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COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES: AUDITION D'ONG SUR LE LESOTHO, LE TCHAD, LE KOWEÏT ET LA CÔTE D'IVOIRE

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a tenu, cet après-midi, une réunion informelle avec des représentants d'organisations non gouvernementales s'agissant de la situation qui prévaut, au regard des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, dans les quatre pays dont les rapports seront examinées cette semaine: Lesotho, Tchad, Koweït et Côte d'Ivoire.

En ce qui concerne le Lesotho, ont particulièrement été évoqués les mariages forcés de mineures, l'impossibilité pour les femmes d'hériter, la violence contre les femmes, ainsi que la situation des femmes rurales.

Pour ce qui est du Tchad, l'attention a été attirée sur la prolifération des armes légères, le manque d'accès à l'eau potable, la traite de personnes, la violence contre les femmes, les mutilations génitales féminines, les mariages précoces, les expulsions forcées de populations dans la capitale ou encore la situation des femmes incarcérées, dont les droits sont bafouées.

En ce qui concerne le Koweït, des organisations non gouvernementales ont évoqué en particulier les âges minima de mariage pour les filles et pour les garçons; la pratique de la polygamie; ou encore l'inégalité des femmes face à l'héritage.

S'agissant enfin de la Côte d'Ivoire, l'attention s'est concentrée sur la Commission sur le dialogue, la vérité et la réconciliation qui, a-t-il été souligné, doit permettre d'associer les femmes au processus de paix et de reconstruction dans ce pays et de traiter de la question de la violence contre les femmes et l'impunité, en engageant des poursuites contre les auteurs des crimes qui ont été commis par toutes les parties au conflit.


Demain, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport du Lesotho (CEDAW/C/LSO/1-4).


Aperçu des interventions

S'agissant du Lesotho

Une représentante du Lesotho Council of NGOs a salué l'adoption en 2006 de la Loi sur la capacité juridique des personnes mariées, qui reconnaît le statut des femmes mariées en tant que citoyennes indépendantes du Lesotho. Elle a également attiré l'attention sur l'introduction d'un quota de 30% pour la participation des femmes dans les conseils locaux. Elle a en revanche exprimé sa préoccupation face au maintien par cet État partie de la réserve qu'il a émise à l'égard de l'article 2 de la Convention. Elle a en outre fait part de ses préoccupations s'agissant des mariages forcés de mineures, de l'impossibilité pour les femmes d'hériter, de la violence contre les femmes ou encore de la situation des femmes rurales.

Une représentante de la Federation of Women Lawyers a souligné que le taux élevé de violence contre les femmes reste un problème grave au Lesotho. Aucune loi ne traite de violence domestique et aucune loi ne permet de dissuader les hommes d'exercer ce type de violence, qui est considérée comme culturellement acceptable, a-t-elle insisté. Elle a en outre attiré l'attention sur les problèmes que rencontrent les femmes rurales, notamment en ce qui concerne l'accès aux services d'éducation et de santé et aux opportunités économiques.

Une experte du Comité a évoqué la question des mariages forcés de jeunes filles mineures au Lesotho en relevant qu'un ministre du Gouvernement semble avoir autorité pour avaliser le mariage d'une jeune fille n'ayant pas atteint l'âge de majorité. La représentante d'une organisation non gouvernementale a souscrit à la suggestion de l'experte que ce ministre pourrait être invité à exercer son autorité dans un sens contraire pour refuser de donner son autorisation pour tout mariage de mineure.

S'agissant du Tchad

Une représentante de l'Association des femmes pour le développement et la culture de la paix au Tchad a sollicité l'appui du Comité afin que soit combattue la prolifération des armes légères dans ce pays, qui causent des dizaines de milliers de morts chaque année, dont la plupart sont des civils et particulièrement des femmes et des enfants. Elle a en outre fait observer que le Tchad ne dispose toujours pas de loi contre la violence fondée sur le sexe. Plus de 70% de la population tchadienne n'ont pas accès à l'eau potable, pas même dans la capitale, a par ailleurs souligné cette intervenante, ajoutant que les structures de santé sont très limitées, en particulier dans les zones rurales. Par ailleurs, la traite est fortement présente dans certaines régions du pays et fortement pratiquée entre les Tchadiens du milieu rural, en particulier dans la Tandjilé Ouest, a-t-elle poursuivi, précisant que la plupart des victimes sont les filles enlevées et envoyées à l'Est du Tchad et dans la capitale.

Un représentant d'Amnesty International a déclaré que les femmes et les filles à l'Est du Tchad continuent d'être victimes de discriminations et d'autres violations de leurs droits fondamentaux. Les femmes sont également victimes de discriminations dans les autres régions du pays; en effet, la violence sexuelle, les mutilations génitales féminines, les mariages précoces et forcés continuent d'être pratiqués dans l'ensemble du pays, a ajouté l'orateur. Il en outre dénoncé les expulsions forcées de populations dans la capitale, N'Djamena, soulignant qu'elles entraînent des perturbations considérables pour la scolarisation des enfants. Le représentant a par ailleurs déclaré que les droits des femmes incarcérées ne sont pas respectés; en règle générale, leur sécurité est menacée dans les prisons, notamment par la présence de gardiens de sexe masculin, a-t-il indiqué. Il a par ailleurs souhaité que des mesures soient prises contre les causes du recrutement et de l'utilisation des filles par les forces et groupes armés.

Une experte a demandé s'il était exact que les sanctions sévères prévues à l'encontre de toute personne qui viole une fillette de moins de 13 ans sont réservées à une certaine catégorie de Tchadiens et a voulu savoir laquelle. La représentante d'une ONG a affirmé que la catégorie de Tchadiens qui n'est pas soumise à la loi pénalisant le viol de fillettes sont «ceux qui ne sont pas de la mouvance» du parti au pouvoir Tchad.

Le représentant d'une ONG a par ailleurs expliqué que les droits des femmes détenues ne sont pas respectés au Tchad car elles n'ont accès ni aux médicaments, ni aux soins de santé primaire, ni à une alimentation adéquate. Depuis février 2008, a-t-il poursuivi, les autorités tchadiennes se sont engagées dans une politique d'expulsions forcées dans la capitale; au moins 60 000 personnes, essentiellement des femmes, ont ainsi été expulsées à N'Djamena, a-t-il précisé.

S'agissant du Koweït

Une représentante de Musawah a déclaré que les recherches qui ont été menées par son organisation ont permis de mettre en lumière les nombreux domaines dans lesquels existent des inégalités entre hommes et femmes au Koweït. Ce pays maintient une réserve à l'égard de l'article 9.2 de la Convention qui accorde des droits égaux à ceux de l'homme en ce qui concerne la nationalité de leurs enfants et à l'égard de l'article 16.f qui accorde aux hommes et aux femmes les mêmes droits et responsabilités en matière de tutelle, de curatelle, de garde et d'adoption des enfants. Le Koweït affirme que ces dispositions de la Convention entrent en conflit avec la charia; or, comme l'a déjà souligné le Comité, les réserves à l'article 16 sont incompatibles avec la Convention. D'autre part, l'âge de mariage est de 15 ans pour les filles et de 17 ans pour les garçons et la polygamie est toujours autorisée au Koweït, a fait observer la représentante, ajoutant que pour se marier, les femmes musulmanes sunnites doivent obtenir le consentement de leur tuteur. En outre, le viol conjugal n'est toujours pas reconnu comme un crime au Koweït, a déploré l'oratrice. Elle a également déploré que les femmes koweïtiennes ne soient toujours pas en mesure d'hériter de parts égales à celles des héritiers de sexe masculin.

Une experte ayant souhaité savoir les questions sur lesquelles il conviendrait de se pencher prioritairement s'agissant des droits de la femme au Koweït, la représentante de l'ONG a souligné qu'il est très difficile de dire où sont les priorités s'agissant de l'action à mener en faveur des droits des femmes dans ce pays. Elle a toutefois fait observer que les législations fondées sur l'islam doivent être soumises à un examen critique.

S'agissant de la Côte d'Ivoire

Une représentante de Femmes Afrique Solidarité a attiré l'attention sur les violations graves de droits humains et plus particulièrement des droits des femmes qui ont été commises durant la crise électorale et post-électorale en Côte d'Ivoire. À cet égard, elle a apporté son soutien à la Commission sur le dialogue, la vérité et la réconciliation établie au mois de septembre dernier par le Gouvernement ivoirien, soulignant que cette Commission doit permettre d'associer les femmes au processus de paix et de reconstruction dans ce pays; en particulier, cette Commission doit traiter de la question de la violence contre les femmes et de l'impunité, en engageant des poursuites contre les auteurs des crimes qui ont été commis par toutes les parties au conflit.

Répondant à des questions de membres du Comité, la représentante de l'ONG a souligné que l'objectif final de la Commission sur le dialogue, la vérité et la réconciliation reste de recréer le tissu social qui s'est gravement détérioré avec la crise qui a frappé la Côte d'Ivoire.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CEDAW11/20F