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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA AU TITRE DU PROTOCOLE SUR L'EXPLOITATION DES ENFANTS

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné cet après-midi le rapport initial présenté par la République de Moldova sur les mesures prises par ce pays en application des dispositions du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Présentant ce rapport, M. Eugeniu Moraru, Directeur du Centre de lutte contre la cybercriminalité de l'Inspection générale de la Police du Ministère moldove de l'intérieur, a attiré l'attention sur la Stratégie pour la protection de l'enfant et de la famille (2013-2020), dont l'un des objectifs est de prévenir et combattre la violence, les négligences et l'exploitation à l'encontre des enfants. Il a par ailleurs souligné qu'une Loi sur la protection spéciale des enfants à risques et des enfants séparés de leurs parents a été adoptée cette année. La République de Moldova a ratifié en 2011 la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et la violence sexuelles et a rejoint en décembre 2012 l'Alliance mondiale contre les abus sexuels commis contre des enfants via internet, a poursuivi M. Moraru. La législation sanctionne les violences à l'encontre des enfants, qu'il s'agisse de viol commis intentionnellement sur un mineur ou d'autres actes violents de nature sexuelle, ainsi que le trafic d'enfant et le recours à la prostitution d'un enfant, notamment.

La délégation moldove était également composée du Représentant permanent de la République de Moldova auprès des Nations Unies à Genève, M. Victor Moraru, et d'autres fonctionnaires de du Ministère des affaires étrangères, ainsi que de représentants du Ministère de l'intérieur; du Ministère du travail, de la protection sociale et de la famille; et de la Commission parlementaire sur les droits de l'homme et les relations interethniques. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant notamment de la coopération entre la police et la société civile; de la lutte contre la production et la diffusion de matériels pédopornographiques; du projet de Stratégie nationale pour la protection de l'enfant et de la famille; des questions d'adoption; de la lutte contre le tourisme sexuel; ou encore des mesures applicables à un citoyen moldove ayant commis un crime à l'étranger.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la République de Moldova, Mme Renate Winter, a félicité le pays pour diverses mesures qu'il a prises aux fins de la mise en œuvre du Protocole et notamment pour avoir amendé le code pénal, adopté une loi contre la traite des êtres humains et adopté des plans nationaux visant à faciliter la mise en œuvre du Protocole. Elle s'est toutefois inquiétée qu'au vu de certaines informations, le tourisme sexuel visant les enfants semble être un problème grave dans le pays. Le corapporteur, M. Peter Guráň, s'est quant à lui inquiété d'informations faisant état d'un nombre élevé et croissant de cas de pédopornographie dans le pays.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport de la République de Moldova, qui seront rendues publiques à l'issue de la session, dont les travaux se terminent le vendredi 4 octobre prochain.


Lors de sa prochaine séance publique, vendredi 20 septembre dès 9h30, le Comité examinera le rapport initial des Tuvalu (CRC/C/TUV/1) en salle XVI du Palais des Nations, par visioconférence.



Présentation du rapport

Présentant le rapport initial de la République de Moldova au titre du Protocole facultatif concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/MDA/1), M. Eugeniu Moraru, Directeur du Centre de lutte contre la cybercriminalité de l'Inspection générale de la Police du Ministère moldove de l'intérieur, a assuré que son pays était fermement engagé à assurer la réalisation des droits de l'enfant, notamment au moyen de la Stratégie de réforme de la justice pour les années 2011-2016.

Les recommandations que le Comité a adressées au pays à l'issue de l'examen de ses deuxième et troisième rapports périodiques soumis au titre de la Convention ont été dûment prises en compte dans le cadre de l'élaboration de la première Stratégie pour la protection de l'enfant et de la famille (2013-2020), a-t-il par ailleurs souligné, précisant que la République de Moldova rendrait compte des progrès ainsi réalisés dans le prochain rapport qu'elle soumettra au titre de la Convention et qui est attendu pour 2015. Il a indiqué que cette Stratégie pour la protection de l'enfant et de la famille vise à assurer les conditions nécessaires pour l'éducation des enfants dans l'environnement familial (prévention de la séparation entre l'enfant et sa famille; réforme du système de soins de substitution; réduction des effets négatifs de la migration des parents pour les enfants restés au pays); à prévenir et combattre la violence, les négligences et l'exploitation à l'encontre des enfants; et à réconcilier vie familiale et professionnelle afin d'assurer un environnement harmonieux pour le développement de l'enfant. M. Moraru a par ailleurs souligné qu'une Loi sur la protection spéciale des enfants à risques et des enfants séparés de leurs parents a été adoptée cette année.

La République de Moldova a ratifié en 2011 la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et la violence sexuelles (Convention de Lanzarote) et a rejoint en décembre 2012 l'Alliance mondiale contre les abus sexuels commis contre des enfants via internet (Global Alliance Against Online Child Sexual Abuse).

La législation actuellement en vigueur en République de Moldova sanctionne les comportements agressifs (violences) à l'encontre des enfants, qu'il s'agisse de viol commis intentionnellement sur un mineur ou d'autres actes violents de nature sexuelle, a d'autre part assuré le Directeur du Centre de lutte contre la cybercriminalité. Par ailleurs, le trafic d'enfant, en tant que délit, est punissable conformément à l'article 206 du code pénal. En vertu de la Loi n°43 du 22 mars 2013, il est interdit de recourir au pardon, à l'amnistie ou à la réconciliation pour les personnes ayant commis un délit à l'encontre d'un mineur, a en outre indiqué M. Moraru. Il a ajouté que la Loi n°73 du 12 avril 2012 a pénalisé, entre autres, le recours à la prostitution d'un enfant (article 208 du code pénal). Le code de procédure pénale prévoit le lancement de poursuites pénales dans tous les cas où il y a une forte suspicion de violence à l'encontre d'un enfant, a-t-il précisé. En outre, le code de procédure pénale prévoit des arrangements spéciaux (espace distinct, matériel d'enregistrement audio et vidéo, présence d'un pédagogue) pour l'audition d'enfants âgés de moins de 14 ans dans les affaires pénales relatives à des crimes à caractère sexuel, à des cas de trafic d'enfants ou à des cas de violence domestique. Afin d'éviter une nouvelle victimisation de l'enfant, le mineur n'est pas tenu de participer à la confrontation avec la personne accusée du délit contre son intégrité physique et/ou morale, a en outre fait valoir M. Moraru.

Le chef de la délégation moldove a par ailleurs attiré l'attention sur les efforts déployés par les autorités afin d'accroître la sensibilisation du public de manière à réduire la demande en vente d'enfants, prostitution des enfants et pornographie mettant en scène des enfants. Il a ensuite rappelé la création, cette année, du Centre de lutte contre la cybercriminalité qu'il dirige et dont l'objectif est de combattre les crimes de violence sexuelle contre les enfants via Internet et de fournir des informations à ce sujet. La coopération dans ce domaine avec la société civile est particulièrement importante, a-t-il ajouté.

En tant que membre du Conseil des droits de l'homme et d'autres organes de droits de l'homme, la République de Moldova continuera de plaider en faveur de la protection et de la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à servir l'intérêt supérieur de l'enfant, a conclu M. Moraru.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME RENATE WINTER, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la République de Moldova, a félicité le pays pour diverses mesures qu'il a prises aux fins de la mise en œuvre du Protocole et notamment pour avoir amendé le code pénal, adopté une loi contre la traite des êtres humains et adopté des plans nationaux visant à faciliter la mise en œuvre du Protocole. Elle a également salué la création du Centre de lutte contre la cybercriminalité.

Mme Winter a toutefois constaté qu'au vu de certaines informations, le tourisme sexuel visant les enfants semble être un gros problème en République de Moldova et a demandé si la délégation disposait de statistiques en la matière et si elle pouvait fournir des informations sur les mesures prises par les autorités pour lutter contre cette forme d'exploitation sexuelle des enfants.

Toutes les infractions visées par le Protocole – y compris le transfert d'organes, le travail forcé et la prédation d'enfants via Internet à des fins d'exploitation sexuelle – sont-elles dûment traitées par le code pénal, a par ailleurs demandé la rapporteuse?

Qu'en est-il des possibilités d'extradition vers un pays tiers de citoyens moldoves y ayant commis un crime relevant du Protocole, a en outre demandé Mme Winter?

M. PETER GURÁŇ, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport moldove, s'est inquiété d'informations faisant état d'un nombre élevé et croissant de cas de pédopornographie dans le pays et a relevé que les chiffres venant à l'appui de ces informations ne correspondent pas à ceux fournis dans le rapport; aussi, a-t-il souhaité en savoir davantage au sujet des méthodes employées par les autorités en matière de collecte de données.

M. Guráň a ensuite souhaité en savoir davantage au sujet des services offerts aux victimes qui reviennent de pays tiers européens.

Un autre membre du Comité a demandé quelles mesures sont prises pour s'assurer qu'une adoption n'est autorisée qu'en tenant compte de l'intérêt supérieur de l'enfant et que l'enfant adopté ne sera pas utilisé à des fins d'exploitation sexuelle. L'experte a aussi demandé quel contrôle est exercé après le placement d'un enfant, ajoutant que la Convention de La Haye sur les adoptions internationales ne prévoit pas un tel contrôle.

Tous les enfants de moins de 18 ans sont-ils protégés par le droit pénal moldove pour toutes les infractions visées par le Protocole, a demandé un expert, relevant que le droit pénal du pays prévoit une peine d'emprisonnement pour les personnes reconnues coupables d'«actes pervers» à l'encontre de victimes de moins de 16 ans?

Quelles ont été les leçons tirées par les autorités moldoves de la découverte d'un réseau pédophile de Chisinau, a demandé un autre membre du Comité? Quelles mesures ont-elles été prises à l'encontre des agences de voyage dont il a été prouvé qu'elles ont participé au commerce sexuel des enfants à destination des touristes, a-t-il également été demandé?

Réponses de la délégation

La délégation moldove a indiqué que la République de Moldova a créé il y a plusieurs années maintenant un Conseil national de protection des droits de l'enfant, qui est un organe stratégique par le biais duquel sont adoptées les politiques applicables aux droits de l'enfant et de la famille. La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur la création d'un groupe de travail interinstitutionnel - conformément à l'article 12 du Protocole – qui œuvre en étroite collaboration avec le Conseil national ainsi qu'avec la Commission nationale chargée de l'élaboration des rapports initiaux et périodiques dus aux organes de traités internationaux.

En 2013, a par ailleurs indiqué la délégation, une loi a été adoptée sur la protection spéciale des enfants à risques et des enfants de parents divorcés qui prévoit le placement provisoire dans un centre temporaire pour les enfants ayant été victimes de violence; ces enfants peuvent également être placés dans des familles d'accueil.

La République de Moldova a désormais commencé à combattre de manière très active la production et la diffusion de matériels pédopornographiques, a d'autre part souligné la délégation, précisant qu'il y a eu jusqu'ici une seule affaire relevant de ce délit.

La délégation a ensuite attiré l'attention sur la coopération entre la police et la société civile, évoquant en particulier le mémorandum de coopération signé entre la police et le centre La Strada, ce centre ayant notamment mis à disposition une ligne d'appel d'urgence pour traiter des plaintes, étant entendu que la police ne peut à elle seule traiter de tous les types de plaintes.

Le projet de stratégie nationale pour la protection de l'enfant et de la famille n'a pas encore été adopté à ce stade mais il est envisagé de la faire prochainement aboutir et adopter par le Parlement, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation a ensuite exposé les différentes dispositions législatives prévoyant la poursuite et de la sanction des délits visés par le Protocole, y compris le fait d'attirer des enfants via Internet, c'est-à-dire la manipulation psychologique à des fins d'exploitation sexuelle.

Après les affaires de tourisme sexuel impliquant des enfants qu'a connues le pays, des amendements ont été apportés à la législation pénale, a par ailleurs souligné la délégation. La République de Moldova a ratifié la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale de 1959 et a passé un certain nombre d'accords bilatéraux dans la région, notamment avec des pays de la Communauté d'États indépendants (CEI), a-t-elle par ailleurs fait valoir.

Un citoyen moldove ayant commis un crime à l'étranger ne saurait être extradé dans toutes les situations; quoi qu'il en soit, si les autorités moldoves ont connaissance d'un crime commis par un ressortissant moldove à l'étranger, elles ouvriront une enquête, qu'il y ait plainte ou non.

La délégation a par ailleurs fait état d'un cas d'implication d'une entreprise touristique dans la traite de personnes, mais pas nécessairement d'enfants.

S'agissant des questions d'adoption, la délégation a indiqué que le Ministère du travail et des affaires sociales dispose d'une base de données nationale sur les enfants adoptés/adoptables ainsi que sur les citoyens moldoves qui souhaitent adopter un enfant. Conformément à la législation applicable en matière d'adoption, les organisations internationales actives en la matière doivent passer par une procédure d'accréditation en République de Moldova avant de pouvoir s'occuper d'adoption internationale dans ce pays.

S'agissant de la procédure applicable aux témoignages d'enfants, la délégation a notamment indiqué que lors de l'entretien, le représentant légal de l'enfant est présent, qu'il s'agisse de son parent, de son parent adoptif ou de son tuteur.

Toutes les lois moldoves applicables aux enfants mentionnent que l'enfant est compris comme toute personne ayant moins de 18 ans, a souligné la délégation.


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