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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT REFUSE D'ADOPTER LE PROGRAMME DE TRAVAIL PROPOSÉ PAR LA PRÉSIDENCE POLONAISE ET BASÉ SUR LA PROPOSITION BRITANNIQUE

Compte rendu de séance
Elle achève ainsi la deuxième partie de sa session de 2016 et reprendra ses travaux le 2 août prochain

Achevant la deuxième partie de sa session de 2016, la Conférence du désarmement a refusé, ce matin – après un débat auquel ont participé une vingtaine de délégations – d'adopter par consensus un projet de programme de travail qui lui était soumis par son Président, l'Ambassadeur Piotr Stachanczyk de la Pologne.

Le Président de la Conférence a indiqué qu'il avait poursuivi, ces derniers jours, les consultations autour de son projet de programme de travail CD/WP.595, lui-même basé sur le document CD/2055 présenté en février par le Royaume-Uni, et que ce projet consistait à créer un groupe de travail et instaurer un programme de travail connexe pour la durée de la session de 2016, avec pour mandat de rechercher, d'élaborer et de recommander des mesures efficaces en matière de désarmement nucléaire, y compris les dispositions juridiques et autres arrangements qui contribuent à l'avènement définitif d'un monde sans armes nucléaires et qui sont requis à cet égard.

Le Président a ajouté que la formule proposée était souple et pouvait aboutir à des engagements concrets, tout en laissant la porte ouverte à d'autres initiatives. Il a fait observer que compte tenu du temps qu'il reste pour les débats cette année, il ne serait pas possible à la Conférence de se concentrer sur d'autres points de l'ordre du jour que celui proposé par ce projet de programme de travail.

Plusieurs délégations ont indiqué ne pas être en mesure d'approuver le projet de programme de travail, l'estimant incomplet et regrettant qu'il réoriente le programme de travail sur un seul point de l'ordre du jour de la Conférence du désarmement. La Fédération de Russie, qui a formellement fait objection à l'adoption de ce texte, a fait observer que s'il était adopté, ce projet ferait de la Conférence du désarmement un doublon de la Commission du désarmement, avec le risque que la Conférence – privée de son mandat de négociation – se mue en un forum de discussion incapable de prendre la moindre initiative tangible.

D'autres intervenants ont quant à eux souligné que si le projet de la présidence polonaise ne répondait pas à toutes les attentes, il constituait sans doute la dernière possibilité pour la Conférence du désarmement de travailler sur le fond de son mandat cette année. Il a en outre été souligné à plusieurs reprises que le programme de travail proposé visait à préparer des négociations ultérieures.

Les délégations suivantes ont fait des déclarations: Fédération de Russie, Norvège, Bélarus, Belgique, Japon, Pays-Bas, Bulgarie, Canada, République de Corée, Allemagne, Chine, Espagne, Venezuela, Cuba, Italie, Finlande, Mexique, Inde, États-Unis et Royaume-Uni.

Durant cette séance plénière, les délégations et le Président de la Conférence ont fait part de leurs condoléances aux proches des victimes de l'attentat d'Istanbul. La Fédération de Russie a dit que cet attentat odieux témoignait du mépris de ses auteurs de toute morale laïque et religieuse et que l'origine internationale de ses victimes montrait l'importance de la coopération internationale dans le domaine de la lutte antiterroriste. La Turquie a remercié les délégations pour leur solidarité et indiqué qu'elle poursuivrait sans relâche son combat contre le terrorisme.


La prochaine séance plénière de la Conférence se tiendra le mardi 2 août 2016, à 10 heures. La Conférence entamera alors la troisième et dernière partie de sa session de 2016, qui s'achèvera le 16 septembre.


Aperçu des déclarations

La Norvège a souligné l'impasse dans laquelle se trouve la Conférence, impasse à cause de laquelle cette institution n'est aujourd'hui ni unique, ni multilatérale ni même consacrée à la négociation. La Norvège estime donc nécessaire d'ouvrir la Conférence à tous les pays qui en font la demande; de réviser son Règlement intérieur, la règle du consensus devant être révisée; et d'être plus ouverte vis-à-vis de la société civile. Pour survivre, la Conférence doit aussi produire un résultat qui soit jugé utile et pertinent.

La Norvège constate plus généralement que la sécurité nationale, qui est un impératif pour tous les pays, est probablement plus efficace si elle peut se traduire dans une sécurité collective pour tous. Dans le monde réel, cela n'est pas toujours le cas. C'est pourquoi, comme d'autres, la Norvège maintient son droit de se défendre, par des moyens militaires s'il le faut. Mais les armes qui causent des souffrances humanitaires inacceptables ne sont pas nécessairement garantes de paix ni de sécurité durables, a-t-elle fait observer.

Le Bélarus a estimé que le programme de travail proposé ce matin n'est pas assez complet ni concret. Le mandat du groupe de travail envisagé dans ce programme ne couvre pas tous les enjeux liés au désarmement complet, notamment la question des garanties négatives de sécurité, ni les préoccupations qui sortent du cadre conventionnel, comme par exemple les menaces hybrides. Autre problème, il n'est pas certain que la Conférence du désarmement aura le temps de parvenir à des résultats concrets d'ici à la fin de la session, a ajouté le Bélarus. Il a indiqué qu'il ne s'opposerait cependant pas au consensus sur le projet soumis ce matin.

La Belgique s'est dite préoccupée par le fait que la Conférence ne semble pas, cette année encore, prête à avancer dans ses travaux. La Belgique considère que le programme proposé par le Royaume-Uni est bien conçu et utile et appuie donc la proposition de programme de travail du Président.

Le Japon a estimé que le projet mis en avant par le Président présente pour avantage de donner l'occasion d'approfondir les grandes questions du désarmement nucléaire et de jeter les bases d'une négociation.

La Fédération de Russie a fait part de ses condoléances à la Turquie, frappée par un attentat terroriste odieux et barbare qui témoigne du mépris de ses auteurs de toute morale laïque et religieuse. Les victimes d'Istanbul étaient originaires de nombreux États: cela montre l'importance de la coopération internationale dans le domaine de la lutte antiterroriste, a ajouté la délégation russe. S'agissant de la Conférence, le projet de programme de travail dont elle est aujourd'hui saisie est malheureusement incomplet, a déclaré la délégation russe; ses conséquences n'ont pas été examinées et s'il était adopté, le projet de programme de travail ferait de la Conférence du désarmement un doublon de la Commission du désarmement, a-t-elle affirmé. Le risque existe alors que la Conférence se mue en un forum de discussion incapable de prendre la moindre initiative tangible. La Fédération de Russie fera tout pour que la Conférence recouvre son mandat initial de négociation. C'est pourquoi elle a proposé d'élaborer une convention internationale contre le terrorisme biologique et chimique.

Les Pays-Bas ont demandé à la Conférence d'agir de manière réfléchie et non de prendre des mesures hâtives, comme il a été suggéré. Les Pays-Bas ont observé que la proposition étudiée aujourd'hui est la meilleure chance de trouver des mesures efficaces en matière de désarmement nucléaire; des discussions de fond sont une bonne manière d'approcher un début de négociation.

La Bulgarie a dit soutenir la proposition de programme de travail du Président car elle permet d'aborder de manière flexible un enjeu crucial pour la Conférence, à savoir le désarmement nucléaire.

Le Canada a rappelé qu'il avait souhaité entamer en 2016 des négociations autour d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles. Le pays soutient le projet de programme de travail soumis ce matin, qui ne pourra qu'accélérer les choses – même s'il ne répond pas à toutes les attentes.

La République de Corée a souligné que le programme proposé vise des négociations ultérieures et que rien n'interdit à la Conférence de tenir des débats de fond pour faciliter des négociations futures. En l'espèce, le mieux ne doit pas être l'ennemi du bien: les États devraient se rallier au consensus sur le projet soumis par le Président de la Conférence, a estimé la République de Corée.

L'Allemagne s'est félicitée de la volonté du Président de la Conférence d'instaurer un débat ouvert et transparent qui puisse préparer utilement des travaux de fond sur le désarmement nucléaire à partir de 2017. Le projet de programme de travail dont est aujourd'hui saisi la Conférence constitue une approche novatrice pour sortir cette instance de son impasse, laquelle pose des questions sur la pertinence à court terme de la Conférence, a ajouté l'Allemagne.

La Chine s'est dite favorable à un programme de travail exhaustif et équilibré qui résulterait de la fusion des propositions de la Fédération de Russie et du Royaume-Uni.

L'Espagne a souligné le caractère positif de la proposition de programme de travail soumise ce matin aux membres de la Conférence.

Le Venezuela a souligné l'importance de préserver la crédibilité de la Conférence dans le contexte international actuel et a demandé aux membres de cette instance d'examiner d'un œil favorable les propositions de la Fédération de Russie concernant ses travaux.

Cuba, qui s'est dit très favorable à la Conférence et à son mandat de négociation, a demandé au Président de cette instance de préciser quelle serait la contribution concrète de son programme de travail à la réalisation de ce mandat. Cuba a par ailleurs voulu savoir pour quelles raisons le Président n'avait pas retenu d'autres propositions très intéressantes.

L'Italie a déclaré avoir examiné de près les quatre propositions de programme de travail qui ont été déposées pendant la présente session. Elle estime que, le temps étant compté, il faut négocier rapidement sur la question du désarmement nucléaire.

La Finlande a soutenu la proposition de programme de travail présentée par le Président de la Conférence.

Le Mexique a dit n'être pas en mesure d'approuver le projet de programme de travail, qui n'en est d'ailleurs pas un car il est trop incomplet. Un processus de consultation plus large doit intervenir, a ajouté la délégation mexicaine. La proposition du Royaume-Uni ne recueillant pas davantage de consensus que les trois autres dont la Conférence a été saisie, cette dernière doit examiner toutes les propositions sur le même pied, a demandé le Mexique.

La Fédération de Russie a souligné qu'un projet qui réoriente le programme de travail sur un seul point de l'ordre du jour de la Conférence ne saurait être qualifié de complet. Il est préférable, comme l'envisage la proposition de programme de travail déposée par le Nigéria à la présente session, de traiter tous les points de l'ordre du jour. Pour des raisons d'équilibre, la proposition britannique aurait dû intégrer une mention au mandat de négociation de la Conférence. La Fédération de Russie estime que la lutte contre le terrorisme ne menace la sécurité de personne; sa proposition de négociation d'un instrument sur cette question ne saurait donc soulever d'objections de principe.

L'Inde a dit espérer que le Président de la Conférence poursuivrait ses consultations pendant la période intersessions. La proposition de programme de travail déposée par le Groupe des 21 est toujours d'actualité, a-t-elle en outre rappelé.

Les États-Unis ont observé que le projet du Président de la Conférence est sans doute la dernière possibilité de mettre cette instance sur les rails cette année.

L'Ambassadeur PIOTR STACHANCZYK de la Pologne, Président de la Conférence, ayant demandé à la Conférence du désarmement de s'exprimer formellement sur son projet de programme de travail, la Fédération de Russie a fait savoir qu'elle émettait une objection à l'adoption du projet. Le Président a donc constaté que son projet de programme de travail tel que figurant dans le document CD/WP.595 était rejeté.

Le Royaume-Uni a déclaré que sa proposition originale, qui sous-tend le projet CD/WP.595, avait pour objet d'inciter les puissances nucléaires à débattre du désarmement nucléaire. Le Royaume-Uni continuera de travailler pour trouver une manière d'aller de l'avant dans le désarmement.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

DC16.030F