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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE, LE SOUS-COMITÉ POUR LA PRÉVENTION DE LA TORTURE ET LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA TORTURE EXAMINENT LA QUESTION DES REPRÉSAILLES

Compte rendu de séance
Le Comité se penche sur la suite donnée à ses observations finales et à ses recommandations suite à des plaintes

Le Comité contre la torture a tenu ce matin un échange de vues avec les membres du Sous-Comité pour la prévention de la torture et le Rapporteur spécial sur la torture, M. Juan Méndez, s'agissant notamment de la question des représailles exercées contre des personnes qui coopèrent avec les organes des Nations Unies. Il s'est par ailleurs penché sur la suite donnée par les États parties aux observations finales adoptées suite à l'examen de leurs rapports, ainsi que sur le suivi des communications relatives à des plaintes.

M. Méndez a indiqué avoir déjà eu à déplorer, en particulier lors de missions sur le terrain qu'il entreprend dans le cadre de son mandat, des représailles, parfois graves, contre des personnes ayant coopéré avec lui, ajoutant que, pour sa part, il veillait toujours à protéger, et non à exposer à des représailles, les personnes ayant coopéré avec les Nations Unies. Au cours des débats, l'idée a été évoquée de recommander aux États d'interdire les représailles par des dispositions légales. Certains ont plaidé en faveur de l'élaboration d'une déclaration commune du Comité, du Sous-Comité et du Rapporteur spécial concernant la question des représailles.

Présentant son rapport sur le suivi des observations finales du Comité (article 19 de la Convention), Mme Felice Gaer, membre du Comité, a rappelé que cette procédure porte sur les informations que le Comité demande aux États parties de lui présenter dans un délai d'un an après l'examen de leurs rapports. Le Comité a adopté un nouveau cadre ayant pour objectif de cibler davantage cette procédure, les États étant priés de donner suite aux recommandations qui leur sont adressées s'agissant de la nécessité de renforcer les garanties juridictionnelles, de mener des enquêtes promptes et impartiales et de poursuivre en justice et sanctionner les responsables d'actes de torture. Un membre du Comité a suggéré la création de catégories permettant de classer les pays en fonction de la façon dont ils appliquent les recommandations qui leur ont été adressées par le Comité. Outre les membres du Comité, des représentants du Conseil international de réhabilitation des victimes de la torture et d'Alkarama ont pris part au débat.

Le rapport de M. Fernando Mariño Menéndez, membre du Comité chargé du suivi des communications relatives aux plaintes (article 22 de la Convention) a été présenté par le secrétariat du Comité. Il rend compte d'informations reçues de plaignants et d'États parties depuis la session de mai 2013 du Comité. De nouvelles informations ont ainsi été reçues s'agissant de onze cas concernant six pays dans lesquels des violations de la Convention avaient été reconnues par le Comité.


Le Comité devrait tenir la séance de clôture de la présente session le vendredi 22 novembre à 10 heures. Il tiendra d'ici là des séances privées consacrées principalement à l'adoption de ses observations finales sur les rapports qui lui ont été présentés, depuis le 28 octobre dernier, par neuf pays: Mozambique, Ouzbékistan, Pologne, Lettonie, Belgique, Burkina Faso, Portugal, Andorre et Kirghizistan.



Suivi des observations finales du Comité

MME FELICE GAER, membre du Comité et rapporteuse chargée du suivi de l'article 19 de la Convention, a rappelé que ce suivi porte sur les informations que le Comité demande aux États parties de lui présenter dans un délai d'un an après l'examen de leurs rapports. Le Comité a adopté un nouveau cadre ayant pour objectif de cibler davantage cette procédure, a-t-elle souligné, précisant qu'il est plus particulièrement demandé aux États de donner suite aux recommandations qui leur sont adressées s'agissant de la nécessité de renforcer les garanties juridictionnelles, de mener des enquêtes promptes et impartiales et de poursuivre en justice et sanctionner les responsables d'actes de torture. L'État peut aussi être appelé à fournir des informations sur la question du droit de recours pour les victimes, a-t-elle ajouté.

Mme Gaer a indiqué qu'entre le mois de mai 2003 (date de mise en place de la procédure de suivi) et mai dernier, le Comité avait examiné 142 rapports d'États parties et formulé des recommandations de suivi à chacun d'entre eux. Parmi les 133 rapports de suivi qui étaient dus au 22 novembre 2013, 93 ont été reçus, ce qui représente une baisse sensible du taux de réponse. Depuis 2012, des rapports de suivi ont été reçus de la part de douze États. Mme Gaer a ensuite rendu compte de l'état de la procédure de suivi s'agissant de certains pays, plus particulièrement le Sri Lanka, l'Irlande et la Syrie, indiquant que la Syrie n'a pas répondu mais que l'Irlande a remarquablement bien réagi à maints égards.

Un autre membre du Comité a relevé, s'agissant de l'Irlande, que de nombreuses informations avaient été reçues, tant de la part d'organisations non gouvernementales que du Gouvernement, sur l'affaire de la blanchisserie du couvent de la Madeleine. Cette experte a rappelé que le Comité avait eu l'occasion de rencontrer des victimes, aujourd'hui âgées, de cette tragédie.

Un expert a suggéré la création de catégories permettant de classer les pays en fonction de la façon dont ils appliquent les recommandations qui leur sont adressées par le Comité dans le contexte du suivi de l'article 19. Un autre expert a plaidé en faveur de l'insertion pour chaque pays, sur la page web pertinente du site du Haut-Commissariat traitant du Comité et de ses observations finales, d'un lien renvoyant aux informations relatives au suivi.

Le Conseil international de réhabilitation des victimes de la torture a souhaité savoir si des initiatives ont été lancées pour rendre plus formelle la procédure de suivi; des orientations ou directives ont-elles été rédigées en la matière, a-t-il demandé? Alkarama a pour sa part jugé judicieuse la proposition faite par un membre du Comité de créer des catégories permettant de classer les pays en fonction de l'application des recommandations qui leur ont été adressées par le Comité, eu égard à l'impact non seulement médiatique mais aussi au niveau de la société civile que pourrait avoir une telle classification.

Suivi des communications relatives à des plaintes

En l'absence de M. Fernando Mariño Menéndez, membre du Comité et rapporteur pour le suivi de l'article 22 de la Convention, une représentante du Secrétariat, MME Antoanela Pavlova, a rendu compte des informations reçues des États parties et des plaignants depuis la cinquantième session du Comité, en mai 2013. Elle a précisé la teneur des informations nouvelles qui ont été reçues s'agissant de onze cas concernant les six pays suivants dans lesquels des violations de la Convention avaient été reconnues par le Comité: Kazakhstan (2 cas), Algérie (1 cas), Norvège (1 cas), Serbie (4 cas), Tunisie (2 cas) et Ukraine (1 cas).

Dans le cadre du débat qui a suivi cette présentation, un membre du Comité a fait observer que le défaut de réponse des États parties aux demandes d'informations semble être assez généralisé et s'est enquis de ce qui pourrait être fait pour y remédier. La procédure de suivi semble s'affaiblir parce qu'à moment donné, il n'y a plus de communication entre le Comité et l'État concerné, a-t-il insisté.

Rencontre avec le Sous-Comité pour la prévention de la torture et le Rapporteur spécial sur la torture

La réunion, coprésidée par le Président du Comité contre la torture, M. CLAUDIO GROSSMAN, et par Président du Sous-Comité pour la prévention de la torture, M. MALCOM EVANS, avait plus particulièrement pour objet de se pencher sur la question des représailles à l'encontre des personnes qui coopèrent avec les organes des Nations Unies, plus particulièrement avec le Comité et le Sous-Comité.

M. WILDER TAYLOR-SOUTO, membre du Sous-Comité pour la prévention de la torture, a indiqué que la question de représailles s'est manifestée dans seize cas sur dix-huit visites que le Sous-Comité a effectuées sur le terrain. Il a ajouté que les cas de représailles mentionnées au Sous-Comité concernent souvent des pays dans lesquels règne une sorte de culture de représailles. Certains pays toutefois, telle l'Australie, ont érigé les représailles en délit, au même titre que d'autres délits tels que l'abus d'autorité. Il serait donc judicieux d'examiner plus avant la possibilité pour les États d'interdire les représailles par des dispositions légales, au moins pour tous les pays qui sont parties au Protocole facultatif, a ajouté M. Taylor-Souto. Un autre membre du Sous-Comité a plaidé en faveur de l'élaboration d'une déclaration commune du Comité, du Sous-Comité et du Rapporteur spécial sur la torture concernant la question des représailles.

Une experte du Comité a rappelé que l'article 13 de la Convention stipule que «des mesures seront prises pour assurer la protection du plaignant et des témoins contre tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison de la plainte déposée ou de toute déposition faite». Un autre membre du Comité a jugé très judicieuse l'idée d'interdire les représailles par la loi, mais a dit craindre qu'il soit difficile de mettre cela en œuvre, en particulier dans les prisons où des sanctions peuvent être appliquées pour des raisons officiellement disciplinaires alors qu'il peut en fait s'agir de représailles. L'expert a en outre rappelé que le Conseil des droits de l'homme avait recommandé la création d'un point focal sur les représailles pour toute l'Organisation.

M. JUAN MéNDEz, Rapporteur spécial sur la question de la torture, a indiqué avoir déjà eu à déplorer, en particulier lors des visites qu'il entreprend dans divers pays dans le cadre de son mandat, des représailles, parfois graves, contre des personnes ayant coopéré avec lui. Il a en outre attiré l'attention sur le problème des menaces de représailles. M. Méndez a précisé qu'il s'arrange toujours pour que le gouvernement concerné sache qu'il est au courant, même s'il ne rend pas publique l'information afin de ne pas envenimer la situation. Le Rapporteur spécial a en effet rappelé que dans le cadre de son mandat, il adopte une approche orientée vers les victimes, y compris pour ce qui est des représailles, ce qui signifie que l'objectif doit toujours rester de protéger, et non d'exposer à des représailles, les personnes ayant coopéré avec les Nations Unies.

Le Conseil international de réhabilitation des victimes de la torture a estimé que le Rapporteur spécial était probablement le mieux placé des trois mécanismes des droits de l'homme sur la torture pour réagir rapidement à toute information relative à des représailles, les deux autres (le Comité et le Sous-Comité) devant obtenir l'aval de collègues avant de réagir.

Une experte du Comité s'est inquiétée que des gouvernements semblent envisager de s'opposer à la création, demandée par le Conseil des droits de l'homme, d'un point focal sur les représailles au sein de l'ONU et a souhaité que le Comité, le Sous-Comité et le Rapporteur spécial se penchent sur cette question.

Pour lutter contre l'impunité, il faut qu'il y ait sanction; si l'on veut lutter contre les représailles, il convient donc que celles-ci soient sanctionnées, a souligné le Président du Comité, M. Grossman.


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CAT13/029F