Aller au contenu principal

LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES EXAMINE LE RAPPORT DE L’AUTRICHE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par l’Autriche pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Présentant ce rapport, M. Helmut Tichy, Conseiller juridique auprès du Ministère fédéral pour les affaires européennes et internationales de l’Autriche, a souligné que la ratification de la Convention et du Protocole facultatif s’y rapportant a donné un élan formidable à la politique menée par le pays en matière de handicap, d’égalité de traitement et de non-discrimination. Le Plan national d’action sur le handicap pour les années 2012-2020 fournit le principal cadre dans lequel s’inscrit la politique autrichienne en matière de handicap pour les années à venir, a-t-il indiqué, précisant que ce Plan comporte huit principaux domaines d’intervention : politique générale en matière de handicap ; protection contre la discrimination ; accessibilité ; éducation ; emploi ; vie indépendante ; santé et réhabilitation ; et enfin sensibilisation et information. Ce Plan national d’action élaboré au niveau fédéral s’accompagne d’efforts complémentaires déployés au niveau régional, alors que jusqu’à présent, un Land autrichien, la Styrie, a également adopté un plan d’action visant à appliquer la Convention, a précisé M. Tichy.

M. Tichy a ensuite indiqué que la Loi de 2006 sur l’égalité en termes de handicap comporte trois parties : un amendement à la Loi sur l’emploi des personnes handicapées, qui englobe des dispositions relatives à la discrimination au travail ; la Loi fédérale sur l’égalité en termes de handicap, qui règlemente l’interdiction de la discrimination dans la vie quotidienne ; et un amendement à la Loi fédérale sur le handicap, qui instaure un médiateur (ombudsman) sur le handicap. La Loi sur l’égalité en termes de handicap prévoit une procédure de conciliation obligatoire au niveau du Bureau social fédéral, laquelle constitue une alternative aux procédures juridiques, a ajouté M. Tichy, faisant valoir que cette procédure de conciliation s’est avérée fructueuse puisque, depuis 2006, un total de 1300 procédures ont été engagées avec un taux de règlement atteignant 47%.

Des représentants du Comité fédéral de surveillance de la mise en œuvre de la Convention et du Bureau du Médiateur de l’Autriche ont également fait des déclarations.

La délégation autrichienne était également composée, entre autres, du Représentant permanent adjoint de l’Autriche auprès des Nations Unies à Genève, M. Karl Prummer, ainsi que de représentants du Ministère du travail, des affaires sociales et de la protection du consommateur ; du Ministère de la santé ; du Ministère de l’économie, de la famille et de la jeunesse ; du Ministère de la justice ; du Ministère pour les sciences et la recherche ; du Ministère pour les affaires européennes et internationales ; du Ministère de l’éducation, des arts et de la culture ; de la Chancellerie fédérale ; et des Länder de Haute Autriche, de Basse Autriche et de Styrie.

La délégation a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s’agissant, notamment, du texte allemand de la Convention ; de la traduction des débats parlementaires en langage des signes ; de la définition du handicap ; des campagnes de sensibilisation ; de la coopération entre le niveau fédéral et les Länder ; des discriminations multiples ; des réparations ; du droit à la vie, s’agissant plus particulièrement de la question de l’avortement ; de l’enregistrement des naissances ; des questions liées à la prévention de la torture ; des questions de tutelle ; de l’allocation mensuelle pour handicap ; du choix libre et éclairé du lieu de vie pour la personne handicapée ; de l’éducation inclusive ; ou encore de l’accès sans obstacle des personnes handicapées aux transports.

Le rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Autriche, M. Ronald McCallum, a relevé que c’est surtout l’approche médicale qui domine dans les lois appliquées au niveau local s’agissant des personnes handicapées et a donc préconisé une meilleure prise en compte de l’approche sociale prônée par la Convention. L’Autriche dispose de lois contre la discrimination mais elles ne sont pas assez strictes, a-t-il par ailleurs déclaré. Il semble qu’en 2012, près de 55 000 Autrichiens étaient soumis à une tutelle sur tous les aspects de leur vie ; peut-être cela est-il dû au caractère obsolète et non conforme à la Convention de la législation sur la tutelle, a en outre fait observer le rapporteur. Il semblerait que la fragmentation entre le niveau fédéral et celui des Länder soit le principal problème en Autriche au regard de la mise en œuvre de la Convention, a conclu M. McCallum.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Autriche et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit se clore le 13 septembre prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport initial de l’Australie.


Présentation du rapport

Présentant le rapport initial de l’Autriche (CRPD/C/AUT/1), M. HELMUT TICHY, Conseiller juridique auprès du Ministère fédéral pour les affaires européennes et internationales de l’Autriche, a rappelé que son pays avait été l’un des premiers Etats à signer la Convention et son Protocole facultatif en mars 2007 et à les ratifier durant l’été 2008, ces deux instruments étant entrés en vigueur en Autriche le 26 octobre 2008. La ratification de la Convention et du Protocole facultatif s’y rapportant a donné un élan formidable à la politique menée par le pays en matière de handicap, d’égalité de traitement et de non-discrimination, a-t-il souligné. Depuis qu’elle est entrée en vigueur, la Convention est devenue un cadre de référence pour toute action entreprise dans le domaine des droits des personnes handicapées en Autriche, a-t-il insisté. Il a indiqué que l’Autriche serait représentée au plus haut niveau, en la personne du Président fédéral, M. Heinz Fischer, lors de la réunion de haut niveau que l’Assemblée générale tiendra le 23 septembre prochain sur la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement pour les personnes handicapées.

La participation des organisations de la société civile a constitué un élément important tant dans le contexte du processus d’élaboration du présent rapport initial que dans celui de l’élaboration du Plan d’action national sur le handicap adopté par le Gouvernement autrichien en juillet 2012, a poursuivi M. Tichy. Il a ensuite fait valoir que plusieurs personnes handicapées figurent parmi les membres du Parlement autrichien ; l’une d’elle étant sourde, les délibérations du Parlement sont traduites en langage des signes, a-t-il précisé. En outre, a-t-il ajouté, à compter du 1er janvier 2014, deux juges aveugles siégeront dans un tribunal autrichien, à savoir la Cour administrative fédérale, récemment créée.

Le Plan national d’action sur le handicap pour les années 2012-2020 fournit le principal cadre dans lequel s’inscrit la politique autrichienne en matière de handicap pour les années à venir, a poursuivi M. Tichy, soulignant que par ce Plan, le Gouvernement a reconnu que la question du handicap était une question transversale. Ce Plan d’action, qui comprend un total de 250 mesures devant être appliquées d’ici 2020, comporte huit principaux domaines d’intervention, a-t-il indiqué : politique générale en matière de handicap ; protection contre la discrimination ; accessibilité ; éducation ; emploi ; vie indépendante ; santé et réhabilitation ; et enfin sensibilisation et information. Ce Plan national d’action élaboré au niveau fédéral s’accompagne d’efforts complémentaires déployés au niveau régional, alors que jusqu’à présent, un Land autrichien, la Styrie, a également adopté un plan d’action visant à appliquer la Convention. La mise en œuvre de la Convention en Autriche s’inscrit également dans le contexte de la Stratégie de l’Union européenne sur le handicap pour les années 2010-2020, sur laquelle s’aligne le Plan national d’action élaboré par l’Autriche.

M. Tichy a attiré l’attention sur la création, au sein du Ministère du travail, des affaires sociales et de la protection du consommateur, d’un groupe de travail chargé d’analyser les données existantes, de fixer des priorités, d’attirer l’attention sur les lacunes, de présenter des recommandations et de coopérer à l’approfondissement du Plan national d’action. Il a ensuite souligné que le nouveau paradigme consistant à considérer les personnes handicapées comme des participants actifs au sein de la société et non comme de simples récipiendaires de l’aide sociale a commencé à s’imposer en Autriche dans les années 1990. Une clause antidiscriminatoire particulière en faveur des personnes handicapées a été introduite dans la Constitution fédérale en 1987, a rappelé M. Tichy, avant de faire observer que la promotion et la protection des droits de l'homme relèvent désormais du mandat du bureau du Médiateur autrichien (Ombudsman), lequel surveille maintenant les installations et programmes pour personnes handicapées afin de prévenir l’occurrence de la violence à leur encontre, comme l’exige l’article 16 de la Convention.

M. Tichy a ensuite indiqué que la Loi de 2006 sur l’égalité en termes de handicap comporte trois parties : un amendement à la Loi sur l’emploi des personnes handicapées, qui englobe des dispositions relatives à la discrimination au travail ; la Loi fédérale sur l’égalité en termes de handicap, qui règlemente l’interdiction de la discrimination dans la vie quotidienne ; et un amendement à la Loi fédérale sur le handicap, qui instaure un médiateur (ombudsman) sur le handicap. Avec ce corpus législatif, l’Autriche est allée bien au-delà des obligations qui sont les siennes en vertu de la Directive cadre de l’Union européenne pour l’égalité de traitement dans l’emploi, puisque l’ensemble de ces textes législatifs autrichiens renvoie non seulement à la protection contre la discrimination dans le domaine du travail mais aussi à la protection contre toute forme de discrimination dans la vie quotidienne, en particulier pour ce qui est des biens et services offerts au public.

La Loi sur l’égalité en termes de handicap prévoit une procédure de conciliation obligatoire au niveau du Bureau social fédéral, laquelle constitue une alternative aux procédures juridiques, a poursuivi M. Tichy, faisant valoir que cette procédure de conciliation s’est avérée fructueuse puisque, depuis 2006, un total de 1300 procédures ont été engagées avec un taux de règlement atteignant 47%, le taux de règlement atteignant même les deux tiers pour les procédures engagées relativement à des problèmes de barrières dans divers domaines de la vie (c’est-à-dire à des problèmes d’accessibilité).

Reconnaissant que l’égale participation dans le secteur de l’éducation est essentielle pour une participation égale dans la vie de la société, M. Tichy a insisté sur l’importance que revêt l’accès des personnes handicapées à une éducation inclusive et a fait valoir que l’éducation constitue précisément un des domaines prioritaires du Plan national d’action sur le handicap.

Passer du paradigme présidant au système de tutelle à un système de soutien visant à permettre aux personnes handicapées à prendre leur propre décision sera une œuvre de longue haleine, a souligné M. Tichy, précisant notamment qu’il devrait dans ce contexte être dûment tenu compte de la situation des personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial.

M. Tichy a ensuite souligné que dans le cadre du Programme national relatif au marché du travail pour les personnes handicapées (2014-2017), un projet-pilote allait être mené dans le but d’instaurer un environnement de travail inclusif pour les personnes souffrant de handicaps sévères. M. Tichy a enfin rappelé qu’une prestation sociale existe en Autriche depuis une vingtaine d’années qui, sous forme de soutien financier, permet aux personnes handicapées et aux personnes ayant besoin de soins de vivre de manière aussi indépendante que possible ; environ 400 000 personnes, soit 5% de la population autrichienne, perçoivent cette prestation, a-t-il précisé.

Déclarations du mécanisme national de surveillance de la mise en œuvre de la Convention et du Médiateur de l’Autriche

Une représentante du Comité fédéral de surveillance de la mise en œuvre de la Convention en Autriche a déclaré que nombre de mesures ont été prises par le pays depuis son accession à la Convention. Néanmoins, a-t-elle ajouté, de nombreuses difficultés persistent et les personnes handicapées restent confrontées à bon nombre d’obstacles. En effet, nombre de mesures restent à un stade embryonnaire du point de vue de leur application et les Länder restent lents à inclure dans leurs politiques au niveau local les dispositions de la Convention, a-t-elle précisé. La représentante a notamment attiré l’attention sur l’absence de respect des personnes handicapées dans le cadre médical.

La sensibilisation du public reste la pierre angulaire des mesures que doit prendre le Gouvernement et l’éducation reste essentielle, les personnes handicapées devant pouvoir aller dans les écoles ordinaires, a poursuivi la représentante. Elle s’est dite préoccupée par le manque de volonté politique et de ressources pour améliorer cette question de l’inclusion des personnes handicapées en milieu scolaire. Quant à la participation des personnes handicapées, elle dépend elle aussi de l’apprentissage, a-t-elle souligné.

Un représentant du Bureau du Médiateur de l’Autriche a rappelé que depuis 1979, le Médiateur est une institution auxiliaire du Parlement mais n’en est pas moins indépendant dans ses fonctions. Depuis 2008, son mandat a été élargi à la promotion et la protection des droits de l'homme, a-t-il précisé, faisant valoir que le Médiateur peut entreprendre à tout moment des visites inopinées dans des centres d’accueil pour personnes handicapées. Au 20 août 2013, 87 visites ont été menées, notamment dans 37 hôpitaux psychiatriques, a-t-il précisé. Dans certains cas, ont été décelés des problèmes de mauvaise administration et des conditions déplorables qui posent des problèmes dans le contexte des droits de l'homme, a précisé le représentant du Bureau du Médiateur ; il s’agit notamment de comportements autoritaires, d’un manque de respect à l’égard des personnes handicapées, ou encore du recours à des médicaments ou à des mesures de restriction (contrainte) mécaniques (tels que des lits où sont attachés les individus).

Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

Le rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Autriche, M. RONALD MC CALLUM, a remercié l’Autriche pour avoir présenté ce rapport initial dans les délais impartis. Il a félicité le pays pour son Plan national d’action pour les personnes handicapées pour les années 2012-2020, soulignant que les plans d’action nationaux constituent d’excellents outils pour harmoniser les lois et politiques nationales avec les dispositions de la Convention. Le Plan national d’action est certes un bon début, a déclaré M. McCallum, avant de s’inquiéter que les Länder ne semblent pas avoir beaucoup contribué à l’élaboration de ce Plan. Ainsi, les lois sont-elles inutilement fragmentées, tout comme le sont les politiques relatives aux personnes handicapées ; il faut donc espérer que se développera une coopération entre le Gouvernement fédéral et les neuf Länder que compte le pays, a insisté M. McCallum.

C’est surtout l’approche médicale qui domine dans les lois appliquées au niveau local s’agissant des personnes handicapées, a fait observer le rapporteur, avant de préconiser une meilleure prise en compte de l’approche sociale prônée par la Convention. L’Autriche dispose de lois contre la discrimination mais elles ne sont pas assez strictes et celle sur l’égalité des personnes handicapées ne prévoit qu’une forme de réparation, à savoir la réparation pécuniaire, sans garantir que la discrimination diminue effectivement, a par ailleurs souligné M. McCallum.

Pour ce qui est de l’accessibilité des bâtiments, des transports et de la formation, la situation s’est beaucoup améliorée, mais il faudrait davantage de coordination entre les différents niveaux de pouvoir, a poursuivi M. McCallum. Il semble que l’éducation inclusive ne soit pas totalement acceptée en Autriche ; le nombre d’enfants scolarisés dans des écoles spécialisées semble être en hausse, a-t-il en effet déploré.

Pour ce qui est des questions d’emploi, seules 22,9% des entreprises respectent la législation relative aux quotas d’employés handicapés, les autres se contentant de payer un impôt supplémentaire (pour non-respect dudit quota), a par ailleurs fait observer le rapporteur.

Davantage de mesures devraient en outre être prises par l’Autriche pour dé-institutionnaliser les personnes handicapées et les laisser libres de choisir où elles souhaitent habiter, a poursuivi M. McCallum. Il semble qu’en 2012, près de 55 000 Autrichiens étaient soumis à une tutelle sur tous les aspects de leur vie ; peut-être cela est-il dû au caractère obsolète et non conforme à la Convention de la législation sur la tutelle, a ajouté le rapporteur.

La violence, y compris sexuelle, à l’égard des personnes handicapées semble être endémique dans un nombre trop élevé de pays ; il faut faire davantage pour mettre un terme à ce type de comportements, a en outre rappelé M. McCallum. Il a également rappelé que le droit de vote est garanti aux personnes handicapées par l’article 29 de la Convention ; or, le nombre d’urnes accessibles à ces personnes est beaucoup trop restreint en Autriche, a-t-il regretté.

Il semblerait que la fragmentation entre le niveau fédéral et celui des Länder soit le principal problème en Autriche au regard de la mise en œuvre de la Convention; les Länder étant en quelque sorte les fournisseurs de services, il est étonnant qu’ils n’aient été que peu impliqués dans le Plan national d’action, a affirmé le rapporteur, avant d’insister sur la nécessité d’une meilleure coopération entre ces deux niveaux de gouvernement.

Une autre experte du Comité a souhaité en savoir davantage sur le nombre d’affaires intéressant le handicap qui ont été réglées par la justice et sur la nature des règlements y afférents.

La traduction de la Convention en langue allemande suscite de fortes critiques car elle n’a pas été effectuée en coopération avec les organisations de personnes handicapées et emploie le terme d’« intégration » au lieu de celui d’ « inclusion », a pour sa part relevé une experte. Cette experte s’est dite inquiète face à la situation des femmes et filles handicapées en Autriche, qui ne seraient pas suffisamment protégées contre la violence sexuelle et les abus, ni contre la discrimination fondée sur le sexe et le handicap en matière d’emploi.

Un expert s’est enquis de ce que prévoit la loi autrichienne en faveur de la protection des personnes âgées handicapées.

Une autre experte a déploré le manque d’informations sur la situation des personnes handicapées appartenant à des minorités ethniques en Autriche. Comment l’Etat garantit-il que ces personnes ont accès aux droits et services en matière d’éducation, de santé et d’emploi, a-t-elle demandé ?

Plusieurs experts se sont ainsi enquis de la manière dont l’Autriche prend à bras le corps les problèmes de discriminations multiples dont peuvent faire l’objet les personnes handicapées.

Un expert a souhaité savoir si une personne handicapée qui choisit de vivre de manière indépendante et autonome peut vivre où elle le souhaite ou bien si elle doit vivre près de là où les services sont offerts. Cet expert s’est ensuite enquis des mesures prises pour assurer que les personnes souffrant de handicaps psychosociaux se voient garantir leur droit au consentement libre et éclairé concernant toutes les questions les concernant.

L’Autriche dispose de nombreuses institutions spécialisées pour personnes handicapées, ce qui témoigne du choix du pays de privilégier l’approche médicale de la question du handicap, a fait observer une experte, déplorant que le pays dépense dix fois plus d’argent pour ces institutions que pour les programmes visant à assurer l’autonomie de vie des personnes handicapées.

Les enfants handicapés sont-ils tous enregistrés à la naissance ou certains restent-ils dans une situation de flou juridique quant à leur statut, a demandé un expert ?

Les mesures visant à assurer la mobilité - et l’accessibilité – des personnes handicapées sont-elles prises et appliquées de manière uniforme sur l’ensemble du territoire autrichien, y compris dans les zones rurales, ou bien touchent-elles principalement la région de la capitale, Vienne, a demandé un expert ?

Une experte s’est enquise des lois existantes en Autriche contre les mesures de contrainte physique telles que le placement en isolement. Qu’en est-il de la législation existant en Autriche contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants, a demandé cette experte ?

Réponses de la délégation

S’agissant du texte allemand de la Convention tel que traduit en Autriche, la délégation a indiqué avoir pris bonne note des préoccupations exprimées par les membres du Comité à ce sujet.

La délégation a ensuite indiqué que la décision d’assurer une traduction des débats parlementaires en langage des signes est une décision permanente qui a été prise par la plénière du Parlement ; cela ne concerne pas seulement les députés mais aussi le public puisque les délibérations du Parlement sont suivies par le public et par les médias, a-t-elle souligné.

En ce qui concerne la définition du handicap, la délégation a rappelé que jusqu’à il y a trois ans, la pratique de l’Autriche consistait à se fonder sur les connaissances passées, ce qui impliquait une approche effectivement très médicale du handicap. Depuis trois ans, a-t-elle fait valoir, l’approche retenue par le pays se fonde sur une ordonnance parlementaire qui tient beaucoup plus compte de l’approche sociale. Ainsi, a-t-on convenu de travailler à l’élaboration d’une définition beaucoup plus conforme aux vœux des organisations de personnes handicapées et aux dispositions de la Convention, en tenant dûment compte des aspects sociaux du handicap, a insisté la délégation. D’une manière générale, a-t-elle ajouté, l’Autriche a souhaité que son système juridique ne perde pas de vue l’objectif de la loi et a donc opté pour une approche en vertu de laquelle la définition du handicap doit rester basée sur les objectifs de chaque loi considérée.

L’Autriche est en train de préparer avec le Conseil de l’Europe une grande campagne de sensibilisation sur la question des droits de l'homme et du handicap, a par ailleurs fait valoir la délégation. En 2016, a-t-elle ajouté, sera lancée, avec les organisations concernées et avec les Länder, une campagne d’information axée sur l’édification d’une société inclusive.

Il n’y a pas de types de lois parallèles, a par ailleurs assuré la délégation, soulignant que la coopération entre le niveau fédéral et les Länder allait aller en s’améliorant. Les Länder ont été invités à mettre au point leurs propres plans d’action en matière de handicap, mais à ce stade, seule la Styrie en a élaboré un, a ajouté la délégation, ce qui n’empêche pas tel ou tel Land d’avoir pris telle ou telle mesure, notamment en matière d’éducation inclusive. Les Länder autrichiens sont bien entendus liés par les conventions ratifiées au niveau fédéral, a souligné la délégation.

La délégation a indiqué ne pas être en mesure de fournir de données statistiques ventilées concernant les affaires judiciaires impliquant des personnes handicapées, car les tribunaux n’ont pas le droit de divulguer le statut des personnes, ce qui ne permet pas de savoir si une plainte concerne ou non une personne en situation de handicap.

Il est vrai que jusqu’à présent, le seul moyen de réparation prévu par la loi reste l’indemnisation, même si d’autres mesures telles que l’amélioration des conditions de travail peuvent être prises, a reconnu la délégation.

En ce qui concerne les discriminations multiples dont peuvent faire l’objet des personnes handicapées, la délégation a indiqué que c’est le Bureau des affaires sociales du Ministère des affaires sociales qui en est saisi, car le personnel de ce Bureau est constitué d’experts qui sont particulièrement à même de veiller à ce qu’il soit répondu aux besoins des personnes handicapées. En cas de discriminations multiples, l’indemnisation versée est accrue, a fait valoir la délégation.

Pour ce qui est du droit à la vie, la délégation a indiqué que la question de l’avortement – qui est effectivement possible plus longtemps après la fécondation si on craint de graves dommages pour l’intégrité physique de l’enfant à naître – a fait l’objet d’un vaste débat national ; il a été suggéré que ce débat se poursuive de manière approfondie durant la période 2012-2016.

En ce qui concerne l’enregistrement des naissances, la délégation a souligné qu’en Autriche tout enfant doit être déclaré et enregistré dans un délai de trois jours après sa naissance, cette règle ne souffrant aucune exception.

Pour ce qui est de l’aide humanitaire, la délégation a indiqué que la politique suivie par l’Agence de développement autrichienne tient compte des besoins spécifiques et de la situation de vulnérabilité particulière qui sont ceux des personnes handicapées dans les situations d’urgence.

S’agissant des questions liées à la prévention de la torture, la délégation a indiqué que depuis le 1er juillet 2012, le Médiateur autrichien a l’obligation en tant qu’autorité indépendante d’intervenir dans le cadre des mécanismes de prévention de la torture ; il peut se rendre dans les institutions et suivre les différents programmes, ce qui est très important aux fins d’une meilleure socialisation des personnes handicapées. Plus de 400 contrôles ont ainsi été effectués, a précisé la délégation ; mais le principal objectif du Médiateur reste de faire prendre conscience de l’importance des questions d’intégration des personnes handicapées, a souligné la délégation.

Un certain nombre de plaintes qui ont été soumises au Bureau du Médiateur ont trait au manque de contact entre le tuteur et la personne handicapée concernée, notamment dans le contexte de ventes d’appartement, a par ailleurs expliqué la délégation.

Le problème de la tutelle, ce n’est pas le système de représentation en tant que tel, a par ailleurs expliqué la délégation. Le système de tutelle est parfois considéré comme un moyen de compenser les lacunes institutionnelles et ce système a donc été réformé en 2006. Suite à une étude récente, il est apparu que la tutelle était indispensable dans certains cas alors que dans d’autres elle n’avait pas de raison d’être ; il a donc été décidé de mettre en place un programme destiné à aider la personne handicapée à prendre une décision éclairée, a indiqué la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que l’allocation mensuelle pour handicap va de 154 à 1654 euros et est versée à quelque 440 000 Autrichiens représentant environ 5% de la population totale. La prestation moyenne s’élève à 465 euros par mois, a précisé la délégation.

Quant au choix libre et éclairé du lieu de vie pour la personne handicapée, l’un des critères les plus importants est celui du souhait de la personne, a indiqué la délégation, ajoutant que la proximité de la famille peut être un autre facteur permettant de déterminer où la personne peut vivre. Parfois, les Länder proposent plusieurs choix de lieu de vie à la personne handicapée, a fait valoir la délégation.

Si la personne handicapée a la capacité d’agir, alors sont consentement est nécessaire pour tout traitement médical, a ensuite expliqué la délégation.

Quant à la baisse du nombre d’enfants nés en Autriche avec le syndrome de Down, on peut penser qu’il s’agit d’une simple coïncidence, les statistiques disponibles ne permettant pas de déterminer si cela peut être dû à d’autres facteurs, et notamment aux avortements, a indiqué la délégation.

L’accès sans obstacle des personnes handicapées aux transports est possible à Vienne et dans les autres grandes villes du pays, mais pas dans les zones rurales où les transports ne sont pas accessibles à tous, sauf si le déplacement est annoncé à l’avance, auquel cas les mesures adéquates peuvent être anticipées, a indiqué la délégation. Les Länder ont conscience de ce problème, a-t-elle insisté.

S’agissant des violences à l’encontre des enfants handicapés, la délégation a indiqué que les autorités autrichiennes ont l’intention de procéder régulièrement à des enquêtes et évaluations auprès des familles telles que celles qu’il a menées récemment. A en outre été désigné un médiateur pour les enfants victimes de violences ou de mauvais traitements, a fait valoir la délégation.

Les personnes handicapées ne souffrent en Autriche d’aucune exclusion des droits et devoirs électoraux, a en outre assuré la délégation. C’est aux partis politiques qu’il appartient de décider de la composition de leurs listes de candidats et l’Etat n’a pas à intervenir dans ce processus, a-t-elle par ailleurs indiqué.

Si un enfant se trouve sur le sol autrichien à titre temporaire, il n’est pas soumis à l’obligation scolaire ; en revanche, à partir d’un certain temps, il est soumis à cette obligation, a expliqué la délégation, précisant que les mesures adéquates sont prises pour assurer la scolarisation de cet enfant lorsqu’il s’agit d’un enfant handicapé.

L’Autriche a modifié la loi de 2005 sur les universités de manière à y introduire l’éducation inclusive, a par ailleurs fait valoir la délégation. Elle a en outre souligné que le Ministère de l’éducation avait adressé aux différents Länder une recommandation visant la mise en place de modèles régionaux inclusifs. Certaines dispositions de la législation fédérale constituent toujours un obstacle à l’inclusion, a toutefois reconnu la délégation, évoquant notamment la Loi sur la scolarité, qui n’autorise pas les parents à décider s’ils veulent envoyer leur enfant dans une école normale ou dans une école spécialisée.



Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CRPD13/008F