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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS OUVRE LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DIXIÈME SESSION

Compte rendu de séance
Il auditionne des organisations non gouvernementales concernant la situation au Burundi, en Grèce et en Italie

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a entamé, ce matin, les travaux de sa soixante-dixième session en adoptant son ordre du jour et son programme de travail et en entendant le Directeur de la Division des traités au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, M. Ibrahim Salama. Le Comité a ensuite auditionné des représentants de la société civile concernant l'application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels au Burundi, en Grèce et en Italie – les trois pays dont les rapports seront examinés cette semaine.

Dans sa déclaration d'ouverture de la session, M. Salama a notamment rappelé que le 2 août dernier, les États Membres des Nations Unies avaient entériné par consensus le document final du programme de développement pour l'après-2015 intitulé «Transformer notre monde: programme de développement durable d'ici 2030» qui sera examiné pour adoption par les chefs d'État lors du Sommet des Nations Unies qui se tient cette semaine. Il est rassurant de constater que ce texte met notamment l'accent sur les aspects du développement relatifs aux droits de l'homme. L'obligation redditionnelle concernant les objectifs du développement durable reposera sur des indicateurs précis qui devront, dans toute la mesure du possible, se rapporter aux instruments relatifs aux droits de l'homme. M. Salama a ensuite rappelé que l'un des résultats importants de la Réunion annuelle des Présidents d'organes de traités, réunie en juin dernier à San José du Costa Rica, a été l'adoption des Directives contre l'intimidation et les représailles à l'encontre des personnes qui coopèrent avec les organes conventionnels. Un autre résultat important de cette réunion a été l'appel lancé par le Ministre des affaires étrangères du Costa Rica à une réflexion des institutions académiques à travers le monde sur les options qui permettraient de renforcer le système des organes conventionnels et constituerait une contribution bienvenue en vue de l'examen d'évaluation auquel procédera l'Assemblée générale en 2020.

S'agissant enfin du cinquantième anniversaire des deux Pactes – relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels, M. Salama a indiqué que la Journée des droits de l'homme, le 10 décembre 2015, marquera le coup d'envoi d'une année entière de célébrations jusqu'à la date anniversaire de l'adoption des deux Pactes, à savoir le 16 décembre 2016. Divers événements sont prévus dans ce contexte, parmi lesquels la tenue d'une réunion-débat durant le débat de haut niveau de la session de mars prochain du Conseil des droits de l'homme ou encore la tenue d'une réunion conjointe des deux Comités concernés, en juin prochain. Par ailleurs, le Haut-Commissariat a préparé divers outils de sensibilisation aux deux Pactes et au travail des deux Comités.

Dans le cadre de l'audition des organisations de la société civile concernant la situation dans les pays dont les rapports seront examinés cette semaine, le Comité a entendu, s'agissant du Burundi, la Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights, au nom également d'une autre ONG, a évoqué le problème de l'inégalité des droits entre hommes et femmes en matière de propriété de la terre. En matière de droits d'héritage, ce sont les droits coutumiers qui s'appliquent, aboutissant à une discrimination à l'encontre des droits des femmes. Le code foncier permet à tout propriétaire terrien d'enregistrer ses biens, mais les femmes ne peuvent faire enregistrer leurs terres en leur nom. Il convient pour le Gouvernement burundais de prendre des mesures pour corriger ces discriminations. L'Association pour l'intégration et le développement durable au Burundi a attiré l'attention sur la situation des droits économiques, sociaux et culturels des peuples autochtones au Burundi en rappelant que le pays n'avait pas ratifié la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail sur les peuples indigènes et tribaux. Elle a particulièrement déploré la situation des Batwa, soulignant que l'exigence constitutionnelle relative à la représentation de toutes les ethnies, au sein du Gouvernement comme au sein des postes techniques, n'est pas respectée en ce qui concerne les Batwa. Elle a également dénoncé la situation dont souffrent les Batwa en matière de droits fonciers, de droit à la santé, de droit à une nourriture et à un logement suffisants, ou encore de droit à l'éducation et au travail.

Un expert s'étant enquis de ce qu'il en est pour les Batwa de l'institution de la servitude, en contrepartie du droit d'occuper des terres d'autrui, en principe abolie depuis 1977, une ONG a déclaré que cette situation existe effectivement encore pour nombre de Batwa au Burundi. Les Batwa ont peur de porter plainte devant la justice, a ajouté l'ONG.

S'agissant de la Grèce, le Greek Helsinki Monitor a rappelé que le pays était confronté à une crise de réfugiés sans précédent avec plus de 250 000 arrivées cette année, les îles grecques étant dépassées par cet afflux. Les infrastructures et services de réception, ainsi que les procédures d'enregistrement, sont très lacunaires au regard des besoins. En outre, depuis 2010, le pays est confronté à une grave crise de la dette qui a rendu nécessaires l'introduction de mesures d'austérité non pas imposées mais négociées avec les institutions internationales. En fait, le Gouvernement grec a préféré des mesures d'austérité qui ont bien sûr profondément affecté plusieurs droits relevant du Pacte plutôt que d'autres alternatives qui auraient demandé de profondes réformes structurelles impopulaires auprès des groupes professionnels ciblés. L'ONG a aussi souligné que la plupart des recommandations que le Comité avait adressées à la Grèce à l'issue de l'examen du précédent rapport du pays, en 2004, ont été ignorées par le pays. La Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights, au nom également de la FIDH, a rappelé que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme avait établi des critères que doivent respecter les mesures d'austérité pour être conformes aux droits de l'homme; or ces critères n'ont pas été respectés pour ce qui est de la Grèce. De nombreuses mesures d'austérité n'ont fait qu'entraver les droits fondamentaux des travailleurs ainsi que le droit à la santé.

Répondant aux questions des experts, une ONG a souligné que la plupart des négociations entre la Grèce et les institutions régionales et internationales se sont déroulées à huis clos et qu'il ne semble pas y avoir eu de consultations avec la société civile pour s'enquérir de l'impact que pourraient avoir les mesures envisagées sur les droits économiques, sociaux et culturels. Une autre ONG a imputé une part importante de la crise grecque aux mesures prises par les divers gouvernements successifs en Grèce et à des problèmes structurels – alors que les retraites, par exemple, étaient démesurément élevées. Pour l'heure, les droits de l'homme n'ont été pris en compte par aucun des deux côtés dans les négociations, a ajouté cette ONG.

En ce qui concerne l'Italie, le Forum italien des personnes handicapées a attiré l'attention sur les conséquences sur les personnes handicapées des mesures d'austérité prises dans le pays, les politiques publiques concernant les droits de ces personnes s'étant progressivement détériorées au fil des ans. L'organisation a déploré la tendance à la ré-institutionnalisation des personnes handicapées. Elle a en outre fait observer que les femmes handicapées restent souvent invisibles en raison de l'absence de politiques en leur faveur, alors que seules 1,8% d'entre elles sont employées, contre 6,8% pour les hommes handicapés. Les coupes budgétaires pour les autorités locales ont, elles, eu des effets négatifs sur l'éducation inclusive des personnes handicapées. L'ONG a enfin plaidé pour la mise en place d'une institution nationale des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris.


Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels entame cet après-midi l'examen du rapport initial du Burundi (E/C.12/BDI/1).


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

ESC15/021F