Aller au contenu principal

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA POLOGNE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le rapport présenté par la Pologne sur les mesures prises qu'elle a prises pour appliquer les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport, M. Radosław Mleczko, Sous-Secrétaire d'État au Ministère du travail et des politiques sociales de la Pologne, a déclaré que son Gouvernement avait fait siens les objectifs de la Déclaration de Varsovie. Cette déclaration, adoptée en 2012 à l'issue du Congrès international sur les droits de l'enfant, a constitué le point culminant de la commémoration du soixantième-anniversaire de la disparition du Dr Janusz Korczak, pionnier des droits des enfants et précurseur de la Convention. Actuellement, les politiques polonaises dans le domaine de l'enfance reposent sur la famille, laquelle représente l'environnement le plus propice au développement de l'enfant. Dans ce cadre, les pouvoirs du Médiateur pour les enfants, et les moyens à sa disposition, ont été étendus progressivement aux domaines de l'éducation et de la défense des droits des mineurs confrontés à la justice. M. Mleczko a rappelé le retrait par la Pologne, en 2013, de ses réserves aux articles 7 et 38 de la Convention ; et sa ratification du Protocole facultatif concernant la vente d'enfants, la prostitution d'enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Outre M. Mleczko, la délégation polonaise, forte d'une trentaine de membres, était composée de plusieurs représentants des Ministères de la santé ; du travail et des politiques sociales ; et de l'intérieur ; ainsi que des services du Procureur général, du corps des gardes-frontières, de la police nationale et de la chancellerie du Premier ministre. Elle a répondu aux questions et observations des membres du Comité portant – notamment – sur la coordination nationale de la mise en œuvre de la Convention, la discrimination des enfants roms dans le système scolaire, l'audition d'enfants par les tribunaux, ainsi que la responsabilité et la formation des personnes qui s'occupent des enfants. Les experts ont aussi sollicité des informations sur les soins de santé prodigués aux enfants handicapés et aux petits Polonais en général.

Les trois rapporteurs du Comité chargés de l'examen du rapport de la Pologne étaient Mme Kirsten Sandberg et MM. Peter Guran et Gehad Madi. Ils ont demandé à la délégation de dire quels avaient été les résultats du Plan d'action national 2004-2012 intitulé « une Pologne pour les enfants ». Les rapporteurs ont dit leur inquiétude face à la persistance des stéréotypes sexistes et des attitudes négatives à l'égard des jeunes ayant une identité et une orientation sexuelles différentes. Les rapporteurs ont également abordé la question des abus sexuels commis par des prêtres et des membres de l'Église. Ils ont enfin encouragé la Pologne à ratifier le Protocole facultatif établissant une procédure de plaintes.

Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport présenté par la Pologne dans le cadre de séances privées qui se tiendront avant la clôture de la session, le 2 octobre prochain.


Le Comité examinera, le lundi 21 septembre à partir de 15 heures, les rapports du Brésil sur l'application de la Convention (CRC/C/BRA/2-4) et du Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/BRA/1).



Présentation du rapport

Le Comité est saisi du troisième et quatrième rapport périodique combiné de la Pologne (CRC/C/POL/3-4), couvrant la période 1999-2010, ainsi que de ses réponses (CRC/C/POL/Q/3-4/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRC/C/POL/Q/3-4) au sujet de l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport, M. RADOSŁAW MLECZKO, Sous-Secrétaire d'État au Ministère du travail et des politiques sociales de la Pologne, chef de la délégation, a déclaré que l'année 2012 avait marqué le soixante-dixième anniversaire du décès de Janusz Korczak, pionnier des droits des enfants en tant que droits de l'homme, qui avait jeté les bases de la future Convention relative aux droits de l'enfant. Le Congrès international sur les droits de l'enfant a constitué l'événement phare de cette commémoration puisqu'il a abouti à l'adoption de la Déclaration de Varsovie qui exhortait les adultes à veiller à ce que les droits des enfants soient pleinement respectés, notamment le droit de vivre sans violence, négligence ni traitements dégradants. Le Gouvernement a entièrement endossé les objectifs de la Déclaration en tant que priorités de ses propres politiques en la matière.

M. Mleczko a indiqué que la politique de l'enfance de la Pologne procède de la conviction que la famille représente l'environnement le plus propice au développement de l'enfant. Les parents doivent déterminer l'intérêt supérieur de l'enfant et le guider tout en prenant en considération ses aspirations et opinions. Partant, le Gouvernement a pris une série de mesures dans les domaines des soins aux enfants, du soutien à la famille et de la santé. La prise en compte du point de vue de l'enfant dans les décisions le concernant est garantie par les mesures appropriées. L'engagement sans faille de la Pologne en faveur des droits de l'enfant a été concrétisé par la ratification de la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées et de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle et les abus sexuels. En 2013, a précisé le Sous-Secrétaire d'État, la Pologne a retiré ses réserves aux articles 7 et 38 de la Convention et amendé sa déclaration interprétative sur le Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés.

De son côté, le Médiateur pour les enfants joue un rôle important dans les activités et politiques gouvernementales ainsi que dans le lancement de nouveaux projets en faveur des droits de l'enfant. Ses pouvoirs ont été étendus au fil des ans dans les domaines, notamment, de l'éducation et de la défense des droits des enfants confrontés à la justice. Le financement du bureau du Médiateur a été augmenté dans la même mesure pour lui permettre de remplir ses missions. Le Médiateur est très actif dans la lutte contre la violence à l'encontre des enfants, dans la protection des droits des enfants placés dans des centres ou familles d'accueil et dans la divulgation des normes sur le respect de la dignité et des opinions des enfants.

S'agissant du soutien aux familles, M. Mleczko a informé le Comité que la durée du congé parental payé a été multipliée par deux, de 26 à 52 semaines, soit un des plus longs congés parentaux au sein de l'Union européenne. Depuis 2014, l'appui financier aux parents d'enfants handicapés a également été amélioré. Une carte de réduction a été introduite la même année au profit des familles nombreuses pour leur faciliter, ainsi qu'à leurs enfants, l'accès à certain nombre d'institutions, de centres sportifs et culturels ainsi qu'aux transports publics. Les parents peuvent bénéficier des services de nombreuses crèches et garderies de jour. Le programme « Petite enfance » finance l'ouverture de structures d'accueil pour ce groupe d'âge.

Le Ministère du travail et des politiques sociales réalise régulièrement des enquêtes et des sondages sur la violence à l'égard des enfants et sur les attitudes sociales face à la violence domestique, a ajouté le chef de la délégation. On a ainsi constaté un changement positif dans le comportement des fonctionnaires en charge de l'enfance, a-t-il conclu.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. PETER GURAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Pologne, a souligné l'importance de l'action du Dr Korczak dans le domaine des droits positifs de l'enfant et remercié l'État partie de ses efforts pour diffuser son message partout dans le monde. Le rapporteur a néanmoins voulu savoir pourquoi la Pologne avait mis treize ans pour présenter ses rapports ; et quel est actuellement l'organe de coordination des activités liées aux droits de l'enfant, le groupe de travail chargé de cette question ayant cessé ses activités en 2013.

Concernant le Plan d'action national 2004-2012 intitulé « une Pologne pour les enfants », le rapporteur a sollicité davantage d'informations tant sur ses résultats que sur son suivi. Des doutes subsistent quant à l'application de l'article 14, al. 2 de la Convention (« les États parties respectent le droit et le devoir des parents […] de guider celui-ci dans l'exercice » de la liberté de pensée), a relevé l'expert. M. Guran a dit aussi ne pas comprendre pourquoi la Pologne ne ratifie pas le protocole facultatif établissant une procédure de plaintes.

MME KIRSTEN SANDBERG, corapporteuse, s'est alarmée de la persistance des stéréotypes sexuels en Pologne, observant que la position de l'Église sur ces questions est très suivie. La société polonaise a aussi des attitudes négatives contre la communauté rom, en particulier contre les enfants. Mme Sandberg a sollicité des informations sur les résultats des actions menées par le Gouvernement pour y remédier, et si ses efforts avaient induit un changement réel d'attitude. La corapporteuse a exprimé la même préoccupation concernant les mesures et lois relatives à l'identité et l'orientation sexuelles des jeunes.

Le rapport indique que le personnel des centres de placement et d'accueil d'urgence ne saurait être accusé de mauvais traitement. Mais Mme Sandberg a observé qu'il semble, pourtant, que des violences sur mineurs sont commises dans ces centres. Dans ce contexte, elle a voulu savoir s'il y avait eu dépôt de plaintes et si des poursuites avaient été engagées. Le châtiment corporel est certes interdit depuis 2010 en Pologne, mais il perdure dans les établissements scolaires, dans la famille et dans certaines institutions étatiques pour mineurs, a aussi remarqué l'experte. Elle a évoqué le problème des agressions sexuelles commises sur des enfants par des prêtres polonais: qu'est-il fait pour les poursuivre et pour les sanctionner, en Pologne et à l'étranger ?

M. GEHAD MADI, corapporteur, a encouragé la Pologne à ratifier les instruments internationaux relatifs aux apatrides. Il a voulu savoir à partir de quel âge un enfant peut participer au Conseil des organisations de jeunesse. M. Madi a regretté que les enfants réfugiés et requérants d'asile musulmans ne puissent pas s'acquitter de leurs devoirs religieux dans les écoles publiques et dans les centres d'hébergement. Selon certaines allégations, les enfants musulmans seraient même forcés de participer au culte catholique, a dit M. Madi.

D'autres membres du Comité ont invité la délégation à préciser dans quelle mesure les enfants sont systématiquement inclus dans les politiques transversales et intersectorielles. Ils se sont enquis de la formation des juges traitant les affaires impliquant un enfant et voulu savoir si l'avis de l'enfant était écouté dans les procédures aussi bien civiles que pénales.

Un expert a demandé à la délégation de dire si la loi polonaise punit les actes discriminatoires commis contre des adolescents sans foyer ou lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres: en 2014, environ 120 crimes d'homophobie ont été recensés, mais le rapport ne précise pas si certains de ces délits ciblaient des adolescents. Une experte a insisté sur les abus commis par les prêtres polonais contre des enfants et sur l'extradition éventuelle de ces personnes. Attirant l'attention sur « le poids de l'Église catholique » en Pologne, elle a évoqué le cas d'abus graves dans la paroisse de Koszalin (nord-ouest) ; de même que le cas d'un capitaine de l'armée accusé d'avoir violé 17 jeunes filles.

S'agissant des questions de santé, des experts ont relevé que les enfants handicapés et les enfants migrants ne bénéficient pas systématiquement de subventions. Ils ont demandé des renseignements sur les mesures visant à garantir l'intégration des enfants handicapés dans les établissements d'enseignement public. Les experts ont, en outre, relevé des cas de malnutrition en Pologne, et noté que les initiatives en matière de nutrition semblent exclusivement menées par des organisations de la société civile: le Gouvernement leur accorde-t-il des aides financières ? Par ailleurs, même si des cours sur la santé génésique et sexuelle sont offerts en milieu scolaire, les élèves, notamment les jeunes filles, n'y ont pas accès dans certains établissements.

Dans le contexte du droit à l'éducation, des membres du Comité ont attiré l'attention de la Pologne sur la discrimination des enfants roms dans le système scolaire: les jeunes Roms ne sont pas toujours éduqués dans leur langue maternelle mais en polonais. Ils ont plaidé également pour que les enfants migrants, réfugiés et de parents demandeurs d'asile reçoivent un enseignement dans leur langue maternelle. Ils ont exprimé leur inquiétude pour les enfants séparés de leurs familles réfugiées lors de leur transfert en Pologne depuis des États voisins, en vertu du règlement Dublin II, et encouragé la Pologne à favoriser la réunification familiale.

Un expert a souligné qu'aucun effort systématique n'est consenti en faveur des enfants mendiants, qui sont de ce fait très exposés aux abus, voire à la traite des enfants. L'expert s'est enquis de l'existence en Pologne d'un plan national contre l'exploitation sexuelle des enfants et contre le tourisme sexuel.

Une experte a posé le problème de l'existence de « boîtes à bébés » où les nouveau-nés peuvent être déposés de façon anonyme, ce qui leur interdit de fait de connaître leurs origines biologiques. La réponse écrite aux questions du Comité parle du soutien psychologique accordé aux enfants concernés, alors qu'il faudrait surtout abolir la pratique de ces boîtes anonymes, a estimé l'experte.

Un autre membre du Comité a demandé quelles mesures sont prises pour placer les enfants handicapés ailleurs que dans des institutions spécialisées. Il a souhaité savoir s'il existait en Pologne une politique de scolarisation, de sédentarisation ou de placement des enfants mendiants et des enfants de la rue.

Un expert s'est dit déçu par l'absence de réponse aux questions portant sur la lutte contre la vente d'enfants et sur les sanctions pénales prévues en cas d'enrôlement d'enfants dans des conflits armés.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que l'application de la Convention en Pologne passe par l'inclusion de ses dispositions dans la législation nationale. Il n'existe pas d'organe spécifique d'application des dispositions de la Convention: l'architecture législative polonaise intègre les intérêts de l'enfant de manière complète et coordonnée, a affirmé la délégation. Ainsi, la stratégie sur le transport et l'environnement contient-elle des mesures liées spécifiquement à l'accessibilité des enfants handicapés.

Il existe par contre des organes chargés de la coordination de l'action publique pour les droits de l'enfant: les principaux sont le Ministère du travail et des affaires sociales, le Médiateur pour les droits civils et son homologue chargé des droits de l'enfant. À leur propre niveau, les différents ministères s'acquittent de leur mandat relatif à l'application du Plan national pour les enfants. Ce plan a fait l'objet d'une évaluation en 2012: les constatations faites à cette occasion ont été reprises dans la Stratégie nationale pour les droits de l'homme.

S'agissant de la prise en charge de l'enfant confronté au système judiciaire en tant que victime, la délégation a expliqué que son audition se fait en présence d'un psychologue ou d'un spécialiste de l'enfance dans une salle isolée. L'apparition de nouveaux éléments de preuve, par exemple, peut entraîner la nécessité d'une nouvelle audition. Ce second entretien exige cependant une procédure très complexe et une intervention préliminaire d'un psychologue pour expliquer à l'enfant la raison de sa nécessité. L'enfant peut aussi requérir la présence d'un adulte de confiance. La délégation a précisé que 9375 enfants ont ainsi été entendus en 2014: 75 seulement l'ont été plus d'une fois. On compte 192 salles d'audition pour mineurs dans les tribunaux et 179 dans les commissariats de police. Mais toutes ces salles ne répondent pas pleinement aux critères fixés par le Ministère de la justice et seules 86 d'entre elles ont obtenu le certificat officiel de « salle adaptée à l'audition des mineurs ». Les entretiens sont systématiquement enregistrés. En aucun cas l'accusé n'est présent à l'audition.

Le Médiateur des droits des enfants et plusieurs organisations non gouvernementales ont émis cependant des réserves sur la manière dont certains membres du personnel des tribunaux traitent les affaires impliquant des enfants. En conséquence, des tuteurs spécialisés, indépendants des tribunaux, sont désormais formés pour représenter les enfants.

Toute personne ayant la charge d'enfants, à quelque titre que ce soit, bénéficie d'informations et d'une formation sur les différents instruments européens et internationaux que la Pologne a ratifiés. Ces documents sont mis à la disposition des enseignants, des universitaires et des institutions concernées.

Répondant aux questions relatives à la minorité rom, la délégation a défini cette communauté comme une minorité ethnique en Pologne. L'action gouvernementale dans ce domaine a débuté il y a 14 ans par un train de mesures systémiques subventionnées par l'État. Un programme de préservation de la culture rom a été lancé en 2004: il prévoit aussi des activités contre les stéréotypes à l'encontre des Roms. Partant de la constatation qu'à l'époque communiste les écoles étaient particulièrement oppressives contre les enfants roms, la Pologne met l'accent sur l'application de mesures éducatives au niveau des communautés locales et en consultation avec les organisations roms de Pologne. Les représentants de ces organisations sont également associés à la formulation des requêtes que les collectivités locales soumettent dans le cadre du Programme en faveur de la communauté rom, coordonné par le Ministre de l'intérieur. La délégation a affirmé enfin que le pays est bien conscient du fait que « l'Holocauste rom est l'holocauste oublié ».

La délégation a répertorié 42 cas d'abus sexuels commis par des prêtres et membres de l'Église: il s'agit de cas de pédophilie, de présentation de contenus pornographiques à des mineurs et d'abus sur des jeunes atteints de troubles psychologiques. Douze de ces cas ont été classés sans suite ; 17 accusations ont été confirmées, notamment celle d'un archevêque dominicain. Le Procureur de la République a travaillé avec son homologue de la République dominicaine à son arrestation: mais l'archevêque est décédé au Vatican et la procédure sera probablement interrompue une fois le certificat de décès reçu. Les institutions ecclésiastiques ont tardé à collaborer à l'identification des crimes de ce prélat, a commenté la délégation. Ces actes sont particulièrement ignobles lorsqu'ils sont perpétrés par des membres du clergé, a-t-elle dit.

Les politiques visant l'élimination de tous les stéréotypes, notamment sexuels, se fondent sur une analyse régulière de la mise en œuvre de la politique d'égalité de traitement, en coopération avec les organisations non gouvernementales, a indiqué la délégation. La Pologne a lancé de très nombreuses activités de sensibilisation, d'information et de renforcement du rôle actif du père dans l'éducation de l'enfant. La sensibilisation aux droits de l'enfant fait partie de la formation des fonctionnaires de tous les secteurs.

Au sujet de l'identité et l'orientation sexuelles, la délégation a affirmé que tous les citoyens sont égaux aux yeux de la loi. Membre de l'Union européenne, la Pologne applique les directives européennes relatives à l'égalité des personnes ayant une autre orientation sexuelle. Le services de l'État en charge de la promotion de l'égalité entre les sexes mènent des campagne contre les stéréotypes affectant ces personnes. Spots télévisés, brochures et aussi organisation d'une gay pride sont autant d'autres moyens de sensibiliser aux droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres.

Le Gouvernement est toutefois conscient que beaucoup reste à faire contre les crimes homophobes. La lutte contre les crimes de haine en général est devenue une priorité des services de police, qui disposent d'un réseau d'agents pour la protection des droits de l'homme: il s'agit de postes de haut rang dans les forces de police dans la capitale et au niveau régional. Leur formation est assurée avec le concours de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). La Pologne applique la définition de crime de haine retenue par l'OSCE.

Le Parlement examine la possibilité d'adopter une loi tendant à simplifier la procédure permettant aux jeunes transsexuels de changer d'état-civil à leur majorité. L'identification du sexe à la naissance n'entraîne pas de mesures médicales de modification du sexe: ceci afin de laisser au jeune le temps de décider du choix de son sexe. Les enfants concernés reçoivent les conseils d'un centre spécialisé ouvert à leur intention.

Par ses campagnes, le Ministère du travail et des affaires sociales diffuse des messages sur la nécessité d'éliminer la violence dans la société et dans la famille, en particulier la violence affectant les enfants. Un projet « Non à la violence » a été financé conjointement par le Fonds social de l'Union européenne, a indiqué la délégation, qui a aussi décrit le travail de plusieurs équipes pluridisciplinaires sur la violence domestique et la violence sexiste. Outre une ligne téléphonique publique gérée par le Ministère du travail et des affaires sociales, la Fondation « La ligne bleue » dispose d'une ligne téléphonique gratuite, cofinancée par l'État: les enfants peuvent ainsi alerter sur une situation de violence au sein de leur famille ou toute autre situation les mettant en danger. Une « carte bleue » à usages multiples a été introduite en 2010: elle permet de passer des appels gratuits pour dénoncer des violences familiales et de laisser un message enregistré.

Les principes généraux régissant la répression des crimes motivés par la xénophobie sont inscrits dans la législation. L'amendement de la loi sur les crimes de haine tient compte de délits spécifiques, en particulier les agressions commises, en raison de leur identité sexuelle, contre des homosexuels.

La délégation a confirmé que la police n'a enregistré aucune plainte émanant de mineurs qui auraient subi des mauvais traitements alors qu'ils étaient placés dans un centre d'urgence de la police pour enfants. Elle a expliqué que les mineurs détenus dans ces centres ont le droit de recevoir la visite de leur avocat, ont droit au respect de leur dignité personnelle et à la protection contre la violence physique ou mentale et contre les mauvais traitements. Ils ont aussi le droit de recevoir des colis de vivres ou de vêtements et la visite de leurs parents ou tuteur légal, avec l'assentiment du service de la police chargé de leur dossier ou du responsable du centre. Selon un représentant de la police polonaise membre de la délégation, les centres d'urgence de la police sont des lieux non pas de détention mais d'accueil temporaire avant la décision d'un juge familial. La durée maximale du séjour n'y dépasse pas cinq jours. Ces centres ne doivent pas être confondus avec les maisons de correction ou de redressement, où les enfants sont effectivement en détention ; le nombre de ces établissements est beaucoup plus élevé.

La délégation a ensuite mis en avant efforts consentis par les autorités pour placer 66 000 enfants de 0 à 18 ans dans des familles d'accueil plutôt que dans des institutions. La priorité est donnée au placement chez des proches, c'est-à-dire des personnes bénévoles qui reçoivent une aide pour élever les enfants. Certaines familles accueillent uniquement des enfants handicapés: elles reçoivent une formation aux besoins spécifiques de ces enfants. Dans la mesure du possible, les enfants de mêmes parents sont placés dans la même famille d'accueil.

Répondant aux questions relatives à la santé, la délégation a signalé que nul ne peut refuser des soins de santé aux réfugiés et aux demandeurs d'asile, même s'ils ne disposent pas de la carte de santé. Le budget d'assistance aux familles en matière de santé a augmenté au cours des dernières années. L'assistance couvre notamment la fourniture d'équipements spéciaux, les visites médicales et les soins à domicile. La prise en charge des soins pour maladies rares est aussi assurée. Pour ce dernier type de maladies, le traitement est administré dans un centre proche du domicile du patient. Des dépistages in-utéro sont également disponibles.

Une nouvelle loi restreint l'achat de boissons sucrées dans le milieu scolaire, en dépit de la pression exercée par les entreprises concernées par ce commerce. Le programme « Restez en forme » encourage l'éducation physique chez les enfants ; un autre programme gratuit s'attaque au problème croissant des caries dentaires, généralement imputable à une négligence de l'hygiène bucco-dentaire.

L'allaitement maternel est encouragé en Pologne, mais la délégation a dit ne pas disposer de données spécifiques à l'allaitement exclusif. Cependant, la durée du congé maternel a été prolongée pour faciliter l'allaitement, ce qui contribue à l'amélioration de l'état de santé des bébés. À l'instar d'autres pays d'Europe, la Pologne connaît une progression des maladies mentales qui explique la mise en place d'un programme de dépistage et de traitement de ces maladies.

La pilule du lendemain est disponible sans ordonnance médicale pour les jeunes filles de plus de 15 ans. Un débat est en cours sur la possibilité de permettre aux filles de moins de 15 de consulter un gynécologue sans l'assentiment des parents. La délégation a précisé que le projet de loi tendant à l'interdiction totale de l'avortement n'a pas été adopté. Les « boîtes à bébés », qui existent depuis 2006, sont gérées par l'Église catholique et les organisations non gouvernementales en tant que solution de dernier recours. Leur justification réside dans l'importance accordée au respect du droit à la vie. La stérilisation est interdite en Pologne: les parents qui feraient stériliser leur fille handicapée mentale risquent des poursuites judiciaires. Les mariages précoces sont aussi totalement interdits: toute personne ayant validé une telle union serait sanctionnée.

La délégation a annoncé enfin que le Gouvernement procède à une analyse de la manière de donner éventuellement effet au protocole facultatif à la Convention établissant une procédure de plainte. Une décision sera prise sur la base de cette analyse.

Conclusions

Les rapporteurs ont dit avoir apprécié les nombreuses informations fournies par la délégation pluridisciplinaire de l'État partie, ajoutant qu'ils auraient aimé avoir davantage de détails sur les solutions qui ont été apportées aux problèmes soulevés précédemment par le Comité.

La délégation a affirmé la volonté de la Pologne d'appliquer avec diligence les recommandations du Comité. Avant de ratifier le protocole facultatif établissant une procédure de plainte, les autorités entendent évaluer de manière approfondie les conditions de son application concrète, a précisé encore une fois la délégation. La Pologne est prête à maintenir le dialogue avec le Comité.

M. BENYAM DAWIT MEZMUR, Président du Comité des droits de l'enfant, a dit compter sur l'engagement politique de la Pologne pour une application exhaustive de la Convention.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CRC15/038F