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LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DE TOUS LES TRAVAILLEURS MIGRANTS EXAMINE LE RAPPORT DU MEXIQUE

Compte rendu de séance

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a examiné, hier après-midi et ce matin, le deuxième rapport périodique du Mexique sur l'application par ce pays des dispositions de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Présentant le rapport de son pays, M. Salvador Beltrán del Rio Madrid, Commissaire à l'Institut national des migrations du Mexique, a déclaré que le pays a réalisé d'importants progrès en matière de protection des droits des migrants, ajoutant qu'il est conscient que le Gouvernement et la société mexicains ont de multiples défis à relever pour garantir pleinement ces droits. Il a rappelé qu'environ douze millions de Mexicains résident aux États-Unis et que chaque année, quelque 500 000 ressortissants mexicains se rendent dans ce pays, alors qu'un million de Mexicains ont été rapatriés des États-Unis au cours des deux dernières années. Pour sa part, le Mexique reçoit en moyenne 150 000 migrants par an, majoritairement des Centraméricains sans papiers. Les activités de délinquance organisée sont la principale menace pour les migrants qui se trouvent en transit au Mexique et le Gouvernement a mis en place une stratégie intégrale de prévention, de lutte et de sanction contre les délits à l'encontre des migrants et mène un effort de coordination avec les pays voisins. Le Gouvernement du Mexique ne tolère pas les violations des droits de l'homme des migrants, a insisté la délégation, et ne tolère pas l'impunité. La délégation a aussi souligné que depuis juillet 2008, la migration irrégulière a été dépénalisée.

La délégation mexicaine était également composée du Sous-Secrétaire à la prévention et à la participation citoyenne du Ministère de la sécurité publique, M. Monte Alejandro Rubido García; du Représentant permanent du Mexique auprès des Nations Unies à Genève, M. Juan José Gómez Camacho; ainsi que de représentants du Ministère des affaires extérieures, du Ministère de la sécurité publique, du Ministère de la marine, du Ministère de la gouvernance, du Ministère de la santé, de l'Institut national des femmes, de l'État du Chiapas. Elle a fourni aux membres du Comité des informations complémentaires s'agissant, entre autres, de la stratégie intégrée de lutte contre les enlèvements; de l'implication de la criminalité organisée dans les délits perpétrés contre les migrants; des mesures prises pour protéger les défenseurs des droits de l'homme; des rapatriements de Mexicains depuis les États-Unis; de l'enregistrement des enfants de migrants au Mexique; ou encore des activités des Grupos Beta chargés de la protection des migrants.

De nombreux experts ont fait part de leurs préoccupations face aux enlèvements et aux assassinats de migrants, souvent en transit, au Mexique. Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport, M. Francisco Carrión Mena, a déclaré que le Mexique est un pays pionnier dans la recherche de solutions pour la prise en charge adéquate des phénomènes migratoires. Il a salué la volonté du pays de s'acquitter de ses obligations conformément aux dispositions de la Convention; il existe réellement une volonté politique de s'attaquer au phénomène migratoire et à ses incidences, a-t-il insisté, avant de saluer les initiatives originales du Mexique dans ce contexte. Il n'en demeure pas moins que des progrès restent à réaliser, s'agissant notamment de l'élimination de la corruption ou de la lutte contre la criminalité organisée, a poursuivi M. Carrión Mena, avant de souligner que la criminalité organisée reste certainement le principal obstacle auquel se heurte l'application de la Convention du Mexique.


La prochaine réunion publique du Comité aura lieu vendredi prochain à 15 heures, pour clore les travaux de sa quatorzième session en rendant publiques ses observations finales sur le rapport du Mexique, qui auront été adoptées par les experts à huis clos.


Présentation du rapport

M. SALVADOR BELTRÁN DEL RIO MADRID, Commissaire à l'Institut national des migrations du Mexique, a affirmé que le Mexique a réalisé d'importants progrès en matière de protection des droits des migrants, tout en se disant conscient que le Gouvernement et la société mexicains ont de multiples défis à relever pour garantir pleinement ces droits. Le Mexique a opté pour une politique de pleine incorporation au système international de droits de l'homme, a-t-il en outre rappelé.

Ces dernières années, a poursuivi M. del Rio Madrid, trois grandes tendances peuvent être observées au Mexique s'agissant des migrations, qui se traduisent par un changement dans la façon de traiter la question migratoire. En premier lieu, des mesures juridiques, institutionnelles et de politiques publiques ont été prises pour rendre effectives les normes internationales en matière de droits de l'homme des migrants, en particulier celles énoncées dans la Convention. Ainsi, la loi sur l'asile (ou loi sur le statut de réfugié) récemment approuvée par le Congrès, les réformes apportées à la loi générale sur la population et à la loi sur les migrations. Ce changement d'approche est consolidé par la réforme constitutionnelle en matière de droits de l'homme récemment approuvée par le Congrès mexicain, a poursuivi le représentant, attirant l'attention sur l'existence d'une garantie d'audience face à la procédure d'expulsion des étrangers prévue par la Constitution. Cette réforme constitutionnelle rend sans fondement les réserves que le Mexique avaient émises à l'égard de l'article 22.4 de la Convention, a indiqué M. del Rio Madrid. La deuxième tendance que l'on peut observer au Mexique a trait à l'impératif de garantir aux migrants étrangers dans le pays les mêmes droits et traitements que ceux que l'on demande pour les migrants mexicains à l'étranger, a-t-il ajouté. La troisième tendance a trait à l'élaboration d'une politique intégrale en matière migratoire.

Environ douze millions de Mexicains résident aux États-Unis et environ 500 000 ressortissants mexicains se dirigent chaque année vers ce pays, a poursuivi M. del Rio Madrid. Parallèlement, un million de personnes nées à l'étranger résident au Mexique, auxquelles s'ajoutent les migrants en transit par le Mexique, dont le flux s'élève en moyenne à 150 000 par an et est majoritairement composé de Centraméricains sans papiers. De 2009 à 2010, ont été rapatriés des États-Unis un million de Mexicains, alors que, dans cette même période, quelque 130 000 étrangers étaient renvoyés du Mexique. Pour le Mexique, a souligné M. del Rio Madrid, le rapatriement vers le lieu d'origine doit se faire dans des conditions ordonnées et sûres et s'accompagner d'un soutien afin de veiller à ce que les migrants soient réintégrés dans leurs communautés, bénéficient de possibilités de réinsertion, jouissent du plein respect de leurs droits de l'homme et voit préservée leur unité familiale. Sur cette base, le Gouvernement du Mexique a conclu des accords avec divers pays de la région, a souligné M. del Rio Madrid.

Les activités de la délinquance organisée sont devenues la principale menace pour les migrants qui se trouvent en transit au Mexique, a poursuivi M. del Rio Madrid, ajoutant que cela n'exclut pas la responsabilité de l'État de garantir leurs droits. Il convient de souligner que la délinquance transnationale organisée est responsable de délits aussi graves que l'enlèvement, la traite et le trafic de migrants, a-t-il insisté. Face à ce constat, le Gouvernement du Mexique a agi sur deux fronts: d'une part en mettant en place une stratégie intégrale de prévention, de lutte et de sanction contre les délits à l'encontre des migrants et, d'autre part, en déployant un effort de coordination avec les pays voisins, eu égard au caractère transnational des délits en cause.

M. del Rio Madrid a ensuite souligné que le droit d'accès à la justice reste un des aspects essentiels des obligations de l'État vis-à-vis des migrants. Aussi, a-t-il attiré l'attention sur divers mécanismes mis en place par les autorités mexicaines pour faciliter la dénonciation des délits perpétrés contre les migrants, citant notamment les visas dits humanitaires octroyés aux migrants victimes ou témoins de délits afin de faciliter leur séjour légal dans le pays dans le but de permettre leur participation aux procédures judiciaires. Le Gouvernement du Mexique ne tolère pas les violations des droits de l'homme des migrants, a assuré M. del Rio Madrid. Au Mexique, a-t-il insisté, les délits contre les migrants font l'objet d'enquête et de sanctions; des sentences sont prononcées et les études le montrent. «Le Gouvernement du Mexique ne tolère pas l'impunité», a réaffirmé le Commissaire de l'Institut national des migrations.

Le chef de la délégation mexicaine a par ailleurs souligné qu'en 2009, de nouvelles normes sont entrées en vigueur pour le fonctionnement des centres de rétention des migrants, orientées vers le plein respect des droits de l'homme et de la dignité des migrants. Il a en outre souligné que le Gouvernement mexicain travaille en collaboration avec la société civile pour garantir la protection des victimes, y compris le retour dans leur pays d'origine.

M. del Rio Madrid a d'autre part souligné que depuis juillet 2008, la migration irrégulière a été dépénalisée. En 2010, a-t-il rappelé, a été approuvée la Loi d'asile et de protection complémentaire, qui a été qualifiée d'avant-gardiste par le Haut Commissariat pour les réfugiés. Enfin, un projet de loi sur les migrations a été approuvé par le Sénat et se trouve actuellement en discussion devant la Chambre des députés; il reprend des recommandations importantes formulées par la société civile, s'agissant notamment de la reconnaissance des droits des migrants, indépendamment de leur situation.

Ce qui était à l'origine un formulaire d'immigration pour travailleur saisonnier agricole et permettait aux travailleurs guatémaltèques de travailler dans les champs de culture au Chiapas s'est transformé à compter de 2008 en formulaire d'immigration pour les travailleurs frontaliers, dont le champ d'application s'est élargi à tous les États de la frontière sud du Mexique, établissant le droit des travailleurs migrants de participer, dans des conditions d'égalité avec les Mexicains, à tous les secteurs de l'économie et non pas seulement au secteur agricole, a par ailleurs fait valoir M. del Rio Madrid. Au total, 80 000 formulaires d'immigration de ce type ont été émis depuis sa création.

Enfin, M. del Rio Madrid a attiré l'attention sur les nouvelles structures juridiques et institutionnelles mises sur pied au Chiapas et en Oaxaca pour améliorer la protection des droits de l'homme des migrants. Le bureau du Procureur spécialisé dans les délits commis contre les migrants, qui a été créé en 2008 au Chiapas, a obtenu des résultats très positifs en parvenant à réduire de 90% l'indice des délits perpétrés contre les migrants dans cet État fédéré.

Le deuxième rapport périodique du Mexique (CMW/C/MEX/2) indique qu'au cours de la période à l'examen, les autorités mexicaines ont insisté sur la nécessité d'envisager la question des migrations internationales, et des travailleurs migrants en particulier, de manière globale et selon le principe de la responsabilité partagée, en plaçant le travailleur migrant et ses droits au cœur de la politique migratoire. Le Mexique est un pays d'origine, de transit et de destination, rappelle en outre le rapport. L'essentiel de l'émigration depuis le Mexique, qui concerne tout aussi bien les Mexicains que les nationaux d'autres pays d'Amérique centrale ou d'Amérique du Sud qui transitent par le Mexique, continue d'avoir les États-Unis comme pays de destination, souligne le rapport. Alors que le taux d'accroissement de la population migrante mexicaine aux États-Unis s'est stabilisé et a même baissé depuis 2006, le nombre total des migrants mexicains a atteint les 12,7 millions, dont 55 % en situation irrégulière. Les Mexicains représentent près d'un tiers des immigrés aux États-Unis, ce qui en fait le groupe d'immigrés le plus important, et sont de mieux en mieux intégrés. L'immigration clandestine va de pair avec l'existence de vastes réseaux organisés de trafic de clandestins, souligne le rapport. Le nombre de migrants mexicains décédés à la frontière avec les États-Unis alors qu'ils tentaient d'entrer illégalement sur le territoire américain était de 369 en 2004 et de 169 en 2009 pour un total de 2149 entre 2004 et 2009, indique en outre le rapport.

Les facteurs économiques, comme le ralentissement de l'économie américaine depuis 2006, ainsi que les mesures restrictives mises en œuvre par les autorités américaines (législation, construction de murs à la frontière, descentes de police, criminalisation et expulsion de milliers de Mexicains, etc.) pour empêcher l'immigration clandestine font partie des causes possibles de la diminution de la migration mexicaine clandestine aux États-Unis observée ces dernières années, estimée à environ 315 000 personnes par an. Entre 2006 et 2008, le nombre d'expulsions des États-Unis vers le Mexique a dépassé les 500 000 par an. Ces mesures se sont traduites par une aggravation des risques encourus par les migrants et leur famille6, une augmentation du coût de la migration et l'émergence d'un climat hostile, anti-immigrants et discriminatoire au sein du pays de destination, ce qui rend les immigrants plus vulnérables et rend le retour saisonnier des clandestins vers leur lieu d'origine plus difficile et coûteux. La crise financière aux États-Unis, qui a commencé en septembre 2008, a eu des incidences négatives sur les conditions de travail des migrants et migrantes mexicains, en particulier sur les clandestins, ainsi que sur le montant des sommes d'argent qu'ils envoient à leur famille.

S'agissant des migrants au Mexique, le rapport indique notamment que la capacité d'hébergement des centres de rétention de migrants a été réduite afin d'éviter le surpeuplement. Par ailleurs, des procédures administratives et des procédures de rapatriement ont été accélérées, ce qui a aussi permis de réduire le surpeuplement. En ce qui concerne la recommandation du Comité invitant le Gouvernement mexicain à instruire comme il se doit les plaintes dénonçant l'implication de fonctionnaires dans des délits commis à l'encontre de migrants, il y a lieu de préciser que le nombre de plaintes pour abus d'autorité, abus de pouvoir, non-respect des règles internes, mauvais traitements, négligence et non-respect des règles régissant les relations du travail a été de 480 en 2006, 570 en 2007 et 718 en 2008. Le nombre de sanctions imposées à des membres du personnel et à des fonctionnaires de l'Institut national des migrations a été de 197 en 2006, 105 en 2007 et 38 en 2008. Il n'existe pas d'estimation fiable du flux de migrants clandestins qui entrent au Mexique par la frontière sud et qui viennent majoritairement du Guatemala, du Honduras, d'El Salvador et du Nicaragua. Des estimations très générales datant de 2004 indiquent que le nombre de migrants pouvait dépasser 400 000 par an. Cependant, le nombre de clandestins a diminué au cours des dernières années. Le taux d'immigration légale est également resté faible. Au cours de la période 2006-2007, 43 000 personnes sont entrées sur le territoire en tant que visiteurs et 40 000 en tant que travailleurs agricoles. Depuis 2008, le flux de personnes en situation régulière s'est élevé à environ 23 700 personnes. Une caractéristique importante des flux migratoires clandestins est l'augmentation du trafic d'êtres humains lié à des réseaux mais également à des bandes de trafiquants originaires pour la plupart d'Amérique centrale.

Le 14 novembre 2008, fait valoir le rapport, la deuxième chambre de la Cour suprême de justice de la nation a établi, dans une décision historique, que les travailleurs étrangers ont les mêmes droits du travail que les nationaux, quel que soit leur statut migratoire. La loi relative à la prévention et à la répression de la traite des personnes, publiée au Journal officiel le 27 novembre 2007, et le règlement y relatif, publié le 27 février 2009, établissent des politiques de prévention et de répression de la traite des personnes et de protection des victimes et des témoins, souligne en outre le rapport. L'action de l'Institut national des migrations dans le domaine de la traite des personnes peut se faire dans le cadre de visites de contrôle dans les entreprises qui emploient des migrants, y compris les boîtes de nuit, ou sur plainte, qui peut être anonyme. Les opérations sont menées avec l'appui des procureurs qui peuvent identifier les victimes et, le cas échéant, les secourir avec l'appui de la police fédérale en vue de préserver l'intégrité physique des victimes identifiées. L'Institut a mis au point divers mécanismes pour recueillir les plaintes relatives à la traite des personnes et informer la population sur des possibilités et mécanismes d'aide et de protection qui visent à informer et sensibiliser le grand public sur la nature de l'infraction et les conséquences de la traite, tout en faisant connaître les mécanismes d'aide et de plainte.

Examen du rapport

Questions des experts

Un membre du Comité a relevé qu'un million de personnes sont revenues des États-Unis au Mexique l'an dernier. Il a souhaité savoir dans quelle proportion elles avaient été interceptées alors qu'elles franchissaient la frontière vers les États-Unis ou venaient de la franchir depuis peu. Parallèlement, combien de Mexicains ont-ils vu leur situation être régularisée aux États-Unis, a-t-il demandé?

Un autre expert a souligné que la question des migrations relève non seulement de la responsabilité des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, mais aussi de celle des secteurs non gouvernementaux, des syndicats, des entreprises et de la société civile. Par ailleurs, a ajouté l'expert, il ressort du rapport que la problématique de la criminalité transnationale organisée pourrait saper les bonnes intentions de l'État pour faire face à la situation difficile du Mexique en matière de migrations. D'autre part, il semblerait que le pays connaît des difficultés préoccupantes s'agissant de la poursuite des responsables des délits perpétrés contre les migrants. L'expert a aussi relevé que le Mexique est le théâtre de nombreux cas d'enlèvement et de meurtres, notamment dans l'État de Tamaulipas, de migrants originaires d'Amérique centrale et du sud. Il a insisté sur la nécessité de sanctionner les coupables et d'empêcher que cela ne se renouvelle. Les enlèvements de migrants méritent également une attention toute particulière car d'autres délits, comme les viols, en découlent, a poursuivi l'expert. La Commission nationale des droits de l'homme du Mexique parle de plus de 11 000 personnes victimes d'enlèvements au Mexique, auxquels participerait la criminalité organisée, mais aussi - du moins par l'inaction voire leur complicité - des agents de la force publique. L'expert a souhaité en savoir davantage sur le bilan de la délivrance des «visas humanitaires».

Une experte s'est dite préoccupée par la situation des migrants en transit par le Mexique et par la recrudescence des violations de droits de l'homme – notamment des enlèvements – à leur encontre. On assiste à une sorte de commercialisation de la migration, a-t-elle ajouté, avant de demander si le Gouvernement fédéral mexicain faisait tout ce qui est en son pouvoir pour y remédier. Il faut sanctionner les personnes, quelles qu'elles soient, qui violent les droits de l'homme des migrants; pays d'origine et de destination doivent œuvrer ensemble pour lutter contre les phénomènes en cause, notamment contre la criminalité organisée, a insisté l'experte.

Un migrant mexicain qui a travaillé à l'étranger et qui revient au Mexique est-il couvert par le régime de protection sociale, s'agissant notamment des pensions de retraire, a demandé un expert?

Un membre du Comité a relevé qu'un millier environ de plaintes ont été déposées contre des agents publics pour des atteintes aux droits des migrants, suite auxquelles environ 80 sanctions ont été prononcées; elle s'est inquiété du faible taux de répression par rapport au nombre de cas présentés.

Une experte a relevé la faible culture de la dénonciation qui prévaut parmi les migrants s'agissant des atteintes à leurs droits.

Un autre membre du Comité a souhaité en savoir davantage sur l'éventuel système permettant de mesurer les résultats des politiques publiques visant la promotion et la protection des droits des migrants. Il a en outre fait part de sa préoccupation face aux informations faisant état d'exactions que subissent les migrants dans les centres de rétention au Mexique.

Réponses de la délégation

La délégation mexicaine a notamment attiré l'attention sur la Stratégie intégrée de lutte contre les enlèvements qui a été mise en place par les autorités mexicaines. Des mesures ont été prises dans le cadre de cette stratégie pour démanteler des bandes criminelles organisées, a-t-elle souligné. Les actions de prévention dans ce domaine sont menées, notamment, par le biais de distribution de brochures et d'émissions de télévision, a précisé la délégation.

Les enlèvements de migrants sont liés à la criminalité organisée, plus particulièrement au trafic de drogues, a insisté la délégation. Elle a fait part des poursuites engagées et des condamnations prononcées contre des personnes impliquées dans des actes délictueux contre des migrants, y compris contre des personnes accusées de complicité avec des bandes criminelles organisées. La délégation a précisé que 26 bandes organisées impliquées dans la traite de personnes ont été démantelées récemment.

Le «business de la migration» a généré une source impressionnante de revenus pour les trafiquants, a souligné la délégation. Un certain nombre de délits énoncés dans le Code pénal permettent d'agir contre ce phénomène, a-t-elle assuré, citant notamment les dispositions relatives au blanchiment d'argent ou encore le simple fait de constituer une bande criminelle organisée. Aujourd'hui, le trafic de migrants constitue la seconde source de revenus pour les bandes criminelles, a par la suite indiqué la délégation.

La délégation a souligné que des personnes ont été condamnées au Mexique à des peines de 9 à 13 ans d'emprisonnement pour le crime de traite de personnes.

Le Chiapas est la porte d'entrée des migrants en provenance d'Amérique centrale, a rappelé la délégation.

Suite à l'assassinat de 72 personnes à San Fernando de Tamaulipas, une enquête fédérale a été lancée afin de déterminer les responsabilités; au mois d'août dernier, 11 personnes ont été placées en détention dans le cadre des poursuites engagées dans cette affaire, qui relève de la criminalité transnationale organisée, a indiqué la délégation. Cinquante-sept des 59 victimes identifiées à ce jour ont été rapatriées dans leurs pays d'origine, a par ailleurs précisé la délégation.

La délégation a fait part des mesures prises par les autorités mexicaines pour protéger les défenseurs des droits de l'homme, conformément aux recommandations de la Commission interaméricaine des droits de l'homme, de la Commission nationale des droits de l'homme ou encore de l'ombudsman.

La délégation a fait observer qu'en 2010, 469 000 Mexicains ont été rapatriés au Mexique depuis les États-Unis, contre pratiquement un million en 2005. Il existe un programme spécifique de prise en charge, aux fins de leur réintégration rapide dans la société mexicaine, des Mexicains qui reviennent au Mexique depuis les États-Unis, a souligné la délégation.

En réponse à une autre question, la délégation a précisé que la peine encourue en cas d'enlèvement est aggravée si le coupable est un agent de l'État.

La politique en faveur des femmes, y compris pour ce qui est de la lutte contre la violence faite aux femmes, a bénéficié aux femmes migrantes, a d'autre part assuré la délégation. Au total, quelque 1200 entités municipales, 32 fédérales et une institution nationale ont constitué l'architecture de soutien de la politique nationale d'égalité entre hommes et femmes.

L'Institut national de la migration s'efforce d'être présent sur tous les chemins suivis par les migrations au Mexique, du Chiapas à la frontière nord, a souligné la délégation. Les «Grupos Beta» - créés il y a plus de 20 ans - constituent un mécanisme qui a rendu à l'Institut national des migrations de bons services dans la protection et la prise en charge des migrants; ils les nourrissent, veillent à leur intégrité physique, voire leur portent secours dans bien des cas. La présence de ces groupes a été particulièrement renforcée tout le long des itinéraires suivis par les migrants, a indiqué la délégation.

La délégation a par ailleurs présenté l'action du vaste réseau de consulats mexicains aux États-Unis en faveur des migrants mexicains dans ce pays, dont le nombre est évalué à 12 millions. Ces consulats font notamment circuler des informations sur les conséquences que peut avoir pour ces migrants la loi adoptée l'an dernier en Arizona.

Questions complémentaires des experts

Un membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles certains «Grupos Beta» mis en place par l'Institut national des migrations pour la protection des migrants seraient infiltrés par la criminalité. Il a aussi soulevé la question de l'enregistrement des enfants de migrants nés au Mexique en soulignant que, selon certaines informations des officiers de l'état civil refuseraient parfois d'enregistrer ces enfants.

Un autre membre du Comité s'est enquis des actions entreprises par le Mexique aux fins de l'accession du pays aux conventions n°97 et 143 de l'Organisation internationale du travail relatives aux travailleurs migrants. Les migrants seraient souvent victimes des bandes de criminels liées à la criminalité organisée; les plaintes en la matière reçues par la Commission nationale des droits de l'homme ne cessent d'augmenter d'année en année, a souligné l'expert.

Il semble que les travailleurs saisonniers, près de la frontière méridionale du Mexique, ne travaillent pas dans des conditions décentes et sont victimes de nombreuses discriminations, s'est inquiétée une experte, avant de s'enquérir des mesures prises pour remédier à cette situation. Elle a en outre exprimé son inquiétude au sujet du nombre élevé de travailleurs migrants décédés aux frontières du Mexique - qui s'élève à environ 2000 entre 2005 et 2009.

Une autre experte a évoqué la situation des femmes domestiques migrantes, attirant l'attention à cet égard sur la recommandation générale adoptée par le Comité sur les travailleurs domestiques migrants, dont l'écrasante majorité sont des femmes. Est-ce que, à travers les consulats mexicains à l'étranger, des mesures sont prises pour garantir le respect des droits de ces travailleuses domestiques migrantes, particulièrement exposées à une multitude de privations et de violations de leurs droits, a demandé l'experte? De la même manière, qu'en est-il de la situation des femmes travailleuses migrantes domestiques au Mexique?

Évoquant pour sa part la situation des travailleurs saisonniers qui entrent au Mexique à la période des récoltes, un expert a souligné l'importance de conclure des accords bilatéraux entre les pays d'origine et le Mexique afin d'assurer le bien-être de ces travailleurs agricoles.

Réponses complémentaires de la délégation

La délégation mexicaine a souligné qu'au nombre des défis rencontrés par les autorités s'agissant de la situation des migrants au Mexique, figurent les délits du crime organisé contre les migrants, la nécessité de garantir l'accès des migrants à la justice ou encore la nécessité d'assurer le bon fonctionnement des centres de rétention de migrants. Elle a notamment assuré à cet égard qu'aucune vexation n'est tolérée dans les centres pour migrants.

Au total, il existe 54 points d'entrée terrestres au Mexique, frontières septentrionale et méridionale confondues; en outre, le pays compte une soixantaine d'aéroports et autant de ports, a rappelé la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que 19 000 personnes, originaires essentiellement d'Amérique centrale, ont vu leur situation régularisée. L'an dernier, quelque 63 300 ressortissants d'Amérique centrale, essentiellement du Guatemala, du Honduras, d'El Salvador et du Nicaragua ont été rapatriés dans leur pays.

Pour ce qui est de l'enregistrement des enfants de migrants au Mexique, la délégation a souligné que les autorités mexicaines œuvrent à la formation adéquate des agents de l'état civil afin de garantir que les enfants d'étrangers soient traitées comme des enfants de citoyens mexicains, conformément à la Constitution qui reconnaît notamment le jus soli (droit du sol).

S'agissant des mesures prises pour garantir les droits des employés domestiques, la délégation a souligné que les consulats mexicains apportent notamment une assistance juridique et fournissent un grand nombre d'informations pertinentes aux personnes concernées.

Pour ce qui est des travailleurs saisonniers, surtout en provenance du Guatemala, qui travaillent au Chiapas, il convient de relever que désormais, l'Institut national des migrations reconnaît qu'il s'agit là d'un élément décisif du développement du Chiapas; aussi, des droits sont-ils désormais reconnus à ces travailleurs saisonniers qui sont devenus «visibles», en quelque sorte.

En 2006, le droit de vote des Mexicains de l'étranger aux élections mexicaines a été exercé pour la première fois, a par ailleurs indiqué la délégation.

Observations préliminaires

M. FRANCISCO CARRIÓN MENA, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport du Mexique, a exprimé sa reconnaissance et sa satisfaction à la délégation mexicaine suite au dialogue qu'elle a mené avec le Comité. Le Mexique est un pays pionnier dans la recherche de solutions pour la prise en charge adéquate des phénomènes migratoires, a-t-il souligné. Il a salué la volonté du pays de s'acquitter de ses obligations conformément aux dispositions de la Convention. Il existe réellement une volonté politique de s'attaquer au phénomène migratoire et à ses incidences, a-t-il insisté, avant de saluer les initiatives originales du Mexique dans ce contexte. Il n'en demeure pas moins que des progrès restent à réaliser, s'agissant notamment de l'élimination de la corruption ou de la lutte contre la criminalité organisée. La criminalité organisée reste certainement le principal obstacle auquel se heurte l'application de la Convention, a estimé M. Carrión Mena.


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CMW11/003F