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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DU PORTUGAL

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné aujourd'hui le rapport du Portugal sur les mesures prises par le pays en application des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Le chef de la délégation portugaise a souligné que le Portugal avait été confronté, ces dernières années, à une difficile crise économique et financière et a été soumis à plusieurs programmes internationaux d'ajustement financier sévères. Face à l'impact négatif de ces mesures d'austérité sur la réalisation des droits de l'homme au Portugal, des efforts qui ont été déployés tout au long de cette période afin d'éviter que quiconque, en particulier parmi les groupes les plus vulnérables, ne soit privé de la jouissance de ses droits de l'homme. L'égalité des droits et des chances entre hommes et femmes est inscrite dans la Constitution portugaise depuis 1976 et le devoir fondamental de l'État de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes est expressément mentionné dans la Constitution depuis 1997. Depuis l'adoption de la loi sur la parité, en 2006, le nombre de femmes élues à des postes politiques de niveau décisionnel n'a cessé de croître; lors des élections législatives du 4 octobre dernier, 76 femmes ont été élues au Parlement national, représentant un tiers du total des membres du Parlement. La même tendance peut être observée dans le nombre de postes de prise de décision au niveau économique occupés par des femmes. L'attention du Comité a été attirée sur les efforts déployés en vue de promouvoir l'emploi et l'entrepreneuriat des femmes. En dépit de la récente crise économique, le Portugal a maintenu un niveau élevé de protection de la santé maternelle et infantile, le taux de mortalité maternelle du pays étant actuellement l'un des plus faibles d'Europe.

La délégation portugaise, dirigée par M. Pedro Nuno Bártolo, Représentant permanent du Portugal auprès des Nations Unies à Genève, était également composée de Mme Fátima Duarte, Présidente de la Commission sur la citoyenneté et l'égalité entre les sexes, et d'autres représentants de cette Commission ainsi que de du Ministère des affaires étrangères; du Ministère des finances; du Ministère de l'administration interne; du Ministère de la justice; du Ministère de l'agriculture et de la mer; du Ministère de la santé; du Ministère de l'éducation et des sciences; du Ministère de la solidarité, de l'emploi et de la sécurité sociale; du Haut-Commissariat pour les migrations; de la région autonome de Madère. La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, de la possibilité d'invoquer la Convention devant les tribunaux portugais; des questions d'asile; de l'impact des mesures d'austérité sur la situation des droits de l'homme; des mesures temporaires spécialesde discrimination positive; des attributions de la Commission pour l'égalité dans le travail et l'emploi; de la violence contre les femmes; de la lutte contre les stéréotypes; de la traite de personnes et de la prostitution; des questions de santé, y compris s'agissant de l'avortement, de la lutte contre les mutilations génitales féminines; des questions d'éducation; du logement; du programme d'aide sociale d'urgence associé à la stratégie de lutte contre la pauvreté des personnes les plus vulnérables.

Des membres du Comité ont salué les réalisations du Portugal sur le plan législatif tout en soulignant que ces réalisations ne changent néanmoins pas la situation générale du pays, marquée depuis 2008 par les mesures d'austérité qui semblent avoir eu un impact dévastateur sur les femmes. Les attitudes patriarcales et les stéréotypes sexistes subsistent dans pratiquement tous les domaines de la vie, y compris dans les médias, se sont inquiétés les membres du Comité. Le concept de viol figurant dans le code pénal ne semble pas conforme aux exigences de la Convention puisqu'il prévoit que pour être qualifié, le viol doit s'accompagner de preuves de résistance, la notion de non-consentement ne suffisant pas. Il aussi été constaté que la violence conjugale ne faisait pas partie des motifs légalement reconnus pour le divorce. Le Portugal est devenu un pays non pas seulement de destination mais aussi, de plus en plus, d'origine de la traite de personnes, a fait observer une autre experte.

Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport du Portugal lors de séances privées qui se tiendront avant la clôture de la session, le vendredi 20 novembre prochain.


Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Libéria (CEDAW/C/LBR/7‑8).

Présentation du rapport

Le Comité est saisi du rapport périodique du Portugal (CEDAW/C/PRT/8-9), ainsi que de ses réponses (CEDAW/C/PRT/Q/8-9/Add.1 ) à une liste de questions que lui a adressées le Comité (CEDAW/C/PRT/Q/8-9).

M. PEDRO NUNO BÁRTOLO, Représentant permanent du Portugal auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que le rapport de son pays et les réponses à la liste de questions avaient été rédigés par l'organe national de coordination interministérielle sur les droits de l'homme, à savoir la Commission nationale des droits de l'homme du Portugal, créée en 2010. La Commission est sur le point de finaliser un ensemble d'indicateurs sur la prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes et le travail d'élaboration d'un nouvel ensemble d'indicateurs sur la non-discrimination et l'égalité est en cours.

Ces dernières années, a poursuivi M. Bártolo, le Portugal a été confronté à une difficile crise économique et financière et soumis à plusieurs programmes internationaux d'ajustement financier sévères. «Nous reconnaissons l'impact négatif de ces mesures d'austérité sur la réalisation des droits de l'homme au Portugal», a déclaré le Représentant permanent. Le Portugal réaffirme néanmoins son engagement et les efforts qui ont été déployés tout au long de cette période afin d'éviter que quiconque, en particulier parmi les groupes les plus vulnérables, ne soit privé de la jouissance de ses droits de l'homme.

L'agenda national et international du Portugal a mis un accent de plus en plus marqué sur la lutte contre la discrimination fondée sur le genre et sur la promotion de l'inclusion sociale des femmes, a souligné M. Bártolo. L'égalité des droits et des chances entre hommes et femmes est inscrite dans la Constitution portugaise depuis 1976, a-t-il rappelé, ajoutant que le devoir fondamental de l'État de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes est expressément mentionné dans la Constitution depuis 1997. M. Bártolo a attiré l'attention sur un certain nombre d'instruments visant l'élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes appliqués par le Portugal, citant plus particulièrement le cinquième Plan national pour l'égalité entre les sexes, la citoyenneté et la non-discrimination (2014-2017) et le cinquième Plan national pour la prévention et la lutte contre la violence domestique et basée sur le sexe, qui inclut le troisième Programme d'action pour la prévention et l'élimination des mutilations génitales féminines. M. Bártolo a en outre mentionné le deuxième Plan d'action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité et le troisième Plan national de prévention et de lutte contre la traite d'êtres humains.

Depuis l'adoption de la loi sur la parité en 2006, le nombre de femmes élues à des postes politiques de niveau décisionnel n'a cessé de croître, a ensuite fait valoir le Représentant permanent du Portugal. Lors des élections législatives du 4 octobre dernier, 76 femmes ont été élues au Parlement national, représentant un tiers du total des membres du Parlement, a-t-il précisé, soulignant que cela représente une hausse de 6,5% par rapport aux précédentes élections parlementaires. La même tendance peut être observée dans le nombre de postes de prise de décision au niveau économique occupés par des femmes, a poursuivi M. Bártolo. Il a en outre attiré l'attention sur les efforts déployés en vue de promouvoir l'emploi et l'entreprenariat des femmes, soulignant que des textes de loi avaient été adoptés pour promouvoir l'égalité entre les sexes sur le marché du travail dans des domaines tels que la participation équilibrée des femmes et des hommes dans les organes de direction des entreprises ou l'égalité en matière de salaires.

La législation relative à la protection de l'environnement parental et à la conciliation entre travail et vie de famille a été renforcée, a d'autre part fait valoir le Représentant permanent du Portugal. Il a par ailleurs rendu compte du renforcement des politiques publiques liées à la prévention et à la lutte contre toutes les formes de violence à l'encontre des femmes, insistant notamment sur les formations dispensées en la matière aux professionnels du système judiciaire et sur la mise en place d'un statut de victime qui place la victime au cœur du système pénal.

La traite de personnes prend des proportions alarmantes et inquiétantes à travers le monde, ce qui requiert une approche intégrée de cette problématique tant au niveau international qu'au niveau national, a poursuivi M. Bártolo. Depuis 2008, a-t-il rappelé, le Portugal dispose d'un Système national de référence des victimes de traite, qui a été mis à jour en 2014. Le pays a par ailleurs créé un Observatoire de la traite de personnes.

En dépit de la récente crise économique, le Portugal a maintenu un niveau élevé de protection de la santé maternelle et infantile, a assuré le chef de la délégation, faisant valoir que le taux de mortalité maternelle du pays est actuellement l'un des plus faibles d'Europe. Quant au taux de mortalité infantile – 2,8 pour mille en 2014 – il est considéré comme le plus faible en nombres absolus jamais enregistré et constitue l'un des meilleurs taux du monde. L'accès aux services de santé nationaux reste universel et inclusif, atteignant tous les résidents au Portugal, y compris les migrants en situation irrégulière, a souligné M. Bártolo.

Depuis quatre décennies, le Portugal s'est fermement engagé en faveur de l'élimination des stéréotypes de genre et de l'intégration de l'égalité entre les sexes par le biais de l'éducation, a poursuivi le Représentant permanent. Il a en outre souligné que le Portugal continue de renforcer ses efforts en vue d'améliorer la condition des femmes vulnérables telles que les femmes rurales, les femmes immigrantes, les femmes roms et les femmes agricultrices. S'agissant des femmes immigrantes, le Plan d'intégration des immigrants et le Plan stratégique pour les migrations incluent des mesures concrètes visant la promotion de l'égalité entre les sexes et le renforcement de l'intégration personnelle, professionnelle et civile des femmes immigrantes dans la société portugaise, a ajouté M. Bártolo. Quant à la Stratégie nationale pour l'intégration des communautés roms 2013-2020, elle inclut un axe transversal qui vise l'égalité entre les sexes par le biais de l'autonomisation des femmes par leur participation aux différents aspects de la vie sociale et par la performance de leur vie professionnelle.

Au cours des 25 dernières années, le Portugal a enregistré une baisse significative (57%) du nombre d'exploitations agricoles, a poursuivi le Représentant permanent. Néanmoins, le nombre de femmes agricultrices n'a pas chuté en proportion mais seulement de 12%, ce qui témoigne du rôle important joué par ces femmes dans le monde rural portugais.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a salué les réalisations législatives du Portugal depuis l'examen de son précédent rapport périodique, citant notamment l'adoption de la loi sur l'identité de genre (2011) et la loi sur l'asile de 2014. Il a en outre relevé que, depuis l'examen de son précédent rapport, le Portugal avait ratifié un certain nombre d'instruments internationaux, parmi lesquels les Conventions de l'OIT sur les travailleurs domestiques et sur la protection de la maternité. Ces réalisations ne changent néanmoins pas la situation générale du pays, marquée depuis 2008 par les mesures d'austérité, a déclaré l'expert. D'après la Plateforme sur les droits des femmes, ces dernières mesures semblent avoir eu un impact dévastateur sur les femmes. Le Portugal se doit d'assurer que toutes les dispositions de la Convention sont bien mises en œuvre dans les régions autonomes des Açores et de Madère, a en outre rappelé l'expert. Il est regrettable que la Convention ne semble pas souvent directement invoquée devant les tribunaux portugais, a ajouté l'expert, qui a voulu savoir si le cas s'était déjà produit.

S'interrogeant sur la proportion de femmes dans les postes décisionnels au sein des entreprises d'État et des entreprises privées, une experte s'est enquise des objectifs que les autorités portugaises avaient fixés dans ce domaine et des sanctions prévues si ces objectifs n'étaient pas atteints, au moins pour les entreprises publiques, soulignant que cela permettrait de voir si le Portugal avait réellement pris des mesures temporaires spéciales en la matière.

Il semblerait que la situation qui prévaut actuellement au Portugal soit meilleure que ne le laissaient entrevoir les réponses, insuffisamment détaillées, fournies par le pays à la liste de questions écrites que lui avait adressée le Comité, a déclaré une experte. Elle a par ailleurs souhaité savoir si la Commission pour l'égalité dans le travail et l'emploi (CITE) avait un pouvoir d'initiative pour engager des poursuites judiciaires lorsqu'il est fait appel à elle dans un cas de discrimination au travail.

Une experte a félicité le Portugal pour les efforts concrets qu'il a déployés depuis l'examen de son précédent rapport, notamment dans le système éducatif, pour éliminer les stéréotypes sexistes concernant le rôle des hommes et des femmes. Il n'en demeure pas moins que les attitudes patriarcales et les stéréotypes sexistes subsistent dans pratiquement tous les domaines de la vie, y compris dans les médias, s'est inquiétée l'experte. Les statistiques montrent en outre que la violence faite aux femmes restait répandue au Portugal. Elle a aussi souhaité des statistiques pour ce qui est des poursuites engagées contre les auteurs de cette violence. Le concept de viol figurant dans le code pénal ne semble pas conforme aux exigences de la Convention puisqu'il prévoit que, pour être qualifié, le viol doit s'accompagner de preuves de résistance, la notion de non-consentement ne suffisant pas. La violence conjugale ne fait pas partie des motifs légalement reconnus pour le divorce, a en outre déploré l'experte.

Le Portugal est devenu un pays non pas seulement de destination mais aussi, de plus en plus, d'origine de la traite de personnes, a fait observer une autre experte, avant de s'enquérir des améliorations apportées en matière de sensibilisation des juges et des agents des forces de l'ordre aux questions relatives à la violence de genre. Près de la moitié des femmes prostituées sont des étrangères, a-t-elle poursuivi, s'inquiétant par ailleurs de tendances en cours au sein de certains partis politiques portugais en faveur de la légalisation de la prostitution. Qu'en est-il des programmes d'aide et de soutien aux femmes qui souhaitent quitter la prostitution ?

Une experte a attiré l'attention sur l'importante sous-représentation des femmes dans les instances judiciaires les plus élevées, telles que la Cour suprême.

Une autre experte a souhaité en savoir davantage sur les modalités d'application de l'extraterritorialité de la loi interdisant les mutilations génitales féminines. L'experte a par ailleurs estimé que toute légalisation de la prostitution ne pourrait que s'accompagner d'une légalisation du proxénétisme.

Les grossesses adolescentes constituent un problème pour les communautés immigrantes, en particulier africaines, a fait observer une experte.

Comment est évaluée la politique visant à éliminer les stéréotypes qui a été mise en place dans le pays depuis cinq ans, a demandé une autre experte, estimant que la formation des enseignants à cette fin n'est pas suffisante?

Des préoccupations ont été exprimées face aux nombreux mariages forcés dont font l'objet les jeunes filles roms. Dans ce contexte, une experte s'est enquise des efforts déployés par les autorités portugaises pour protéger les filles contre ces pratiques culturelles préjudiciables.

Un membre du Comité a relevé que le marché du travail au Portugal avait été gravement touché par la crise, provoquant chômage et sous-emploi; dans ce contexte, nombre de femmes ne trouvent que des emplois à temps partiel et constituent un groupe précaire. L'expert a fait état de préoccupations liées à la grossesse et à la maternité dans le contexte du marché du travail. Les femmes roms, migrantes et âgées rencontrent des difficultés pour accéder au marché du travail et l'expert a souhaité savoir comment les autorités s'y prenaient pour veiller à ce qu'elles n'en soient pas exclues.

Une experte s'est inquiétée des amendements restrictifs apportés à la législation relative à l'avortement. Par ailleurs, s'il n'y a pas de mortalité lors de l'accouchement, des préoccupations existent quant aux conséquences négatives possibles de l'épisiotomie, qui atteint 73% au Portugal, soit le taux le plus élevé de l'Union européenne. Il semblerait en outre qu'il y ait dans le pays un abus de la pratique de la césarienne, a-t-elle insisté. Des statistiques montrent que, même si en théorie la possibilité existe pour les femmes gitanes d'avoir accès aux mêmes services de santé que le reste de la population, leur accès est moindre pour ce qui est des actes de santé génésique, a d'autre part fait observer l'experte.

Une experte a rappelé que dans ses dernières observations finales en date relatives au Portugal, le Comité s'était dit préoccupé par les pratiques d'expulsion du logement en raison du non-paiement des hypothèques. La pauvreté a un visage souvent féminin et il est fréquent que les gouvernements ne tiennent pas compte de cette féminisation de la pauvreté, a-t-elle souligné, avant de s'enquérir des mesures prises pour assurer la protection du droit à un logement adéquat, en particulier pour les femmes ayant des enfants.

Relevant que l'agriculture pèse moins qu'auparavant dans l'économie portugaise, une experte a fait observer que de nombreuses femmes vivent néanmoins toujours de l'agriculture. Les femmes sont plutôt présentes dans l'agriculture familiale alors que les hommes le sont davantage dans l' agriculture entrepreneuriale, a-t-elle précisé, s'inquiétant du peu de reconnaissance dont bénéficient les femmes qui travaillent dans cette agriculture familiale.

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels s'est inquiété du nombre important de Roms vivant au Portugal dans des campements isolés sans accès aux services de base en eau et en assainissement, a rappelé un expert.

Une experte s'est enquise des recours, autres que le divorce, dont dispose une femme victime de violence familiale.

Le délai d'attente avant le remariage en vigueur au Portugal est contraire aux droits de l'homme et est d'ailleurs plus long pour les femmes que pour les hommes, a fait observer une experte.

Réponses de la délégation

La délégation a d'emblée souligné que les autorités portugaises reconnaissent l'impact potentiel ou effectif des mesures d'austérité sur la situation des droits fondamentaux, et plus particulièrement des droits des femmes, au Portugal. L'objectif de la délégation portugaise est aujourd'hui de faire comprendre aux membres du Comité que malgré ce contexte, tout a été fait pour minimiser ou atténuer cet impact négatif et faire en sorte que les personnes les plus vulnérables ne se retrouvent pas totalement démunies, a-t-elle précisé.

La politique d'asile actuellement déployée par les autorités portugaises ne contient pas d'éléments d'analyse de genre, a poursuivi la délégation, avant de préciser que le Portugal ne pratiquait pas la détention des requérants d'asile. Les autorités veillent à leur intégration en veillant à la satisfaction de leurs besoins spécifiques, y compris en termes de formation à la langue portugaise, a précisé la délégation. Dans le contexte de l'accueil des requérants d'asile, les femmes reçoivent un traitement préférentiel, surtout s'il s'agit de femmes enceintes ou de femmes accompagnées d'enfants; elles ne restent pas dans les centres d'installation temporaire ou autres centres d'asile, a précisé la délégation.

À une question sur le nombre de procès en justice au cours desquels des dispositions de la Convention ont été invoquées devant les tribunaux portugais, la délégation a expliqué que les données disponibles au Portugal ne permettent pas de fournir une indexation des sentences judiciaires en fonction des instruments juridiques invoqués.

La région autonome de Madère est fermement attachée et engagée à la pleine et entière mise en œuvre de la Convention, a assuré le représentant la région. Sur les huit secrétariats que compte le gouvernement de la région autonome de Madère, deux sont dirigés par des femmes, a-t-elle par ailleurs indiqué.

En ce qui concerne les mesures temporaires spéciales prévues à l'article 4 de la Convention, la délégation a expliqué que, plutôt que des mesures temporaires, qui ont pour but de rééquilibrer une inégalité structurelle, le Portugal a pris un certain nombre de décrets visant à mettre en place un ordre social permanent d'égalité entre hommes et femmes à tous les niveaux de l'administration; cela doit être plus qu'une mesure temporaire car cela relève d'une obligation constitutionnelle, a insisté la délégation.

Dans les administrations publiques, le taux de féminisation du personnel atteint 31,1% pour les cadres supérieurs, a précisé la délégation.

Un délai a été accordé au secteur privé pour lui permettre de prendre des mesures volontaires aux fins de la réalisation de l'égalité entre hommes et femmes à tous les niveaux de représentation dans les entreprises privées; au-delà de ce délai, une loi sera appliquée pour garantir le respect, dans le secteur privé, de ce principe d'égalité entre les sexes, a indiqué la délégation. D'après les dernières données disponibles, il y aurait 11% de femmes dans les conseils d'administration des entreprises privées.

La Commission pour l'égalité dans le travail et l'emploi (CITE) a notamment pour fonction de fournir des conseils, a indiqué la délégation. Les travailleuses enceintes ou qui allaitent ont des droits qui doivent être respectés sous peine de poursuites devant les tribunaux, a-t-elle rappelé. Tout employeur qui lèse les droits d'un travailleur doit se conformer à l'avis rendu par la Commission dans le cas d'espèce, sous peine de poursuites en justice. La CITE peut être à l'initiative de poursuites judiciaires par le biais des syndicats qui y sont représentés, a expliqué la délégation. La CITE a aussi pour compétence de faire des recommandations au Gouvernement au sujet de textes de loi visant à promouvoir l'égalité entre hommes et femmes au travail, a-t-elle ajouté.

Revenant par la suite sur les questions de représentation des femmes, la délégation a fait observer que depuis cinq ans, les femmes portugaises sont plus nombreuses que les hommes à suivre des études doctorales.

Pour ce qui est des disparités salariales (entre hommes et femmes), la délégation a notamment indiqué qu'avait été mis en place depuis cette année un soutien technique gratuit visant à soutenir les entreprises qui souhaitent mettre en place une stratégie de réduction des écarts salariaux.

En ce qui concerne la violence à l'égard des femmes, y compris la violence conjugale, la délégation a indiqué que le nombre de plaintes pour violence conjugale était stable depuis 2008: il se situe autour de 27 000 ou 28 000 cas. Le nombre de condamnations pour violence conjugale s'est élevé à 1687 en 2011, 1729 en 2012 et 1769 en 2013, a ajouté la délégation. Quant au nombre de victimes intégrées dans le système de protection prévu à leur intention, il est passé de 13 en 2011 à 562 aujourd'hui, a-t-elle fait valoir.

La délégation a par ailleurs fait état d'un chiffre cumulé (sur plusieurs années) de quelque 13 694 expertises médicales pratiquées suite à des crimes sexuels commis contre des victimes de sexe féminin contre un peu plus de 600 expertises pratiquées pour des victimes de sexe masculin.

La délégation a souligné que des amendements récents ont été apportés au code pénal afin de prendre en considération tous les éléments figurant dans la Convention d'Istanbul (Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à égard des femmes et la violence domestique). Le crime de viol figure au nombre des dispositions du code pénal qui ont ainsi été amendées.

La délégation a indiqué que le code pénal prévoyait, pour la détermination de l'exercice de l'autorité parentale, des circonstances aggravantes lorsqu'un crime perpétré au sein de la famille se produisait en présence de mineurs. Pour que des mesures de protection soient prises en faveur de la victime ou que des mesures de contrainte soient prises à l'encontre de l'agresseur, il faut qu'il y ait eu dépôt de plainte, a ajouté la délégation.

La loi sur le divorce, elle a été amendée en 2008 et le divorce, qui était autrefois fondé sur la faute d'un conjoint, relève désormais d'un système général où les conjoints peuvent invoquer des raisons très variées pour demander le divorce.

Interpellée sur la lutte contre les stéréotypes, la délégation a indiqué que depuis trente ans, la stratégie de lutte contre les stéréotypes se faisait au sein et par le biais de l'éducation, à tous les niveaux d'enseignement, du primaire à la terminale. Ces dernières années, quelque 200 enseignants ont été formés à cette fin sur l'ensemble du territoire national.

La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur le renforcement de la protection de la maternité et de la paternité grâce à un amendement apporté au code du travail qui prévoit cinq journées supplémentaires de congé parental pour le père, ce qui contribue à sensibiliser l'ensemble de la population à la nécessité d'un meilleur partage des tâches entre les deux parents.

La Convention n°189 de l'OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques a été ratifiée par le Portugal, mais le processus d'adaptation de la loi à cet instrument est en cours, a indiqué la délégation.

Quant à la traite de personnes, la délégation a souligné que la perspective de genre avait été intégrée dès le premier Plan national de lutte contre la traite. Le Système national de référence pour les victimes de traite a été mis à jour l'an dernier, avec une forte contribution des ONG; cet outil constitue d'ailleurs un guide pour la participation permanente des indispensables organisations de la société civile, fortement présentes sur le terrain et particulièrement aptes à contribuer à l'identification de victimes. L'Observatoire de la traite est l'une des composantes de ce mécanisme national de référence et a notamment pour fonction de recueillir des statistiques, a ajouté la délégation. C'est en 2007 que le crime de traite de personnes a été défini tel qu'il figure actuellement dans la législation pertinente, a-t-elle rappelé.

La légalisation de la prostitution n'est absolument pas à l'ordre du jour au Portugal; si la prostitution n'est certes pas incriminée, depuis longtemps, rien n'est prévu pour aller au-delà de cette dépénalisation.

S'agissant des questions de santé, la délégation a indiqué que le Portugal comptait quelque 226 hôpitaux dont plus d'une quarantaine disposent de services de gynécologie obstétrique. Sur ces 226 hôpitaux, 119 sont publics.

Des modifications ont récemment été apportées par la loi à la procédure de l'interruption volontaire de grossesse, a ensuite rappelé la délégation. La procédure va ainsi devenir plus laborieuse et lente que par le passé, mais la loi n'est pas encore en vigueur car il faut encore adopter la réglementation correspondante. Aussi, les interruptions volontaires de grossesse sont-elles encore soumises au régime qui était en vigueur jusqu'ici, a-t-elle indiqué.

Au mois d'août dernier, a été adoptée une loi incriminant de manière spécifique les mutilations génitales féminines, a rappelé la délégation, insistant par ailleurs sur les mesures préventives mises en place aux fins de l'éradication de ces pratiques. Un amendement a été apporté l'an dernier à la loi sur l'asile qui prévoit que les victimes doivent être considérées comme des demandeuses d'asile ayant des besoins spéciaux, a précisé la délégation.

L'étude nationale sur les communautés gitanes a permis de mieux connaître leur situation, a poursuivi la délégation, tout en attirant l'attention sur le caractère incomplet de cette étude qui n'a finalement couvert que la moitié des municipalités du pays. Il en ressort que plus de 34 000 Gitans vivent au Portugal. Un observatoire a été mis en place pour les communautés gitanes qui travaille actuellement à compléter cette étude. Les Roms - ou Gitans - ont accès aux services de santé et s'en servent, a par ailleurs déclaré la délégation.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a assuré qu'il n'y avait pas de ségrégation en milieu scolaire au Portugal. Les Gitans ne sont pas considérés comme un groupe minoritaire et jouissent des mêmes droits que le reste de la population, notamment en matière d'éducation.

Pour ce qui est des femmes en milieu rural, la délégation a notamment indiqué que 29% des exploitations agricoles au Portugal ont une femme à leur tête. Entre 2009 et 2013, le nombre de femmes ayant suivi un enseignement supérieur dans le domaine de l'agriculture a fortement augmenté, a ajouté la délégation.

Suite à la crise économique et financière, certaines familles ont eu du mal à faire face à leurs engagements, notamment pour ce qui est de payer leur loyer ou leur hypothèque, a reconnu la délégation. Aussi, les conditions d'emprunt aux fins du paiement d'hypothèques privées ont été assouplies pour permettre aux familles de conserver leur logement, a-t-elle notamment fait valoir.

La délégation a par ailleurs exposé le programme d'aide sociale d'urgence associé à la stratégie de lutte contre la pauvreté des personnes les plus vulnérables. Les femmes bénéficient souvent des mesures liées à ce programme - notamment pour ce qui est du revenu minimum d'insertion - en raison de leur plus grande vulnérabilité, a-t-elle fait observer.

L'âge minimum du mariage est actuellement fixé à 16 ans pour les garçons comme pour les filles; l'âge du mariage était autrefois fixé à 14 ans pour les filles et 16 ans pour les garçons. Il reste que, étant mineurs, les jeunes âgés de 16 à 18 ans doivent obtenir le consentement de leurs parents pour se marier, a précisé la délégation.


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CEDAW15/033F