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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE L'ÉGYPTE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique présenté par l'Égypte sur la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

La Vice-Ministre adjointe des affaires étrangères chargée des droits de l'homme et des organisations non gouvernementales, Mme Mahy Hassan Abdel Latif, a déclaré que le Gouvernement mettait en œuvre les recommandations des mécanismes de surveillance des droits de l'homme dont s'est doté l'Égypte, notamment le Conseil national de droits de l'homme. Le Pacte a force de loi en Égypte, a souligné Mme Abdel Latif. Elle a aussi indiqué qu'un chapitre de la nouvelle constitution, qui sera soumise à référendum, sera entièrement consacré aux droits économiques, sociaux et culturels. Le chef de la délégation a par ailleurs fait valoir que la lutte contre la discrimination envers les femmes a porté ses fruits, comme en témoigne la participation massive des femmes au mouvement révolutionnaire. Elle a insisté à plusieurs reprises sur la place que les femmes ont su prendre dans les sphères privée et publique égyptiennes.

La délégation égyptienne était également composée de représentants des Ministères des affaires étrangères, de l'éducation, de la culture et de la santé. Elle a répondu aux nombreuses questions posées par le Comité concernant l'application du principe d'égalité entre les sexes, la rédaction du projet de nouvelle constitution, les mesures prises face au chômage et la promotion des droits liés au travail, la protection des droits des minorités religieuses, l'élimination des mutilations génitales féminines, ou encore la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Égypte, M. Chandrashekhar Dasgupta, a souligné que l'examen du rapport intervenait à un moment important, l'Égypte s'apprêtant en effet à se doter d'une nouvelle constitution. Il a notamment exprimé l'espoir que la nouvelle constitution interdira explicitement toute forme de discrimination entre les hommes et les femmes, y compris dans le cadre du mariage et du divorce. Il s'est par ailleurs interrogé sur les mesures adoptées par l'État pour récupérer des fonds publics détournés, améliorer son rendement fiscal et empêcher la fuite des capitaux. D'autres membres du Comité ont souligné à quel point il importe que l'Égypte parvienne à stabiliser sa situation politique. Le pays souffre aujourd'hui des carences des gouvernements précédents et les décisions prises aujourd'hui vont déterminer l'avenir du pays. La crise économique, la flambée des prix alimentaires et la diminution des subventions ont aggravé les problèmes de pauvreté et d'insécurité alimentaire en Égypte, ont relevé les membres du Comité.

Le Comité adoptera en séance privée des observations finales sur le rapport de l'Égypte, qui seront rendues publiques après la clôture de la session, le vendredi 29 novembre prochain.


Le Comité examinera, à partir de lundi après-midi à 15 heures, le rapport initial du Gabon (E/C.12/GAB/1), qui se poursuivra le lendemain. Il a en outre prévu de tenir, lundi matin, une réunion publique avec des organisations non gouvernementales et institutions nationales des droits de l'homme qui apporteront leurs témoignages sur la situation dans des pays dont les rapports seront examinés la semaine prochaine.



Présentation du rapport

Présentant le rapport de l'Égypte (E/C.12/EGY/2-4), MME MAHY HASSAN ABDEL LATIF, Vice-Ministre adjointe des affaires étrangères, chargée des droits de l'homme et des organisations non gouvernementales, a assuré le Comité de l'intention de son pays de coopérer pleinement avec lui à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. La mise en œuvre du Pacte en Égypte est assurée par un ensemble de plans ambitieux visant à donner un effet concret aux droits fondamentaux des citoyens. Le pays met en œuvre les recommandations des mécanismes de surveillance des droits de l'homme dont il s'est doté, notamment le Conseil national de droits de l'homme. Les Ministères de la justice et des affaires sociales disposent de leurs propres institutions de contrôle. Sur la base des engagements pris par l'Égypte, le Gouvernement a lancé des programmes de formation aux droits de l'homme destinés aux élèves aussi bien qu'aux enseignants. Le Pacte a force de loi en Égypte, dont la Constitution affirme le principe de non-discrimination, a indiqué Mme Abdel Latif, qui a aussi souligné que la loi fixe l'âge minimal du mariage. La lutte contre la discrimination envers les femmes a porté ses fruits, comme en témoigne la participation massive de femmes au mouvement révolutionnaire.

La liberté du travail est garantie par la loi et, par extension, la liberté d'association et la liberté syndicale, a déclaré le chef de la délégation. Mme Abdel Latif a aussi indiqué que le taux de chômage en Égypte était tombé sous la barre des 10%. Elle a également souligné que le système social reposait sur les retraites et la protection de la structure familiale. Les programmes de sécurité sociale garantissent les moyens d'existence des familles vulnérables. Ils permettent notamment aux familles de répondre à leurs besoins fondamentaux. L'État garantit aux petits exploitants agricoles une surface de terres suffisante pour leur autosuffisance alimentaire. En 2013-2014, l'État construira 30 000 unités de logement pour les familles les plus défavorisées.

L'État fait respecter le droit à l'éducation, conformément à la Constitution, a affirmé Mme Abdel Latif. Il assure une couverture sanitaire complète aux enfants scolarisés. Il veille à la qualité des enseignements par une action sur le contenu des programmes, l'aménagement des horaires et la formation des maîtres. L'État intègre les enfants ayant des besoins particuliers aux classes normales. L'État développe, enfin, l'infrastructure culturelle du pays et favorise les manifestations culturelles dans tout le pays. L'Égypte est heureuse de nouer aujourd'hui un dialogue interactif avec le Comité autour des trois rapports successifs qu'elle lui soumet.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. CHANDRASHEKHAR DASGUPTA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Égypte, a voulu savoir dans quelle mesure et de quelle manière la société civile avait participé à l'élaboration du rapport. Il a demandé à la délégation de donner des renseignements sur la jurisprudence égyptienne en matière d'application directe des dispositions du Pacte devant les tribunaux. M. Dasgupta a posé plusieurs questions sur la composition et le mandat du Conseil national des droits de l'homme. La délégation a été priée de donner des explications sur la diminution de la part du budget national consacrée à l'éducation et à la santé. L'Égypte agit-elle pour récupérer des avoirs détournés, améliorer son rendement fiscal et lutter contre la fuite des capitaux? Où en sont ses négociations avec le Fonds monétaire international en vue d'un prêt? Le rapporteur a par ailleurs demandé s'il est prévu que la nouvelle constitution interdise explicitement toute forme de discrimination entre hommes et femmes, y compris dans le cadre du mariage et du divorce.

Plusieurs autres membres du Comité ont noté que l'Égypte présente ses rapports avec beaucoup de retard. Un expert a souligné que ce retard n'est pas propice au suivi régulier des progrès réalisés et risque de donner une fausse impression d'indifférence de la part du pays. D'autres experts ont demandé des précisions sur les statuts et l'indépendance du Conseil national des droits de l'homme et sur le degré de liberté dont jouissent les organisations non gouvernementales. Un expert a constaté que la loi égyptienne ne garantit toujours pas les mêmes droits aux femmes et aux hommes et a demandé des précisions sur les intentions de l'Égypte concernant, notamment, l'élimination des mutilations génitales féminines et l'imposition de quotas féminins au Parlement.

Un expert a estimé que l'Égypte devrait accorder une plus grande attention aux droits économiques, sociaux et culturels, en particulier au vu des revenus très faibles des familles. Il a voulu savoir dans quelle mesure l'aide étrangère dont l'Égypte bénéficie est consacrée à la réalisation de ces droits. Un autre expert s'est interrogé sur le niveau actuel de la dette extérieure égyptienne. Une experte s'est enquise de l'état des relations entre le Gouvernement et les organisations non gouvernementales et de la société civile.

Des experts ont souligné à quel point il importe que l'Égypte parvienne à stabiliser sa situation politique. Le pays souffre aujourd'hui des carences des gouvernements précédents et les décisions prises aujourd'hui vont déterminer l'avenir du pays. À cet égard, comment le Gouvernement s'y prendra-t-il pour éviter de prendre des mesures rétrogrades, notamment dans le cadre de la rédaction de la constitution qu'il est en train de rédiger? Jusqu'à quel point la Constituante est-elle consciente des obligations de l'Égypte au titre du Pacte? Les membres de cette commission consultent-ils la société civile et des personnalités éminentes? Un expert a aussi voulu savoir si le projet de constitution serait finalement adopté par le Parlement ou par référendum.

S'agissant des questions relatives au droit du travail, des experts ont voulu savoir comment le Gouvernement comptait réduire le taux de chômage parmi les femmes et les jeunes. Une experte a demandé à la délégation de dire si l'Égypte s'était dotée d'un plan d'action en matière d'emploi. Une autre s'est interrogée sur l'existence d'un salaire minimum dans le secteur privé. Elle a noté qu'il n'existe en Égypte qu'un seul syndicat par secteur d'activité et que le droit de grève est encadré très étroitement. En période de transition et de difficultés, de plus en plus de personnes se tournent vers le secteur informel, où elles ne bénéficient pas de la sécurité sociale: les autorités devraient s'attaquer sans attendre à ce problème, a suggéré une experte.

D'autres questions ont porté sur la prise en compte des aspirations populaires dans le plan urbanistique pour «le Caire en 2050», actuellement au stade des consultations; sur la gestion des ressources hydriques du Nil; et sur le respect du principe de non-discrimination fixé par la Constitution égyptienne alors que, de fait, les femmes ne jouissent pas de mêmes droits que les hommes dans plusieurs domaines.

La crise économique, la flambée des prix alimentaires et la diminution des subventions ont aggravé les problèmes de pauvreté et d'insécurité alimentaire en Égypte, a constaté un expert. Il semble ainsi que 40% de la population vit avec moins de deux dollars par jour, nombre de personnes étant simultanément confrontées à la pénurie alimentaire. D'autres problèmes sont à signaler dans le domaine du logement, les prix des habitations neuves étant très élevés. En outre, les expulsions forcées se font sans préavis, indemnisation ni solution de rechange. Il est urgent que le Gouvernement réglemente cette pratique. Une experte a souligné, pour sa part, la fragmentation des services de santé égyptiens, qui serait notamment à l'origine de reculs dans la couverture vaccinale; ainsi que les coûts très élevés d'accès aux soins de santé. D'autres experts ont pointé des difficultés dans l'accès à l'eau potable.

Une experte a voulu savoir si le programme de réforme de l'éducation engagé par le Gouvernement avait permis de scolariser les enfants jusqu'ici exclus du système. Un autre expert a souligné qu'en pourcentage, sinon en termes absolus, la part du PIB égyptien consacrée à l'éducation a effectivement baissé depuis quelques années.

Un expert a salué les efforts du Gouvernement égyptien en matière d'éducation, tels qu'ils ressortent du rapport. Mais des défaillances persistent à cet égard, relevées déjà par le Comité en 2000, notamment l'abandon scolaire et l'analphabétisme. D'autre part, des informations font état d'une dégradation de la qualité de l'enseignement public et d'un regain d'intérêt pour l'enseignement privé. Les mêmes sources font état de sanctions administratives démesurées, voire de violences, contre des étudiants contestataires.

Des experts ont demandé comment le Pacte s'appliquait au plan interne pour garantir le respect de droits culturels des Égyptiens, dans un contexte où le Gouvernement affirme ne pas reconnaître la notion de minorité nationale. Un expert s'est alarmé de la situation des Coptes, demandant quelles mesures sont prises par les autorités pour garantir l'exercice de leurs droits religieux.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que le dialogue avec le Comité, au moment où une nouvelle constitution est en cours de rédaction, ne peut avoir que des incidences positives. Elle a fait valoir qu'un chapitre de la nouvelle constitution sera entièrement consacré aux droits économiques, sociaux et culturels. Elle a aussi indiqué que le projet de constitution sera soumis à référendum. La précédente constitution a été suspendue en mars 2011, a par la suite précisé la délégation.

Selon les précédentes constitutions ou chartes fondamentales qui se sont succédé en Égypte, les traités internationaux peuvent être invoqués directement devant les tribunaux, au même titre qu'une loi nationale. En 2010, l'avocat de travailleurs du secteur du rail en grève a ainsi invoqué les dispositions du Pacte devant le tribunal pénal, obtenant gain de cause: le droit de grève de ces travailleurs a été confirmé. Les droits défendus par le Pacte sont également mentionnés dans la Constitution. La Cour constitutionnelle, dans ses arrêts, a déjà fait référence aux dispositions du Pacte pour casser certaines mesures jugées discriminatoires dans le domaine des salaires, notamment.

La corruption est un obstacle au développement, privant le pays de ressources nécessaires et nuisant à sa productivité, a souligné la délégation. L'Égypte dispose d'un appareil législatif pour lutter contre ce problème, qui est réprimé par le code pénal. Un décret de 2004 a entraîné la mise en place d'un plan de prévention et de répression de la corruption: un grand nombre de procédures sont en cours dans ce cadre. L'Égypte a aussi entrepris des démarches judiciaires pour récupérer des fonds détournés par la corruption.

S'agissant du statut de la femme, la délégation a fait savoir que le problème des viols de manifestantes en 2011 a été examiné très attentivement. Après consultations, la loi a été amendée dans le sens d'une répression beaucoup sévère de ce type de faits. La loi adopte une définition du viol élargie, réprime le harcèlement sous toutes ses formes et impose la création d'un fonds de dédommagement des victimes. Les agresseurs s'exposent concrètement à des sanctions aggravées. Reste que les progrès des dernières années en matière de droits des femmes sont actuellement remis en cause par des extrémistes, a regretté le chef de délégation. Mais le gouvernement actuel entend respecter ses obligations au titre, en particulier, de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. La délégation a donné des précisions chiffrées sur la présence des femmes dans les instances gouvernementales et au Parlement. Elle a ajouté que l'idée de fixer des contingents de femmes a suscité un vif débat en Égypte, au terme duquel il a été décidé de ne pas imposer de quotas.

Le problème de la transmission de la nationalité égyptienne à leurs enfants par les femmes a été résolu en 2004, suite à une recommandation du Comité. Une étude réalisée en 2007 dans les écoles a montré un recul de 50% en moyenne des mutilations génitales féminines. Mais, malgré ces progrès et les dispositions rigoureuses de la loi, le problème persiste, a admis la délégation: un effort est fait pour sensibiliser les populations aux risques que cette pratique fait peser sur la santé des femmes, en collaboration avec les représentants religieux. Le fléau, issu d'une tradition millénaire, sévit surtout dans les campagnes, d'autres régions ayant réussi à l'éradiquer. Les organisations de la société civile ont joué un rôle très important à cet égard, surtout dans le sud du pays.

Certains aspects du divorce et de l'héritage sont régis par le droit religieux. Les autorités s'efforcent actuellement d'uniformiser les pratiques dans ces domaines en les débarrassant des représentations stéréotypées sur la place des femmes. Le chef de la délégation a de nouveau insisté sur la place que les femmes ont su prendre dans les sphères privée et publique égyptiennes.

Les organisations non gouvernementales jouent un rôle important en Égypte, a indiqué la délégation. Dans l'Égypte postrévolutionnaire, ces organisations assument une part des tâches dont le Gouvernement ne peut s'acquitter. La loi fixe le cadre d'action des 26 mille organisations concernées, dont au moins deux cent sont actives dans le domaine des droits de l'homme. Le droit de créer une organisation de la société civile est consacré par la loi. Les anciennes restrictions imposées à l'activité de la société civile seront abrogées par une nouvelle loi élaborée par les organisations non gouvernementales elles-mêmes. Ce projet, très progressiste, est entré en phase de consultation. Il amendera notamment les articles relatifs à l'enregistrement des associations: l'autorisation préalable ne sera plus nécessaire et les règles de financement seront assouplies, y compris pour les organisations internationales. L'objectif est de favoriser la participation de la société civile sans pour autant compromettre la sécurité nationale. Le projet devrait être adopté par le Parlement issu des prochaines élections.

En réponse à des questions sur les ressources hydriques, la délégation a déclaré que les eaux du Nil sont d'une importance cruciale non seulement pour l'Égypte, mais aussi pour les pays voisins. L'Égypte tient donc compte des intérêts de ces pays dans sa gestion du cours du fleuve.

Les membres du Conseil national des droits de l'homme qui ne siégeaient pas à titre d'experts indépendants ont démissionné après le départ de l'ancien Président. Le prochain Parlement sera chargé de réviser l'organisation et le fonctionnement du Conseil. Depuis mai 2013, ses membres sont des experts reconnus au plan international.

S'agissant de la sécurité alimentaire, le Gouvernement a pris un train de mesures pour réduire les prix au détail, organiser la concurrence, lutter contre les monopoles et améliorer le pouvoir d'achat des citoyens. Le Gouvernement est décidé à parvenir à l'autonomie nationale en matière alimentaire. C'est déjà le cas pour la production de blé. L'objectif est de diminuer le recours aux importations et de garantir la stabilité des prix. Les autorités agissent en faveur de la justice sociale par une revalorisation du salaire minimal et s'efforcent d'améliorer l'efficacité des subventions alimentaires. L'insécurité alimentaire touche encore 4% de la population, contre 6% en 2009.

La pauvreté est l'un des problèmes essentiels des pays en voie de développement, l'Égypte ne faisant pas exception: le taux de pauvreté s'y élevait à 25% en 2010-2011. Le Gouvernement lutte en priorité contre le chômage et l'analphabétisme. Il a identifié les familles qui ont besoin d'une aide urgente.

Le Gouvernement a lancé un programme prioritaire d'aide à la construction d'un million de logements destinés aux catégories défavorisées. Le programme encourage, par des aides et des crédits, la construction dans les zones excentrées. Les autorités œuvrent, de plus, à la réhabilitation des «zones d'habitation informelle» dans les villes. On compte plus de 400 de ces zones, contenant des milliers d'unités de logement. Les personnes expulsées de force bénéficient dans certains cas de mesures de relogement, a indiqué la délégation.

La délégation a estimé que la situation des minorités religieuses relève plutôt du mandat du Comité des droits de l'homme. Les chrétiens font partie de la nation égyptienne et ne sont pas considérés comme faisant partie d'une minorité. Les chrétiens en Égypte acceptent l'article 2 de la Constitution, selon lequel la charia est la source du droit civil. Cela étant, la discrimination contre les chrétiens existe et des églises ont bel et bien été détruites, a reconnu la délégation. Mais les raisons de ces phénomènes relèvent d'attitudes extrémistes opportunistes, et non d'un antagonisme religieux fondamental, a assuré Mme Adb el Latif. Quant aux obstacles à la construction d'églises, ils reflètent pour l'essentiel des complications administratives. L'Égypte compte plus de 3000 églises chrétiennes, a rappelé la chef de la délégation.

La création de syndicats indépendants est actuellement autorisée par un décret du Gouvernement qui a pris ses fonctions en mars 2011. Un projet de loi complet sur la liberté syndicale est en cours d'élaboration. L'Organisation internationale du travail est saisie de ce projet, pour observations. La loi garantira la liberté d'association, a ajouté la délégation.


Le salaire minimum est applicable dans le secteur public et dans les régies publiques. Il s'élève à 1200 livres égyptiennes. Les partenaires sociaux du secteur privé sont en train de négocier l'adoption, pour la première fois, des mêmes conditions. Le code du travail donnait par le passé à l'employeur le droit de choisir ses employés, a confirmé la délégation en réponse à des observations des experts du Comité: cette disposition a été modifiée en 2003 au profit d'un article plus équilibré. La loi réglemente en outre l'exercice du droit de grève, qui est notamment soumis à préavis. Le Gouvernement dispose d'une marge d'appréciation s'agissant de l'autorisation d'un mouvement de grève. Les grèves sont interdites dans certaines infrastructures publiques de première importance, notamment les ports et les hôpitaux. Le code du travail est en cours de révision, a précisé la délégation.

Le travail des enfants est interdit en Égypte. Une étude réalisée en 2010 avec l'Organisation internationale du travail montre que 1,45 million d'enfants environ travaillent, contre 2,8 millions en 2001. La même étude indique que 50% des enfants concernés sont employés dans les exploitations agricoles de leurs propres parents.

Le chômage atteint 13% de la population active en 2013, en progression depuis 2010 du fait de la crise que traverse l'Égypte. Le plan d'action 2013-2014 du Gouvernement a pour objectif de réduire le chômage par la création de 800 000 postes. Il bénéficie d'une aide internationale multilatérale.

Les mesures de justice sociale s'appuient sur une politique financière consistant notamment à appliquer des exemptions fiscales. Les familles nécessiteuses bénéficient aussi de subventions pour la scolarité et l'assurance maladie de leurs enfants.

Le taux de mortalité maternelle baisse constamment depuis 1992. La réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement a été, simultanément, l'occasion de progrès substantiels dans la réduction des taux de mortalité infantile: de 104 pour cent mille en 1992, l'Égypte est passée à 15 pour cent mille en 2012. Quarante-trois millions d'Égyptiens sont aujourd'hui couverts par l'assurance maladie.

En matière d'éducation, l'Égypte a fait des progrès importants, depuis deux ans, dans la qualité de l'enseignement primaire ainsi que dans la formation professionnelle des enseignants. Le système d'évaluation n'est plus axé sur le seul examen de fin d'année, mais sur le contrôle continu des connaissances. L'intégralité de l'enseignement primaire est gratuite. L'analphabétisme est en recul modeste mais constant.

Le problème de l'abandon scolaire touche surtout les écoles communautaires. Il est dû à des difficultés financières des familles ou à des conceptions traditionnelles relativement à la socialisation des filles. Malgré ces obstacles, le taux de réussite dans ces établissements a dépassé 80% en 2011-2012, a fait savoir la délégation. Ce succès est imputable en partie aux mesures de soutien aux familles prises par les autorités.

La délégation a précisé que les écoles privées ne représentent que 5% de la capacité du système scolaire. Leur avantage comparatif réside essentiellement dans l'enseignement des langues et dans l'organisation des horaires scolaires.

En matière de droits culturels, la nouvelle constitution de l'Égypte garantira à tous les citoyens le droit de participer aux activités culturelles sur le plan non seulement national mais aussi international. Le Ministère de la culture est responsable de l'élaboration des politiques culturelles. Il accorde une attention de plus en plus soutenue à la question du respect du droit de propriété intellectuelle, une démarche inédite en Égypte. Les autorités entretiennent les «palais de la culture» qui servent de centres culturels au plus près des populations. Ils abritent plus de mille bibliothèques, 1500 salles de théâtre, plusieurs centaines de salles de cinéma et les activités de dizaines de troupes folkloriques dont certaines jouissent d'une réputation internationale.

Une experte d'étant inquiétée de ce que les nouvelles autorités agissent dans un vide juridique préjudiciable à la qualité de l'action publique, la délégation a affirmé que l'Égypte ne connaît pas de vide juridique, les lois restant par définition en vigueur jusqu'à leur amendement. Les mutilations génitales féminines et le viol, notamment, sont fermement poursuivis et sanctionnés.

La délégation a précisé, par ailleurs, que l'État a été contraint de réduire ses dépenses générales pour assumer d'autres charges, notamment le service de sa dette et le versement des salaires de ses fonctionnaires.

Des membres du Comité ayant observé que, selon les définitions objectives couramment utilisées, il existe, de fait, des minorités en Égypte, la délégation a déclaré que le fait de réduire les Coptes à un statut de minorité est une façon de mettre en question leur appartenance fondamentale à l'Égypte. L'Égypte est un état civil, basé sur l'égalité des droits entre citoyens.

Conclusions

MME ABDEL LATIF s'est félicitée des contributions très utiles des membres du Comité, que la délégation transmettra fidèlement aux autorités égyptiennes compétentes. L'Égypte est sensible au rôle du Comité dans la défense des droits économiques, sociaux et culturels et surtout du droit au développement et à la coopération internationale.

M. DASGUPTA a salué le caractère constructif du dialogue, notamment l'assurance donnée par la délégation qu'il contribuerait aux décisions importantes que l'Égypte s'apprête à prendre pour se doter d'une nouvelle constitution.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

ESC13/023F