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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DES SEYCHELLES

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport des Seychelles sur les mesures prises par ce pays en application de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport, M. Bernard Shamlaye, Ministre du développement social et de la culture des Seychelles, a notamment fait valoir que selon une étude publiée au mois de mars dernier par la Royal Commonwealth Society, les Seychelles sont, parmi les 54 pays du Commonwealth, le quatrième meilleur endroit où une petite fille puisse naître. Bien que le pays soit fier des progrès significatifs réalisés les autorités sont également conscientes que beaucoup reste à faire dans certains domaines. Des problèmes tels que le trafic de drogues illégales, l'abus de stupéfiants et d'alcool, la violence domestiques, entre autres, ont des conséquences néfastes sur les enfants et menacent l'essence même de notre petite société, a souligné le Ministre. Il a en outre reconnu que les contraintes pesant sur les ressources financières et humaines des Seychelles entravent la pleine mise en œuvre des droits énoncés dans la Convention. Maintenant que l'économie des Seychelles est relativement stable, l'attention du pays se concentre fermement sur la réforme sociale, a par ailleurs indiqué le Ministre.

La délégation seychelloise était également composée d'autres représentants du Ministère du développement social et de la culture. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, les questions relatives aux ressources humaines et financières disponibles aux fins de la mise en œuvre de la Convention; les âges minima du mariage pour les garçons et les filles, ainsi que l'âge du consentement sexuel; la prostitution des enfants; les questions de nationalité; le droit de l'enfant de connaître l'identité de ses parents biologiques; les enfants nés de parents chagossiens; les châtiments corporels; les questions d'éducation, s'agissant notamment de l'instruction des enfants handicapés; les questions de santé, s'agissant notamment du VIH/sida, des grossesses d'adolescentes et de la toxicomanie; l'âge du recrutement dans l'armée; les mesures prises en matière de prévention des violences sexuelles; ou encore le travail des enfants.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport des Seychelles, Mme Agnes Akosua Aidoo, a relevé que les indicateurs sociaux pour les Seychelles sont comparables à ceux que l'on peut observer pour certains pays de l'OCDE et que l'archipel a atteint la plupart des objectifs du Millénaire pour le développement. Elle a relevé trois défis structurels auxquels les Seychelles sont confrontées pour ce qui est de la mise en œuvre de la Convention, qui concernent les attitudes sociales traditionnelles , les faiblesses institutionnelles et les contraintes pesant sur la disponibilité de ressources humaines qualifiées. Elle a conclu que davantage doit être fait aux Seychelles, notamment dans le domaine législatif, afin de transposer dans le droit interne toutes les dispositions de la Convention. Il faut que le pays s'investisse davantage dans la lutte contre les causes socioculturelles des violences faites aux enfants et autres violations de leurs droits, a-t-elle ajouté. Il faut faire en sorte que les enfants de l'archipel sachent qu'ils ont des droits, a insisté la rapporteuse, attirant l'attention sur le potentiel énorme des Seychelles, qui pourraient devenir un modèle pour ce qui est de l'application des droits de l'enfant. La corapporteuse, Mme Pilar Nores, a pour sa part insisté sur la nécessité pour les Seychelles d'intégrer dans leur législation les principes de base de la Convention et de considérer l'enfant comme une sujet de droits.

Le Comité rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 7 octobre prochain, ses observations finales sur le rapport des Seychelles.


Vendredi matin, à 10 heures, le Comité entamera, au Palais des Nations, sa journée de discussion générale sur les droits des enfants dont les parents sont incarcérés.


Présentation du rapport

M. BERNARD SHAMLAYE, Ministre du développement social et de la culture des Seychelles, a rappelé que son pays avait soumis au Comité son rapport initial en 2001. Il a souligné que les Seychelles sont très engagées dans la promotion et le respect des droits de l'enfant dans le pays. Les Seychelles sont un petit État insulaire composé de quelque 115 îles et comprenant 87 440 habitants dont la plupart vivent sur les trois îles principales: Mahé, Praslin et La Digue, a-t-il précisé, rappelant que ce pays est le plus petit d'Afrique, avec 455 kilomètres carrés de terres émergées auxquels il faut ajouter une zone économique exclusive de 1,3 million de kilomètres carrés. Les enfants constituent 28% de la population totale, a indiqué le Ministre.

M. Shamlaye a rappelé que le Ministère du développement social et de la culture est le ministère responsable des enfants aux Seychelles et a été désigné comme organe responsable de la coordination de la réponse apportée par le pays au Comité des droits de l'enfant des Nations Unies. Le Ministre a également souligné que le Plan national d'action pour les enfants (2005-2009) était basé sur les principes de la Convention relative aux droits de l'enfant. Il a précisé que parmi les plus importantes initiatives prises dans le cadre de ce Plan national d'action, figuraient le Programme de bien-être des enfants, qui mesurait les tendances en matière de qualité de vie et de bien-être telles que perçues par les enfants et les jeunes du pays; la mise en place d'un cadre d'indicateurs de risques, afin d'assurer l'identification, à un stade précoce, des enfants vulnérables; ou encore la création du Centre de développement de l'enfant. Ces initiatives témoignent de l'engagement des Seychelles en faveur des questions relatives aux enfants, a souligné le Ministre. Il a en outre fait part de l'approbation récente, par le Gouvernement des Seychelles, d'un cadre pour les soins et l'éducation à l'intention de la petite enfance.

Le Ministre a par ailleurs fait valoir que selon une étude publiée au mois de mars dernier par la Société Royale du Commonwealth (Royal Commonwealth Society), les Seychelles sont, à égalité avec la Dominique, le quatrième meilleur lieu, parmi les 54 pays du Commonwealth, où une petite fille puisse naître (les trois premiers étant la Nouvelle-Zélande, la Barbade et la Trinité-et-Tobago).

«Bien que nous soyons fiers des progrès significatifs réalisés par les Seychelles», a poursuivi le Ministre du développement social et de la culture, «nous sommes également conscients que beaucoup reste à faire dans certains domaines». Des problèmes tels que le trafic de drogues illégales, l'abus de stupéfiants et d'alcool, la violence domestiques, entre autres, ont des conséquences néfastes sur les enfants et menacent l'essence même de notre petite société, a-t-il souligné. Il a en outre reconnu que les contraintes pesant sur les ressources financières et humaines des Seychelles entravent la pleine mise en œuvre des droits énoncés dans la Convention. À cet égard, il a fait observer que le présent rapport présenté par son pays propose des solutions possibles et avance des recommandations pour un avenir proche.

Comme on pouvait s'y attendre, la crise financière de ces dernières années n'a pas épargné les Seychelles, a par ailleurs souligné M. Shamlaye. Face à ce défi international et afin de remédier à certains déséquilibres économiques, a-t-il précisé, les Seychelles ont engagé en 2008 un ambitieux programme macroéconomique, aidées en cela par le FMI et la Banque mondiale et soutenues par des partenaires bilatéraux et multilatéraux. Ce programme a demandé une réduction dans l'emploi du secteur public et l'exercice d'une discipline fiscale, a indiqué M. Shamlaye. Parallèlement, le Gouvernement a veillé à ce que les investissements soient maintenus dans d'importants secteurs sociaux, notamment la santé et l'éducation, et a pris des mesures pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables, notamment en octroyant à toutes les écoles du pays des fonds visant à aider les élèves dont les parents s'avèrent incapables d'assurer le financement des fournitures scolaires.

M. Shamlaye a d'autre part reconnu la nécessité de remédier à certaines lacunes existantes en ce qui concerne la disponibilité de données ventilées s'agissant de certains domaines couverts par la Convention. Néanmoins, un certain nombre d'exercices de recherches ont d'ores et déjà été engagés, a-t-il ajouté, citant une étude sur la prostitution ou encore une étude, qui doit être achevée d'ici la fin de l'année, sur les changements subis par la structure de la famille seychelloise et les soutiens actuellement apportés aux familles. Maintenant que l'économie des Seychelles est relativement stable, l'attention du pays se concentre fermement sur la réforme sociale, a indiqué le Ministre. Au début de l'année, a-t-il rappelé, le Président de la République a demandé à la population de s'engager dans une renaissance sociale qui traitera des problèmes sociaux et permettra de promouvoir la cohésion sociale, la solidarité et le développement humain.

Enfin, le Ministre seychellois a mentionné le problème de piraterie auquel les Seychelles sont confrontées en raison de l'instabilité politique et sociale qui règne en Somalie.

Le rapport des Seychelles (CRC/C/SYC/2-4) souligne que d'importantes mesures ont été prises pour aligner la législation des Seychelles sur les dispositions de la Convention. La législation a été amendée et une commission spéciale chargée d'harmoniser les lois relatives aux enfants a été instaurée. Les contributions des diverses parties prenantes, notamment celles des enfants, ont été prises en considération en vue d'élaborer la législation sur la base d'une démarche participative. Plusieurs incohérences ont ainsi pu être été identifiées et la loi relative à l'enfance ainsi que le Code pénal ont été amendés. Ainsi, en vertu de la loi de 1998 portant modification de la loi relative à l'enfance, le Tribunal de la famille a été créé. La Commission nationale de protection de l'enfance (NCCP), la Commission interinstitutions, l'Équipe chargée de la protection de l'enfance, la Commission consultative sur les foyers pour enfants, la Commission des services sociaux, les groupes de travail interinstitutions sur les indicateurs de risque ainsi que les programmes d'éducation parentale et de protection de l'enfance s'appuient sur une expérience et une expertise de haut niveau. Ces commissions veillent également à ce que les différentes institutions utilisent au mieux leurs ressources et adoptent des approches de collaboration leur permettant de rendre des services optimaux aux enfants. Le Plan national d'action pour l'enfance (2005-2009) figure parmi les mesures les plus ambitieuses prises en faveur des enfants. D'autre part, poursuit le rapport, la création à Maurice de l'Observatoire des droits de l'enfant de l'Océan Indien (ODEROI) en novembre 2004 constitue une avancée significative à cet égard. L'Observatoire qui dessert les Comores, Madagascar, Maurice, la Réunion et les Seychelles est le fruit d'une initiative conjointe de la Commission de l'Océan indien, de l'Université de Maurice et de l'UNICEF.

Aux termes de la loi sur l'état civil, les jeunes filles âgées de 15 à 17 ans doivent obtenir le consentement de leurs parents pour se marier. L'âge nubile est de 18 ans pour les garçons. Des propositions d'amendement à la loi sont encore en cours d'examen. Tant la Constitution que la loi de 2004 sur l'éducation disposent que l'éducation est gratuite et obligatoire pour les enfants des Seychelles de la première classe du cycle primaire à la quatrième classe du cycle secondaire, c'est-à-dire pendant 10 ans. Aux termes de la loi sur l'éducation de 2004, l'âge de la scolarité obligatoire est l'âge auquel un enfant est tenu de fréquenter un établissement scolaire. Un enfant doit être scolarisé dès la première année du cycle primaire et ce jusqu'à la quatrième année du cycle secondaire, c'est-à-dire de l'âge de 6 ans à l'âge de 16 ans ou plus. Cependant, le Ministère de l'éducation reconnaît que chaque enfant se développe à son propre rythme et accepte que certains enfants soient admis en première année de primaire avant l'âge de six ans s'il est estimé que cette mesure sert l'intérêt supérieur de l'enfant. Bien que la législation des Seychelles interdise la discrimination, certaines valeurs et paradigmes culturels peuvent déboucher sur des pratiques d'exclusion ou d'aliénation. Ces pratiques sont très difficiles à combattre car elles échappent souvent au contrôle de la loi et sont profondément ancrées dans la culture et les mentalités populaires. Depuis toujours, les stéréotypes sexistes jouent un rôle discriminatoire dans la société dans la mesure où ils renforcent les inégalités entre hommes et femmes. Leurs effets se manifestent clairement au sein du système éducatif où il est attesté que les filles sont sous-représentées dans les branches technique et professionnelle malgré leurs bons résultats scolaires et la politique d'intégration du Gouvernement. En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, le rapport indique notamment que la Commission interministérielle sur les établissements pénitentiaires et les centres de redressement a indiqué qu'un centre de rééducation des jeunes délinquants sera aménagé dans la nouvelle prison qui sera construite à Mahé. L'ancien Établissement pénitentiaire pour mineurs qui hébergeait les jeunes délinquants et les enfants présentant des troubles du comportement sera progressivement supprimé. Jusqu'à la construction du nouveau centre de rééducation des jeunes délinquants, les mineurs détenus seront transférés dans l'établissement pénitentiaire pour adultes où des dispositions spéciales seront prises pour les accueillir.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME AGNES AKOSUA AIDOO, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport des Seychelles, a relevé que les indicateurs sociaux pour les Seychelles sont comparables à ceux que l'on peut observer pour certains pays de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), le pays étant classé 57ème sur 182 pays pour ce qui est de l'indice de développement humain. Les Seychelles ont atteint la plupart des objectifs du millénaire pour le développement, a-t-elle par ailleurs souligné, notant que le pays assure l'universalité de l'éducation primaire, assortie d'une parité entre les sexes, que les soins de santé primaire sont gratuits et que les taux de mortalité infantile et maternelle sont faibles.

Mme Aidoo a souhaité savoir ce qui retarde la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant qui traite de la vente des enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, signé par les Seychelles en 2001.

Mme Aidoo a ensuite relevé trois défis structurels auxquels les Seychelles sont confrontées pour ce qui est de la mise en œuvre de la Convention. En premier lieu, les attitudes sociales traditionnelles semblent indiquer que l'enfant n'est pas considéré non comme un détenteur de droit et que la promotion des droits de l'enfant est considérée comme susceptible d'aller à l'encontre des intérêts de la famille et de la société dans son ensemble en amenant l'enfant à remettre en cause l'autorité parentale et les autorités scolaires, par exemple. En deuxième lieu, Mme Aidoo a évoqué les faiblesses institutionnelles aux Seychelles, que reflètent les fréquents changements du point focal désigné au niveau gouvernemental pour traiter des droits de l'enfant et la fréquente rotation du personnel impliqué dans cette action au sein des ministères concernés. Enfin, Mme Aidoo a attiré l'attention sur les sérieuses contraintes pesant sur la disponibilité de ressources humaines qualifiées, ce qui a amène le pays à recourir à la main-d'œuvre étrangère, qui représente un quart de la main-d'œuvre totale.

La rapporteuse a souhaité savoir dans quelle mesure la société civile a été impliquée dans la préparation du présent rapport.

Mme Aidoo a en outre relevé que les jeunes filles peuvent se marier, avec le consentement de leurs parents, à partir de l'âge de 15 ans, alors que l'âge minimum du mariage est fixé à 18 ans pour les garçons; elle a souligné qu'il y a là une infraction au principe de non-discrimination énoncé dans la Convention.

Mme Aidoo s'est par ailleurs enquise du rôle de la Commission nationale pour les enfants et a souhaité savoir si le Ministère du développement social et de la culture était doté de ressources humaines, financières et techniques adéquates pour lui permettre de s'acquitter de sa tâche en matière de coordination des différentes entités impliquées dans l'application des programmes et politiques en faveur des droits de l'enfant et de du bien-être des enfants aux niveaux national et local.

La rapporteuse a d'autre part souhaité savoir quelles mesures ont été prises pour protéger les enfants dans le contexte de l'industrie du tourisme, qui représente avec le secteur des pêches 90% des recettes en devises étrangères. Existe-il ou est-il envisagé d'adopter un code de conduite, concerté avec l'industrie du tourisme, qui protègerait les enfants de pratiques néfastes telles que le tourisme sexuel et la prostitution infantile dans les zones touristiques? Les Seychelles sont incontestablement concernées par les changements climatiques et les pratiques de l'industrie de la pêche pourraient avoir sur l'environnement des effets qui pourraient affecter les vies des enfants vivant dans les zones côtières, a ajouté Mme Aidoo, avant de s'enquérir de ce qui est fait pour sensibiliser et réglementer cette industrie à cet égard.

MME PILAR NORES, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport des Seychelles, a félicité les Seychelles pour les innombrables mesures qu'elles ont récemment prises en faveur du bien-être de l'enfant, ce qui montre que l'État s'intéresse à ce segment de la population. Elle a notamment salué l'adoption de la loi relative à l'enfance portant notamment création du tribunal de la famille, qui permet d'assurer le versement de pensions alimentaires adéquates, lesquelles ont été augmentées. Subsiste néanmoins un écart entre les âges minima du mariage fixés pour les garçons et pour les filles, a regretté Mme Nores; du point de vue du Comité, a-t-elle rappelé, tout mineur de moins de 18 ans est considéré comme un enfant, indépendamment de toute question de maturité. En ce qui concerne l'âge du consentement sexuel et l'âge à partir duquel les mineurs sont autorisés à accéder aux contraceptifs, il y a entre ces deux âges un écart de deux ans, ce qui crée un vide provoquant des grossesses précoces et amenant des adolescentes enceintes à recourir à des avortements, a d'autre part souligné la corapporteuse.

S'agissant enfin de la violence, une question ici encore liée aux paradigmes et stéréotypes culturels au sein de la société, il semble que les châtiments physiques soient tolérés, s'est inquiétée Mme Nores.

Un autre membre du Comité a évoqué le droit de l'enfant né hors mariage de connaître ses parents biologiques, en soulignant que le droit de la mère de garder le secret quant au nom du père de l'enfant est contraire aux recommandations du Comité en la matière. Le droit d'acquérir la nationalité des Seychelles est-elle garantie aux enfants nés hors mariage, a demandé cet expert?

Un expert a relevé que les Seychelles considèrent que l'archipel de Chagos leur a été annexé en 1986; dans ce contexte, a-t-il voulu savoir, comment se fait-il que les habitants de cet archipel doivent s'acquitter d'une taxe pour obtenir la nationalité des Seychelles et pourquoi ces personnes sont-elles expulsées de force vers les plus grandes îles des Seychelles?

Un expert ayant relevé qu'après un certain nombre d'années, les enfants migrants se retrouvent sans statut clair, il a souhaité savoir comment ces enfants peuvent obtenir la nationalité des Seychelles.

Les mères seychelloises mariées à un étranger ont-elles la capacité de transmettre la nationalité seychelloise à leurs enfants, a-t-il en outre été demandé.

Un autre membre du Comité a demandé quelle était la situation s'agissant de la nomination du commissaire aux droits de l'enfant, dont le poste a été récemment créé. Il a aussi voulu savoir si cette institution a la capacité de recevoir des plaintes et de les transmettre, le cas échéant, à la justice.

Les châtiments corporels semblent très largement pratiqués non seulement contre les jeunes filles mais aussi contre les femmes et ne semblent pas interdits par la loi, s'est inquiétée une experte, avant de s'enquérir de l'éventuelle intention du pays de rendre ces pratiques illégales.

Une experte s'est inquiétée du grand nombre de grossesses d'adolescentes et d'avortements illégaux aux Seychelles. Se pose également la question des adoptions illégales, a-t-elle ajouté.

Une experte a relevé que, du fait notamment du nombre accru de divorces enregistrés, il y a de plus en plus de familles monoparentales; aussi, cette experte s'est-elle enquise des mesures prises par l'État pour soutenir ces familles monoparentales. La majorité des jeunes filles enceintes quittent le système scolaire, a par ailleurs déploré cette experte. Elle s'est en outre enquise de la situation des enfants toxicomanes et alcooliques.

Une autre experte a attiré l'attention sur un certain nombre de défis sociaux auxquels les Seychelles sont confrontées, citant notamment les abandons d'enfants, les abandons scolaires, les violences familiales, la prostitution des enfants, la toxicomanie ou encore les grossesses d'adolescentes – autant de phénomènes préoccupants qui, en outre, exercent une ponction sur les ressources humaines et financières des Seychelles, a-t-elle souligné. Dans un établissement secondaire au moins, il est apparu que 40% des élèves disaient consommer régulièrement des drogues, s'est-elle inquiétée.

Une experte s'est enquise des mesures prises pour mieux sensibiliser le public sur la non-discrimination à l'égard des enfants handicapés et lutter contre les préjugés qui poussent parfois les familles à abandonner leurs enfants handicapés ou à les remettre à des institutions. Aux Seychelles, la plupart des enfants handicapés continuent de suivre leur instruction dans des écoles pour «enfants exceptionnels», a fait observer cette experte.

Une experte s'est inquiétée du nombre élevé d'abandons scolaires au niveau du secondaire, en particulier de la part des garçons.

Le travail des enfants semble toléré voire permis par la loi en deçà de 15 ans, s'est pour sa part inquiété un membre du Comité.

Une experte a relevé l'existence de 480 cas de sida aux Seychelles, dont 11 issus d'une transmission de la mère à l'enfant, et a donc souhaité savoir si les autorités avaient mis en place un programme de prévention et de lutte contre le sida, à l'intention particulière des enfants et des adolescents. Les Seychelles ne disposent pas de programme national de promotion de l'allaitement maternel, s'est en outre inquiétée cette experte.

Les Seychelles ont une armée de 200 personnes et admet l'enrôlement avant 18 ans avec l'autorisation des parents, a relevé un expert; aussi, a-t-il souhaité savoir s'il y a des enfants dans l'armée seychelloise.

Réponses de la délégation

La délégation seychelloise a fait savoir que le Ministère des affaires étrangères a établi une liste des conventions auxquelles les Seychelles ont adhéré mais en vertu desquelles elles n'ont pas encore présenté de rapports, ainsi qu'une liste des instruments auxquels le pays doit encore adhérer. Pour ce qui est du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant qui traite de la vente des enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, signé par les Seychelles en 2001, la délégation a affirmé ne pas penser qu'il y ait des blocages ou entraves particuliers à la ratification de cet instrument.

Pour être réaliste, on ne peut pas dire qu'il n'y ait pas de prostitution des enfants aux Seychelles; des personnes de moins de 18 ans participent effectivement à la prostitution, a reconnu la délégation, avant de rappeler que le tourisme est l'un des piliers de l'économie de l'archipel. La délégation a jugé excellente l'idée avancée par le Comité de travailler avec l'industrie du tourisme à l'élaboration d'un code de conduite visant à protéger les enfants dans ce contexte.

La question des ressources humaines est vraiment cruciale pour un petit pays comme les Seychelles, qui ne compte que 90 000 habitants, a souligné la délégation. Elle a ajouté que, depuis 2010, l'Observatoire des droits de l'enfant de l'Océan Indien (ODEROI) ne fonctionne plus, ce qui est dû à un manque de financement lié au manque de ressources financières, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation a expliqué qu'il y a quelques années, le Gouvernement seychellois avait effectivement envisagé de mettre en place un bureau de commissaire des droits de l'enfant; mais ceci n'a jamais été réalisé car les autorités ont réalisé qu'elles ne disposaient pas des ressources suffisantes. Néanmoins, a fait valoir la délégation, la Commission nationale des droits de l'homme traite de toutes les questions relatives aux droits de l'homme, y compris les droits de l'enfant.

L'âge du mariage est toujours fixé à 18 ans pour les garçons et à 15 ans – avec le consentement des parents – pour les jeunes filles, a poursuivi la délégation. Le fait que des parents marient leurs jeunes filles tôt n'est effectivement pas nécessairement une bonne chose et il est vrai, par ailleurs, qu'il conviendrait d'établir une parité entre filles et garçons en ce qui concerne l'âge minimum du mariage, a reconnu la délégation. Elle a en outre fait part de l'intention des autorités seychelloises de réviser les lois portant sur la famille et les enfants.

La délégation a souligné que selon la loi, toute personne ayant eu un rapport sexuel avec un enfant de moins de 15 ans ne peut invoquer le fait que l'enfant était consentant. Parfois, cela est interprété comme fixant à 15 ans l'âge du consentement sexuel; mais ce n'est pas nécessairement l'interprétation qu'il convient de faire, a estimé la délégation. Il n'y a pas de loi interdisant la contraception pour les enfants de moins de 15 ans, a-t-elle en outre fait observer; mais il semble qu'en la matière, les parents aient leur mot à dire.

Tous les enfants nés aux Seychelles acquièrent automatiquement la nationalité seychelloise, a indiqué la délégation, ajoutant devoir se renseigner plus avant pour ce qui en est des enfants nés de parents chagossiens.

Il peut arriver que pour une raison ou une autre, une mère veuille ne pas révéler à son enfant le nom de son père, a par ailleurs déclaré la délégation; en outre, il faut tenir compte du droit du père qui peut considérer qu'il y a erreur et qu'on lui accorde une fausse paternité, a-t-elle ajouté tout en affirmant reconnaître qu'il est préférable que l'enfant connaisse l'identité de ses parents biologiques. À cet égard, un expert est intervenu pour souligner que l'intérêt supérieur de l'enfant commande que l'enfant puisse connaître l'identité de ses deux parents biologiques.

En ce qui concerne les châtiments corporels, la délégation a souligné qu'ils ne sont pas autorisés dans les écoles aux Seychelles. Il est vrai en revanche qu'il n'y a pas de loi visant à les interdire au sein du foyer et que certains parents recourent encore à de tels châtiments. Quoi qu'il en soit, il va falloir modifier de telles pratiques, qui, en tout état de cause, se réduisent, comme en attestent les propos de certains parents qui se plaignent de ne plus pouvoir administrer de correction à leurs enfants, a ajouté la délégation.

Les Seychelles n'ont pas de problème de minorités ethniques, la population du pays formant un seul peuple issu historiquement de divers courants migratoires, a par ailleurs souligné la délégation.

Tous les enfants aux Seychelles, y compris les enfants d'étrangers résidant ou travaillant aux Seychelles, ont droit d'accéder aux soins de santé et à une éducation publique gratuite, a par ailleurs rappelé la délégation.

Répondant à une nouvelle série de questions, la délégation a souligné qu'un certain nombre de mesures ont été prises afin d'aider les parents qui élèvent leurs enfants seuls et qui ont besoin d'assistance. Les soins de santé et l'éducation sont gratuits aux Seychelles, a-t-elle en outre rappelé.

Interrogée sur le problème des grossesses précoces, la délégation a notamment indiqué que le Ministère du travail organise des ateliers de formation professionnelle afin d'aider les jeunes filles qui tombent enceintes à acquérir un certain nombre de savoir-faire et de connaissances qui pourront leur être ultérieurement utiles. Il est vrai qu'une étude menée dans le pays a révélé que sur 27 jeunes filles tombées enceintes, seules cinq étaient retournées à l'école. Il conviendrait donc de voir comment venir en aide à ces jeunes filles, tant sur le plan psychologique que sur le plan financier, afin de leur permettre notamment de poursuivre leurs études, a insisté la délégation.

Le cannabis semble être la drogue la plus utilisée par les jeunes, même si le pays compte également un certain nombre de cas de jeunes héroïnomanes, a poursuivi la délégation.

Les Seychelles ne disposent pas de personnels qualifiés en santé mentale, a par ailleurs indiqué la délégation.

S'agissant des mesures prises en matière de prévention des violences sexuelles à l'encontre des enfants, la délégation a expliqué que l'action en la matière est confiée aux services sociaux du Ministère de l'éducation et au Conseil national pour la protection de l'enfance, le but étant d'expliquer aux enfants comment se protéger contre de tels abus et comment les dénoncer. La délégation a précisé que deux lignes téléphoniques accessibles en permanence ont été mises à disposition dans ce contexte.

Le Code du travail est en cours de révision et les autorités vont s'assurer que dans le nouveau Code, apparaisse bien la notion de travail dangereux, a par ailleurs indiqué la délégation. En vertu du Code du travail, les enfants de moins de 15 ans ne peuvent pas travailler, a-t-elle ajouté.

La délégation a indiqué qu'il n'y a pas aux Seychelles de limite d'âge fixée par la loi pour le recrutement dans l'armée; néanmoins, la pratique acceptée est qu'aucune personne de moins de 17 ans ne puisse intégrer l'armée.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a fait part des très nombreuses campagnes de sensibilisation menées aux Seychelles au sujet du VIH/sida. Pour ce qui est de l'allaitement maternel, une campagne de promotion de cette méthode d'allaitement est actuellement menée, a poursuivi la délégation.

Plusieurs membres du Comité étant intervenus pour souligner l'importance que revêtent les mesures de prévention dans le contexte de la lutte contre le VIH/sida, la délégation a indiqué qu'une étude en cours de finalisation vise à recueillir des informations sur l'homosexualité masculine en tant que facteur n'ayant peut-être pas été assez pris en compte dans le cadre des politiques menées jusqu'ici en matière de lutte contre le VIH/sida.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a notamment assuré que les autorités seychelloises adoptent désormais une approche davantage inclusive de l'éducation des enfants handicapés.

Il est vrai qu'après l'école secondaire, les écoles de formation technique comme l'école du bâtiment sont davantage fréquentées par les jeunes garçons, a par ailleurs reconnu la délégation. Il n'en demeure pas moins que les jeunes filles ont parfaitement le droit d'entrer dans de telles écoles et certains programmes de formation technique intègrent d'ailleurs des jeunes filles, a-t-elle ajouté, avant d'évoquer des causes psychosociales à cette moindre fréquentation des écoles techniques par les filles.

Il n'y a pas aux Seychelles de discrimination ouverte ou institutionnalisée, a souligné la délégation. Il n'en demeure pas moins qu'il faut rester vigilant en ce qui concerne cette question, a-t-elle ajouté.

Observations préliminaires

MME NORES a remercié la délégation des Seychelles pour l'intérêt qu'elle a porté à chacune des questions soulevées par les experts. De toute évidence, ce qui est maintenant important, c'est de souligner la nécessité pour les Seychelles d'intégrer dans leur législation les principes de base de la Convention et de considérer l'enfant comme un sujet de droits. Il faut que les interdictions, notamment en termes de violences à l'encontre des enfants, soient expressément mentionnées dans la législation du pays, a insisté la corapporteuse.

MME AIDOO a jugé franc et constructif le dialogue entre les membres du Comité et la délégation des Seychelles. La rapporteuse a rappelé que si durant cette journée d'examen du rapport seychellois, des préoccupations ont été exprimées, des progrès ont également salués. Davantage doit être fait aux Seychelles, notamment dans le domaine législatif afin de transposer dans le droit interne toutes les dispositions de la Convention, a souligné Mme Aidoo. Il faut que le pays s'investisse davantage dans la lutte contre les causes socioculturelles des violences faites aux enfants et autres violations de leurs droits. Il faut faire en sorte que les enfants de l'archipel sachent qu'ils ont des droits, a insisté la rapporteuse, attirant l'attention sur le potentiel énorme des Seychelles, qui pourraient devenir un modèle pour ce qui est de l'application des droits de l'enfant. Le pays n'a pas été inactif jusqu'ici et a même beaucoup entrepris, a déclaré Mme Aidoo, avant d'exprimer l'espoir que le pays donnera suite comme il convient aux recommandations que lui adressera le Comité.


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