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LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS EXAMINE LE RAPPORT DE LA MAURITANIE

Compte rendu de séance

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial de la Mauritanie sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Présentant ce rapport, Cheikh Tourad Ould Abdel Malick, Commissaire aux droits de l'homme et à l'action humanitaire de la République islamique de Mauritanie, a assuré que le Gouvernement auquel il appartient plaçait les droits humains au cœur de ses politiques et stratégies, conformément aux orientations du Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Il a attiré l'attention sur l'existence d'un certain nombre de textes ayant visé à mettre le pays en conformité avec ses obligations en termes de mise en œuvre de la Convention, depuis la ratification de cet instrument en 2008, s'agissant notamment du Code du travail, de la sécurité sociale, de la traite des personnes, de l'incrimination des pratiques esclavagistes, ainsi que des décrets fixant le régime de la migration ainsi que les conditions d'emploi de la main-d'œuvre étrangère.

Le Gouvernement a adopté en 2010 une stratégie nationale de gestion de la migration, a ajouté le Commissaire, précisant que cette stratégie a notamment contribué à assurer une prise en compte de la dimension de la migration dans le développement du pays et à contrôler les entrées et sorties du territoire. Les dispositions de la Convention sont d'application directe, a-t-il par ailleurs fait valoir; elles peuvent être invoquées devant les tribunaux et prévalent sur la loi nationale. En outre, les travailleurs migrants ont accès à l'assistance judiciaire. Le Commissaire a ensuite attiré l'attention sur le plan d'action de lutte contre le travail des enfants adopté par son pays. Il a également mentionné les mesures prises en matière de regroupement familial et a souligné que le principe d'égalité dans le domaine du travail était appliqué par l'Inspection du travail.

La délégation mauritanienne était également composée, entre autres, de Mme Salka Mint Yamar, Représentante permanente de la Mauritanie auprès des Nations Unies à Genève. Elle comprenait également un membre du cabinet du Premier ministre et des représentants du Commissariat aux droits de l'homme et à l'action humanitaire et des Ministères de la justice; des affaires étrangères et de la coopération; de la fonction publique, du travail et de la modernisation de l'administration; des affaires sociales, de l'enfance et de la famille; de l'intérieur et de la décentralisation.

La délégation a répondu aux questions des experts du Comité s'agissant, entre autres, de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; de l'état civil; du vote des Mauritaniens à l'étranger; de la carte de séjour; du contrôle des frontières; de la traite de personnes et des activités d'agences de placement privées (pour l'emploi à l'étranger); ou encore de la mendicité des enfants «talibés».

Mme Khedidja Ladjel, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Mauritanie, a affirmé que 80% des travailleurs immigrés en Mauritanie ne disposaient pas de titre de séjour en raison de son coût, équivalant à environ 75 euros, ce qui permet aux employeurs de ne pas respecter le droit du travail. Le rapport méconnaît la réalité de la diaspora, a-t-elle ajouté. On estime que 900 femmes mauritaniennes travaillent dans les pays du Golfe, victimes de la traite, a-t-elle précisé. Il y a aussi un problème de coordination entre les hôpitaux et l'état civil pour ce qui concerne les enregistrements à l'état civil. Or, l'absence de papiers d'identité favorise l'exploitation, a rappelé la rapporteuse. Des enfants sont exploités à des fins de mendicité par de pseudo-enseignants du Coran, s'est d'autre part inquiétée Mme Ladjel. Elle s'est en outre interrogée sur l'étendue du travail domestique et sur le respect de la dignité humaine dans ce secteur, évoquant des cas semble-t-il très nombreux d'abus contre les femmes dans ce contexte.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Mauritanie, M. Ahmadou Tall, s'est notamment inquiété de témoignages faisant état de harcèlements, de la part de membres de forces de l'ordre, à l'égard des migrants lorsqu'il leur est demandé de produire leur titre de séjour. Les migrants en situation irrégulière sont incarcérés avec des prisonniers de droit commun, alors que les textes en vigueur en Mauritanie l'interdisent, a-t-il déploré. Les quartiers où vit une majorité de migrants se videraient actuellement, en raison d'expulsions massives, parfois sans que ces migrants puissent emporter leurs biens, s'est en outre inquiété M. Tall. La Commission nationale des droits de l'homme ne semble pas être indépendante et il semblerait qu'elle ne soutienne pas les défenseurs des droits de l'homme, ni les travailleurs migrants, a-t-il ajouté.

Le Comité adoptera ultérieurement, dans le cadre de séances privées, ses observations finales sur le rapport de la Mauritanie et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 22 avril prochain.



Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Lesotho (CMW/C/LES/1).

Présentation du rapport

Présentant le rapport initial de la Mauritanie (CMW/C/MRT/1), CHEIKH TOURAD OULD ABDEL MALICK, Commissaire aux droits de l'homme et à l'action humanitaire de la République islamique de Mauritanie, a assuré que le Gouvernement auquel il appartient plaçait les droits humains au cœur de ses politiques et stratégies, conformément aux orientations du Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Il a attiré l'attention sur l'existence d'un certain nombre de textes ayant visé à mettre le pays en conformité avec ses obligations en termes de mise en œuvre de la Convention, depuis la ratification de cet instrument en 2008, s'agissant notamment du Code du travail, de la sécurité sociale, de la traite des personnes, de l'incrimination des pratiques esclavagistes, ainsi que des décrets fixant le régime de la migration ainsi que les conditions d'emploi de la main-d'œuvre étrangère.

Le Gouvernement a adopté en 2010 une stratégie nationale de gestion de la migration dont l'élaboration a impliqué les ministères concernés, les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers, a poursuivi le Commissaire. Cette stratégie a contribué, en particulier, à assurer une prise en compte de la dimension de la migration dans le développement du pays et à contrôler les entrées et sorties du territoire, a-t-il précisé. Des campagnes d'information et de sensibilisation sur la réalité migratoire ont été organisées, ainsi que des activités de formation à la lutte contre la traite des enfants migrants. Quarante-sept postes frontière ont été construits pour maîtriser les flux migratoires, a ajouté le Commissaire. Le Commissariat aux droits de l'homme et à l'action humanitaire est chargé de la coordination de l'élaboration des rapports relatifs à la mise en œuvre de la Convention, a-t-il précisé. Une édition spéciale du Journal officiel a publié le texte de la Convention et des ateliers et séminaires de formation ont été organisés à l'intention des acteurs concernés – services de l'État, personnels de justice, organisations de la société civile, a-t-il indiqué.

Outre les tribunaux, figurent parmi les autres acteurs concernés par la protection des droits des travailleurs migrants, la Commission nationale des droits de l'homme, les syndicats, le patronat, les agents de la sécurité des frontières et la presse, a poursuivi le Commissaire. «Tous ces acteurs ont largement contribué à la vulgarisation et à la diffusion des dispositions de la Convention», a-t-il assuré. Les dispositions de la Convention sont d'application directe, a-t-il par ailleurs fait valoir. Elles peuvent être invoquées devant les tribunaux et prévalent sur la loi nationale, en vertu au système constitutionnel moniste adopté par la Mauritanie. En outre, les travailleurs migrants ont accès à l'assistance judiciaire.

Le Commissaire a ensuite attiré l'attention sur le plan d'action de lutte contre le travail des enfants adopté par son pays. Il a également mentionné les mesures prises en matière de regroupement familial et a souligné que le principe d'égalité dans le domaine du travail était appliqué par l'Inspection du travail. L'état civil biométrique comprend des registres réservés aux étrangers qui peuvent y enregistrer leurs enfants à leur naissance, a-t-il poursuivi. Les parents (étrangers) disposent de cartes de séjour; quant à leurs enfants, ils sont scolarisés dans les mêmes conditions que leurs camarades mauritaniens, de l'école primaire à l'université et peuvent demander leur naturalisation à leur majorité, a précisé le Commissaire.

«En dépit d'une conjoncture mondiale difficile et des défis multiples, le Gouvernement mauritanien réaffirme son attachement aux idéaux, principes et valeurs des droits de l'homme. Il réitère son engagement à mettre en œuvre les dispositions de la Convention», a conclu Cheikh Tourad Ould Abdel Malick.

Questions et observations des membres du Comité

MME KHEDIDJA LADJEL, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Mauritanie, a affirmé que 80% des travailleurs immigrés en Mauritanie ne disposaient pas de titre de séjour en raison de son coût – 30 000 ouguiyas soit environ 75 euros –, ce qui permet aux employeurs de ne pas respecter le droit du travail. Le rapport méconnaît la réalité de la diaspora, a-t-elle ajouté. On estime que 900 femmes mauritaniennes travaillent dans les pays du Golfe, victimes de la traite, a-t-elle précisé. Il existe pourtant des institutions – et notamment un sénateur – en charge des Mauritaniens établis à l'étranger, a-t-elle rappelé.

Si, sur place, les travailleurs migrants ont les mêmes droits que les nationaux, le droit d'être défendu par un avocat commis d'office semble être limité à Nouakchott, la traduction et l'interprétariat n'étant par ailleurs pas toujours assurés, a poursuivi la rapporteuse. La communication avec la famille restée au pays n'est pas favorisée, particulièrement en cas d'incarcération, a-t-elle en outre déploré. Certains rapports mettent en avant des expulsions effectuées à la va-vite, a ajouté la délégation. Dans les prisons, les femmes sont surveillés par des hommes, faute d'effectifs suffisants; quelles mesures pourraient être prises pour y remédier, a-t-elle demandé? Il y a aussi un problème de coordination entre les hôpitaux et l'état civil pour ce qui concerne les enregistrements à l'état civil. Or, l'absence de papiers d'identité favorise l'exploitation, a rappelé la rapporteuse.

Si le taux de scolarisation atteint 99,3% en Mauritanie, Mme Ladjel ne s'en est pas moins interrogée sur le taux de scolarisation des enfants de parents étrangers. Des enfants sont exploités à des fins de mendicité par de pseudo-enseignants du Coran, s'est-elle d'autre part inquiétée. Elle s'est en outre interrogée sur l'étendue du travail domestique et sur le respect de la dignité humaine dans ce secteur, évoquant des cas semble-t-il très nombreux d'abus contre les femmes dans ce contexte. Mme Ladjel s'est enfin demandée si la société civile avait été impliquée dans la rédaction du rapport.

M. AHMADOU TALL, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Mauritanie, a constaté que le rapport contenait un grand nombre de considérations d'ordre juridique, exprimant l'espoir que le dialogue à venir permettrait d'aborder des questions plus concrètes, notamment les problèmes rencontrés dans le pays, ainsi que les solutions apportées. La situation réelle concernant l'application de la Convention doit ressortir de cet examen, a-t-il insisté, invitant la délégation à aller au-delà des contenus de la Convention et des textes afin de décrire la situation réelle des personnes handicapées.

M. Tall a invité la délégation à fournir des précisions quant aux possibilités de bénéficier de l'assistance consulaire, en particulier pour les migrants incarcérés. Une information est-elle fournie aux Mauritaniens souhaitant émigrer au sujet de l'assistance dont ils peuvent bénéficier de la part des représentations de leur pays? Des mesures sont-elles prises contre la traite des travailleurs migrants, a par ailleurs demandé le corapporteur? M. Tall a ensuite demandé à la délégation si elle avait connaissance de cas de torture et, le cas échéant, des suites judiciaires y afférentes. Il s'est inquiété de témoignages faisant état de harcèlements, de la part de membres de forces de l'ordre, à l'égard des migrants lorsqu'il leur est demandé de produire leur titre de séjour.

Le rapport lui-même indique que les dispositions de la Convention ne sont guère invoquées devant les tribunaux, alors même que le rapport affirme qu'un important travail de sensibilisation concernant cet instrument a été mené par les autorités. Comment expliquer ce hiatus, a demandé M. Tall?

Les migrants en situation irrégulière sont incarcérés avec des prisonniers de droit commun, alors que les textes en vigueur en Mauritanie l'interdisent, a poursuivi le corapporteur. Les quartiers où vit une majorité de migrants se videraient actuellement, en raison d'expulsions massives, parfois sans que ces migrants puissent emporter leurs biens, s'est en outre inquiété M. Tall. La Commission nationale des droits de l'homme ne semble pas être indépendante et il semblerait qu'elle ne soutienne pas les défenseurs des droits de l'homme, ni les travailleurs migrants, a-t-il ajouté. La délégation dispose-t-elle d'informations qui contrediraient ces allégations?

Une autre membre du Comité a souhaité savoir si les associations de migrants avaient participé à l'élaboration du rapport. S'il existe une politique nationale de l'emploi, des dispositions ont-elles été prises en faveur des migrants, a-t-elle demandé? Alors que la Mauritanie est à la fois un pays de départ, de transit et d'accueil de migrants, de nombreux travailleurs en provenance des pays voisins non arabophones et travaillant comme domestiques sont confrontés à la barrière de la langue: des mesures sont-elles prises en faveur de l'apprentissage de l'arabe, s'est également interrogée l'experte? Elle a en outre constaté que la Mauritanie, à l'instar de ses voisins, connaissait un problème de tenue de statistiques. Existe-t-il un mécanisme de suivi des travailleurs se rendant dans le Golfe (persique) où l'application de la Convention est suspendue, a-t-elle par ailleurs demandé? Existe-t-il en Mauritanie, à l'instar de ce qui se fait dans nombreux de pays d'émigration, une institution ministérielle en charge des Mauritaniens émigrés et de retour au pays, a lui aussi demandé un autre membre du Comité?

Un expert a constaté qu'en dépit d'un certain nombre d'aléas depuis l'indépendance, un état de droit se mettait progressivement en place en Mauritanie. Des institutions sont installées, la question restant de savoir si elles fonctionnent. Par ailleurs, l'immensité du territoire, ainsi que sa faible densité démographique, exigent sans nul doute une assistance technique des Nations Unies et du Haut-Commissariat concernant la question du contrôle des frontières. Le G5 Sahel, qu'a promu la Mauritanie, a-t-il donné des résultats en matière de contrôle des frontières, a demandé l'expert? Il s'est en outre enquis de la coopération régionale que la Mauritanie envisageait éventuellement d'impulser face aux problèmes de la migration religieuse, des «talibés», ces jeunes enfants censés payer leurs études coraniques en mendiant et qui sont de fait aussi, bien souvent, des migrants mineurs non accompagnés. Y a-t-il d'autre part une réflexion sur le fait que certains métiers, dans la restauration et le tourisme en particulier, soient presque exclusivement occupés par des migrants? Qu'en est-il par ailleurs des travailleurs frontaliers venant quotidiennement du Sénégal?

Un autre expert a demandé ce qu'il en était du statut de la Convention dans l'ordre juridique interne. Comment se passent les expulsions de migrants, a-t-il en outre demandé, indiquant avoir le sentiment que les possibilités de recours étaient quasiment nulles?

Plusieurs membres du Comité ont souhaité en savoir davantage sur les entités ou agences de placement qui envoient des travailleurs à l'étranger, estimant que la situation semblait peu claire en la matière.

Un expert a déploré les dérives actuelles en matière de mendicité des enfants. Les enfants apprenant le Coran doivent rester dans les écoles coraniques, a-t-il souligné, estimant que l'État devrait prendre des mesures contre l'exploitation des enfants sous couvert de la religion, particulièrement en ville où ils sont soumis à des périls divers. Une experte a souligné que Dieu ne saurait autoriser une telle pratique et demandé à l'État d'agir contre ce phénomène.

Une experte a évoqué sa visite au marché aux poissons de Nouakchott, soulignant que si c'était un très beau lieu de vie, les conditions de travail y étaient néanmoins difficiles, notamment en matière de salubrité. Les autorités envisagent-elle d'y améliorer les choses, a-t-elle demandé, soulignant que de nombreux travailleurs migrants y puisaient leur source de revenus?

Des informations complémentaires ont en outre été demandées au sujet des centres dits «de transit» qui semblent jouer le rôle de centres de rétention des migrants.

Une experte s'est enquise des mesures de formation à la Convention prises en faveur des magistrats. Des mesures sont-elles par ailleurs prévues afin d'améliorer la parité entre les sexes au sein des administrations publiques, a-t-elle en outre demandé? Il ne devrait pas être difficile pour l'État mauritanien de former des femmes gardiennes de prison, a par ailleurs souligné cette experte.

Un expert a demandé si l'État envisageait de permettre la scolarisation d'enfants, migrants en particulier, dans d'autres langues que l'arabe ou le français. Cet expert a par ailleurs estimé que le coût prohibitif de la carte de séjour favorisait l'illégalité puisque pour une famille de cinq personnes, le coût total équivaudrait à environ cinq mois du salaire minimum.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que depuis 2009, depuis l'accession au pouvoir du Président Mohamed Ould Abdel Aziz, la Mauritanie s'était engagée dans un processus de dialogue permanent avec les mécanismes internationaux des droits de l'homme. Dans ce cadre, un Comité technique interministériel a été chargé de rédiger l'ensemble des rapports en retard (que le pays devait présenter aux organes de traités). Malgré un contexte international difficile, la Mauritanie a déployé de nombreux efforts visant à mettre en œuvre la Convention, a assuré la délégation. Le pays est particulièrement concerné par les flux migratoires, se trouvant au carrefour de l'Afrique et de l'Europe, a-t-elle souligné.

La société civile n'a pas été directement associée à l'élaboration du rapport, le Comité technique interministériel ayant été chargé de cette tâche, a ensuite précisé la délégation. La société civile a toutefois produit des rapports alternatifs qui ont été présentés hier au Comité, a-t-elle ajouté.

La Mauritanie étant un État de droit, un pays ouvert et hospitalier, il n'y existe pas de discrimination flagrante, contrairement aux allégations de certaines associations, a poursuivi la délégation, avant de demander à ces dernières d'apporter des preuves de leurs allégations.

L'arabe n'étant pas la seule langue en usage dans le pays, aucune langue ne constitue un obstacle à l'intégration, a ajouté la délégation. Tous les travailleurs migrants originaires d'Afrique de l'Ouest ou du Nord sont parfaitement intégrés, a-t-elle assuré.

Les conventions internationales dûment ratifiées par le pays sont d'application directe et peuvent être directement invoquées devant les tribunaux, a d'autre part fait valoir la délégation. La possibilité de présenter au Comité des plaintes individuelles sera étudiée par le Gouvernement et le Comité obtiendra une réponse à ce sujet en temps utile, a-t-elle indiqué.

La législation en vigueur prévoit l'enregistrement dans les 45 jours de tous les événements relevant de l'état civil – naissances, mariages, décès. Au-delà de ce délai, il faut en passer par un tribunal pour assurer l'enregistrement de l'acte, a expliqué la délégation, avant de reconnaître que les moyens manquent pour assurer à travers tout le pays l'enregistrement à l'état civil. La majorité de la population réside dans la capitale, Nouakchott, a-t-elle néanmoins rappelé.

Une loi de 2009 fixe les modalités de vote des Mauritaniens à l'étranger afin de faire en sorte que la diaspora soit représentée en Mauritanie, a poursuivi la délégation. Tout pays ayant plus d'un millier d'électeurs mauritanien constitue une circonscription électorale, a-t-elle précisé, avant de faire valoir que les Mauritaniens émigrés ont eu la possibilité de voter, lors des dernières élections législatives et présidentielles mauritaniennes, dans les représentations diplomatiques mauritaniennes, particulièrement en Arabie saoudite, au Qatar, en France, en Côte d'Ivoire ou encore en Gambie. Les services consulaires mauritaniens ont été sensibilisés à la nécessité de se mettre au services de leurs ressortissants, a souligné la délégation.

Pour pouvoir séjourner à long terme dans le pays, tout étranger doit - au-delà de 90 jours – se faire délivrer une carte de séjour, dont le prix équivaut à 80 euros. Les personnes résidant dans le pays sans document valable sont reconduites à la frontière par le point de passage par lequel elles sont arrivées, a indiqué la délégation. Elle a ajouté que tant la gendarmerie que la police, entre autres, démentent tout abus de la part de leurs agents lors des procédures d'expulsion.

Ne sont soumis à l'obligation de détention d'une carte de séjour que les personnes âgées de plus de quinze ans, ce qui signifie que pour la plupart des familles, ce titre administratif concerne, généralement, uniquement les deux parents, a ensuite fait observer la délégation.

Les réfugiés sont protégés par un décret fixant le mode d'acquisition de ce statut, a poursuivi la délégation. En Mauritanie, il y a des réfugiés dans l'est du pays: quelque 50 000 en provenance du Mali, pris en charge dans un camp géré par le Haut-Commissariat pour les réfugiés. Il y a aussi quelque 2000 réfugiés dans les villes de Nouakchott et Nouadhibou. Un projet de loi sur l'asile est actuellement en cours d'élaboration.

Le contrôle des frontières, longues de 4700 km, a été renforcé ces dernières années, a par ailleurs souligné la délégation. Quarante-sept postes frontière ont été mis en place, initiative qui s'est accompagnée de la formation des personnels de sécurité chargés de les tenir, ainsi que de l'informatisation de la douane. Une zone militaire a été créée dans le nord-est qui était traditionnellement une zone de trafics en tous genres. Il s'agit de lutter contre la criminalité transfrontalière et le terrorisme, celui-ci constituant actuellement la menace la plus grande à laquelle fait face la région, a précisé la délégation. Des projets de développement dans les zones frontalières ont été lancés, particulièrement en direction des jeunes et des femmes, avec l'assistance de l'Europe et du Japon, a-t-elle ajouté. Seule une mutualisation des efforts et une coopération accrue entre les pays concernés peuvent contribuer à combattre le phénomène de la radicalisation politico-religieuse, a-t-elle souligné.

Par ailleurs, un traitement spécifique concerne la région frontalière du sud afin de faciliter la vie de populations qui entretiennent des liens de part et d'autre du fleuve Sénégal, a rappelé la délégation. Il n'y a pas de discrimination à la frontière, a assuré la délégation, expliquant que les ressortissants de la plupart des pays voisins n'étaient pas assujettis à l'obtention d'un visa pour entrer en Mauritanie.

Un accord de réadmission a été conclu avec l'Espagne pour les personnes entrées illégalement dans ce pays à partir de la Mauritanie, a d'autre part indiqué la délégation. Elle a toutefois rappelé que la Mauritanie n'était plus seulement un pays d'émigration mais aussi un pays d'accueil.

Le centre de transit de Nouakchott prend en charge les étrangers ne détenant pas de documents d'identité ou de voyage valables, a ensuite indiqué la délégation. Ceux-ci sont traités et hébergés dans des conditions optimales et mis en contact avec leur consulat afin de régulariser leur situation; si ce n'est pas possible, ils font l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, a-t-elle expliqué. La délégation a précisé qu'il existait une excellente coopération avec les gardes frontière sénégalais.

La stratégie de gestion des frontières a fait reculer sensiblement la traite des migrants, a souligné la délégation qui a précisé que le centre de rétention de Nouadhibou, au nord du pays, était pratiquement vide, alors qu'il accueillait plusieurs centaines de personnes il y quelques années.

En réponse à un expert qui a fait état de 900 femmes mauritaniennes qui seraient victimes de la traite de personnes en Arabie saoudite, la délégation a affirmé ne pas disposer d'informations à ce sujet. Le régime politique mauritanien n'est pas un État policier et toute citoyen peut voyager librement sans avoir besoin de solliciter une autorisation, a par ailleurs assuré la délégation. Des femmes ont ainsi pu se rendre en Arabie saoudite sans faire appel aux autorités consulaires, même si toute personne souhaitant aller travailler à l'étranger est censée signer un contrat de travail qui doit être visé par un inspecteur du travail avant de quitter le pays. La délégation a laissé entendre que des abus auraient pu être commis par des agences de voyage qui ont joué le rôle d'agences de placement en Arabie saoudite et dont les responsables sont actuellement poursuivis en justice. Un projet de texte est à l'étude qui vise à autoriser et réglementer les agences de placement privées. S'il n'y a pas de bureaux de placement privés en Mauritanie, et alors que l'agence mauritanienne nationale de l'emploi n'assure plus cette activité, des agences de voyage privées ont néanmoins frauduleusement exercé une telle activité, profitant d'un vide de fait, mais elles ont été fermées et leurs responsables poursuivis, a ensuite insisté la délégation. Le Gouvernement prévoit d'autoriser cette activité en la réglementant et le décret à cette fin est prêt, a-t-elle réitéré.

La délégation a ensuite apporté un certain nombre d'explications au sujet du Code du travail et de son respect. Le permis de travail est gratuit, a-t-elle souligné.

En réponse à une question sur le monopole exercé par des étrangers sur certaines activités, la délégation a expliqué que les migrants s'adonnaient soit à des activités salariées exigeant la détention d'un permis de travail, soit à des activités «lucratives» dans la restauration ou le commerce par exemple.

La délégation a par ailleurs assuré que la situation du marché aux poissons de Nouakchott s'était considérablement améliorée. Elle a toutefois indiqué prendre bonne note de la suggestion faite visant à améliorer encore davantage la situation sur ce marché.

Pour bénéficier d'une assistance judiciaire, le requérant doit demander un certificat d'indigence à la mairie de son domicile, a d'autre part indiqué la délégation. En matière de justice, la validité de la procédure dépend de la présence d'un interprète lorsque cela est nécessaire. Dès la première heure de garde à vue, toute personne suspectée d'avoir commis un délit peut faire appel à un avocat.

Le Comité international de la Croix-Rouge a le droit d'effectuer des visites inopinées dans les prisons, a d'autre part fait valoir la délégation. En prison, les détenues sont gardées par des hommes, de par le fait que le personnel féminin de l'administration pénitentiaire travaille principalement à des tâches administratives. Il est question de former un corps de gardiens mixtes, a indiqué la délégation.

Le Gouvernement prévoit de mettre en place un mécanisme de prévention de la torture dans le cadre du Protocole facultatif à la Convention contre la torture, a ensuite indiqué la délégation. Par ailleurs, la surveillance des prisons de femmes par des femmes est une mesure qui nécessite du temps pour pouvoir être mise en place, a-t-elle ajouté.

La mendicité des enfants n'est pas un délit, la solidarité musulmane exigeant de donner l'aumône, a ensuite souligné la délégation. En revanche, l'exploitation d'enfants par la mendicité est un crime, a-t-elle ajouté. La pratique des «talibés», qui est séculaire dans les campagnes, s'est désormais développée dans les villes, ce qui donne lieu à des abus, a-t-elle reconnu. La Mauritanie a ratifié les Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, ainsi que les conventions pertinentes de l'Organisation internationale du travail. Une stratégie nationale de protection des enfants a été lancée, a ajouté la délégation. Près de 17 000 enfants au total ont bénéficié l'an dernier des mesures prises en faveur des enfants mendiants.

La mendicité est un phénomène de société qui existe dans un certain nombre d'États de la sous-région, principalement en Afrique de l'Ouest, a ensuite rappelé la délégation, avant de souligner que le Gouvernement a mis en place il y a plusieurs années un programme de lutte contre la mendicité. Le Gouvernement mauritanien ne ménage aucun effort contre un phénomène qui porte atteinte à la fois à l'image du pays et à la dignité humaine, a déclaré la délégation.

La liberté religieuse est garantie en Mauritanie, tout fidèle pouvant pratiquer sa religion, a par ailleurs indiqué la délégation.

Le Gouvernement a déployé des efforts en faveur de la sensibilisation aux conventions de l'ONU, a d'autre part fait valoir la délégation. Un programme de formation spécifique a été établi dans plusieurs régions, avec le soutien du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et l'aide d'organisations non gouvernementales.

La délégation a assuré que la Mauritanie affichait la meilleure parité hommes-femmes d'Afrique de l'Ouest.

Remarques de conclusion

M. JOSE BRILLANTES, Président du Comité, a remercié la délégation pour ses réponses satisfaisantes et exhaustives, qui illustrent non seulement les efforts consentis mais aussi l'engagement de la Mauritanie dans la mise en œuvre de la Convention. M. Brillantes a appelé la Mauritanie à prendre toutes les mesures nécessaires qui permettront de prendre en compte les diverses recommandations que lui adressera le Comité.



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