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LE COMITÉ CONSULTATIF PORTE SON ATTENTION SUR LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME PAR LA COMPRÉHENSION DES VALEURS TRADITIONNELLES

Compte rendu de séance
Il débat également de la préparation de ses travaux sur la coopération et la solidarité internationales dans le domaine des droits de l'homme

Le Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme a entamé aujourd'hui la préparation d'une étude sur «la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales par une meilleure compréhension des valeurs traditionnelles de l'humanité». Il a également porté son attention sur les travaux que le Conseil lui a demandé de mener sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme et sur un projet de déclaration relatif au droit des peuples et des individus à la solidarité internationale.

S'agissant de la question de la promotion des droits de l'homme et des valeurs traditionnelles de l'humanité, il a été souligné que, quel que soit leur système économique et social, les États sont responsables de la promotion de tous les droits figurant dans les instruments des droits de l'homme des Nations Unies. Le caractère universel des droits de l'homme ne doit cependant pas conduire à nier les valeurs traditionnelles propres à chaque culture. Bien ciblée, l'étude envisagée devra montrer comment la dignité, la responsabilité et la liberté sont au cœur de la réalisation des droits de l'homme, et comment certaines conceptions traditionnelles empêchent précisément la réalisation des droits de l'homme, s'agissant par exemple de la discrimination contre les femmes. Des organisations non gouvernementales ont déclaré que les valeurs traditionnelles ne doivent jamais servir à justifier des violations des droits de l'homme, comme par exemple l'exclusion des femmes de la participation pleine et entière à la vie sociale, et que le Comité consultatif ne doit pas passer sous silence les aspects négatifs des pratiques traditionnelles.

Outre les membres du Comité, les représentants des États suivants ont participé au débat: Pologne (au nom de l'Union européenne), Fédération de Russie, Bolivie, Maroc et Namibie. Plusieurs organisations non gouvernementales ont fait des déclarations: Cairo Institute for Human Rights Studies, Service international pour les droits de l'homme, Commission internationale de juristes, Amnesty International, Réseau juridique canadien VIH/sida et Conseil indien d'Amérique du Sud.

En ce qui concerne l'étude qu'il doit mener sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme, le Comité consultatif a été saisi du rapport préparé par son groupe de rédaction chargé de la question. Le groupe souligne que la coopération internationale devrait prendre la forme d'un véritable partenariat, fondé sur la définition d'objectifs communs. La coopération devrait s'exercer au niveau de l'aide apportée aux États afin qu'ils remplissent leurs obligations au regard des organes conventionnels. Les États doivent aussi coopérer avec les organes chargés des droits de l'homme, par exemple en répondant aux questionnaires des titulaires de procédures spéciales des Nations Unies et en leur adressant des invitations permanentes. Le Conseil indien d'Amérique du Sud a participé au débat avec les experts.

Enfin, dans une présentation orale sur les progrès réalisés par le groupe de rédaction du projet de déclaration sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale, il a été indiqué que le document final qui sera produit par le Comité consultatif sera notamment structuré autour de la définition et de la portée de ce droit, de son cadre juridique et de sa promotion et sa protection. Le groupe va procéder à des consultations sur ces aspects avec les parties concernées et préparera un projet final d'ici à la session de février 2012 du Comité consultatif. Il œuvrera en étroite coopération avec la nouvelle experte indépendante du Conseil des droits de l'homme sur cette question. La Chine est intervenue à l'issue du débat entre les experts.


Le Comité consultatif se réunira en public demain à 11h30 pour examiner des propositions d'études nouvelles, à l'initiative de certains de ses membres. Il tiendra en outre des réunions privées au cours de cette journée, notamment dans le cadre de son groupe de rédaction sur les valeurs traditionnelles. Au dernier jour de la session, vendredi, le Comité consultatif procédera, à partir de 10 heures, à l'adoption de ses recommandations et de son rapport de session au Conseil des droits de l'homme.


Étude sur la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales par une meilleure compréhension des valeurs traditionnelles de l'humanité

Introduction

M. LATIF HÜSEYNOV, Président du Comité consultatif, a indiqué que, selon les termes de sa résolution 16/3, le Conseil des droits de l'homme a chargé le Comité consultatif de préparer une étude sur «la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales par une meilleure compréhension des valeurs traditionnelles de l'humanité». Ce faisant, le Comité consultatif doit montrer comment une meilleure compréhension des valeurs traditionnelles que sont la dignité, la responsabilité et la liberté peut améliorer la promotion et la protection des droits de l'homme. Le débat de ce jour donne le coup d'envoi de cette démarche. M. Hüseynov a aussi fait savoir que plusieurs membres du Comité consultatif ont fait part leur intérêt à faire partie du nouveau groupe qui sera chargé de la rédaction de l'étude, qui doit être remise à la vingtième session du Conseil (juin 2012): M. Vladimir Kartashkin, Mme Anantonia Reyes Prado, Mme Mona Zulficar, M. Obiora Chinedu Okafor, Mme Chinsung Chung, M. Dheerujlall Seetulsingh, Mme Laurence Boisson de Chazournes, M. Shiqiu Chen, M. Ahmer Bilal Soofi et M. Alfred Ntunduguru Karokora.

Débat

Dans quelle mesure concrète les valeurs traditionnelles contribuent-elles au respect des droits de l'homme, a demandé M. VLADIMIR KARTASHKIN, membre du Comité consultatif? Telle est l'une des nombreuses questions auxquelles le Comité consultatif est prié d'apporter une réponse aux termes de la résolution 16/3 du Conseil des droits de l'homme. M. Kartashkin a souligné que si cette résolution mentionne explicitement la dignité, la responsabilité et la liberté en tant que valeurs fondamentales, c'est qu'il est admis que leur respect est nécessaire pour assurer le bien-être minimal de tous les citoyens, au plan tant moral et politique qu'économique et social. Les valeurs traditionnelles sont constitutives de tous les droits de l'homme. Cela étant, certaines valeurs traditionnelles se contredisent mutuellement, d'autres se complètent: dans son étude, le Comité consultatif devra définir quelles sont les valeurs universelles, indépendamment des différents points de vue des États membres et des traditions juridiques. M. Kartashkin a encore observé que les valeurs mentionnées dans la résolution sont conformes à la reconnaissance progressive de l'universalité des droits de l'homme par les différentes cultures, à leur propre rythme. Or, ce rythme n'est pas le même dans tous les pays, comme en témoigne, par exemple, l'octroi relativement tardif du vote aux femmes des États-Unis.

Quel que soit leur système économique et social, a ajouté M. Kartashkin, les États sont responsables de la promotion de tous les droits de l'homme figurant dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et les pactes internationaux, notamment. Le caractère universel des droits de l'homme ne doit cependant pas conduire à nier les valeurs propres à chaque culture. Bien ciblée, l'étude devra montrer comment la dignité, la responsabilité et la liberté sont au cœur de la réalisation des droits de l'homme, et comment certaines conceptions traditionnelles empêchent précisément la réalisation des droits de l'homme, s'agissant par exemple de la discrimination contre les femmes.

M. WOLFGANG STEFAN HEINZ, membre du Comité consultatif, a observé que la résolution du Conseil ne se limite pas à la question générale des droits de l'homme et des valeurs traditionnelles, mais qu'elle prévoit aussi la rédaction d'une étude précise sur la manière dont la compréhension de ces valeurs améliore la promotion et à la protection des droits de l'homme. Le volet conceptuel de l'étude s'annonce ardu: en quoi consiste par exemple la notion de responsabilité? Que dire des pratiques traditionnelles qui n'ont pas trouvé d'expression juridique? Comment couvrir les valeurs traditionnelles transfrontalières ou celles partagées par des diasporas? Quelles sont les «valeurs légitimes»? Le Comité consultatif devra donc puiser à des sources autres que juridiques: l'anthropologie et la sociologie notamment. Il lui faudra définir avec beaucoup de précision son approche. Enfin, le Comité consultatif devra étudier les tensions au sein des États entre valeurs juridiques et valeurs traditionnelles. Un bon angle d'attaque sera, à cet égard, l'étude des réserves apportées par les États aux instruments internationaux, a conclu M. Heinz.

M. SHIGEKI SAKAMOTO, membre du Comité consultatif, a soulevé le problème de l'interprétation de la notion de «responsabilité» dans le cadre des valeurs traditionnelles de l'humanité. Il a cité à titre d'exemple la jurisprudence de la Commission asiatique pour la promotion et la protection des droits des femmes et des enfants, qui pose une opposition de conception majeure entre les valeurs asiatiques (rôle de la famille, importance du consensus) et les valeurs occidentales (individualisme). Le Comité consultatif doit-il par conséquent envisager que les droits de l'homme collectifs ont la priorité sur les droits individuels?

M. OBIORA CHINEDU OKAFOR, membre du Comité consultatif, a estimé que le rôle du Comité consultatif est de faire une étude des valeurs traditionnelles existantes et qui constituent le socle des droits de l'homme tels qu'ils sont appliqués. La démarche du Comité consultatif serait axée sur la recherche d'une relation positive entre les valeurs traditionnelles et les droits de l'homme. Le Comité devra tenir compte du fait que la culture et la tradition ne sont pas immuables, qu'elles évoluent. Le Comité devra aussi s'opposer aux interprétations qui subordonnent les droits de l'homme aux valeurs traditionnelles, et résister aux tendances qui présentent les droits de l'homme comme étant une notion «inventée par des Américains en blue-jeans»: les pays africains par exemple ont aussi œuvré à la définition des droits de l'homme.

M. DHEERUJLALL SEETULSINGH, membre du Comité, a soulevé la question de la définition des termes de la résolution: qui définira le contenu des notions de dignité et surtout de responsabilité? Le Comité consultatif devra aussi combattre certaines idées reçues sur la perception du rôle de la famille, que l'on a parfois tendance à schématiser. Enfin, certains comportements doivent changer et ne sauraient être protégés au motif qu'ils seraient des pratiques traditionnelles – que l'on songe aux mutilations génitales féminines ou au système des castes, par exemple.

M. SHIQIU CHEN, membre du Comité consultatif, a estimé que toutes les valeurs traditionnelles de l'humanité – culture, philosophie, religion notamment – sont subsumées dans les trois valeurs de dignité, de responsabilité et de liberté mentionnées dans la résolution. Le Comité consultatif devra donc s'attacher à comprendre parfaitement ces trois valeurs de base, car il ne pourra s'intéresser aux innombrables valeurs traditionnelles qui font déjà l'objet d'une vaste littérature. L'étude du Comité consultatif pourra donc être relativement brève. Elle montrera comment les trois valeurs améliorent le respect du principe de l'universalité des droits de l'homme. L'expert a ajouté que la résolution du Conseil n'a pas été adoptée à l'unanimité: l'étude devra être équilibrée et harmonieuse et refléter une position commune qui permette d'obtenir le consensus à son propos.

MME MONA ZULFICAR, membre du Comité consultatif, a déclaré que la mission du Comité consultatif ne consiste pas à remettre en question le principe de l'universalité des droits de l'homme. La «liberté» consiste dans le respect des libertés civiles et politiques, des droits économiques, sociaux et culturels. La «responsabilité» est celle de la jouissance de ses droits dans le respect de ceux d'autrui. Les valeurs traditionnelles, qui ont façonné toutes les cultures modernes, ont trouvé leur expression ultime dans l'arsenal juridique international des droits de l'homme, a estimé Mme Zulficar. Dans le même temps, il faut reconnaître la diversité des cultures coutumières, tout en restant attentif au caractère nuisible de certaines pratiques, comme les mutilations génitales féminines. Mme Zulficar a par contre cité des pratiques coutumières propices au respect des droits de l'homme, comme par exemple l'aménagement des dispositions de la charia en vue d'une plus grande égalité des époux en matière de répudiation.

M. AHMER BILAL SOOFI, membre du Comité consultatif, a déclaré que le Comité consultatif devra donner une interprétation avant tout sociologique et anthropologique des valeurs mentionnées par la résolution. Il devra en outre mettre l'accent sur les aspects positifs des valeurs traditionnelles qui facilitent l'application et le respect des droits de l'homme. Il lui faudra aussi évaluer les formes traditionnelles de justice au regard du respect des principes de droits de l'homme, et apprécier les valeurs traditionnelles dans une perspective historique, c'est-à-dire sous l'angle de leur évolution.

MME ANANTONIA REYES PRADO, membre du Comité consultatif, a jugé nécessaire d'adopter un point de vue autocritique sur les valeurs traditionnelles, afin d'en dégager les ambiguïtés pour mieux dégager des terrains d'entente. Les droits de l'homme ont une double dimension éthique et juridique: les valeurs traditionnelles ne sont quant à elles pas toujours réductibles à une perspective juridique. C'est pourquoi le Comité consultatif doit comprendre les droits de l'homme de manière nuancée.

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, membre du Comité consultatif, a observé que si l'objectif doit être d'éliminer toutes les pratiques préjudiciables à la jouissance des droits de l'homme, il faut se garder d'une interprétation préjudicielle des valeurs traditionnelles, comme par exemple des religions, comme certains acteurs sur la scène internationale, notamment des organisations non gouvernementales, ont eu tendance à le faire. S'agissant de la lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes, Mme Warzazi a insisté sur l'importance des efforts de persuasion et de conviction menés auprès des populations et des cadres religieux. L'exercice doit être l'occasion d'aborder les problèmes sans parti pris: tout peut être changé, mais la manière de procéder compte énormément, a insisté Mme Warzazi. L'experte a craint que certaines valeurs traditionnelles d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine, notamment la compassion et la solidarité, ne cèdent la place à la «modernité».

MME CHINSUNG CHUNG, membre du Comité consultatif, a observé que certaines attitudes sociales apparaissent qui tendent à masquer, sous le couvert de l'universalité des droits de l'homme, des comportements sociétaux oppressifs, au nom justement de valeurs traditionnelles.

Interventions d'observateurs

Le représentant de la Fédération de Russie a assuré que l'objectif principal de son pays, en tant qu'auteur de la résolution sur la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales par une meilleure compréhension des valeurs traditionnelles de l'humanité, n'est pas de saper le principe de l'universalité des droits de l'homme. Le texte de la résolution est très clair: les valeurs traditionnelles ne justifient jamais les comportements nuisibles contre les individus. Par contre, on pourra tirer parti de normes morales positives pour améliorer le respect des droits de l'homme. Pourquoi les droits de l'homme ne sont-ils pas reconnus partout? Ce concept, très lié à l'Occident, doit être replacé dans le contexte réel qui est le sien: l'humanité tout entière et chacun des individus qui la composent. L'initiative de la Russie est d'aboutir à l'acception universelle des droits de l'homme. Il faut bien prendre conscience qu'il ne peut y avoir d'interprétation unique des droits de l'homme, s'appliquant à tous les États: chacun interprète nécessairement les normes en fonction de ses propres circonstances. Le représentant russe a ajouté qu'il est important de faire en sorte que les normes sont intégrées culturellement, ce qui souligne l'importance de l'éducation aux droits de l'homme. La résolution soumise par la Russie, si elle semble contourner les gouvernements, n'en néglige pas pour autant le principe de souveraineté ni de responsabilité des États en matière de respect des droits de l'homme. La Russie estime enfin que les «valeurs» traditionnelles sont, comme toutes les valeurs, par nature positives: on ne saurait envisager de «valeurs négatives».

Il a été observé à ce propos une différence entre les notions de «pratiques» et de «valeurs» traditionnelles, les premières seules pouvant, de l'avis de la Bolivie, faire l'objet de poursuites en cas de violation. Le Maroc a regretté que le débat semble focalisé sur les pratiques préjudiciables. L'importance de la contribution des valeurs traditionnelles des peuples autochtones a été soulignée: c'est ainsi, par exemple, que l'affirmation du droit à l'eau par les Nations Unies ou encore la revendication du droit à la terre résultent de longues démarches initiées par les défenseurs des valeurs traditionnelles autochtones.

Pour d'autres intervenants, dont la Pologne au nom de l'Union européenne, le fait que les valeurs traditionnelles ne sont pas définies par la résolution risque de porter atteinte au respect et à l'universalité des droits de l'homme. Certes importantes pour tous les peuples, les valeurs traditionnelles doivent être replacées dans le contexte des mécanismes de droits de l'homme. En outre, le débat ne doit pas entraîner une reconnaissance du relativisme culturel.

Les organisations non gouvernementales Cairo Institute for Human Rights Studies et Amnesty International ont déploré, pour leur part, que la politisation des valeurs traditionnelles au sein du Conseil des droits de l'homme risque d'aboutir à la justification de crimes tels que les mutilations génitales féminines ou l'exclusion des femmes de la participation pleine et entière à la vie sociale. Aussi le Comité consultatif a-t-il été encouragé à adopter, dans la rédaction du rapport, une approche des valeurs traditionnelle qui, d'une part, replace les traditions dans le contexte de l'indispensable protection des droits des personnes et, d'autre part, empêche l'application sélective des droits individuels. Il a été prié en outre de ne pas passer sous silence les aspects négatifs des pratiques traditionnelles. La Commission internationale des juristes a demandé au Comité consultatif de poser le principe que ces pratiques doivent, le cas échéant, s'adapter aux exigences des droits de l'homme. Le Réseau juridique canadien du VIH/sida a demandé au Comité consultatif de réaffirmer l'importance du respect de l'égalité entre les sexes. Le Service international pour les droits de l'homme a enfin recommandé au Comité consultatif de procéder à des consultations systématiques avec les défenseurs des droits de l'homme.

Il a été aussi observé que, lors du débat au Conseil des droits de l'homme, les organisations non gouvernementales et la société civile ont tous fait part de leur préoccupation devant les termes de la résolution, en dépit des assurances de ses parrains qu'ils veulent améliorer le respect des droits de l'homme: on n'a en effet jamais vu d'États invoquer les valeurs traditionnelles à cette fin. Au contraire, elles sont souvent invoquées pour justifier des comportements dépassés. Dans d'autres commentaires, il a été remarqué que le rôle des chefs et autorités traditionnels est ambigu: promoteurs ou au contraire freins au respect des droits de l'homme, par le modèle de comportement qu'ils donnent.

Conclusion

M. KARTASHKIN s'est dit satisfait de la qualité des échanges lors du débat. Il a assuré les États membres et les organisations non gouvernementales qu'il avait pris bonne note de toutes les propositions et recommandations, dont le groupe de rédaction tiendra dûment compte.

Étude sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme

Présentation de rapport

M. SEETULSINGH a présenté, en sa qualité de Président du groupe de rédaction, le rapport sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme, qui a été préparé par l'ancien rapporteur du groupe de rédaction, M. Emmanuel Decaux. M. Seetulsingh a déclaré que le rapport rappelle les textes de base sur la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme, soit la Charte des Nations Unies, les textes généraux de l'Assemblée générale et les instruments spécifiques aux droits de l'homme. Le rapport fait en particulier référence à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, qui aborde de manière détaillée la question de la coopération internationale. Le rapport précise ensuite la qualité des intervenants concernés: États, institutions internationales, coalitions et groupes d'États, sans oublier la dimension transnationale: organisations non gouvernementales, syndicats, grandes entreprises. Le rapport décrit encore les grandes modalités de la coopération internationale. Il propose six domaines de coopération, dont l'aide à la codification, la coopération judiciaire et policière, l'aide à l'éducation et la coopération dans la lutte contre le racisme. La coopération diplomatique est abordée sous l'angle des relations bilatérales.

La coopération internationale devrait prendre la forme d'un véritable partenariat, basé sur la définition d'objectifs communs. Il s'agit d'un processus à long terme autour d'un plan d'action défini en commun. Son objectif doit être d'améliorer le travail en commun autour de la promotion et de la protection des droits de l'homme. Quant aux moyens de la coopération, le rapport insiste sur l'importance d'encourager la ratification de tous les instruments internationaux des droits de l'homme par les États, et de les inciter à s'abstenir d'émettre des réserves. Les États parties doivent être encouragés à incorporer toutes les dispositions des traités qu'ils ont signés dans leur droit national. La coopération devrait s'exercer au niveau de l'aide apportée aux États afin qu'ils remplissent leurs obligations au regard des organes conventionnels. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et le Secrétariat des Nations Unies sont encouragés pour leur part à continuer de contribuer à cet effort. D'autres moyens existent d'améliorer la coopération internationale, notamment par le biais des organismes régionaux. Des stratégies communes peuvent en effet être définies à ce niveau pour régler des problèmes communs. Les États doivent d'autre part coopérer avec les organes conventionnels, par exemple en répondant aux questionnaires des titulaires de procédures spéciales des Nations Unies et en leur adressant des invitations permanentes. Enfin, les organes conventionnels eux-mêmes devraient être renforcés afin d'être en mesure d'assurer le suivi des recommandations qu'ils émettent.

Le rapport sur le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme (A/HRC/AC/7/2) indique en outre que même si une typologie est encore prématurée, il est nécessaire d'esquisser une grille de lecture systématique pour essayer de tenir compte de l'ensemble des paramètres en présence. C'est ensuite seulement qu'il sera possible d'envisager une approche non plus statique, mais dynamique du sujet, en recherchant les bonnes pratiques permettant le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme. Le rapport indique qu'il est nécessaire d'esquisser une grille de lecture systématique des significations données à la notion même de coopération, pour essayer de tenir compte de l'ensemble des paramètres en présence. C'est ensuite seulement qu'il sera possible d'envisager une approche non plus statique, mais dynamique du sujet, en recherchant les bonnes pratiques permettant le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme. Le rapport indique par ailleurs que la coopération internationale n'est plus le propre des structures étatiques. Elle a pris une dimension transnationale qui intègre les acteurs économiques que constituent les entreprises et les syndicats, mais aussi les acteurs de la société civile, les organisations non gouvernementales, les associations, les cultes et l'ensemble des courants de pensée. Le partenariat de plus en plus structuré mis en place par l'ONU et par les autres organisations internationales avec ces différents acteurs non étatiques ouvre une nouvelle dimension à la coopération internationale. Mais force est de constater que ce partenariat se décline pour les instances internationales davantage en termes d'information, de consultation, de participation, voire de sous-traitance, qu'en termes de codécision, de cogestion ou de coresponsabilité.

Débat

M. HEINZ a recommandé que le suivi des progrès en matière de respect du droit au développement soit assuré par des instances appropriées. L'expert a souligné en outre qu'il faut tenir compte, parallèlement à l'activité des sociétés transnationales, des droits économiques, sociaux et culturels. M. Heinz a encore souligné l'intérêt qu'il y aurait à recueillir les expériences des institutions nationales de droits de l'homme en matière de coopération internationale.

M. KARTASHKIN a jugé utile de se pencher sur le renforcement de la coopération internationale au sein même des Nations Unies et de leurs instances chargées des droits de l'homme. Il a proposé des amendements au questionnaire que le groupe de rédaction soumettra aux États pour évaluer leurs activités de coopération internationale, estimant qu'il est nécessaire de s'adresser ce faisant à tous les États.

M. SOOFI a estimé qu'il fallait veiller à ce que la coopération des organisations non gouvernementales entre elles ne soit pas sapée par les intentions des États, surtout quand ces organisations sont originaires d'États hostiles ou en conflit. Le questionnaire devrait en outre demander explicitement quelles mesures les États prennent pour promouvoir la coopération internationale.

M. CHEN a observé qu'il faudrait approfondir la réflexion s'agissant des ressources nécessaires à la coopération internationale. Il faudra en particulier insister sur le rôle des institutions des Nations Unies dans le dégagement de nouvelles ressources humaines et financières. Ceci importe particulièrement compte tenu des besoins urgents des pays pauvres, qui ont besoin de recevoir des aides très concrètes: formation du personnel, soutien pour la rédaction des rapports aux organes conventionnels. Le rôle du Haut-Commissariat dans ce domaine doit être précisé dans l'étude, le seul échange d'informations n'étant pas suffisant.

Le Conseil indien d'Amérique du Sud a regretté les disparités qui persistent entre les politiques des Nations Unies relatives aux peuples autochtones, un problème qui a sa source dans le mépris des nations colonisatrices pour les intérêts des peuples autochtones. La création d'un comité de surveillance, sur le modèle de l'ancien Comité sur la décolonisation des Nations Unies, a été préconisée, de même que d'un tribunal chargé de statuer sur les violations des droits fondamentaux de ces peuples.

Conclusion

M. SEETULSINGH a fait savoir qu'il tiendra compte de toutes les propositions faites au cours du débat d'aujourd'hui. Il a aussi indiqué que le questionnaire serait distribué sous peu. M. Seetulsingh a confirmé l'intention du groupe de rédaction de consulter les institutions nationales de droits de l'homme.

Projet de déclaration sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale

Présentation

M. CHEN, en sa qualité de membre du groupe de rédaction du projet de déclaration sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale, a présenté une mise à jour des progrès réalisés par ledit groupe. Ce dernier est ainsi convenu de l'articulation générale du document final, qui sera structuré autour des chapitres suivants: définition et portée du droit à la solidarité internationale, cadre juridique, importance et valeur de ce droit, sa relation avec les autres droits de l'homme et enfin promotion et protection du droit à la solidarité internationale. Le groupe va procéder à des consultations sur ces aspects avec les parties concernées et préparera un projet final d'ici à la session de février 2012 du Comité consultatif. Il œuvrera ce faisant en étroite coopération avec la nouvelle experte indépendante du Conseil des droits de l'homme chargée de cette question.

Débat

MME ZULFICAR ET Mme ANANTONIA REYES PRADO ont estimé logique que la solidarité internationale ne puisse s'exercer indépendamment de la coopération internationale. Elles se sont demandées pourquoi le Conseil des droits de l'homme n'a pas prévu, en son propre sein, un mandat unique pour traiter de ces deux notions très complémentaires.

MME CHUNG a proposé de préciser, dans le rapport, la définition des droits dits de troisième génération - droit liés à l'environnement par exemple. Il faudrait en outre insister sur le rôle des acteurs non étatiques, en particulier les sociétés transnationales. Certes, les États jouent un rôle majeur dans la vie internationale: mais les grandes entreprises, à l'ère de la mondialisation, doivent elles aussi assumer des responsabilités qu'il faudrait détailler. De même, des explications devront être données sur la manière concrète de donner effet à la solidarité internationale, au-delà des seules considérations juridiques. Mme Chung a observé par ailleurs que la tâche du Comité consultatif est simple et claire: contribuer aux travaux de l'experte indépendante sur les droits de l'homme et la solidarité internationale.

M. KARTASHKIN a observé que des dizaines de procédures thématiques sont attachées au Conseil des droits de l'homme, ce qui pose des problèmes liés aux relations d'autorité. L'expert s'est ainsi étonné que le Conseil ait confié des tâches similaires à deux entités distinctes: le Comité consultatif et l'experte indépendante sur les droits de l'homme et la solidarité internationale. Des consultations devraient être organisées avec le Président du Conseil des droits de l'homme pour éviter à l'avenir de nouveaux «doublons».

MME ZULFICAR a proposé qu'à l'avenir, le Comité consultatif, confronté à une duplication des tâches comme c'est le cas actuellement, puisse se prononcer en faveur d'une rationalisation de l'application des mandats qui lui sont confiés.

M. SEETULSINGH a rappelé que le projet de déclaration sur le droit des peuples à la solidarité internationale est de longue haleine et qu'il impliquera une coopération avec les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. À ce stade, il est trop tard pour procéder à une rationalisation des mandats.

M. HÜSEYNOV, Président du Comité consultatif, a estimé que le Comité consultatif n'est pas placé dans une relation de subordination avec la procédure spéciale du Conseil. La relation reflète au contraire la nature par nature coopérative des relations entre institutions des Nations Unies. D'autre part, il n'est pas certain que les mandats relatifs à la solidarité et à la coopération couvrent exactement les mêmes obligations: on considère qu'il faut donner une contenu normatif au droit à la solidarité internationale vue comme un droit de l'homme; la coopération internationale opère quant à elle à une échelle et dans un domaine différents.

Le représentant de la Chine a assuré que son pays a toujours soutenu l'idée selon laquelle la solidarité internationale et le partage des responsabilités doivent être au cœur des relations internationales au XXIe siècle. Cela est particulièrement important pour atteindre les grands objectifs que la communauté internationale s'est fixée en matière de développement, en particulier. La Chine espère sincèrement que le groupe progressera dans ses travaux.

Conclusion

M. CHEN a salué les recommandations spécifiques faites s'agissant des travaux sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale. Il a souligné que la coopération internationale et la solidarité internationale sont deux domaines différents. Le mandat sur le renforcement de la coopération internationale a été confié au Comité consultatif, alors que la question des droits de l'homme et la solidarité internationale relève principalement des travaux de l'experte indépendante, à qui le Comité consultatif est prié de fournir des contributions dans le cadre de ses travaux, et non de faire double emploi avec ces travaux.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

AC11/013F