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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DES COMORES

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport des Comores sur les mesures prises par ce pays en application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant ce rapport, M. Sultan Chouzour, Représentant permanent des Comores auprès des Nations Unies à Genève, a notamment expliqué les influences historiques et culturelles qu'a connues son pays, rappelant qu'il s'agit d'un pays musulman sunnite qui appartient culturellement au monde bantou et qui a été colonisé par la France au XIXe siècle. Il a souligné que ces trois influences sont sources de beaucoup de difficultés, car l'islam a des origines patrilinéaires et patriarcales alors que les Comores, par leur origine bantoue, sont matrilinéaires et matriarcales. S'agissant de la place de la femme dans ce contexte, M. Chouzour a souligné que beaucoup d'adaptations ont eu lieu. Il a notamment expliqué que, si en droit musulman, le garçon hérite du double de la part de la fille, la tradition comorienne veut que tout ce qui est bien immobilier et terrain ne peut être hérité que par les femmes.

M. Chouzour, regrettant que sa délégation n'ait pas été en mesure d'intégrer des membres de niveau ministériel comme initialement prévu, a apporté des réponses aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, de l'application du principe d'égalité et des mesures temporaires spéciales; de l'influence du droit coutumier; de la violence contre les femmes; de la situation s'agissant de la traite d'enfants; des conditions d'acquisition de la nationalité; des questions d'éducation et de santé; de la situation de l'emploi et du rôle du syndicalisme; de l'attitude du Gouvernement s'agissant de Mayotte, restée territoire français; ou encore de l'accès à la terre. Il a notamment expliqué que des jeunes reviennent aux Comores après des séjours à l'étranger où ils ont fait leurs études et où la tradition islamique est différente, apportant aux Comores des règles et des principes qui n'existaient pas auparavant dans le pays. Ainsi, ces jeunes considèrent que la dimension mystique de l'islam propre au rite chaféite des Comores n'a pas sa place et «veulent en revenir à l'islam du VIIe siècle», a déclaré le représentant. Il a par ailleurs indiqué qu'une loi portant création d'une commission nationale des droits de l'homme vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale comorienne.

Plusieurs expertes du Comité ont salué les progrès réalisés par les Comores. Néanmoins, il existe aux Comores des discriminations à l'égard des femmes en dépit de la dominante matriarcale, a-t-il été relevé, ce dont témoigne notamment le phénomène important de violence contre les femmes. Elles ont également souligné que les Comores sont un pays d'origine de la traite d'enfants aux fins de l'exploitation sexuelle et du travail forcé. Il a par ailleurs été relevé qu'il n'y a qu'une seule femme siégeant au Parlement comorien et aucune au Gouvernement.

Le Comité adoptera en séance privée des observations finales sur le rapport des Comores, lesquelles seront rendues publiques après la clôture de la session, le vendredi 19 octobre prochain.


Demain, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport du Turkménistan (CEDAW/C/TKM/3-4).
Présentation du rapport des Comores

Présentant le rapport des Comores (CEDAW/C/COM/1-4), M. SULTAN CHOUZOUR, Représentant permanent des Comores auprès des Nations Unies à Genève, a regretté que sa délégation n'ait pas été en mesure d'intégrer des membres de niveau ministériel comme initialement prévu. Il a toutefois souligné que le présent dialogue avec le Comité fournira aux autorités comoriennes l'occasion de connaître les inquiétudes, les appréhensions, mais aussi les recommandations du Comité pour permettre aux Comores de se préparer aux prochaines échéances.

Les Comores sont un pays musulman sunnite de rite chaféite, c'est-à-dire un islam influencé par la mystique musulmane, qui a évolué aujourd'hui par le biais de confréries qui, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, ne jouent pas de rôle politique significatif, a poursuivi le Représentant permanent. Les Comores appartiennent culturellement au monde bantou: leur langue, leurs mœurs, leurs traditions reflètent cette réalité. Le représentant a également rappelé que la France a colonisé les Comores au XIXe siècle. Or, ces trois influences sont sources de beaucoup de difficultés, car l'islam est né dans un contexte social patrilinéaire et patriarcal alors que les Comores, par leur origine bantoue, sont matrilinéaires et matriarcales.

S'agissant de la place de la femme dans ce contexte, M. Chouzour a souligné que beaucoup d'adaptations ont eu lieu. Il a notamment souligné que, si en droit musulman, le garçon hérite le double de la part de la fille – ce qui était déjà une amélioration au temps du Prophète -, aux Comores, par tradition, tout ce qui est bien immobilier et terrain à bâtir ne peut être hérité que par les femmes. D'autre part, dans la tradition comorienne, les parents doivent construire une maison pour leur fille et le mari doit aller vivre chez son épouse. Le représentant a en outre attiré l'attention sur la place importante qu'occupent les femmes dans le commerce aux Comores. Il a enfin souligné que la situation de la femme comorienne s'inscrit dans un contexte international qui requiert de lutter contre toute forme de discrimination à l'égard de la femme et ce, dans une société qui évolue très lentement et très difficilement car c'est une société traditionnelle.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Une experte du Comité s'est félicitée que les Comores aient ratifié la Convention sans émettre aucune réserve à l'égard de ses dispositions. Elle a souhaité savoir si la Convention a été traduite dans les langues locales et comment ses principes sont transposés dans les différentes lois en vigueur dans le pays. Lors de l'Examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme, les Comores se sont engagées à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, a rappelé l'experte, qui a souhaité connaître le calendrier prévu à cette fin.

Une autre experte s'est félicitée qu'après une vingtaine d'années, le Comité puisse enfin tenir ce dialogue avec les Comores. Elle a aussi jugé très importants les progrès indiqués dans le rapport. Elle a souhaité savoir où en est le processus d'harmonisation législative avec les dispositions de la Convention qui a fait l'objet d'une étude par les autorités comoriennes en 2007. Les Comores disposent-elles d'un médiateur ou défenseur du peuple et est-il envisagé de mettre en place une commission nationale des droits de l'homme, a en outre demandé l'experte? Il existe aux Comores des discriminations à l'égard des femmes, en dépit de la dominante matriarcale, a-t-elle poursuivi, attirant l'attention en particulier sur la violence contre les femmes. Les femmes ont certes accès à la justice aux Comores, mais existe-t-il également des instances coutumières, religieuses et traditionnelles auxquelles les femmes puissent avoir accès pour faire valoir leurs droits?

Une experte a relevé que selon le rapport présenté par les Comores, la seule mesure temporaire spéciale qui ait été prise par le pays porte sur le domaine de l'éducation et a trait à la suppression des frais d'inscription pour les filles au niveau du primaire; or, il ne s'agit pas là, à proprement parler, d'une mesure temporaire spéciale - d'autant que cette mesure est également appliquée aux garçons dans deux des trois îles du pays, a fait observer l'experte. Elle s'est demandé si les Comores comprennent l'obligation à laquelle elles ont souscrit de prendre des mesures temporaires spéciales afin de parvenir à une égalité de facto entre hommes et femmes. Pour ce qui est de la participation des femmes à la vie politique, il n'y a aux Comores qu'une seule femme siégeant au Parlement et aucune ne fait partie du Gouvernement; dans ce contexte, on peut se demander pourquoi les Comores n'ont pas davantage recours aux mesures temporaires spéciales.

Aux Comores comme ailleurs, la violence contre les femmes se développe, a également fait observer une experte, qui a voulu savoir si les autorités comoriennes ont l'intention de se doter d'une loi interdisant cette violence, notamment au sein du foyer. Il faut veiller à ce qu'il y ait coopération et coordination entre tous les organes impliqués dans la lutte contre ces violences, a souligné une autre experte, qui a voulu savoir si le Gouvernement faisait un effort de sensibilisation dans ce domaine.

Une experte a fait état d'informations selon lesquelles les Comores sont un pays source de la traite d'enfants aux fins de l'exploitation sexuelle et du travail forcé. Aussi, a-t-elle demandé si le Gouvernement a pris des mesures de sensibilisation du public à cette problématique et de formation de la police à l'identification des victimes de la traite. L'experte a en outre relevé que les Comores n'ont pas ratifié le Protocole de Palerme contre le trafic illicite de migrants.

Une autre experte s'est enquise des conditions d'acquisition de la nationalité comorienne et des facilités offertes à cette fin à certains étrangers, eu égard aux liens particuliers qui unissent par exemple les Comores et la Tanzanie, plus particulièrement Zanzibar.

S'agissant des questions d'éducation, une experte s'est inquiétée que 31% - dont 55% de filles - des enfants âgés de 6 à 14 ans ne sont pas inscrits dans le système scolaire. Le grand problème en matière d'éducation aux Comores est celui de l'abandon scolaire, qui touche davantage les filles que les garçons lors du passage du primaire au secondaire, a-t-elle ajouté. Quels sont les obstacles qui empêchent les filles de rester à l'école, a-t-elle demandé? Aux Comores, 64,8% des femmes et des filles sont analphabètes, s'est-elle en outre alarmée.

Une experte a constaté que les programmes de santé génésique sont inadéquats et déploré l'absence de programme de planification familiale aux Comores. Le taux de mortalité maternelle semble élevé, a-t-elle en outre relevé.

Les mariages sont rarement enregistrés dans le registre d'état civil, a fait observer une experte. Elle a ajouté que le Code de la famille n'est pas conforme aux dispositions de la Convention dans nombre de domaines importants. Une autre experte s'est inquiétée des inégalités existantes au sein du mariage.

Des questions ont par ailleurs porté sur l'attitude des Comores à l'égard de Mayotte, reté territoire français, une experte précisant que les résultats d'un référendum mené sur l'île ont été très largement favorables â son rattachement à la France. En outre, un problème d'état civil aux Comores rendait très difficile de résoudre les problèmes de migration, a tenu à préciser cette experte.

Réponses de la délégation

Le Représentant permanent des Comores a indiqué que si on compare la situation de la femme comorienne à ce qu'elle était il y a une vingtaine ou une trentaine d'années, beaucoup de progrès ont été accomplis.

Il y a généralement conflit entre un programme antidiscrimination et le droit coutumier, a poursuivi le représentant. En droit coutumier, a-t-il précisé à titre d'exemple, en cas de violence sexuelle constatée, l'auteur des violences va devoir payer une amende qui n'est en fait pas très élevée et reste peu dissuasive. En outre, il existe dans le monde musulman «un code de l'honneur où la préservation de la dignité de la personne agressée va passer au second plan par rapport à la nécessité dans laquelle les parents croient devoir se trouver de préserver la dignité», a ajouté le représentant.

Très souvent, aux Comores, l'action de l'État se limite aux frontières de la capitale, a souligné le représentant; dès que l'on se trouve à la campagne, l'État, dans les faits, n'existe pas, a-t-il ajouté. Dans ce contexte, il faut donc avoir à l'esprit qu'entre les lois votées et leur application concrète sur le terrain, il y a souvent une marge; en effet, il n'y a pas de structures-relais dans les régions et les villages pour faire respecter les lois existantes, a expliqué le représentant. Pendant la colonisation, les Français ont appliqué aux Comores le Code napoléonien, sauf pour tout ce qui avait trait au statut personnel, qui continuait de relever du droit musulman. Or, cette situation a perduré après l'indépendance, s'agissant par exemple des questions ayant trait à la garde des enfants, au mariage ou encore à l'héritage. Lorsqu'il y a un mariage aux Comores, a poursuivi le représentant, on ne pense même pas qu'il va y avoir une autorité civile qui va intervenir; c'est le cadi (juge de juridiction islamique) qui s'occupe de tout et les familles ne pensent même pas à déclarer ce mariage.

Aux Comores, a en outre indiqué le représentant, les muftis peuvent déclarer une loi comme non applicable si elle est contraire à l'islam. Dans ce contexte, les changements historiques et les changements de mentalité vont beaucoup plus faire, pour faire évoluer les choses, que les lois que l'on pourrait adopter, a-t-il fait valoir.

La polygamie n'existe plus, a en outre déclaré le représentant.

Aux Comores, la femme hérite seule des biens immobiliers (maisons, terrains à bâtir); mais tout le reste (argent, terrain agricole…) est partagé selon le droit musulman, a indiqué le représentant.

Si la violence domestique existe aux Comores, il ne s'agit aucunement d'un phénomène social ou culturel; il s'agit d'un phénomène assez marginal, a en outre assuré le représentant.

Le représentant a ensuite indiqué que s'agissant de la violence contre les femmes, il y avait aux Comores, jusqu'à il y a peu, une omertá (loi du silence); mais si des chiffres montrent une hausse de ce type de violences, c'est très certainement dû au fait que maintenant, on ose dénoncer ces violences, a-t-il expliqué. Dans la culture comorienne, c'est extrêmement mal vu d'exercer des violences pour contraindre la femme, a souligné le représentant.

Quant à l'importance de la place accordée à la Convention dans tous ces contextes, le représentant a indiqué ne pas être certain que dans les instances juridiques, on revienne systématiquement à la Convention au moment où on fait les lois. Néanmoins, les femmes sont de plus en plus actives pour influencer les lois dans un sens ou dans un autre.

Aux Comores, des jeunes reviennent de pays où ils ont fait leurs études et où la tradition islamique est différente de la nôtre et qui veulent imposer aux Comores des règles qui n'existaient pas auparavant dans ce pays; ces jeunes, par exemple, considèrent que la dimension mystique de l'islam n'a pas sa place et veulent en revenir à l'islam du VIIe siècle, a expliqué le représentant.

Une loi portant création d'une commission nationale des droits de l'homme vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale comorienne, a en outre indiqué le représentant.

Il n'y a pas eu de traduction de la Convention en langues locales, a poursuivi le représentant, ajoutant penser qu'il n'y a pas eu non plus d'enseignement dispensé s'agissant de cet instrument. «Je ne suis pas sûr qu'il y ait de telles actions de sensibilisation à la Convention», a insisté M. Chouzour.

Le représentant a indiqué comprendre l'intervention de l'experte qui s'est interrogée sur la compréhension par les Comores du principe d'égalité. Il a toutefois fait valoir que dans certaines classes du secondaire, il y a davantage de filles que de garçons et que, d'une manière générale, les filles réussissent mieux leur scolarité que les garçons.

On peut mesurer le chemin parcouru par les Comores quand on prend conscience qu'il y a dix ans encore, c'était presque considéré comme un blasphème qu'une femme puisse être élue députée, a fait valoir le représentant, rappelant qu'aujourd'hui, les Comores disposent d'une femme députée.

Le représentant a indiqué que la prostitution est un phénomène très marginal aux Comores; on ne la trouve qu'en milieu urbain. Il a toutefois fait part de sa crainte du fait qu'il y a un appauvrissement de la population lié à la crise mondiale et que le pays connaît un exode rural – autant de facteurs qui peuvent favoriser ce phénomène de prostitution.

Le représentant comorien a assuré n'avoir pas connaissance d'informations faisant état de traite d'enfants à des fins de prostitution. Si de tels phénomènes devaient se produire ils seraient très marginaux, a-t-il insisté, ajoutant qu'il serait très étonnant que, dans une famille comorienne, des enfants puissent être dédiés à la prostitution.

Il y a eu un moment où, aux Comores, des familles pauvres rurales amenaient leurs enfants à des familles citadines dans l'idée qu'ils y seraient mieux éduqués; souvent, dans les familles d'accueil, ces enfants devenaient des personnels domestiques corvéables à merci, a expliqué le représentant. Mais après qu'un chanteur eut, dans l'une de ses chansons, attiré l'attention sur ce problème, les familles ont été dûment sensibilisées aux risques de cette pratique, a-t-il fait valoir.

Abordant les questions de nationalité, le représentant comorien a rappelé que Zanzibar a été pendant très longtemps la capitale culturelle arabo-islamique de toute la région. Lors de la colonisation française des Comores, beaucoup de familles comoriennes sont parties à Zanzibar, car les colons français accaparaient les terres aux Comores. Les liens qu'ont avec les Comores ces descendants de Comoriens installés à Zanzibar peuvent ainsi expliquer que des personnes venant de Zanzibar puissent avoir davantage de facilités que d'autres pour obtenir la citoyenneté comorienne.

S'agissant de la situation dans le domaine de l'éducation, les chiffres cités par certaines expertes du Comité sont certes très inquiétants, mais ils ne reflètent pas les progrès qui ont été accomplis par les Comores, a déclaré le représentant. En 1975, au moment de l'accession du pays à l'indépendance, moins de 30% des enfants âgés de 6 à 14 ans étaient scolarisés; or, aujourd'hui, ce taux se situe autour de 78 à 80%, a-t-il fait valoir. Ce progrès est d'autant plus notable qu'il s'inscrit dans un contexte de crise économique, aggravée par les programmes d'ajustement structurels qui, au début, ne tenaient pas compte des secteurs sociaux, a souligné le représentant. Dans la culture comorienne, l'éducation de l'enfant est considérée comme capitale.

Pour ce qui est de l'analphabétisme, le représentant a fait valoir que tous les enfants du pays, même dans les zones les plus reculées, vont à l'école coranique, ce qui signifie qu'ils savent lire et écrire en caractère arabe. Les écoles coraniques sont le système d'enseignement démocratique par excellence, a assuré M. Chouzour. On ne se trouve donc pas aux Comores dans une situation d'analphabétisme comme on l'entend généralement pour des personnes qui ne savent ni lire, ni écrire, a-t-il insisté. Les autorités comoriennes ont même estimé que dans certains cas, il était nécessaire de transcrire certains textes en caractère arabe pour s'assurer qu'un message public passe mieux; cela a par exemple été fait aux fins de la promotion d'un programme de microcrédits.

Quant aux causes de la sous-représentation des filles au niveau secondaire, s'ajoute à l'argument financier un argument culturel, car s'il y a des écoles primaires dans tous les villages, tel n'est pas le cas pour les collèges, a poursuivi le représentant. Ainsi, les élèves des collèges doivent-ils souvent parcourir de longues distances, dans un pays où les transports ne sont pas aussi développés qu'à Genève, pour se rendre à l'école. Or, dans ce contexte, les parents hésitent à envoyer leurs filles au collège s'ils n'ont pas un contact avec une famille d'accueil dans la ville où se trouve le collège. Si les parents arrivent à dire à leur fils de se débrouiller pour aller au collège, il leur est plus difficile d'arriver à dire la même chose à leur fille, a expliqué le représentant.

Le budget de l'éducation représente aux Comores près du quart du budget de l'État, a indiqué le représentant. Il est vrai que les enseignants du primaire sont souvent sous-qualifiés, car du fait de la faiblesse des salaires, peu de gens dûment qualifiés acceptent de devenir enseignant dans le primaire, a-t-il toutefois reconnu.

Les emplois salariés sont rares aux Comores et se trouvent uniquement dans des travaux saisonniers qui durent le temps d'une récolte, celle du girofle par exemple, a par ailleurs expliqué le représentant. Sinon, l'emploi est essentiellement informel aux Comores, a-t-il souligné.

La santé, l'éducation et les dockers (secteur portuaire) sont les trois secteurs d'activités où le syndicalisme est actif, a poursuivi le représentant. Au niveau de la santé, par exemple, ce sont les syndiquées femmes qui sont les plus actives. Pour autant, on ne peut pas parler aux Comores d'une vie syndicale très développée.

Évoquant la question de Mayotte, le représentant a rappelé qu'au moment de l'accession des Comores à l'indépendance, la France a estimé qu'en cette période de guerre froide et pour compenser la perte des bases françaises à Madagascar, entre autres, il fallait conserver une des îles des Comores dans le giron français; et c'est ainsi que la France a décidé de garder Mayotte, affirmant que sur cette île, 60% de la population n'étaient pas favorables à l'indépendance. Mais c'est le vote global des Comores qui aurait dû prévaloir et l'emporter pour l'ensemble du territoire de l'archipel, car au regard du droit international, c'est l'ensemble d'un territoire colonial qui accède à l'indépendance, a fait observer M. Chourouz. Il a ajouté que le Représentant permanent de la France à l'ONU, Louis de Guiringaud, lui avait affirmé, en son temps, lors d'une rencontre en tête-à-tête, que les diplomates de France considéraient que cette position de la France était une erreur, mais qu'il n'en fallait pas moins pour eux la défendre. M. Chourouz a ajouté que la situation a été aggravée par Edouard Balladur qui, pour obtenir les voix de Mayotte, avait introduit un visa obligatoire pour les Comoriens désireux de se rendre à Mayotte. Ainsi, y a-t-il régulièrement des drames où des embarcations, contenant des femmes et des enfants, chavirent entre les îles d'Anjouan et de Mayotte, qui se font face.

Pendant longtemps, l'accès aux soins de santé primaire était gratuit aux Comores; mais depuis quelques années, pour répondre aux exigences des politiques d'ajustement structurel, la médecine est devenue payante, a poursuivi le représentant. Néanmoins, depuis un an, a été mis en place un document qui assure aux premiers soins une gratuité totale.

Aux Comores, il n'y a pas de problème d'accès à la terre pour les femmes, a en outre déclaré le représentant. C'est sur l'île d'Anjouan que le problème global d'accès à la terre se pose avec le plus d'acuité, car c'est là que la dépossession coloniale a été la plus féroce. Au moment où les colons sont partis, quelques riches habitants ont acheté les terres; on parle parfois de redistribution des terres, mais le problème reste difficile.

Jamais une femme âgée ne serait abandonnée aux Comores, quel que soit le niveau de pauvreté de la famille. En effet, il existe une forte admiration de la population à l'égard des personnes âgées, a indiqué le représentant.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CEDAW12/020F