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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DU MALI

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport présenté par le Mali sur l'application dans le pays des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant ce rapport, Mme Sangaré Oumou Ba, Ministre de la promotion de la femme, de l'enfant et de la famille du Mali, a fait observer que la présentation du rapport périodique de son pays intervenait dans un contexte particulier marqué par la crise politico-sécuritaire ayant éclaté il y a deux ans. Elle a déploré que la rébellion, l'occupation du nord par des groupes terroristes et le coup d'État militaire aient porté atteinte aux droits de l'homme. Elle s'est réjouie de la signature, le 15 mai 2015, d'un accord pour la paix et la réconciliation nationale dont la mise en œuvre est en cours. Sans la paix, il est illusoire de maintenir et de renforcer la protection des droits des femmes, a dit Mme Ba.

Les femmes maliennes occupent une place importante sur le plan économique, social et politique du pays, a poursuivi la Ministre. Or, alors qu'elles sont en première ligne, elles sont souvent reléguées au second plan, subissant le poids des traditions. Mme Ba a expliqué que le Gouvernement œuvrait à relever les nombreux défis entravant la réalisation des droits des femmes, comme l'analphabétisme, la méconnaissance de leurs droits, leur non-confiance en elles-mêmes, la pauvreté et le manque de solidarité entre elles. Elle a précisé que la Politique nationale du genre mettait l'accent sur l'accès des femmes à la vie publique et la reconnaissance de la contribution des femmes au développement économique. La Ministre a fait observer qu'il y avait au Mali une supériorité numérique des hommes aux postes de décision et aux postes de conseillers communaux. Pour y remédier, un texte de loi sur la promotion du genre dans les postes «nominatifs» et électifs a été élaboré. Cette loi est d'autant plus importante que sur les 147 députés de l'Assemblée nationale, il n'y a jamais eu plus d'une quinzaine de femmes, un chiffre qui ne dépasse pas la douzaine à l'heure actuelle.

La délégation était également composée de la Représentante permanente du Mali auprès des Nations Unies à Genève et de deux conseillers. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, de la participation des femmes à la mise en œuvre de l'Accord de paix; de la formation des militaires aux droits de l'homme; de la lutte contre la traite; de l'aide apportée aux femmes souffrant de fistules gynécologiques; de la campagne de sensibilisation aux méfaits des mariages forcés; et des obstacles religieux freinant la promotion de la femme. En matière d'éducation, la délégation a expliqué que les taux d'achèvement de l'instruction des filles au primaire et au secondaire atteignaient, respectivement, 48% et 16% en 2014. Elle a informé le Comité des raisons pouvant expliquer l'abandon scolaire et les mesures prises pour encourager les jeunes filles à poursuivre leurs études. Elle a également évoqué la lutte contre l'analphabétisme, une experte s'alarmant que 76% des femmes maliennes soient analphabètes.

Davantage d'efforts doivent être faits pour endiguer la baisse du nombre de femmes dans les sphères de prise de décision, a souligné une experte. La délégation a répondu que le Gouvernement avait pris conscience de l'importance d'une meilleure représentation féminine. Beaucoup d'attentes sont placées dans la mise en œuvre de la loi sur la promotion du genre dans les instances nominatives et électives. Au cours de la discussion avec le Comité, la délégation malienne a également indiqué que le Gouvernement envisageait la possibilité d'élaborer une loi sur les violences basées sur le genre. L'excision en ferait partie, a-t-elle précisé, avant de reconnaître qu'une loi serait, certes, nécessaire pour dissuader cette pratique, mais qu'il fallait aussi que les mentalités changent. Elle a fait observer qu'il était essentiel également de lutter contre les préjugés sexistes, même si cela restait difficile.

Rappelant que le Mali avait ratifié la Convention en 1985, une experte a estimé impensable qu'il y ait encore en 2016 autant de dispositions discriminatoires dans la législation. Elle a constaté avec préoccupation que le Gouvernement avait, encore en 2013, rejeté une recommandation de l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme qui demandait que le Code des personnes et de la famille du Mali soit mis en conformité avec la Convention. La délégation a concédé que si les changements étaient lents, la volonté politique de changer les choses était bien présente.

Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport du Mali lors de séances privées qui se tiendront avant la clôture de la session, le vendredi 22 juillet prochain.

Lundi matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de Trinité-et-Tobago (CEDAW/C/TTO/4-7) en salle XVIII du Palais des nations.


Présentation du rapport du Mali

Le Comité est saisi du rapport périodique du Mali, ainsi que des réponses du pays à une liste de questions que lui a adressée le Comité.

MME SANGARÉ OUMOU BA, Ministre de la promotion de la femme, de l'enfant et de la famille du Mali, a fait observer que la présentation du rapport périodique de son pays intervenait dans un contexte particulier marqué par la crise politico-sécuritaire qui a éclaté il y a deux ans. Elle a déploré que la rébellion, l'occupation du nord par des groupes terroristes et le coup d'État militaire aient porté atteinte aux droits de l'homme. Elle s'est réjouie de la signature, le 15 mai 2015, d'un accord pour la paix et la réconciliation nationale dont la mise en œuvre est en cours. En lien avec ses engagements internationaux et la protection des victimes de violence, le Gouvernement a adopté un plan d'action 2015-2017 inspiré de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, a indiqué la Ministre. Elle a souligné que sans la paix, il était illusoire de maintenir et de renforcer la protection des droits des femmes. Le Mali est actuellement sur la voie du redressement, a-t-elle assuré, précisant que le pays n'avait jamais renoncé à ses obligations nationales et internationales. Au Mali, les droits de l'homme bénéficient d'un cadre normatif et institutionnel favorable à leur réalisation, selon elle.

Les femmes maliennes occupent une place importante sur le plan économique, social et politique du pays. Ce sont les premières à se lever le matin et les dernières à se coucher le soir. Or, alors qu'elles sont en première ligne, elles sont souvent reléguées au second plan, subissant le poids des traditions. La Ministre a expliqué que, dans ce contexte, le Gouvernement œuvrait à relever les nombreux défis entravant la réalisation des droits des femmes, comme l'analphabétisme, la méconnaissance de leurs droits, leur non-confiance en elles-mêmes, la pauvreté et le manque de solidarité entre elles. Elle a précisé que la Politique nationale du genre mettait l'accent sur l'accès des femmes à la vie publique et la reconnaissance de la contribution des femmes au développement économique. Pour réduire les inégalités, il faut promouvoir la place des femmes dans tous les secteurs, éducation, santé, agriculture, élevage, paix et sécurité, a-t-elle préconisé. La Ministre a fait observer qu'il y avait au Mali une supériorité numérique des hommes aux postes de décision et aux postes de conseillers communaux. Pour y remédier, le Ministère de la promotion de la femme, de l'enfant et de la famille a élaboré un texte de loi sur la promotion du genre dans les instances décisionnelles, qu'elles soient «nominatives» ou électives. Sur les 147 députés de l'Assemblée nationale, il n'y a jamais eu plus d'une quinzaine de femmes, a déploré la Ministre qui a précisé que ce chiffre ne dépassait pas la douzaine à l'heure actuelle. Si l'on n'y prend garde, il y aura de moins en moins de femmes, s'est-elle alarmée, relevant l'importance d'assurer l'application de cette nouvelle loi.

Des progrès importants ont été effectués dans le domaine de la santé, la Ministre citant notamment la gratuité de la prise en charge de la césarienne et du traitement du paludisme pour les enfants. En matière d'emploi, elle a relevé que le faible niveau de qualification des femmes et les inégalités qu'elles rencontraient dans le monde du travail les pénalisaient. Elle a souligné que le Ministère chargé de l'emploi et de la formation professionnelle faisait des efforts pour l'emploi des jeunes. L'indépendance économique et l'accès aux prêts sont des initiatives qu'il importe de soutenir, a souligné Mme Ba, celle estimant que la microfinance représentait une opportunité importante pour les femmes. Il faut aussi remédier au manque d'accès des femmes à la terre, à la propriété et aux moyens de production. La représentante malienne a reconnu aussi l'importance de lutter contre les violences. Enfin, il est impératif de faire valoir la place et le rôle des femmes dans le développement du Mali. Aucun pays ne saurait se développer sans la participation active de toutes les composantes de la société, a conclu la Ministre.


Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité


Une experte a souligné l'importance de mettre en œuvre l'accord de paix dans les meilleures conditions. Le respect intégral de la Convention doit devenir une véritable feuille de route pour l'application de cet accord, l'experte faisant valoir que la reconstruction du Mali passait par les femmes. Or, leur engagement dans le processus de paix ne paraît pas être à la hauteur des attentes, a-t-elle déploré. Elle a souhaité savoir comment les autorités comptaient incorporer au plan d'action 2015-2017 inspiré de la résolution 1325 du Conseil de sécurité les recommandations qui seraient formulées par le Comité à la fin de l'examen.

Constatant que des dizaines de milliers de familles sont déplacées et que l'insécurité règne encore au nord et au centre du pays, une membre du Comité a espéré que le renforcement de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) permettrait d'améliorer les conditions de sécurité. Face aux exactions commises par les groupes non étatiques ou les forces armées, elle a souhaité savoir si le Gouvernement entendait soutenir une stratégie claire de poursuite de leurs auteurs et encourager les tribunaux à rendre des décisions explicites sur ces crimes. Elle a fait observer que l'amnistie ne devait pas constituer un pardon pour les crimes et les violences sexuelles.

L'amélioration du cadre juridique est une nécessité, a affirmé une experte qui a fait valoir qu'un grand nombre de lois étaient discriminatoires, alors que les textes censés y remédier tardaient à être adoptés et que d'autres qui l'ont été restaient lettre morte. C'est la loi qui protège et qui libère la participation des femmes, a souligné une autre membre du Comité.

L'État malien a-t-il engagé un dialogue avec les groupes religieux qui s'opposent fondamentalement à l'égalité des sexes, a demandé une experte.

Constatant que de nombreux obstacles socio-économiques et religieux freinaient la promotion de la femme, une membre du Comité a souhaité savoir par quelles actions les autorités comptaient renforcer la dynamique gouvernementale pour accroître l'effectivité des mécanismes de promotion de la femme. Elle s'est également enquise des innovations en matière de promotion de la femme que les autorités comptaient apporter à la politique nationale du genre qui fait actuellement l'objet d'une relecture.

Plusieurs membres du Comité ont attiré l'attention sur le rôle important joué par les mesures temporaires spéciales, notamment pour accélérer la participation égale des femmes à la vie politique et publique. Elles ont invité la délégation à examiner la Recommandation générale n°25 sur les Mesures temporaires spéciales, rappelant que ces mesures pouvaient être appliquées dans nombre de secteurs et se révélaient utiles en attendant l'adoption des lois.

Une experte a regretté que le rapport du Mali donne peu d'informations sur la violence sexiste, y compris dans les zones de conflit. Saluant l'intention du Gouvernement d'élaborer une loi sur les violences à l'encontre des femmes, elle a souhaité savoir si un délai était prévu pour sa rédaction et son adoption. Les groupes vulnérables seront-ils couverts ? Cette loi va-t-elle clairement condamner les mutilations génitales féminines et prévoir des mesures d'accompagnement pour les victimes, a-t-elle également demandé. La délégation a également été invitée à donner des détails sur les mesures prises pour lutter contre les mariages précoces et forcés, ainsi que les tortures et les viols, en précisant le travail réalisé par le Gouvernement et pas uniquement les organisations non gouvernementales.

Plusieurs membres du Comité ont insisté sur l'importance de l'autorité de l'État. Celui-ci doit être en mesure de mener des contrôles, de procéder à des arrestations et de prononcer des sanctions pour toutes les violations des droits de l'homme et en particulier pour toutes les discriminations faites aux femmes. L'esclavage demeure une réalité, a affirmé, par ailleurs, une experte, qui a souhaité savoir comment les autorités y remédiaient.

Davantage d'efforts doivent être faits pour endiguer la diminution du nombre de femmes dans les sphères de prise de décision, a souligné une experte qui a souligné l'importance de mettre en œuvre la loi sur la promotion du genre. Elle a fait observer que ce problème ne se limitait pas au Parlement: il n'y a aucune femme juge dans les tribunaux de première instance, tandis que deux agents de police sur 300 sont des femmes.

Une experte a souligné que 76% des femmes étaient analphabètes. Elle a estimé nécessaire de disposer de données sur les taux d'abandon scolaire et les coûts cachés de l'éducation. Elle s'est aussi intéressée aux écoles coraniques et leur impact sur l'éducation des filles. Les autorités prévoient-elles de mettre en place un système scolaire unifié, a-t-elle demandé.

Une experte s'est enquise de la présence des femmes dans la culture du coton et la recherche d'or. Elle a souhaité savoir si des mesures étaient prises pour lutter contre les mauvaises conditions de travail dans ces secteurs.

Rappelant que le Mali avait ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes en 1985, une experte a jugé impensable qu'il y ait encore en 2016 autant de dispositions discriminatoires dans la législation. Elle a constaté avec préoccupation que le Gouvernement avait, encore en 2013, rejeté une recommandation formulée lors de l'examen périodique universel du Mali au Conseil des droits de l'homme qui demandait que le Code des personnes et de la famille du Mali soit mis en conformité avec la Convention. Cet appel à l'harmonisation du Code avec la Convention a été soutenu par d'autres membres du Comité.

Une experte a fait remarquer qu'en vertu du droit coutumier, l'homme est le chef de la famille; c'est lui qui choisit par exemple là où la famille vivra. Parmi les dispositions discriminatoires du droit coutumier figurent aussi la polygamie, la différence d'âge minimal du mariage entre garçons et filles, les restrictions empêchant la femme d'accéder à l'héritage ou l'obligation pour la femme d'attendre quelques mois avant de se remarier. L'experte a souhaité savoir ce qui était fait pour mettre fin aux conflits entre le droit officiel et le droit coutumier et religieux.

Notant qu'une campagne avait été eu lieu pour informer sur les méfaits des mariages précoces, initiative soutenue par la Première Dame du pays, une membre du Comité a espéré que cela irait au-delà de la simple sensibilisation.

D'autres questions posées par le Comité ont porté sur l'absence de définition de la discrimination dans le droit malien; sur la participation des femmes à l'élaboration de la Constitution; sur les campagnes d'information et de sensibilisation menées pour éradiquer les pratiques traditionnelles néfastes; sur les actions entreprises pour lutter contre l'écart salarial entre hommes et femmes; sur la vulnérabilité des femmes rurales, en particulier face à la détérioration de la sécurité alimentaire; et sur les mesures prises pour lutter contre la domination de l'idéologie patriarcale.


Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que dans le cadre de l'accord de paix négocié à Alger, le Gouvernement du Mali avait mis en place un mécanisme de participation inclusive. Les différentes composantes féminines du Mali étaient bien représentées au sein des différentes délégations qui se sont succédé. En outre, une place importante est accordée aux femmes dans la mise en œuvre de cet accord. La délégation a indiqué, par ailleurs, que les femmes avaient demandé à participer au processus d'élaboration de la Constitution et elle a assuré qu'elles seraient incluses: le Gouvernement en a la volonté et les organisations de la société civile y veillent.

La loi sur la promotion du genre dans les instances «nominatives» et électives porte sur toutes les élections, a précisé la délégation, en réponse à une question. Elle a expliqué qu'il avait fallu déployer une stratégie particulière pour faire accepter cette loi auprès des hommes et faire comprendre comment la mettre en œuvre. Un travail particulier a été mené avec les représentants religieux. «Ils ont compris», a affirmé la Ministre.

Il conviendrait d'harmoniser les textes nationaux avec les instruments internationaux, a reconnu la délégation, suite à une remarque du Comité à cet égard. Il y a en tout état de cause une volonté claire du Gouvernement malien de lutter contre l'impunité. La délégation a affirmé qu'il n'était pas question de sacrifier le respect des droits de l'homme sur l'autel de la stabilité. Des efforts importants sont entrepris pour que le moment venu les auteurs de violations des droits de l'homme puissent être traduits devant les juridictions compétentes. S'agissant de la Cour pénale internationale, elle a compétence pour les crimes commis au Mali. Le Gouvernement ne peut procéder à la collecte des données sur la violence sexiste dans certaines parties du territoire, a concédé la délégation, ce qui explique que certaines informations manquent, a expliqué la délégation.

Plusieurs mécanismes de promotion de la femme sont mis en œuvre. L'action du Gouvernement s'organise autour de la politique nationale du genre. Cette politique est composée de quatre principaux organes, dont un Comité sectoriel d'institutionnalisation du genre au sein des Ministères. Ce Comité remplace les «points focaux genre» qui existaient auparavant au sein des Ministères et qui n'ont pas obtenu les résultats escomptés.

Pour ce qui est de l'excision, la délégation a précisé que les opposants à l'éradication de cette pratique n'étaient pas seulement des religieux: ce sont aussi les femmes elles-mêmes qui n'ont pas encore compris que la pratique était néfaste et qu'il fallait y mettre un terme. De plus, nombre de femmes qui en sont convaincues n'osent pas le dire ouvertement. La loi serait, certes, nécessaire pour dissuader cette pratique, mais il faut aussi que les mentalités changent, a souligné la délégation. Elle a indiqué que le Gouvernement envisageait l'éventualité d'élaborer une loi sur les violences faites aux femmes qui prendrait en compte l'excision, a-t-elle précisé. La délégation a également mentionné l'existence d'un Programme national de lutte contre l'excision, suite à laquelle plus de 1 200 communautés avaient décidé d'abandonner cette pratique. Ce texte éventuel sur les violences basées sur le genre n'en est toutefois pas encore à l'état de projet. Un calendrier pour sa rédaction et pour son adoption devrait être décidé d'ici la fin de l'année.

Les services sociaux de base sont une priorité du Gouvernement, a affirmé la délégation. Celle-ci a précisé que le nouveau chef de l'État avait demandé à tous les Ministres de veiller à établir des services de base dans les secteurs qui les concernent - maternités, centres de formation, centres d'autopromotion des femmes. S'agissant de l'aide aux victimes de violences, la délégation a évoqué l'existence de «maisons de la femme» qui tiennent lieu de refuge pour les femmes victimes de violences où elles reçoivent un soutien.

La délégation a précisé que les femmes souffrant de fistules gynécologiques étaient prises en charge dans les différents centres de santé et soignées gratuitement. Ces femmes étant ostracisées, des actions sont menées pour les aider à se réinsérer dans la société. Elles sont également invitées à sensibiliser les autres femmes aux dommages des mariages précoces et de l'excision, qui jouent un rôle dans l'apparition des fistules.

La délégation a expliqué que l'ensemble des militaires maliens présents sur le terrain avaient bénéficié d'une formation complète sur les droits de l'homme. Il y a eu une «prise de conscience remarquable» de l'État pour que les forces armées fassent leur travail dans le respect des droits de l'homme. Il y a une volonté politique pour amener les éléments des forces armées à respecter les droits humains.

Des accords ont été signés avec les pays frontaliers, dont le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et la Guinée, pour lutter contre la traite des êtres humains, a indiqué la délégation, avant d'ajouter que le Mali était aussi engagé dans la lutte contre la traite dans le cadre de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Au plan national, le Mali a adopté une loi spécifique sur la traite des personnes, ainsi qu'un plan d'action national. L'esclavage a été aboli au Mali, a par ailleurs affirmé la délégation.

La participation des femmes dans les instances de prise de décisions est faible, la délégation précisant qu'il n'y avait que 14 femmes sur les 147 membres de l'Assemblée nationale. Deux femmes dirigent des partis politiques. À titre d'explication, la délégation a fait valoir que cette sous-représentation était due pour une part à des raisons liées au système mais également aussi aux femmes elles-mêmes. Ce n'est pas tout de former des femmes, encore faut-il qu'elles souhaitent participer à la vie politique. Mais il y a une évolution, a souligné la délégation, affirmant que le Gouvernement avait pris conscience de l'importance d'une meilleure représentation féminine. À l'appui de ses propos, elle a souligné qu'une femme avait été nommée très récemment ambassadrice dans un pays important.

La délégation a également reconnu la difficulté de lutter contre les stéréotypes: il faut briser les tabous, sensibiliser, informer, communiquer.

En matière d'éducation, la délégation a expliqué que le taux d'achèvement de l'instruction primaire des filles atteignait 48,3% en 2014, et 16,24% au secondaire. La délégation a assuré que l'État s'efforçait d'accroître le budget dévolu à l'éducation. Elle a reconnu qu'il y avait nécessité d'augmenter la qualité de l'enseignement et de lutter contre l'abandon scolaire. Elle a fait remarquer que suite aux recommandations de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international de privilégier le secteur privé au détriment du secteur public, de nombreux jeunes avaient arrêté leurs études pour travailler, ayant perdu tout espoir de devenir fonctionnaire. La crise économique a aussi joué un rôle. La délégation a expliqué que des programmes destinés à encourager les jeunes filles à poursuivre leurs études avaient été lancés: ils consistent par exemple à octroyer des bourses ou à fournir des ordinateurs aux jeunes filles qui continuent d'étudier après le baccalauréat.

La délégation a également souligné que des efforts étaient faits pour lutter contre l'analphabétisme. Elle a évoqué l'existence de cours du soir proposés aux personnes analphabètes qui viennent travailler en ville.

S'agissant de la promotion des femmes dans le domaine de l'emploi, la délégation a attiré l'attention sur le Fonds d'appui à l'autonomisation de la femme et à l'épanouissement de l'enfant créé en 2015. Il met l'accent sur le leadership féminin, par le biais de formations pour toutes les femmes, et sur la prise en charge des enfants en situation difficile, ce qui, au final, bénéficie aussi aux femmes. Beaucoup de femmes ont bénéficié de microcrédits, a par ailleurs précisé la délégation.

Les femmes des campagnes participent pleinement aux niveaux local, régional et national, à toutes les activités économiques de leurs collectivités. Elles sont bien organisées, a assuré la délégation. Chaque année, elles mettent sur pied la «Journée de la femme rurale», dans le lieu de leur choix, pour présenter leurs activités.

Interrogée sur la lutte contre le VIH/sida, la délégation a indiqué qu'existait au Mali des centres de santé qui prennent en charge des personnes vivant avec le virus et leur fournissent des médicaments gratuitement. Chaque année, le pays tient une semaine de lutte contre le VIH/sida qui implique tous les Ministères. Le VIH n'est plus un tabou au Mali, a affirmé la délégation.

S'agissant des femmes détenues, la délégation a précisé qu'elles n'étaient plus emprisonnées avec les hommes à Bamako. Il existe aujourd'hui des prisons séparées pour les hommes, les femmes et les enfants.

La religion ne peut et ne doit pas être un blocage à l'avancée de la femme, a souligné la délégation. Dans les consultations qu'il a menées pour promouvoir la loi sur la promotion de genre, le Gouvernement a souvent entendu des dignitaires religieux affirmer que la religion n'était pas contre la femme. La stratégie du Gouvernement est d'approcher les responsables pour les informer. Il ne faut pas forcer les choses, il faut faire preuve de conviction en menant des campagnes de sensibilisation, a précisé la délégation, soulignant à titre d'exemple que la campagne des mariages précoces soutenue notamment par la Première Dame avait suivi cette stratégie et été bien reçue.

La délégation a concédé que les changements étaient lents. Elle a souligné que c'est petit à petit que le pays arriverait aux résultats espérés. Il ne s'agit pas d'un refus, a-t-elle précisé, il faut juste trouver les moyens adéquats pour y arriver. La volonté politique existe, a-t-elle insisté.

En conclusion, MME SANGARÉ OUMOU BA, Ministre de la promotion de la femme, de l'enfant et de la famille du Mali, a salué la franchise du Comité. Elle a dit retenir que ses membres avaient mis un accent particulier sur la nécessité d'améliorer le cadre législatif et règlementaire relatif à la protection des droits de la femme; de disposer de calendriers précis de mise en œuvre des plans d'actions, mesures et lois ayant trait au genre, notamment en ce qui concerne le projet de loi relatif à la lutte contre la violence faite aux femmes; de faciliter davantage l'accès à la justice; d'accroître la représentativité des femmes dans les instances de décision; et de procéder à l'harmonisation des textes nationaux. La Ministre a affirmé que le Gouvernement prenait bonne note de l'ensemble de ces points. Elle a réitéré la détermination de son Gouvernement de ne ménager aucun effort pour promouvoir et protéger les droits des Maliennes.


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CEDAW16.026F