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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME OUVRE UNE SESSION EXTRAORDINAIRE SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN SYRIE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a ouvert, ce matin, sa dix-huitième session extraordinaire, consacrée à «La situation des droits de l'homme en République arabe syrienne à la lumière du rapport de la commission d'enquête». Cette commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne a été créée en août dernier à l'issue de la précédente session extraordinaire du Conseil, également consacrée à la Syrie, et a soumis cette semaine son rapport.

Le débat a été ouvert par Mme Navi Pillay, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. M. Paulo Sérgio Pinheiro, Président de la commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne, a présenté le rapport de la commission, et Mme Farida Shahid, experte indépendante dans le domaine des droits culturels, a fait une déclaration à titre de Présidente du Comité de coordination des procédures spéciales du Conseil. Le représentant de la Syrie a fait déclaration en tant que pays concerné, suivi de 34 délégations d'États membres du Conseil, puis de délégations observatrices dans le cadre du débat général.

Mme Pillay a souligné que la violente répression visant les civils et les manifestants pacifiques en Syrie n'a pas cessé depuis la présentation de son rapport sur la situation le 22 août dernier. Depuis mars 2011, on estime à plus de 4000 le nombre de personnes tuées et des dizaines de milliers auraient été arrêtées. Plus de 14 000 personnes seraient en détention des suites de la répression des manifestations. La Haut-Commissaire a souligné que les autorités maintiennent une répression qui pourrait conduire le pays à une guerre civile. Compte tenu de l'incapacité des autorités syriennes à protéger leurs citoyens, la communauté internationale se doit de prendre de toute urgence des mesures efficaces pour protéger la population.

Le président de la commission d'enquête a indiqué que celle-ci était gravement préoccupée de ce que des crimes contre l'humanité ont été commis en Syrie. La force excessive utilisée contre des civils, l'ampleur des attaques ciblant des civils et leur caractère répétitif et coordonné conduisent la commission à conclure que ces crimes ont été commis en vertu d'une décision de l'État. La commission insiste sur la nécessité de mettre fin à la souffrance des civils syriens, poursuit M. Pinheiro. Le Gouvernement doit mettre un terme immédiat aux violations flagrantes des droits de l'homme, ouvrir des enquêtes indépendantes et impartiales sur ces violations et traduire leurs auteurs en justice.

Mme Shahid a pour sa part déclaré que les procédures spéciales s'alarment de crimes horribles commis dans la ville de Homs, où des dizaines de milliers de personnes sont détenues – certaines torturées – dans des lieux surpeuplés. Elle a aussi dénoncé les milliers de disparitions forcées et les attaques ciblées contre les défenseurs des droits de l'homme, journalistes et blogueurs. Le Comité de coordination souligne que les allégations de violations des droits de l'homme en Syrie doivent faire l'objet d'enquêtes indépendantes et approfondies, que leurs crimes doivent être sanctionnés et leurs victimes obtenir réparation.

La délégation de la Syrie a mis en cause l'objectivité du rapport de la commission d'enquête, qui se contente de critiquer et ignorant les informations présentées par le Gouvernement syrien, notamment sur les lois et législations adoptées pour améliorer la situation de la population syrienne. Le représentant syrien a aussi regretté qu'il ne soit pas tenu compte des réformes mises en place par le Gouvernement syrien. Cette «négligence préméditée» devrait contribuer à jeter de l'huile sur le feu, a-t-il estimé, et remet en question la crédibilité et l'objectivité du Conseil.

Dans leurs interventions, de nombreuses délégations ont rendu hommage à la population syrienne qui exprime son aspiration à l'instauration d'un nouvel ordre politique et n'est plus disposée à tolérer que l'on piétine ses droits et sa dignité. Elles ont dénoncé l'intimidation, la violence, voire la torture et les violences sexuelles auxquelles est soumise la population civile en Syrie, y compris des enfants. Il a été observé que les abus du Gouvernement syrien sont condamnés par les responsables du monde arabe. Il a notamment été demandé aux autorités syriennes d'appliquer les propositions de la Ligue des États arabes en vue d'une solution pacifique. Certaines délégations ont estimé que les démarches de la Ligue arabe doivent servir de point de départ à l'action de la communauté internationale. Il a par ailleurs été demandé à la Syrie d'ouvrir des enquêtes approfondies sur les violations des droits de l'homme et d'en sanctionner les auteurs, et de créer les conditions nécessaires à l'ouverture d'un dialogue national constructif.

D'autres délégations ont regretté que le conflit soit attisé par certaines forces extérieures: elles ont relevé que toute action de la communauté internationale relative à la Syrie doit être conforme au droit international et à la Charte des droits de l'homme, de même qu'elle doit respecter la souveraineté de la Syrie et son intégrité territoriale. La communauté internationale est confrontée à une présentation médiatique biaisée et manquant d'objectivité, ont aussi observé des délégations, estimant que la session extraordinaire ne doit pas servir de prétexte à des violations du droit international et ne pas laisser planer de menaces d'intervention ou de changement de régime.

Les délégations des États membres suivants ont participé au débat: Pologne (au nom de l'Union européenne), Équateur (au nom des pays de l'Alliance bolivarienne pour les Amériques), Fédération de Russie, Italie, Espagne, Koweït, Costa Rica, Arabie saoudite, Qatar, Mexique, États-Unis, Norvège, Hongrie, Chili, Uruguay, Libye, Guatemala, Pérou, République tchèque, Équateur, Roumanie, Maldives, Kirghizistan, Angola, Indonésie, Suisse, Cuba, Thaïlande, Autriche, Inde, Chine, Nigéria, Djibouti et Belgique.

Les délégations observatrices de la Ligue des États arabes, de la France, de l'Égypte, de la Turquie, de la République de Corée, de l'Iran, du Canada et de l'Australie ont également fait des déclarations.

En début de séance, le Conseil a observé une minute de silence à la mémoire de Purificacion Quisumbing, membre du Comité consultatif du Conseil, décédée hier à Manille après avoir consacré une grande partie de sa vie à la promotion des droits de l'homme. Elle a notamment été Présidente de la session de 1990 de la Commission des droits de l'homme.


Le Conseil reprend ses travaux à 15 heures pour entendre les déclarations d'autres délégations observatrices et d'organisations non gouvernementales, avant de se prononcer sur un projet de résolution sur la situation des droits de l'homme dans la République arabe syrienne.


Déclarations liminaires

MME NAVI PILLAY, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a d'emblée annoncé que la violente répression visant les civils et les manifestants pacifiques en République arabe syrienne n'a pas cessé depuis son précédent rapport devant le Conseil des droits de l'homme, le 22 août dernier. Depuis mars 2011, les informations reçues indiquent que plus de 4000 personnes ont été tuées et des dizaines de milliers arrêtées. Plus de 14 000 personnes seraient en détention des suites de la répression des manifestations; pas moins de 12 400 personnes ont cherché refuge dans les pays environnants; et des dizaines de milliers ont été déplacées dans le pays. Des informations faisant état d'attaques armées de plus en plus fréquentes commises contre le système militaire et sécuritaire syrien par les forces d'opposition, y compris de la part de la soi-disant «armée syrienne libre», sont également source de préoccupation.

Mme Pillay a rappelé qu'à sa dernière session extraordinaire, le Conseil des droits de l'homme a décidé d'établir une commission internationale indépendante chargée d'enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l'homme commises en République arabe syrienne. Le rapport de la commission, présenté lundi dernier, a conclu que les forces militaires et de sécurité syriennes ont commis des crimes contre l'humanité à l'encontre de la population civile, notamment des tueries, la torture, des viols et autres formes de violence sexuelle, des disparitions forcées, des emprisonnements et autres formes de privation de liberté. La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a ajouté que le rapport de la commission fait état de violations systématiques, graves et généralisées des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les autorités syriennes. Des enfants auraient été assassinés: 256 décès ont été signalés jusqu'à présent et ce chiffre se monterait à 307 selon les dernières informations reçues. Des écoles ont été utilisées comme centres de détention, a poursuivi Mme Pillay, ajoutant que cela démontre l'absence de respect de l'État pour les droits des enfants à l'éducation et à la sécurité. Enfin, l'ampleur même et la persistance des attaques commises par les forces militaires et de sécurité à l'encontre des civils, ainsi que la destruction généralisée de propriétés montrent que le Gouvernement syrien a connaissance, voire autorise ces faits.

La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a souligné que les autorités maintiennent une répression qui, s'il n'y est pas mis fin immédiatement, pourrait conduire le pays à une guerre civile. La communauté internationale se doit de prendre de toute urgence des mesures efficaces pour protéger la population syrienne; tous les actes de torture, meurtres et autres formes de violence doivent immédiatement cesser; tous les prisonniers de conscience doivent être relâchés; les actes de représailles à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme doivent cesser; les organes de surveillance indépendants et internationaux, y compris le Haut-Commissariat aux droits de l'homme et la Ligue des États arabes, doivent être autorisés à se rendre dans le pays et en particulier dans tous les lieux de détention; et un accès sans entrave et immédiat doit être garanti pour tous les acteurs humanitaires.

En conclusion, et compte tenu que des crimes contre l'humanité auraient été commis en Syrie, la Haut-Commissaire a encouragé le Conseil de sécurité à référer la situation en République arabe syrienne à la Cour pénale internationale.

MME FARIDA SHAHID, Présidente du Comité de coordination des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme, a déploré - dans une déclaration retransmise par vidéo - qu'en dépit de la dénonciation venue de toutes parts des violations graves des droits de l'homme en Syrie, le nombre de décès dans ce pays a doublé en trois mois, de 2000 à 4000. Le Comité constate que le Gouvernement syrien n'a tenu aucun compte des appels qui lui sont lancés, notamment par le Conseil des droits de l'homme, et qu'il a intensifié la répression brutale contre les manifestants et civils. Les violations des droits de l'homme ont en outre entraîné des déplacements de populations, qu'il s'agisse du départ à l'étranger de nombreux réfugiés ou de personnes déplacées dans le pays. Cette situation justifie à elle seule une action urgente. Les procédures spéciales du Conseil condamnent fermement, et pour la troisième fois devant le Conseil des droits de l'homme, les violations graves des droits de l'homme qui se poursuivent en Syrie. Mme Shahid a regretté que le Gouvernement syrien n'ait pas tenu les engagements qu'il a pris envers la Ligue arabe. Les procédures spéciales s'alarment de crimes horribles commis dans la ville de Homs, dans un contexte d'impunité, du fait que des dizaines de milliers de personnes sont détenues – certaines torturées – dans des lieux surpeuplés; de milliers de disparitions forcées; d'attaques ciblées contre les défenseurs des droits de l'homme, journalistes et blogueurs. D'autres informations font état, dans certaines régions, de restrictions délibérées à l'accès à l'eau, aux médicaments et au matériel médical et à d'autres biens de première nécessité, afin de punir les manifestants: cette tactique constitue clairement une violation des droits de l'homme.

Le Comité de coordination des procédures spéciales demande l'arrêt immédiat de la violence et la libération des personnes détenues pour des motifs politiques. Il demande également à toutes les parties de renoncer à la violence. Les populations doivent avoir accès aux biens de première nécessité et aux traitements médicaux. Des mesures politiques doivent être prises en vue du lancement d'un processus démocratique répondant aux aspirations du peuple syrien, notamment en matière de respect des droits de l'homme. Les procédures spéciales estiment que les allégations de violations des droits de l'homme en Syrie doivent faire l'objet d'enquêtes indépendantes et approfondies. Les auteurs de telles violations doivent être sanctionnés et leurs victimes, ainsi que leurs familles, obtenir réparation.

Présentation du rapport

M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, Président de la commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne, a indiqué que le rapport de la commission recense des violations systématiques et généralisées des droits de l'homme commises par l'armée et les forces de sécurité syriennes, ainsi que des milices progouvernementales, depuis le début des manifestations en mars 2011. Ces violations sont notamment constituées par le recours à une force excessive, aux détentions arbitraires, aux disparitions forcées, à la torture, aux violences sexuelles, aux violations des droits de l'enfant et des droits économiques, sociaux et culturels. La commission a ouvert son enquête à la fin septembre, pour conclure son travail de terrain le 2 novembre. Elle a interrogé de nombreuses victimes, des témoins et déserteurs des forces armées et de sécurité. Certains entretiens ont été réalisés par téléphonie sur internet et la commission a examiné des documents vidéo et photographiques. C'est ainsi qu'elle a été en mesure de récolter des preuves solides, bien qu'elle n'ait pas été autorisée à entrer en Syrie. Les troubles ont affecté la vie de près de trois millions de Syriens et des milliers d'entre eux ont dû fuir le pays.

M. Pinheiro a indiqué que le Gouvernement syrien invoque sa responsabilité de lutter contre les bandes armées, les terroristes et les agents étrangers qui instrumentalisent le mécontentement public. Il assure en outre ne pas appliquer de politique de brutalité systématique contre les civils. Par ailleurs, la commission a pris connaissance d'actes de violence commis par certains opposants au gouvernement et par des membres de l'«Armée syrienne libre». La commission est convaincue quoi qu'il en soit que les civils sont les principales victimes de la violence. Pratiquement tous les témoins et victimes ont déclaré qu'un ou plusieurs membres de leur famille, de leurs voisins ou de leurs amis ont été tués, blessés, arrêtés ou torturés depuis le début des manifestations. Beaucoup n'ont jamais été revus et sont toujours portés disparus.

Du fait du blocus imposé à certaines villes, des habitants ne peuvent s'approvisionner en eau, en nourriture et autres produits de première nécessité. Les forces militaires et de sécurité ciblent des réservoirs et l'adduction d'eau, tandis que des tireurs d'élite prennent position sur des bâtiments publics et privés pour dissuader tout déplacement et faire appliquer le couvre-feu. Les enfants ne sont pas épargnés. Selon des sources fiables, jusqu'à la date du 9 novembre, 307 enfants ont été tués par les forces de l'État, dont 56 en novembre. D'autres sont détenus ou torturés. Le père du jeune Sharee Al-Thamir a communiqué le rapport d'autopsie du corps de son fils, dont les blessures sont compatibles avec les tortures graves qu'un témoin avait décrites comme étant infligées à cet enfant lors de sa détention par la sûreté militaire.

La commission ne saurait trop insister sur la nécessité de mettre fin à la souffrance des civils syriens. Le Gouvernement doit mettre un terme immédiat aux violations flagrantes des droits de l'homme, ouvrir des enquêtes indépendantes et impartiales sur ces violations et traduire leurs auteurs en justice. La commission soutient l'appel de la Ligue arabe pour une présence de surveillance en Syrie. En effet, des observateurs des droits de l'homme, y compris la commission, devraient bénéficier d'un accès immédiat et sans entraves à la Syrie. Un examen indépendant et impartial peut contribuer à atténuer les souffrances des civils et prévenir d'autres violations des droits de l'homme. À la lumière de ses conclusions, la commission est gravement préoccupée par le fait que des crimes contre l'humanité ont été commis en Syrie. En outre, la force excessive appliquée contre les civils, l'ampleur des attaques ciblant des civils et leur caractère répétitif et coordonné conduisent la commission à conclure que ces crimes ont été commis en vertu d'une décision de l'État, a conclu M. Pinheiro.

Le rapport de la commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne (A/HRC/S-17/2/Add.1, disponible en anglais et en arabe) rappelle que la détérioration de la situation des droits de l'homme dans la République arabe syrienne a poussé le Conseil des droits de l'homme à établir cette commission afin d'enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l'homme commises depuis mars 2011. De la fin septembre à la mi-novembre 2011, la commission a tenu des réunions avec les États membres de tous les groupes régionaux groupes, des organisations régionales - dont la Ligue des États arabes et l'Organisation de la coopération islamique -, des organisations non gouvernementales, des défenseurs des droits de l'homme, des journalistes et des experts. Elle s'est entretenue avec 223 victimes et témoins de violations présumées des droits de l'homme, y compris des civils et des déserteurs de l'armée et des forces de sécurité. Dans le rapport, la commission documente des cas d'exécutions sommaires, d'arrestations arbitraires, de disparition forcée, de torture, y compris de violence sexuelle, ainsi que de violations des droits de l'enfant. L'ensemble substantiel de preuves recueillies par la commission indique que ces violations flagrantes des droits de l'homme ont été commises par des militaires syriens et des membres des forces de sécurité depuis le début des manifestations en mars 2011.

La commission se dit gravement préoccupée par le fait que des crimes contre l'humanité ont été commis en différents lieux du pays au cours de la période concernée. Elle invite le Gouvernement de la République arabe syrienne à mettre immédiatement un terme aux violations flagrantes des droits de l'homme en cours, à ouvrir des enquêtes indépendantes et impartiales sur ces violations et à en traduire les auteurs en justice. La commission fait également des recommandations aux groupes d'opposition, au Conseil des droits de l'homme, aux organisations régionales et aux États Membres des Nations Unies. Enfin, la commission regrette profondément qu'en dépit des nombreuses requêtes qui lui ont été adressées, le Gouvernement n'ait pas engagé un dialogue et n'ait pas autorisé la commission à se rendre dans le pays. Il a informé la commission qu'il examinerait la possibilité de coopérer avec elle une fois les travaux de sa propre commission indépendante terminés. La commission réitère son appel pour un accès immédiat et sans entrave à la République arabe syrienne.

Pays concerné

M. FAYSAL KHABBAZ HABOUI (République arabe syrienne), intervenant à titre de pays concerné, a appelé à respecter les principes de la Charte des Nations Unies et à promouvoir le dialogue constructif et la coopération internationale. Il a rappelé que le mandat du Conseil des droits de l'homme est de promouvoir un dialogue véritable loin de toute sélectivité et de la politique du «deux poids, deux mesures». En tenant cette réunion aujourd'hui, après deux autres consacrée au même thème, le Conseil perd de sa crédibilité sur la scène internationale.

La délégation syrienne condamne profondément le fait que la commission internationale indépendante d'enquête n'ait pas été objective dans son rapport. Selon le représentant syrien, elle est tombée dans le même piège que d'autres commissions préalables: elle s'est contentée de critiquer et elle a ignoré tout ce qui a été présenté comme document et information par le Gouvernement syrien, dont une dizaine de lois et législations adoptées pour améliorer la situation de la population syrienne. En se contentant de faire figurer ces informations comme des annexes ou comme documents marginaux, ce rapport s'en trouve affaibli et sa crédibilité compromise. Le représentant syrien a regretté qu'il ne soit pas tenu compte des réformes faites par le Gouvernement syrien et a mis en garde la communauté internationale contre les dangers de procéder de la sorte. Cette négligence préméditée devrait contribuer à jeter de l'huile sur le feu, a-t-il estimé, ajoutant que le Conseil des droits de l'homme est ainsi privé de crédibilité et d'objectivité.

Enfin, le représentant a expliqué que le problème syrien ne sera réglé que par les Syriens; il s'agit d'un problème interne et national; il ne peut pas être géré par des parties tierces qui ne veulent que précipiter la Syrie dans des difficultés supplémentaires. Il a ajouté que la situation ne se résoudra pas dans les couloirs des Nations Unies et a demandé aux instigateurs de cette réunion de cesser ces pratiques. Ce type de réunion est stérile. En la convoquant, les instigateurs cherchent à politiser la situation, a-t-il regretté. Il a mis à nouveau en garde contre le danger de prolonger la crise et déstabiliser encore plus la Syrie, voire la région entière. Enfin, il a fait valoir que le projet de résolution soumis au Conseil aujourd'hui contient des points qui violent les procédures établies de cet organe, voire des règles et principes généraux de la communauté internationale. Les messages, commentaires et demandes de la délégation syrienne n'ont pas été écoutés. Un début de solution réside dans un dialogue véritable, a-t-il insisté. Enfin, il a rappelé que le Gouvernement syrien continuera d'agir indépendamment des décisions prises ici et maintiendra la tenue d'élections en février prochain en vue d'une Syrie en paix et démocratique.

États membres

M. REMIGIUSZ A. HENCZEL (Pologne au nom de l'Union européenne) a déclaré qu'il apparaissait évident que les autorités syriennes ont failli à leur devoir de protection de leur population. La commission d'enquête a établi que des violations graves et systématiques des droits de l'homme sont commises par ces autorités et leurs forces armées et de sécurité. C'est la raison pour laquelle la communauté internationale doit agir pour le respect des droits fondamentaux du peuple syrien, notamment le droit à la vie. L'Union européenne demande, à l'instar de la commission d'enquête, que les autorités syriennes ouvrent des enquêtes approfondies sur les violations des droits de l'homme et en sanctionnent les auteurs, en particulier ceux ayant commis des crimes qui relèvent de la juridiction de la Cour pénale internationale. L'Union européenne est atterrée par les cas de torture, de violence sexuelle, d'utilisation excessive de la force, d'exécutions extrajudiciaire et de détention arbitraire. Malgré les nombreux efforts menés par les organisations régionales et surtout la Ligue des États arabes, ainsi que les appels répétés de la communauté internationale, les autorités syriennes n'ont pas mis en œuvre des réformes permettant la transformation pacifique de la vie sociale et politique syrien. L'Union européenne a présenté une résolution proposant un suivi des travaux de la commission d'enquête et la création d'un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Syrie, qui serait chargé de poursuivre le travail de la commission une fois son mandat terminé.

M. LUÍS GALLEGOS (Équateur au nom des États membres de l'Alliance bolivarienne pour les Amériques - ALBA) s'est dit certes soucieux d'assurer la protection de la population syrienne mais a dit ne pas souhaiter que cela devienne un prétexte pour une intervention étrangère. Il a souhaité que ne se reproduise pas en Syrie les mêmes ingérences de puissances étrangères qui se sont vues en Libye. Il a dénoncé la manipulation et les mensonges relayés par les médias de certains pays pour légitimer une intervention. Il a rappelé que des élections sont prévues en Syrie en février 2012. Selon les pays de l'Alliance bolivarienne, le projet de résolution soumis au Conseil aujourd'hui reflète la volonté de s'ingérer dans les affaires internes de la Syrie et constituerait un précédent négatif pour le dialogue international. Une intervention étrangère et une guerre civile auraient des conséquences graves pour le pays et la région dans sa totalité, a-t-il insisté. Plus généralement, il a déploré ce type de résolution qui fustige des pays particuliers plutôt que promouvoir le dialogue.

M. VALERY LOSCHININ (Fédération de Russie) a fait part de la profonde inquiétude de son pays devant les événements tragiques qui se déroulent en Syrie. La confrontation armée a des incidences très négatives sur toutes les catégories de droits de l'homme de la population. Un vaste dialogue national doit être ouvert en vue de trouver une solution à long terme conforme aux intérêts du peuple syrien. Malheureusement, le conflit est attisé par certaines forces extérieures pour compliquer encore la situation. Toute action de la communauté internationale relative à la Syrie doit être conforme au droit international et à la Charte des droits de l'homme, de même qu'elle doit respecter la souveraineté de la Syrie, y compris son intégrité territoriale. La communauté internationale est confrontée à une présentation médiatique biaisée et manquant d'objectivité. En même temps, la Russie appelle les autorités syriennes à faire preuve d'ouverture et à accueillir la commission d'enquête du Conseil des droits de l'homme. La session ne doit pas servir de prétexte à des violations du droit international, a conclu le représentant russe.

MME LAURA MIRACHIAN (Italie) a fait remarquer que les conclusions de la commission internationale indépendante d'enquête sont terribles. Elle a condamné les violations des droits de l'homme commises en Syrie depuis mars 2011. Elle a appelé à mettre immédiatement fin à ces violences systématiques et massives. L'impunité ne peut pas être tolérée, a-t-elle souligné. Les instances humanitaires et organisations des droits de l'homme doivent pouvoir se rendre dans le pays, a-t-elle fait valoir, ajoutant que l'Italie est prête à fournir une aide humanitaire à la population. La situation est si grave que la communauté internationale et le Conseil des droits de l'homme ont le devoir de transmettre un message fort et sans ambigüité aux autorités syriennes pour qu'elles mettent un terme à ces exactions, a-t-elle conclu.

M. AGUSTIN SANTOS MARAVER (Espagne) a déploré que tous les appels à la fin des violations des droits de l'homme en Syrie soient restés lettre morte. L'Espagne regrette le manque de coopération des autorités syriennes. Elle estime que certaines des violations des droits de l'homme décrites dans le rapport de la Commission pourraient constituer des crimes contre l'humanité. Le représentant espagnol a souligné qu'il est nécessaire que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme soit en mesure d'ouvrir un bureau en Syrie pour y contrôler l'évolution des droits de l'homme.

M. DHARAR ABDUL-RAZZAK RAZZOOQI (Koweït) a fait remarquer qu'il est aujourd'hui impossible de cacher la vérité sur les événements qui se produisent dans le monde. Le Koweït a été catastrophé par les événements qui se déroulent en Syrie et les attaques contre les manifestants. Le rapport de la commission internationale indépendante d'enquête confirme tout ce que nous avons vu, a-t-il ajouté. Les forces de sécurité tirent sur les manifestants, visant parfois la tête, et ont recours à force excessive. Des blessés sont même torturés après avoir été conduits à l'hôpital; des enfants sont tués. La liste des violations est extrêmement longue, a-t-il fait remarquer. Pour le représentant du Koweït, la situation a dépassé le stade des sanctions et nécessite peut-être une intervention pour protéger la population civile et mettre un terme à ce bain de sang. Il a rappelé que son pays ne veut que le bien de la Syrie et souhaite que son gouvernement acceptera l'initiative de la Ligue des États arabes avant qu'il ne soit trop tard.

M. MANUEL B. DENGO (Costa Rica) la communauté internationale ne peut plus se taire devant les révélations de la commission d'enquête, qui appellent une action immédiate du Conseil des droits de l'homme. La dégradation considérable de la situation des droits de l'homme en Syrie est en effet alarmante. Le Costa Rica appelle le Gouvernement syrien à mettre un terme aux violations de tous les droits de l'homme, y compris les crimes commis contre des enfants, et à empêcher toute impunité aux auteurs de ces actes. Le Costa Rica appelle aussi le Gouvernement syrien à collaborer avec la Ligue arabe, entre autres intervenants internationaux, dans la recherche d'une solution.

M. ABDELWAHAB ATTAR (Arabie saoudite) a expliqué que son pays a à plusieurs reprises demandé au Gouvernement syrien de mettre fin à ce bain de sang, en l'invitant à revenir à la raison et à mettre un terme aux violations des droits de l'homme. Il a réitéré cet appel aujourd'hui devant le Conseil des droits de l'homme. Selon le représentant saoudien, le Gouvernement syrien doit faire preuve de sagesse et cesser cette violence. Il a rappelé que des nombreux efforts sont déployés pour régler cette crise, dont une résolution de la Ligue des États arabes. Selon lui, il faut soutenir ces efforts déployés tant par la Ligue des États arabes que par l'Organisation de la coopération islamique.

M. KHALID FAHAD AL-HAJRI (Qatar) a exprimé sa profonde préoccupation face aux violations des droits de l'homme commises par le Gouvernement syrien contre ses citoyens et rapportées par la commission d'enquête. Le Qatar a encouragé les autorités syriennes à adopter une attitude visant à trouver une solution pacifique au bénéfice de la population et pour éviter une internationalisation du conflit. Pour parvenir à la liberté, à la dignité et à la justice en Syrie et mettre un terme à la crise, le Qatar avait appelé les autorités syriennes à mettre en place un cadre juridique pour la visite dans le pays d'un groupe de la Ligue des États arabes et les invite à entamer un dialogue national avec toutes les parties; mais cet appel n'a pas été entendu par le Gouvernement de la Syrie. Le Qatar ajoute qu'il faut assurer la reddition de compte de tous les responsables de crimes commis dans le pays et a appelé à nouveau le Gouvernement à accorder la priorité aux intérêts du pays et de répondre aux exigences et aux demandes du peuple syrien.

M. JUAN JOSÉ GÓMEZ CAMACHO (Mexique) a condamné avec énergie la situation qui a cours en Syrie. Il a déploré que la commission d'enquête établie par le Conseil des droits de l'homme n'ait pu se rendre dans le pays, en dépit des demandes répétées formulées dans ce sens. Une telle visite aurait permis à la commission d'obtenir des informations et le point de vue des autorités syriennes, a-t-il souligné. Il a constaté que le rapport apporte la preuve que l'armée et les forces de sécurité syriennes ont commis des violations graves des droits de l'homme depuis mars 2011, au nombre desquelles des exécutions sommaires, des disparitions forcées, la torture, les violences sexuelles et des violations graves des droits de l'enfant. En outre, on craint que des crimes contre l'humanité aient été commis. Selon le représentant mexicain, la commission n'a toutefois pas un mandat d'instance judiciaire. Le Conseil des droits de l'homme a la responsabilité de mettre en place les conditions nécessaires pour le respect des droits de l'homme et de s'assurer que la situation des droits de l'homme dans le pays soit suivie de près. La communauté internationale doit par conséquent accompagner la Ligue des États arabes dans sa recherche d'une solution.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a rendu hommage aux aspirations de la population syrienne pour l'instauration d'un nouvel ordre politique; cette population n'est plus disposée à tolérer que l'on piétine ses droits et sa dignité, à accepter la corruption et la brutalité des autorités. Les États-Unis dénoncent l'intimidation, la violence, voire la torture et les violences sexuelles auxquelles est soumise la population civile en Syrie. Les États-Unis félicitent la commission d'enquête de son rapport convaincant et condamnent dans les termes les plus forts le massacre, les arrestations arbitraires et la torture de manifestants pacifiques. La représentante américaine a observé que les violations des droits de l'homme commises par le Gouvernement syrien sont condamnées par les chefs du monde arabe, notamment par le biais des démarches de la Ligue des États arabes. Les États-Unis continueront de collaborer avec leurs partenaires régionaux et la communauté internationale dans son ensemble pour faire pression sur M. Assad afin qu'il mette fin à la violence contre le peuple syrien.

MME HARRIET E. BERG (Norvège) a demandé aux autorités syriennes de mettre fin aux violations des droits de l'homme et de respecter leurs obligations découlant du droit international et des droits de l'homme. Selon elle, le Président Bachar Al-Assad n'a pas été capable de répondre aux demandes démocratiques des manifestants et à mettre un terme à la spirale de violence qui s'est produite dans le pays. La feuille de route proposée par la Ligue des États arabes était une initiative prometteuse; la Norvège regrette qu'elle n'ait pas été mise en œuvre par la Syrie. La représentante a estimé que l'établissement d'un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Syrie est une mesure importante pour que la communauté internationale demeure saisie de cette question.

M. ANDRAS DÉKÁNY (Hongrie) a estimé que la situation des droits de l'homme en Syrie continue de justifier que le Conseil des droits de l'homme lui accorde toute son attention. Il s'est félicité du rapport préparé par la commission internationale indépendante d'enquête. Le tableau que la Commission fait de la situation est édifiant et la liste des violations des droits de l'homme est longue. Il a demandé au Gouvernement de la Syrie de mettre rapidement en œuvre les recommandations formulées par la commission. Il a également souhaité que les observateurs internationaux aient accès au pays; en outre, l'établissement d'une présence du Haut-Commissariat aux droits de l'homme en Syrie est essentiel. Selon lui, le texte présenté par la Ligue des États arabes est un pas dans la bonne direction.

M. PEDRO OYARCE (Chili) a observé que le Conseil a pour mandat de se pencher sur toute action susceptible de garantir la jouissance des droits de l'homme sur le terrain. Les conclusions de la commission d'enquête sont très troublantes, s'agissant notamment des crimes commis contre des enfants et de la possible existence d'une politique d'État contre les manifestants civils. Le Chili appuie les efforts de la Ligue arabe, bien placée de par son statut et sa connaissance de la situation, pour aider à surmonter la crise. La communauté internationale peut pour sa part exhorter les autorités syriennes à agir résolument pour garantir la protection des droits de l'homme des populations civiles.

MME MARIA LOURDES BONÉ (Uruguay) a condamné l'excès de recours à la force par les forces armées syriennes à l'encontre des civils et rappelé que cette violence ne peut déboucher sur aucune solution. Tout État doit se plier au droit international, a-t-elle en outre rappelé. Elle a souhaité que la Syrie mette en place les conditions nécessaires à un dialogue national véritable qui redonne confiance à la population et respecte les valeurs démocratiques fondamentales et les revendications de la population syrienne. L'Uruguay exhorte la Syrie à s'engager dans cette voie, tout en s'engageant également au niveau international dans un dialogue constructif, y compris avec le Conseil des droits de l'homme et ses mécanismes établis pour aider le pays.

M. IBRAHIM A.E. ALDREDI (Libye) a rappelé que son propre pays a subi plus de quarante ans d'une dictature arbitraire dédaigneuse tant des principes des droits de l'homme que de l'enseignement millénaire du Coran. Le représentant a remercié la commission d'enquête de son travail visant à fournir au Conseil une image véridique de la situation des droits de l'homme en Syrie. Il appartient maintenant au Conseil d'intervenir de manière courageuse contre les violations des droits de l'homme dans ce pays. Le représentant libyen a estimé que les démarches de la Ligue arabe doivent servir de point de départ à l'action de la communauté internationale. Il a appelé les membres du Conseil à mettre de côté les considérations politiques et à agir dans l'intérêt de la protection des droits de l'homme du peuple syrien.

M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala) a fait observer que c'est la troisième fois que le Conseil des droits de l'homme se réunit pour traiter de la grave situation qui prévaut en Syrie. Les attaques des autorités contre sa propre population méritent que la communauté internationale les condamne et leur accorde toute son attention, a-t-il souligné. Il a dit avoir lu avec inquiétude le rapport de la commission internationale indépendante d'enquête et estimé que les allégations graves qui y figurent confirment l'urgence de la situation. Le représentant du Guatemala a appelé les autorités syriennes à accepter la feuille de route de la Ligue des États arabes et à trouver une solution fondée sur la coopération réelle et le dialogue. Faute de quoi, la crédibilité des reformes annoncées et qui ne se sont pas encore traduites en actes concrets serait compromise.

MME LUZ CABALLERO DE CLULOW (Pérou) a déclaré que son pays avait appuyé la convocation de cette session extraordinaire, en vertu du mandat qui est celui du Conseil des droits de l'homme de se pencher sur les violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent. Le contenu du rapport de la commission d'enquête justifie à cet égard pleinement cette démarche. La représentante a appelé à la fin immédiate de la violence en Syrie, par la part de toutes les parties, et à l'adoption de mesures de protection des droits de l'homme de tous les Syriens. Le Pérou regrette que la commission n'ait pu compter sur la coopération des autorités syriennes. Dans le contexte actuel, il importe que les autorités appliquent sans délai les réformes réclamées par la population. La représentante a salué les efforts de la Ligue arabe pour trouver une solution à la crise en Syrie.

MME KATEŘINA SEQUENSOVÁ (République tchèque) a dénoncé le manque de respect choquant pour les valeurs humaines dont ont fait preuve les autorités syriennes et a condamné fermement la façon brutale dont le peuple syrien a été traité. Elle s'est félicitée de toutes les mesures prises par la communauté internationale, en particulier celles proposées par la Ligue des États arabes, pour mettre un terme à cette situation alarmante. Constatant avec inquiétude que le rapport de la commission internationale indépendante d'enquête a fait état de possibles crimes contre l'humanité, la représentante tchèque a rappelé l'importance de la reddition de comptes et de la lutte contre l'impunité. Dans ce contexte, la proposition de référer cette situation à la Cour pénale internationale est, selon elle, pertinente.

M. LUÍS GALLEGOS (Équateur) a déclaré que son pays reconnaît les problèmes graves rencontrés par la Syrie. L'Équateur appelle au dialogue et à la lutte contre l'impunité. L'Équateur continuera de se conformer aux principes de la Charte des Nations Unies et des grands principes du droit international. Son représentant a estimé que le projet de résolution qui est soumis au Conseil risque d'ouvrir la porte à une intervention étrangère. Néanmoins l'Équateur espère que la raison prévaudra s'agissant de la situation en Syrie.

M. RAZVAN ROTUNDU (Roumanie) a fait remarquer que le Conseil des droits de l'homme a déjà tenu deux sessions extraordinaires sur la situation des droits de l'homme en Syrie et que les États membres - dont la Ligue des États arabes - ont fait des efforts considérables pour améliorer la situation. Or, les autorités syriennes continuent d'ignorer tant les demandes de la population que celles émanant de la communauté internationale. Il a exprimé l'espoir que la résolution soumise aujourd'hui au Conseil sera adoptée sans modifications et que le Conseil n'aura plus besoin, à l'avenir, de convoquer de nouveau une session extraordinaire sur la situation des droits de l'homme en Syrie.

MME IRUTHISHAM ADAM (Maldives) a regretté que la Syrie n'ait pas coopéré avec la commission d'enquête, tout en regrettant le manque d'objectivité du rapport de cette commission. Il importe d'envoyer un message clair au Gouvernement syrien qu'il ne peut agir en toute impunité et que la communauté internationale veille au respect des droits du peuple syrien. Les Maldives appellent le Président Assad à quitter le pouvoir et à donner sa chance à une transition démocratique.

MME GULNARA ISKAKOVA (Kirghizistan) a fait remarquer que si les autorités syriennes avaient coopéré avec la commission d'enquête internationale indépendante, son rapport aurait pu refléter l'attitude de coopération du Gouvernement et refléter son point de vue. Elle a souhaité que des solutions soient trouvées pour mettre au plus vite un terme à ces événements tragiques. Lorsque les droits de l'homme sont en jeu et la population soumise à des souffrances, il est inadmissible de continuer à maintenir la même attitude. Le Gouvernement syrien n'a pas d'autre choix que de coopérer avec la communauté internationale.

M. JORGE CORREIA (Angola) a dit la préoccupation de son pays devant la détérioration de la situation des droits de l'homme en Syrie, et appelé les autorités syriennes à mettre un terme à toutes les violations des droits de l'homme, de même qu'à en traduire les auteurs en justice. L'Angola appelle les autorités syriennes à ouvrir un véritable dialogue et à se conformer aux recommandations des instances internationales, en vue d'une solution négociée et pacifique à la crise. L'Angola constate avec regret que le projet de résolution qui est soumis aujourd'hui au Conseil n'est pas équilibré et qu'il s'éloigne trop du principe de résolution pacifique des conflits.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a appelé le Gouvernement syrien à donner suite aux recommandations formulées par la commission internationale indépendante d'enquête établie par le Conseil des droits de l'homme. Il a demandé la fin immédiate de la violence et invité toutes les parties concernées à faire preuve de mesure. Le Gouvernement se doit de prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection des citoyens. Puisque le Gouvernement a fait mention de réformes et de mesures, il convient de les mettre en œuvre. Des solutions doivent être trouvées dans le cadre d'un processus politique syrien. S'il est certes essentiel que le Gouvernement syrien coopère avec les représentants des Nations Unies, il importe aussi de poursuivre les efforts pour promouvoir le dialogue et la coopération, conformément aux principes qui sous-tendent les travaux du Conseil.

M. DANTE MARTINELLI (Suisse) condamne fermement violations droits de l'homme commises par les forces armées syriennes contre la population, en particulier les exécutions arbitraires et sommaires. La Suisse appelle les autorités syriennes à respecter les droits de l'homme et à libérer les prisonniers de conscience non violents. Le représentant a soutenu les recommandations de la commission d'enquête relative à la poursuite des auteurs de violations des droits de l'homme, y compris jusque devant la Cour pénale internationale. La Suisse appelle enfin la Syrie à coopérer avec les instances compétentes au niveau régional et international et à adopter des réformes vers une solution politique à la crise actuelle.

M. RODOLFO REYES RODRÍGUEZ (Cuba) a indiqué que son pays suivait la situation en Syrie avec attention, tout en étant conscient que les informations disponibles sont fragmentaires, imprécises et font l'objet de manipulations. Il a estimé que tant une guerre civile qu'une intervention étrangère pourraient avoir des conséquences graves pour tout le Moyen Orient. Cuba partage les inquiétudes s'agissant des pertes en vies humaines, mais s'oppose à une ingérence étrangère. Cuba s'est également toujours opposée aux résolutions visant des pays particuliers. La coopération internationale réelle n'est pas une option, c'est la seule solution, a fait valoir le représentant cubain, dénonçant ensuite les manipulations et le recours à «deux poids, deux mesures» qui caractérisent la conduite des États-Unis et d'autres membres de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). La communauté internationale doit se limiter à apporter son aide pour assurer paix et sécurité. Cuba accorde sa confiance dans les capacités du Gouvernement syrien à régler ses propres problèmes, sans ingérence étrangère.

M. SEK WANNAMETHEE (Thaïlande) a regretté que les autorités syriennes n'aient pas répondu aux demandes de la communauté internationale. Elle appelle à l'ouverture d'un dialogue constructif, condamne les violations des droits de l'homme, en particulier celles commises contre des enfants, en encourage le Gouvernement de la Syrie à respecter ses engagements internationaux en matière de droits de l'homme. La communauté internationale n'a reçu aucune information sur les progrès réalisés par le Gouvernement syrien dans les enquêtes sur les violations des droits de l'homme commises depuis le mois de mars. Le représentant a appelé les États arabes et le Gouvernement syrien à trouver des moyens d'appliquer les recommandations de la Ligue des États arabes; et à enquêter sur les violations des droits de l'homme qui auraient été commises par des opposants.

M. CHRISTIAN STROHAL (Autriche) s'est dit préoccupé par les conclusions de la commission d'enquête internationale indépendante établie par le Conseil des droits de l'homme: le rapport de la commission révèle un ensemble de violations choquantes des droits de l'homme, l'application d'une politique visant à tuer plutôt que blesser, des violences sexuelles et des violations inacceptables des droits de l'enfant. Le représentant autrichien a répété son appel au Gouvernement pour qu'il mette fin aux exactions. Il a aussi déploré le manque total de coopération de la part du Gouvernement qui illustre, selon lui, un manque de respect choquant à l'égard de la communauté internationale. Enfin, pour l'Autriche, le fait que des crimes contre l'humanité ont été commis en Syrie justifie de référer la situation à la Cour pénale internationale.

M. GOPINATHAN ACHAMKULANGARE (Inde) a déclaré que compte tenu du rôle de la Syrie dans le processus de paix au Moyen Orient, on doit se préoccuper des événements qui ont endeuillé ce pays de plusieurs centaines de morts civiles et militaires. Le droit des personnes à manifester pacifiquement doit être garanti, mais on ne peut refuser aux États de s'acquitter de l'obligation de prendre des mesures de sécurité publique. Les actions de la communauté internationale doivent faciliter la mise en place d'un processus politique piloté par la Syrie, et ne pas laisser planer de menaces d'intervention ou de changement de régime. L'Inde observe en outre que la commission a dépassé son mandat en faisant référence, dans son rapport, à la possibilité d'une saisine de la Cour pénale internationale.

M. HE YAFEI (Chine) s'est dit très inquiet de la situation en Syrie. Selon lui, la solution doit se fonder sur les principes suivants: la violence ne pouvant qu'aggraver le conflit, les parties concernées doivent mettre fin à la violence et s'engager dans un processus politique pour la paix. La Ligue des États arabes et la Syrie doivent poursuivre leurs efforts en vue de préserver les intérêts de la population syrienne. Les États membres doivent pour leur part respecter les principes des Nations Unies et éviter de régler leurs différends par le recours à la force ou la menace d'un tel recours. Les offres d'assistance doivent mener à la recherche de solutions par le dialogue politique et le maintien de la paix et de la stabilité au Moyen Orient. Enfin, la situation des droits de l'homme ne doit pas être un prétexte pour remettre en question la souveraineté d'un pays et s'attaquer à son intégrité territoriale. Les questions de droits de l'homme ne doivent pas être politisées, a-t-il conclu, se prononçant contre un transfert de cette question à la Cour pénale internationale.

M. UMUNNA H. ORJIAKO (Nigéria) a regretté que le Gouvernement de la Syrie n'ait pas coopéré avec la commission d'enquête du Conseil des droits de l'homme. Le Nigéria condamne, dans les termes les plus forts, les détentions arbitraires de manifestants pacifiques, la torture et le décès d'enfants, les violences sexuelles, la fuite de milliers de personnes: il appelle les autorités à mettre un terme au bain de sang. Le Nigéria appelle aussi les bandes armées à cesser leurs attaques aveugles. Le représentant a regretté que le Gouvernement syrien n'ait pas réussi à instaurer les conditions nécessaires au dialogue politique, préférant recourir à la force militaire contre sa population.

M. MOHAMED DOULEH (Djibouti) a exprimé sa profonde préoccupation face à la détérioration constante de la situation en Syrie et estimé particulièrement troublantes les preuves collectées par la commission et établissant de manière crédible que des violations massives ont été commises par l'armée et les forces de sécurité syriennes. Djibouti lance un appel au Gouvernement syrien afin qu'il honore l'engagement d'entreprendre des réformes juridiques et politiques qu'il a lui-même annoncées et de répondre aux aspirations et exigences légitimes de la population syrienne. Le représentant a également lancé un appelé à toutes les parties prenantes afin qu'elles renoncent à la violence et qu'elles privilégient le dialogue et la négociation. À cet égard, il a accueilli chaleureusement les efforts déployés par la Ligue des États arabes afin de trouver un règlement pacifique du conflit.

M. FRANÇOIS ROUX (Belgique) a regretté que la détérioration de la situation des droits de l'homme en Syrie depuis la deuxième session extraordinaire du Conseil sur cette question. La Belgique regrette que la Syrie n'ait pas montré davantage de souplesse s'agissant des initiatives de la Ligue arabe, dont elle est pourtant membre fondateur. Le représentant belge a regretté la violation de leurs obligations internationales en matière de droits de l'homme par les autorités syriennes, en particulier celles qui leur incombent en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Observateurs

M. SAAD ALFARARGI (Ligue des États arabes) a fait remarquer que si la Syrie signait le protocole proposé par la Ligue, la crise pourrait être surmontée et le risque de l'internationalisation et de l'intervention étrangère écarté. L'objectif de ce protocole était de mettre en place un cadre juridique pour le travail de la Ligue des États arabes en Syrie, a-t-il précisé, mais il ne peut être accompli sans l'accord de la Syrie. Il a rappelé que le plan d'action ne constitue pas un accord entre la Syrie et la Ligue mais un engagement de la part de la Syrie à mettre fin aux violences, relâcher les prisonniers et retirer les militaires. Or, le Gouvernement de la Syrie n'a toujours pas respecté ses obligations au titre du plan d'action et a refusé de signer le protocole. C'est ce qui a conduit à la décision de boycott, a expliqué le représentant de la Ligue des États arabes, précisant que cette décision visait à exercer des pressions sur le Gouvernement tout en évitant d'avoir des conséquences négatives pour la population syrienne.

M. JEAN-BAPTISTE MATTÉI (France) a déclaré que la convocation de la session extraordinaire était le signe que le Conseil des droits de l'homme n'abandonne pas le peuple syrien qui subit, depuis des mois, des exactions barbares commises par ses propres autorités et qui frappent aveuglément hommes, femmes et enfants. Ces derniers étant victimes de pratiques particulièrement révoltantes destinées à provoquer la peur chez leurs proches. La convocation de cette session est aussi le signe, malheureusement, que les autorités syriennes sont restées jusqu'à présent sourdes aux appels des Nations Unies et de Ligue arabe. La France salue le travail remarquable réalisé par les membres de la commission internationale indépendante d'enquête malgré l'obstruction de la Syrie; les témoignages qu'ils ont pu recueillir sont accablants. Le Conseil doit en tirer toutes le conséquences et réagir pour mettre fin à ce que la Commission qualifie de crimes contre l'humanité. La France soutient pleinement les recommandations du rapport de la commission d'enquête et souhaite qu'une suite y soit donnée au plus vite.

M. HISHAM BADR (Égypte) a souligné que la situation en Syrie doit être résolue immédiatement de sorte à mettre fin à cette violence, libérer les détenus et entamer un dialogue social. Ces mesures sont nécessaires pour éviter une dégradation plus importante encore de la situation, a-t-il souligné, ajoutant que la solution n'est pas dans le sang. La délégation égyptienne rappelle qu'il n'est pas possible de lutter contre les aspirations du peuple; le Gouvernement doit prendre les bonnes mesures sociales qui assurent paix, stabilité, liberté, droits de l'homme et égalité. La priorité doit être de mettre fin au bain de sang et appuyer les aspirations légitimes du peuple syrien. Dans ce contexte, le représentant égyptien a demandé au Gouvernement syrien de coopérer avec la Ligue des États arabes et d'accepter le protocole qu'il propose et la visite de l'inspecteur de la Ligue. Il a par ailleurs précisé que son pays refuse catégoriquement toute résolution qui porterait atteinte à l'unité du pays. La Charte des Nations Unies demande aux États membres de s'abstenir d'intervenir par force, de recourir à l'intimidation et de porter atteinte à l'intégrité territoriale des États, a-t-il rappelé.

M. OĞUZ DEMİRALP (Turquie) a indiqué que son pays coopère sincèrement avec la direction syrienne pour assurer le bien-être du peuple syrien, et en particulier depuis le début du «printemps arabe». Malheureusement, la direction syrienne a suscité une crise des droits de l'homme qui ne fait que s'aggraver. L'escalade de la crise impose que la communauté internationale mette tout en œuvre pour éviter le pire, notamment une division sectaire en Syrie. La Turquie, qui a pris des mesures unilatérales, espère que le bain de sang cèdera la place à un dialogue politique au bénéfice des intérêts légitimes de la population syrienne, comme devrait y engager les obligations de la Syrie découlant du droit international humanitaire.

M. PARK SAN-KI (République de Corée) a expliqué que son pays et la communauté internationale ont déjà exprimé leurs préoccupations face aux violences commises en Syrie et demandé que ces violences cessent, notamment lors de deux sessions extraordinaires précédentes du Conseil des droits de l'homme. Il a regretté que le Gouvernement syrien ne coopère pas avec la communauté internationale et en particulier avec la Ligue des États arabes. Il s'est dit d'avis qu'en dépit des efforts de la Ligue, des mesures doivent également être prises par les Nations Unies, et en particulier par le Conseil des droits de l'homme. Il a à cet égard soutenu la recommandation de la commission internationale indépendante d'enquête portant sur la création d'un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Syrie.

M. SYED MOHAMMAD REZA SAJJADI (Iran) a déclaré que son pays prend note du rapport la commission et est préoccupé par la situation en Syrie, qui a entraîné la mort de trop nombreux civils et militaires. L'Iran recommande aux autorités syriennes de mener des enquêtes approfondies au sujet de toutes les violations des droits de l'homme et d'en sanctionner les auteurs. L'Iran appelle par ailleurs au respect du principe de souveraineté des États dans toute démarche en vue de résoudre la crise en Syrie. L'Iran demande aussi au Conseil de d'abstenir de politiser ce débat et de créer de nouveaux mandats ou mécanismes.

MME ELISSA GOLBERG (Canada) a déploré qu'après neuf mois de terreur, aucune solution n'ait été trouvée à la crise, poussant la communauté internationale à prendre des sanctions. Elle a fait remarquer que le rapport de la commission d'enquête internationale indépendante établie par le Conseil contient des conclusions profondément troublantes faisant état notamment de violations systématiques et généralisées des droits de l'homme. Le rapport rend compte de la souffrance des victimes, a-t-elle souligné. Compte tenu du refus du régime de changer son comportement et d'établir un environnement permettant la réelle application des réformes, il importe de prendre des mesures. Il faut isoler le régime actuel jusqu'à ce que les souffrances des civils cessent, a préconisé la représentante. Elle a également relevé l'importance que la Syrie coopère avec la Ligue des États arabes.

M. PETER WOOLCOTT (Australie) s'est félicité de l'organisation de cette session extraordinaire, compte tenu des nombreuses preuves réunies sur les violations des droits de l'homme commises par les autorités syriennes. L'Australie estime que certaines de ces violations pourraient être poursuivies par la Cour pénale internationale. Elle estime en outre que le moment est venu pour le Président Al Assad de partir.

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HRC11/143F