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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME TIENT UNE RÉUNION AVEC LES ÉTATS PARTIES AU PACTE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, au Palais des Nations à Genève, une réunion avec les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Au cours de cette réunion, ont été abordées les questions ayant trait aux ressources financières à disposition du Comité; à la présentation par les États de rapports ciblés répondant à une liste de questions du Comité; à l'observation générale du Comité sur la liberté d'expression; aux directives générales sur la présentation et le contenu des rapports des États; et aux décisions adoptées par le Comité à l'issue de l'examen de plaintes (communications). Des membres du Comité sont intervenus pour présenter brièvement chacune de ces cinq questions.

La Présidente du Comité, Mme Zonke Zanele Majodina, a estimé que ce type de réunion entre le Comité et les États parties au Pacte devrait se tenir plus régulièrement. Depuis la dernière réunion de ce type en 2009, le Comité a examiné 43 rapports d'États parties, soit 14 par an. Il a en outre traité en moyenne 80 communications par an et l'arriéré est à ce jour de 360 communications en souffrance qui attendent d'être traitées, a-t-elle ajouté. Depuis sa dernière réunion avec les États parties, le Comité a également mis à jour ses directives concernant l'établissement des rapports des États parties au Pacte, a poursuivi la Présidente. Mme Majodina a indiqué que le Comité était inquiet que des rapports initiaux, dont certains sont attendus depuis maintenant seize ans, n'aient toujours pas été présentés par certains États parties. La Présidente a par ailleurs rappelé que le Comité poursuit l'élaboration régulière d'observations générales, dont la dernière en date est l'observation générale n°34 sur la liberté d'expression, qui a été adoptée au cours de la session de juillet dernier du Comité.

Dans le cadre de la discussion de cet après-midi, plusieurs États parties ont reconnu l'importance qu'il y a, pour les organes conventionnels, à disposer des ressources nécessaires à leur bon fonctionnement. Plusieurs pays sont intervenus pour soutenir la nouvelle procédure relative à la liste de points à traiter adressée aux États parties préalablement à l'examen de leurs rapports, mais nombre d'entre eux ont insisté sur la nécessité de veiller à ce que cette liste de questions se fonde sur des informations dignes de foi et aborde de manière non sélective toutes les dispositions du Pacte. De la même manière, lorsque des problèmes se posent et que des pistes sont explorées pour y répondre, il convient de ne pas s'éloigner des dispositions du Pacte, qui doivent rester le point de référence, a-t-il été souligné. Plusieurs délégations ont par ailleurs déploré de ne pas avoir été davantage consultées lors du processus d'élaboration de l'observation générale n°34 sur la liberté d'expression.

Les représentants des États parties suivants sont intervenus durant la discussion: Argentine, Suisse, Jamaïque, Égypte, Pakistan, États-Unis, Philippines, Algérie, Bélarus, Afrique du Sud, Mexique et Thaïlande.


Le Comité termine sa session le vendredi 4 novembre prochain, et devrait rendre publiques, à cette occasion, ses observations finales concernant les rapports d'États parties examinés au cours de la session.
Déclarations liminaires

MME Zonke Zanele Majodina, Présidente du Comité, a estimé que ce type de réunion entre le Comité et les États parties au Pacte devrait se tenir plus régulièrement. Depuis la dernière réunion de ce type en 2009, a-t-elle souligné, le Comité a examiné 43 rapports d'États parties, soit 14 par an. Il a en outre traité en moyenne 80 communications par an et l'arriéré est à ce jour de 360 communications en souffrance qui attendent d'être traitées, a-t-elle ajouté. Depuis sa dernière réunion avec les États parties, le Comité a également mis à jour ses directives concernant l'établissement des rapports des États parties au Pacte. Mme Majodina a par ailleurs exprimé la préoccupation du Comité de ce que des rapports initiaux, dont certains sont attendus depuis maintenant seize ans, n'aient toujours pas été présentés par certains États parties. Elle a enfin rappelé que le Comité poursuit l'élaboration d'observations générales, dont la dernière en date est l'observation générale n°34 sur la liberté d'expression, qui a été adoptée au cours de la session de juillet dernier du Comité.

Évoquant la question des ressources à disposition du Comité, M. FABIÀN OMAR SALVIOLI, membre du Comité, a souligné que le Comité admet parfaitement qu'il fait partie d'un système plus général de droits de l'homme, au sein du système des Nations Unies. Mais il n'en demeure pas moins que le Comité a des caractéristiques propres; il doit en effet traiter de toute une série de droits à la fois individuels et collectifs. Les droits de l'homme sont le troisième pilier des Nations Unies, mais il demeure le parrain pauvre car moins de 4% des ressources des Nations Unies lui sont alloués, a fait observer M. Salvioli. Il a souligné que le Comité ne dispose pas des ressources nécessaires pour permettre la traduction des documents qui constituent pourtant une partie fondamentale du travail de cet organe; ainsi, les réponses des États parties (à la liste de questions préalables que leur adresse le Comité) ne sont pas traduites, ce qui engendre de nombreuses difficultés et ne va pas sans conséquence sur la qualité finale du travail du Comité. En outre, comme l'a indiqué la Présidente, le Comité enregistre un important arriéré pour ce qui est du traitement des communications individuelles qui lui sont soumises; cela est dû au fait que le secrétariat du Comité ne dispose pas des ressources dont il a besoin pour préparer les dossiers qui sont soumis, à ce titre, au Comité. De plus, il est demandé au Comité de réduire le nombre de mots de ses décisions et observations afférentes à ces communications individuelles. Le Comité pour sa part, a fait preuve de souplesse en acceptant de travailler sans disposer toujours des documents nécessaires dans ses langues de travail, a souligné M. Salvioli, avant de rappeler que les membres du Comité doivent pouvoir recevoir des émoluments. Le déficit de ressources est préjudiciable avant tout pour les États parties eux-mêmes car ils ne vont pas pouvoir bénéficier du travail de cet organe, qui vise à les aider, a conclu l'expert.

Évoquant pour sa part la question des rapports ciblés présentés sur la base des réponses à la liste de questions à traiter préalablement adressée aux États parties en vue de l'examen de leurs rapports, M. Yuji Iwasawa, membre du Comité, a rappelé que cette procédure a été adoptée au moins de novembre dernier et qu'elle constitue l'une des principales innovations du Comité depuis la précédente réunion tenue avec les États parties. Il a renvoyé les États parties au document décrivant les modalités pratiques de la mise en œuvre de cette nouvelle procédure, publié sous la cote CCPR/C/99/4. Les États parties qui sont susceptibles de se soumettre à cette nouvelle procédure sont ceux dont les rapports doivent être examinés en 2013 et au-delà et ceux dont les rapports auraient dû être présentés il y a plus de dix ans, a précisé M. Iwasawa. Il a ajouté que cette nouvelle procédure non obligatoire se substitue, pour les États qui l'acceptent, à la procédure de présentation des rapports périodiques, ce qui peut réduire considérablement la charge de travail tant du Comité que des États parties; ainsi les États qui répondront à la liste de points à traiter n'auront plus à présenter de rapports.

S'agissant de l'observation générale sur la liberté d'expression adoptée par le Comité au mois de juillet dernier, M. MICHAEL O'FLAHERTY, membre du Comité, a rappelé que le Comité avait déjà adopté, il y a près de 30 ans, une observation générale (n°10) sur l'article 19 du Pacte, qui concerne la liberté d'opinion et d'expression. En mars 2009, le Comité a estimé que le moment était venu de remplacer cette ancienne observation générale par une nouvelle sur le même thème. La nouvelle observation générale contient 52 paragraphes; c'est l'une des plus détaillées jamais adoptées par le Comité, a-t-il souligné. La nouvelle observation générale détermine le champ d'application, la portée et les possibilités de restriction de la liberté d'expression de manière très claire, a souligné l'expert, soulignant que l'important est ici de veiller à ce que la capacité de restreindre la liberté d'expression ne porte pas préjudice à la réalisation de ce droit.

En ce qui concerne les directives concernant la présentation et le contenu des rapports à présenter par les États parties, Mme IULIA ANTOANELLA MOTOC, membre du Comité, a souligné que le Comité a adopté de nouvelles directives révisées, telles que publiées dans le document CCPR/C/2009/1. Le document de base commun qui existe pour tous les organes conventionnels vaut également pour le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a-t-elle souligné, mettant l'accent sur l'harmonisation des pratiques à cet égard entre les différents organes. S'ajoute à ce document de base commun un document spécifique présenté pour chaque instrument (ici le Pacte). Mme Motoc a souligné qu'en décidant d'adresser aux États, préalablement à l'examen de leurs rapports, des listes de questions à traiter, le Comité entend les aider à mieux concentrer et cibler leur réflexion et leurs réponses, faute de quoi, la procédure alternative consiste pour les États à soumettre des rapports abordant la mise en œuvre du Pacte article par article.

S'agissant enfin de l'examen des plaintes reçues par le Comité, M. KRISTER THELIN, membre du Comité et rapporteur chargé du suivi des communications, a souligné que cet examen enregistre un arriéré qui représente quatre années de travail, au rythme actuel de traitement des communications par le Comité. M. Thelin a par ailleurs attiré l'attention sur l'observation n°33 adoptée par le Comité, qui concerne les effets du Protocole facultatif, tels que les entend le Comité. Pour ce qui est de la question de la validité juridique des vues du Comité, l'expert a souligné que ces décisions prises à l'issue de l'examen des communications montrent l'interprétation que le Comité fait du Pacte et du Protocole. Récemment, a en outre rappelé M. Thelin, une décision a été adoptée, qui entrera en vigueur au 1er janvier prochain, et qui concerne l'interprétation que fait le Comité de la notion d'abus par un État de la procédure de communication en vertu du Protocole, en particulier lorsque cet État dépasse un certain délai pour l'épuisement des voies de recours interne.

Interventions de délégations d'États parties

Le représentant de l'Argentine a souligné qu'il est important que le Comité dispose des ressources nécessaires à son bon fonctionnement. Le problème des ressources financières est un problème qui se pose pour tous les organes et que l'on aimerait ne pas qualifier de systémique, a pour sa part fait observer la représentante de l'Algérie. Il faut accorder aux organes conventionnels toutes les ressources dont ils ont besoin, a déclaré le représentant de la Suisse. Mais en 2009 et 2010, a-t-il relevé, à la troisième Commission de l'Assemblée générale, il a été difficile de répondre aux demandes de prolongation de sessions présentées par plusieurs organes conventionnels; il faut donc espérer que cette année, les requêtes de cette nature adressées à l'Assemblée générale seront acceptées, a-t-il affirmé. La représentante de l'Égypte a relevé que le système des organes conventionnels souffre d'un déficit de financement pour pouvoir fonctionner efficacement et a souhaité savoir si le Haut-Commissariat aux droits de l'homme avait procédé à une analyse ventilée de la manière dont les ressources sont affectées comité par comité. Pour sa part, le représentant des États-Unis a relevé qu'il est d'autant plus difficile d'établir un budget prévisionnel fixe pour les travaux des comités que les États parties ne présentent pas toujours leurs rapports en temps voulu, comme l'attestent les nombreux et importants arriérés en la matière.

Le représentant de la Thaïlande a souhaité savoir comment le Comité entend mener à bien son nouveau travail de préparation de listes de questions à traiter, étant donné les difficultés de ressources auxquelles cet organe est confronté. Le représentant de la Suisse est intervenu pour indiquer que son pays est favorable à cette nouvelle procédure alternative, qui consiste pour les États parties à répondre à une liste de questions écrites qui leur est adressée préalablement à l'examen de leurs rapports, étant entendu que cette procédure ne doit valoir qu'après que le rapport initial et le premier rapport périodique ont été présentés. La représentante du Pakistan a jugé bonne l'idée de disposer d'une liste de questions à traiter, adressée aux États préalablement à l'examen de leurs rapports; néanmoins, il ne faudrait pas donner l'impression, dans ce contexte, que l'on accorde davantage d'importance à une question qu'à une autre, a-t-elle averti. Le représentant des Philippines a insisté pour que la nouvelle procédure soit facultative et se fonde sur des informations dignes de foi. L'idée de disposer d'une liste de points à traiter envoyée aux États parties préalablement à l'examen de leurs rapports est très louable; mais elle s'accompagne de préoccupations s'agissant notamment de la nécessité de garantir le principe de non sélectivité, a quant à elle souligné la représentante de l'Algérie; en effet, il convient de veiller dans ce contexte de ne privilégier aucune disposition du Pacte au détriment d'autres, a-t-elle insisté. La représentante de l'Afrique du Sud a souhaité savoir comment les membres du Comité choisissent les questions devant figurer sur la liste de points à traiter. La représentante du Mexique a jugé efficace l'idée de disposer d'une liste de points à traiter adressée aux États parties préalablement à l'examen de leurs rapports.

En ce qui concerne l'observation générale n°34 sur la liberté d'expression, le représentant de la Suisse a fait observer que dans le texte de cette observation générale, fait défaut - s'agissant du droit d'accès à l'information, abordé dans cette observation - une référence au droit de diffuser des informations détenues par les autorités nationales; en effet, dans certains pays, des personnes sont jetées en prison sous couvert de protection d'informations relevant de la sécurité nationale, a-t-il rappelé. La représentante du Pakistan s'est demandée s'il y avait eu des consultations et discussions interactives avec les États parties avant l'adoption de cette observation générale. Elle a indiqué ne pas bien saisir la suite qui pourrait être donnée aux propos qui seront tenus à ce sujet cet après-midi, étant donné que les États parties se voient saisis de cette question à la présente réunion alors que l'observation générale a déjà été adoptée. La liberté d'expression est un droit de la plus grande importance qu'il convient de protéger à tout prix; mais des éléments posent problème quant au lien entre les articles 19 et 20, eu égard au fait qu'il n'existe pas de définition, en droit international, de ce qui peut être considéré comme un «discours haineux», a par ailleurs affirmé la représentante pakistanaise. Le représentant des États-Unis a rappelé l'importance que son pays accorde à la liberté d'expression et donc à l'observation générale n°34 du Comité, qui est cruciale. Certaines des préoccupations que les États-Unis avaient exprimées au sujet de la question de la liberté d'expression n'ont pas été reprises dans la version finale de cette observation générale, a-t-il déploré. Le représentant du Bélarus a en outre mis en question l'acceptabilité des observations générales qui ne sont pas adoptées à l'issue d'un processus de consultations mené auprès des États parties.

En ce qui concerne les plaintes individuelles, le représentant des Philippines a rappelé que l'épuisement des voies de recours interne est un critère essentiel pour l'examen des communications, sur lequel l'ensemble du système des Nations Unies doit se fonder. Le représentant du Bélarus a fait part de ses inquiétudes quant à l'enregistrement non justifié de communications par le Comité, en violation du Protocole facultatif dont l'article 2 prévoit que le plaignant doit avoir épuisé toutes les voies de recours interne avant de soumettre une plainte au Comité. Le Comité des droits de l'homme devrait pouvoir renvoyer certaines des communications qui lui ont été transmises à d'autres organes (Comité contre la torture, notamment), a estimé le représentant de la Suisse.

Pour sa part, le représentant de la Jamaïque a souhaité savoir en quoi – et en vertu de quelle disposition du règlement intérieur du Comité ou du Pacte – la composition d'une délégation peut poser problème et être considérée comme attentatoire aux droits de l'homme, relevant que la Présidente du Comité a par le passé laissé entendre que le fait pour un État de ne pas inclure dans la délégation de représentants venus de la capitale constitue un témoigne de sa mauvaise disposition vis-à-vis du Pacte.

Réponses de membres du Comité

Comment se fait-il que seuls 11 États parties aient accepté d'être examinés en vertu de la nouvelle procédure basée sur une liste de listes de questions à traiter, a demandé la Présidente du Comité? L'application de cette nouvelle procédure, qui vise à améliorer les méthodes de travail du Comité sans être une panacée, fera l'objet d'une évaluation à l'issue d'une période de cinq ans, a-t-elle indiqué. Un autre expert a souligné que cette nouvelle procédure s'applique à tous les États, sans sélectivité aucune. En revanche, la nouvelle procédure est différente de la procédure classique puisqu'elle prévoit que les réponses fournies à la liste de questions valent rapport; le Comité souhaite dialoguer avec les États avant que les réponses aux points abordés dans la liste ne soient plus d'actualité.

S'agissant de l'observation générale n°34 sur la liberté d'expression, un membre du Comité a rappelé que l'usage au sein du Comité veut qu'il n'y ait pas de dialogue avec les États parties préalablement à l'adoption d'une observation générale. Néanmoins, dans le cadre du processus d'élaboration d'une observation générale, y compris celle-ci, le Comité demande aux États parties de présenter leurs commentaires et tous ces commentaires ont été pris en compte dans le cas d'espèce, a assuré l'expert.

En ce qui concerne les plaintes individuelles, un membre du Comité a souligné que certaines des communications adressées au Comité ne sont pas enregistrées. S'agissant de celles qui sont transmises au Comité, il lui revient de déterminer si l'article 2 du Protocole facultatif, sur l'exigence d'épuisement des voies de recours internes, a été respecté.

En ce qui concerne la question des ressources, un représentant du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, M. Paulo David, a rappelé que le budget du Comité s'inscrit dans le cadre d'un budget biennal. Pour les dix organes créés en vertu d'instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme, le budget global pour 2011, est de 50 millions de dollars de frais de fonctionnement, dont 30 millions alloués aux services de conférences (documentation, traduction, interprétation…) et 18 millions au Haut-Commissariat lui-même – dont 12 millions pour le personnel, les 6 autres millions allant aux 172 experts pour les 22 sessions annuelles.


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CT11/022F