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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT PÉRIODIQUE DE MAURICE

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique présenté par Maurice sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Les membres du Comité ont par ailleurs salué l'attribution, ce matin, du prix Nobel de la paix à trois femmes: la Présidente du Libéria, Mme Ellen Johnson Sirleaf; la Libérienne Leymah Gbowee et la Yéménite Tawakkul Karman.

Présentant le rapport de son pays, la Ministre de l'égalité entre les sexes, du développement de l'enfant et du bien-être de la famille de Maurice, Mme Maria Francesca Mireille Martin, a souligné que, comme le prévoit la Constitution, nul ne fait l'objet de discrimination sur la base de sa race, de sa couleur, de son opinion politique, de sa croyance, de sa caste, de son sexe ou de son lieu d'origine. Depuis l'examen du précédent rapport de Maurice, le Gouvernement a poursuivi ses efforts inlassables en faveur de la justice sociale et de l'égalité entre les sexes, a-t-elle assuré. Elle a notamment attiré l'attention sur les amendements apportés à la Loi sur la protection contre la violence domestique, qui alourdissent les peines prévues pour les auteurs de ce type d'infraction, y compris dans les cas de récidive. Le Gouvernement a décidé de mettre en place une Commission sur l'égalité des chances afin d'assurer la mise en œuvre de la Loi de 2008 sur l'égalité des chances. La Ministre aussi fait part des mesures prises par les autorités en faveur du renforcement des capacités des femmes et de leur autonomisation, en particulier dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la lutte contre la pauvreté. Elle a reconnu que, si les réalisations favorables aux femmes ont été nombreuses et positives à Maurice, le pays reste confronté à une tâche importante, s'agissant notamment de la nécessité de se départir des pratiques patriarcales qui restent fortement enracinées et entravent les droits fondamentaux des femmes.

La délégation mauricienne était également composée du Représentant permanent de Maurice auprès des Nations Unies à Genève, M. Servansing, ainsi que de représentants du Ministère de l'égalité entre les sexes, du développement de l'enfant et du bien-être de la famille et du Bureau du Procureur général. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, de la situation en ce qui concerne diverses lois en attente d'adoption ou d'abrogation; de la législation applicable au mariage, au divorce et à l'héritage; de la lutte contre la violence familiale et la traite de personnes; des questions d'éducation et de santé, notamment en ce qui concerne l'abandon scolaire et les grossesses d'adolescentes; des questions de travail et d'emploi, y compris pour ce qui a trait à la situation des travailleuses migrantes; et du maintien de dispositions discriminatoires dans la Constitution s'agissant de la Loi sur le statut personnel.

À cet égard, plusieurs expertes ont fait part de leurs préoccupations face au maintien de ces dispositions, jugées discriminatoires puisqu'elles prévoient que les domaines du mariage, du divorce et de l'accès à la propriété, entre autres, sont exemptés du principe de non-discrimination fondée sur le sexe. La délégation a tenu à préciser qu'il n'y a à Maurice ni loi de la charia, ni tribunaux de la charia.

Le Comité présentera ses observations finales sur le rapport de Maurice à la fin de la session, le vendredi 21 octobre 2011.

À sa prochaine séance publique, lundi après-midi à 15 heures, le Comité tiendra une réunion informelle avec des représentants d'organisations non gouvernementales au sujet de la mise en œuvre de la Convention dans des pays dont les rapports restent à examiner pour la présente session.


Présentation du rapport de Maurice

MME Maria Francesca Mireille Martin, Ministre de l'égalité entre les sexes, du développement de l'enfant et du bien-être de la famille de Maurice, a déclaré que depuis son indépendance en 1968, Maurice est une démocratie multiraciale et multiculturelle dynamique dont les fondations sont basées sur la promotion et la protection des droits de l'homme. «Notre population est notre seule ressource et l'investissement dans le développement du plein potentiel de chaque individu reste notre priorité», a souligné la Ministre. Comme le prévoit la Constitution, aucun individu ne fait l'objet de discrimination sur la base de sa race, de sa couleur, de son opinion politique, de sa conviction, de sa caste, de son sexe ou de son lieu d'origine.

Mme Martin a rappelé que Maurice a ratifié en 2008 le Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Elle a par ailleurs souligné que le pays avait également ratifié, en juin dernier, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant qui traite de la vente des enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants. La Ministre a en outre fait valoir que la délégation de Maurice avait soutenu, cette année, la résolution innovante sur les droits de l'homme et l'orientation sexuelle au Conseil des droits de l'homme.

Mme Martin a souligné que la Commission nationale des droits de l'homme dispose d'une Division consacrée à la discrimination fondée sur le sexe.

Depuis l'examen du précédent rapport de Maurice, en 2006, le Gouvernement a poursuivi ses efforts inlassables en faveur de la justice sociale et de l'égalité entre les sexes, a poursuivi la Ministre. Le Gouvernement actuel, élu en 2010, a réaffirmé sa volonté de maintenir et poursuivre les mesures mises en place depuis 2005, a-t-elle précisé.

En juin 2010, a indiqué Mme Martin, un comité national permanent a été mis en place pour veiller à la prise en compte des questions sexospécifiques dans toutes les politiques et programmes gouvernementaux. À ce jour, huit ministères ont déjà formulé leurs politiques en matière de sexospécificité et quatre autres sont en train de le faire.

La Ministre mauricienne a par ailleurs attiré l'attention sur les amendements apportés à la Loi sur la protection contre la violence domestique, en vertu desquels ont notamment été accrues les peines prévues pour les auteurs de ce type d'infraction, y compris dans les cas de récidive. Dans le contexte de la Journée internationale contre la violence faite aux femmes, le mois prochain, il est prévu de mettre en place une Plateforme nationale sur la violence fondée sur le sexe, a précisé Mme Martin.

La Loi de 2008 sur l'égalité des chances, adoptée par l'Assemblée nationale en décembre 2008, n'a pas encore été promulguée étant donné que l'on envisage de revoir le fonctionnement et la structure de la Commission nationale des droits de l'homme, a par ailleurs expliqué la Ministre. Le Gouvernement a décidé de mettre en place une Commission sur l'égalité des chances, totalement indépendante et dédiée à cette question, afin d'assurer la mise en œuvre de la Loi susmentionnée. Un projet de loi portant amendement à la Loi sur l'égalité des chances a donc été préparé par le Bureau du Procureur général, a précisé Mme Martin.

La Ministre a ensuite fait part des mesures prises par les autorités mauriciennes en faveur du renforcement des capacités des femmes et de leur autonomisation, en particulier dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la lutte contre la pauvreté. Elle a rappelé qu'à Maurice, l'éducation primaire et secondaire est gratuite depuis 1976. Elle a fait valoir qu'en 2010, le pays avait atteint la parité entre les sexes en termes de taux de scolarisation au niveau du primaire et a indiqué qu'au niveau du secondaire, ce taux se situe à 72% pour les filles et à 65% pour les garçons. Mme Martin a en outre rappelé qu'un Programme pour l'alphabétisation des adultes avait été mis en œuvre depuis 1986 par le Conseil national des femmes dans 38 régions, tant urbaines que rurales, et que ce Programme est en train de faire l'objet d'une évaluation en vue d'une éventuelle réorientation.

Pour ce qui est des questions de santé, la Ministre a reconnu que la féminisation du VIH/sida constituait pour les autorités mauriciennes un sujet de préoccupation. Maurice enregistre une hausse progressive du nombre de femmes infectées par le virus, qui est passé de 87 en 2006 à 135 en 2010, a-t-elle précisé.

Afin de trouver une solution, attendue depuis longtemps, à la question de l'avortement, le Ministère de l'égalité entre les sexes, du développement de l'enfant et du bien-être de la famille a engagé, en novembre 2009, des consultations avec les parties prenantes afin de recueillir les vues s'agissant de la dépénalisation de cette pratique, a par ailleurs la Ministre.

Afin de faire face à la féminisation de la pauvreté, a poursuivi indiqué Mme Martin, Maurice a adopté des politiques et des programmes en faveur des pauvres, axés sur le développement de l'enfant et de la famille; sur la promotion de capacités communautaires dans le domaine du logement; sur la formation; et sur le développement de l'entreprenariat.

La promotion des capacités économiques des femmes figure en bonne place parmi les priorités gouvernementales, a souligné Mme Martin. La proportion de femmes dans la main-d'œuvre totale du pays s'élevait à 44,2% en 2010, contre 42,6% l'année précédente, a-t-elle fait valoir. D'un autre côté, la récession économique a eu un impact disproportionné sur les femmes, lesquelles ont été licenciées ou sont restées au chômage. En outre, afin de joindre les deux bouts, des femmes acceptent des emplois à temps partiel ou dans le secteur informel, ce qui réduit d'autant leur protection sociale. Conscient de cette situation, la Fondation pour l'autonomisation des femmes met en place des programmes de renforcement des compétences et travaille étroitement avec les employeurs en faveur de la formation et, en fin de compte, de l'emploi de ces femmes. Nous espérons ainsi réduire le chômage des femmes, qui atteint 13%, contre 4,6% pour les hommes, a indiqué la Ministre.

Mme Martin a par ailleurs indiqué que la proportion de femmes élues au Parlement était de 18,8%, ce qui est incontestablement inférieur à l'objectif fixé. Afin d'assurer une représentation adéquate des personnes de chaque sexe au sein des autorités locales, un projet de loi sur la gouvernance locale en cours d'élaboration prévoit que tout groupe présentant plus de deux candidats à un scrutin local devra s'assurer que tous les candidats ne soient pas du même sexe. Cette initiative a nourri l'espoir qu'une fois ce projet de loi adopté, il montrera la voie pour la prise de mesures similaires pour les prochaines élections générales.

En conclusion, la Ministre a reconnu que, si les réalisations favorables aux femmes ont été nombreuses et positives à Maurice, «le pays reste confronté à un ordre du jour encombré pour ce qui est des questions sexospécifiques», s'agissant notamment de la nécessité pour le pays «de se départir des normes patriarcales qui restent fortement enracinées dans la société mauricienne et entravent les droits fondamentaux des femmes».

Faisant valoir que l'Economist Intelligence Unit a, pour 2010, placé Maurice au 23ème rang du classement des nations les plus démocratiques du monde, a fait valoir Mme Martin. «En tant qu'ardente défenseuse de l'égalité entre les sexes, je ne ménagerai aucun effort pour éliminer les vestiges de discrimination contre les femmes», a assuré la Ministre.

Le rapport périodique de Maurice (CEDAW/C/MUS/6-7) indique que le Mécanisme national pour l'égalité des sexes a diffusé un exemplaire des dernières observations finales du Comité à tous les ministères et organismes publics et une brochure sur les dispositions de la Convention a été diffusée par le Premier Ministre le 8 mars 2006 dans le cadre de la Journée internationale de la femme. En réponse aux recommandations du Comité, poursuit le rapport, la loi sur l'égalité des chances a été adoptée par le Parlement mais n'avait toujours pas été promulguée en août 2009. Cette loi établit expressément qu'aucune discrimination ne peut s'exercer en matière d'accès à l'éducation, mais aussi aux installations et aux services proposés dans les structures éducatives. Dans le même ordre d'idées, l'adoption en mars 2008 de la Politique-cadre nationale pour l'égalité des sexes a renforcé l'instauration d'une culture qui tient compte de la problématique hommes-femmes. Concernant l'application de mesures temporaires spéciales, le rapport souligne que la Constitution protège les droits des personnes et non des groupes. Le Gouvernement est convaincu que la représentation symbolique et les quotas ne sont pas un but en soit, et qu'il faut intégrer le principe de l'égalité des chances à tous les niveaux.

La féminisation est en cours dans la fonction publique, un nombre croissant de femmes fonctionnaires occupant des postes de responsabilités, poursuit le rapport. Pour ce qui est des femmes dans la vie politique, le rapport fait part d'un bond significatif du pourcentage de femmes siégeant au Parlement national ainsi que dans les collectivités locales, leur représentation étant passée de 5% à 17%. Dans l'enseignement, ajoute le rapport, l'enseignement universel et gratuit dans le primaire et le secondaire demeure une réalité et cet état de fait a largement contribué à l'avancement des femmes dans la société. Le rapport fait en outre état d'une loi relative à la lutte contre la traite de personnes adoptée le 21 avril 2009 par le Parlement et qui a pour objet de mettre en œuvre le Protocole des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes.

La Constitution stipule qu'aucune loi ne contiendra de disposition discriminatoire en elle-même ou dans ses effets; quiconque allègue que l'une des dispositions de cette disposition a été, est ou est susceptible d'être violée à son encontre pourra s'adresser à la Cour suprême pour faire respecter ses droits. La loi contre la discrimination sexuelle, entrée en vigueur le 8 mars 2003 et visant à assurer l'élimination de toutes les formes de discrimination sexiste et de harcèlement sexuel dans certains domaines de l'activité publique, a été abrogée et ses dispositions intégrées à la loi de 2008 sur l'égalité des chances, laquelle prescrit en outre l'établissement d'une commission de l'égalité des chances et d'un tribunal de l'égalité des chances. En 2004, indique par ailleurs le rapport, un certain nombre d'amendements ont été apportés à la loi de 1997 sur la protection contre la violence au foyer afin, notamment, de prolonger de 7 à 14 jours le délai de notification et de durcir les peines applicables en cas d'infraction. La réforme de la loi sur le mariage, en vigueur depuis 1982, vise principalement à établir un système unique de mariage pour tous, à l'exception des personnes de confession musulmane, qui ont le choix de se marier ou non selon ce rite, explique le rapport. En raison des difficultés à parvenir à un consensus dans la communauté musulmane elle-même, il est très difficile de concilier les lois de la République de Maurice avec les dispositions de la charia, souligne-t-il.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a constaté que persistent dans la Constitution mauricienne, et plus particulièrement à l'article 16.4.c de cette loi fondamentale, des dispositions qui prévoient que les domaines de l'adoption, du mariage, du divorce et de l'accès à la propriété sont exemptés du principe de non-discrimination fondée sur le sexe. Dans ses précédentes observations finales du Comité, le Comité avait recommandé l'abrogation de cette disposition de la Constitution. Aussi, l'experte a-t-elle souhaité savoir si un processus de révision constitutionnelle est envisagé à cette fin. D'autres membres du Comité ont également fait part de leurs préoccupations s'agissant du maintien des dispositions énoncées à l'article 16.4.c de la Constitution.

Au regard de la multitude des écoles de pensée s'agissant de la charia, il apparaît que l'égalité de la femme est possible dans le cadre de la charia, a fait observer une experte. Existe-t-il à Maurice des tribunaux spéciaux qui appliquent la charia, a-t-elle par ailleurs demandé? L'absence d'une répartition équitable des biens lors du divorce est une importante cause de paupérisation des femmes, a d'autre part souligné cette experte.

Une experte a encouragé Maurice à engager sans délai une politique visant à mettre en œuvre avec efficacité l'interdiction de la discrimination, directe comme indirecte, à l'encontre des femmes. Les mesures prises jusqu'ici à cette fin ont en effet été insuffisantes, puisqu'elles n'ont pas eu les résultats escomptés, a souligné cette experte.

Une experte a rappelé qu'il avait été demandé à Maurice d'ériger le viol conjugal en infraction pénale et a souhaité savoir s'il existe une volonté politique ou une possibilité de voir le viol conjugal incriminé dans ce pays.
Une experte a dit regretter qu'aucune ordonnance d'éloignement ne soit prononcée à Maurice à l'encontre des auteurs de violence au foyer; faute de telles ordonnances, comment voulez-vous que les femmes victimes osent porter plainte, a-t-elle souligné?

Maurice est un pays d'origine de la traite de personnes, dont les principales victimes sont les enfants et plus particulièrement les jeunes filles, a pour sa part souligné une autre experte. Maurice est également un pays de transit et de destination de la traite, nombre de femmes venant sur l'île dans le cadre d'un contrat et tombant ensuite «dans les griffes du travail forcé, de la prostitution et de la traite».

À Maurice, il y a 13 femmes parmi les 69 députés, a relevé une experte. Cette proportion ne dépasse certes pas les 20%. Ella voulu savoir quel soutien est apporté à l'action en faveur d'une meilleure représentation des femmes en politique, a-t-elle souligné.

Une experte a relevé que l'éducation est gratuite à tous les niveaux depuis 1976 et qu'en 2004, la législation a été modifiée afin d'instaurer la scolarité obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans. Néanmoins, il semble qu'il y ait dans le pays un absentéisme chronique au niveau du primaire, s'est-elle inquiétée, avant de demander si le taux d'absentéisme était plus élevé chez les filles ou chez les garçons. En 2006, le taux de redoublement était élevé au niveau du primaire, se situant entre 7 et 10% selon le sexe, a par ailleurs relevé l'experte. Dans quelle mesure les grossesses d'adolescentes contribuent-elles aux abandons scolaires et les jeunes filles mères peuvent-elles réellement aller à l'école pendant leur grossesse et réintégrer l'école après avoir accouché, a-t-elle en outre demandé?

S'agissant des questions relatives au travail et à l'emploi des femmes, une experte a relevé que les plaintes individuelles doivent être adressées au Secrétaire permanent du Ministère du travail. Les femmes semblent devoir présenter leur plainte sans le soutien d'un syndicat ou d'une quelconque autre organisation ou institution, s'est inquiétée cette experte. Aussi, les autorités mauriciennes envisagent-elles d'inverser ou tout au moins d'alléger le fardeau de la plainte pour les plaignantes, a-t-elle demandé?

Le congé paternité sera-t-il étendu aux couples non mariés, a également demandé cette experte?

Après avoir déploré la faible participation des femmes au marché du travail, l'experte s'est enquise des mesures prises ou envisagées par les autorités pour remédier aux horaires de travail lourds et inflexibles auxquels sont soumises les femmes et qui les empêchent de concilier vie familiale et vie professionnelle.

S'agissant de la situation des travailleuses migrantes, l'experte a relevé l'écart existant entre, d'une part, la version officielle qui affirme qu'il n'y a pas de discriminations en la matière et, d'autre part, les informations faisant état, pour ces travailleuses, de salaires inférieurs à ceux des Mauriciens, d'une impossibilité de s'inscrire à un syndicat, de retraits de passeports et d'obligation de se soumettre à un test de dépistage du VIH/sida.

En ce qui concerne les questions de santé, une experte s'est enquise des mesures prises aux fins de la mise en œuvre de la Loi relative au VIH/sida. Bien que l'avortement soit illégal à Maurice, cette pratique semble courante, a par ailleurs souligné cette experte, relevant que, comme l'indique le rapport lui-même, le nombre de femmes hospitalisées à l'issue de complications liées à l'avortement est important. Quand le projet de loi en cours d'élaboration pour dépénaliser l'avortement dans les cas où la vie de la mère est en danger ou en cas de viol ou d'inceste pourrait-il être adopté, a-t-il été demandé?

Réponses de la délégation

Les traités internationaux ratifiés par Maurice ne sont pas automatiquement intégrés dans la loi nationale et doivent donc faire l'objet d'une transposition en droit interne, le pays ayant en effet adopté un système dualiste, a indiqué la délégation. Ainsi, les dispositions de la Convention ont-elles dû être transposées dans différentes lois nationales, a-t-elle souligné. Le système judiciaire peut invoquer des dispositions de la Convention ou la jurisprudence du Comité, a ajouté la délégation.

La délégation a souligné que la Constitution garantit l'égalité des femmes et n'établit aucune distinction entre hommes et femmes; toutes les lois sont donc censées être neutres en termes de sexe, a-t-elle assuré. Pour ce qui est de l'article 16.4.c de la Constitution, relatif à la Loi sur le statut personnel, la délégation a indiqué comprendre les préoccupations du Comité. Cependant, la Constitution est la loi suprême du pays et une réforme constitutionnelle ne peut se faire du jour au lendemain; il y a des procédures précises pour cela et il faudra donc encore attendre un certain temps avant que cela ne se fasse, a estimé la délégation.

Une experte ayant souligné que cet article de la Constitution était discriminatoire et qu'il était urgent d'y remédier, la délégation a répondu que, dans le programme gouvernemental 2010-2015, il est prévu de procéder à un examen de la Constitution: le Gouvernement va nommer une équipe d'experts constitutionnalistes qui vont évaluer l'application de la Constitution depuis 1968 et proposer des modifications, y compris pour l'article 16.4.c. et pour ce qui a trait au système électoral, a-t-elle précisé.

Les autorités s'efforcent de combler les lacunes qui subsistent à Maurice du fait de sa société patriarcale, a par ailleurs souligné la délégation.

La délégation a par ailleurs souligné que la Loi contre la discrimination fondée sur le sexe n'a pas été abrogée et remplacée par la Loi sur l'égalité des chances; elle ne sera abrogée que lorsque cette dernière aura été adoptée, a précisé la délégation.

D'importants progrès ont été réalisés à Maurice en ce qui concerne la législation applicable au divorce, a assuré la délégation. En mars dernier, a-t-elle précisé, un projet de loi a été adopté par l'Assemblée nationale qui permet désormais le divorce par consentement mutuel.

Suite aux amendements apportés à la Loi sur le statut civil, un Conseil musulman a été créé en 1990 en vertu de cette loi, a indiqué la délégation. Ce Conseil a le droit de célébrer les mariages religieux avec effet au civil et la loi prévoit que les mariages ainsi célébrés peuvent l'être conformément aux rites musulmans, a précisé la délégation. La législation mauricienne prévoit donc un seul droit du mariage, sauf pour les personnes musulmanes.

Il n'y a pas à Maurice de tribunaux appliquant la charia, a souligné la délégation. Il n'y a à Maurice ni loi de la charia, ni tribunaux de la charia, a-t-elle insisté.

Il n'y a pas à Maurice de tribunaux de la famille, mais la création de tels tribunaux est actuellement envisagée, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a précisé que la Division de la famille de la Cour suprême ne se saisit que d'affaires traitant de divorce et de garde d'enfants.

Le Code civil accorde aux hommes et aux femmes des droits égaux en matière d'héritage, a en outre assuré la délégation.

Interrogée sur les efforts déployés pour lutter contre les stéréotypes sexistes, la délégation a fait part des mesures prises à cette fin dans le domaine de l'éducation. Les filles sont notamment encouragées à opter pour des études axées sur des sujets non traditionnels pour elles, a-t-elle expliqué.

La délégation a déclaré qu'il est envisagé d'intégrer une disposition sur le viol conjugal dans le projet de loi en cours de préparation sur les délits sexuels.

En l'état actuel, la législation mauricienne ne prévoit pas d'ordonnance d'éloignement dans les cas de violence familiale; en revanche, elle permet aux victimes de ce type de violence de solliciter une ordonnance de protection, a indiqué la délégation.

Maurice ne dispose pas de loi spécifique relative à la protection des témoins, a par ailleurs indiqué la délégation. Mais des dispositions existent qui permettent aux victimes de bénéficier d'un certain niveau de protection jusqu'à ce que l'affaire soit jugée par un tribunal. En outre, les enfants peuvent témoigner par vidéo, en particulier dans les affaires d'abus sexuels, a précisé la délégation.

La lutte contre la traite de personnes fait l'objet d'une loi adoptée en 2009 qui donne effet au Protocole à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes et prévoit le retour et le rapatriement des victimes à Maurice et leur indemnisation, ainsi que les sanctions applicables aux auteurs de ce type de délits. Pour l'heure, Maurice ne possède pas de plan national de lutte contre la traite de personnes, a reconnu la délégation, ajoutant prendre bonne note de la suggestion du Comité à cet égard.

Le projet de loi sur la gouvernance locale est examiné aujourd'hui même devant le Cabinet des ministres qui doit décider s'il peut être promulgué en l'état ou si des modifications doivent y être apportées, a indiqué la délégation. En vertu de ce projet, les femmes seront désormais davantage représentées dans les conseils municipaux, a-t-elle souligné.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a souligné qu'à Maurice, les mêmes opportunités scolaires sont offertes aux filles et aux garçons. L'absentéisme est important à Maurice, mais il se confine à certaines régions, a-t-elle déclaré. En effet, certaines régions ont été identifiées comme étant particulièrement vulnérables de ce point de vue; mais les filles ne sont pas davantage touchées que les garçons. Des patrouilles de police font des rondes autour des endroits où les jeunes qui ne vont pas à l'école ont l'habitude de se retrouver, afin de les renvoyer à l'école et d'avertir leurs parents, a indiqué la délégation.

En ce qui concerne les grossesses d'adolescentes, la délégation a indiqué que des jeunes filles se retrouvent enceintes à l'âge de 14 ou 15 ans. Néanmoins, des dispositions sont prises pour accueillir ces jeunes filles à l'école; le problème à cet égard est davantage social que structurel, a déclaré la délégation, affirmant ces jeunes filles enceintes sont gênées par le regard de leurs camarades. Quoi qu'il en soit, conformément à la législation en vigueur, les filles ne peuvent pas faire l'objet de discriminations ni être expulsées de l'école au motif qu'elles sont enceintes; elles peuvent en outre réintégrer l'école après leur accouchement.

En réponse aux préoccupations exprimées par certaines expertes s'agissant des conséquences des avortements illégaux, la délégation a indiqué qu'un dialogue a été ouvert afin de favoriser un changement de mentalités en la matière; il faut espérer que pourra être dégagé dans les mois qui viennent un consensus sur cette question, a-t-elle ajouté.

Les travailleurs migrants, qui constituent une part importante de la main-d'œuvre à Maurice, sont traités comme les travailleurs mauriciens, y compris pour ce qui est des salaires, a d'autre part assuré la délégation. Des cas de confiscation de passeports de travailleurs migrants ont effectivement été portés à la connaissance des autorités mauriciennes, mais les inspections qui sont menées sont efficaces et contribuent à atténuer ce phénomène, a assuré la délégation.

La législation en vigueur à Maurice ne contient aucune prescription relative aux congés paternité pour les couples non mariés, mais la délégation s'est engagée à se pencher sur cette question.


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CEDAW11/019F