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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE LA RÉPUBLIQUE DE CORÉE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné hier après-midi et aujourd'hui le rapport de la République de Corée sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Présentant ce rapport, M. Lee Sung-joo, Représentant permanent de la République de Corée auprès des Nations Unies à Genève, a d'emblée attiré l'attention sur la crise économique mondiale qui a eu pour conséquence une marginalisation d'une partie de la population. Le Gouvernement a continué d'accroître son budget social, qui représente désormais le principal poste budgétaire du pays, avec 26% des dépenses totales de l'État, a-t-il fait valoir. Il a en outre attiré l'attention sur un certain nombre de mesures prises par le Gouvernement pour protéger les personnes pauvres et défavorisées qui rencontrent des difficultés financières. Le chef de la délégation a ensuite développé les changements majeurs intervenus récemment dans le pays que sont l'augmentation impressionnante du nombre des travailleurs migrants et des mariages internationaux, d'une part, et la faible fertilité et le vieillissement rapide de la population, de l'autre. M. Lee a par ailleurs fait valoir qu'en mars 2005, le Gouvernement a aboli le système Ho-ju (système patriarcal). Il a en outre adopté, en janvier 2005, la Loi sur les syndicats de fonctionnaires qui octroie aux agents de la fonction publique le droit de créer des syndicats et de s'y affilier ainsi que le droit de tenir des négociations collectives. Néanmoins, le droit de grève des fonctionnaires reste limité en raison de la nature publique de leur travail et de la nécessité d'assurer la continuité des fonctions de l'État. Le système de permis de travail introduit en 2004 vise à protéger le statut juridique des travailleurs migrants et à interdire toute discrimination à leur encontre, a fait valoir le chef de délégation, ajoutant que le droit à l'éducation pour les enfants de migrants est garanti, quel que soit leur statut de résidence.

La très imposante délégation de la République de Corée était composée d'une trentaine de représentants d'une douzaine de ministères. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, de la place du Pacte dans l'ordre juridique interne; de la Commission nationale des droits de l'homme; du respect du principe de non-discrimination, s'agissant notamment des questions relatives à la nationalité et aux salaires; du projet de développement des Quatre rivières; des contrats passés par certaines multinationales avec des pays étrangers; de la situation des travailleurs temporaires et des travailleurs migrants; de l'emploi des personnes handicapées; du chômage; du droit de grève; des zones franches; des problèmes de contamination de l'eau; des difficultés rencontrées par les agriculteurs; des questions de logement; ou encore des questions d'éducation.

Par rapport à l'examen du précédent rapport de la République de Corée, la plupart des problèmes continuent d'exister et certains se sont même aggravés, a déploré un expert. Un autre membre du Comité a souligné qu'en dépit d'une forte croissance économique, la concurrence, la flexibilité du travail ou encore la réduction des dépenses avaient entraîné une régression générale dans tous les domaines des droits économiques, sociaux et culturels. Des biens publics – santé, éducation, approvisionnement en eau, électricité – ont été privatisés. Cela est d'autant plus préoccupant que la diminution du rôle de l'État ne lui permettra pas de s'acquitter de ses obligations en vertu du Pacte face aux interventions de tiers.

À sa prochaine séance publique, le vendredi 20 novembre prochain, le Comité présentera ses observations finales sur le rapport de la République de Corée, ainsi que sur les autres rapports examinés au cours de la session.


Présentation du rapport

M. LEE SUNG-JOO, Représentant permanent de la République de Corée auprès des Nations Unies à Genève, a d'emblée attiré l'attention sur le premier changement intervenu récemment s'agissant de la situation socio-économique de la République de Corée, qui a été touchée par la crise économique mondiale et la marginalisation d'une partie de la population qu'elle induit. Les dépenses gouvernementales dans le secteur social et pour le bien-être de la population ne doivent pas être considérées comme un coût mais plutôt comme un investissement pour une meilleure intégration sociale, a-t-il souligné, après avoir rappelé que ce sont les personnes socialement et économiquement marginalisées qui sont le plus durement frappées par la crise financière mondiale. Fort de ce point de vue, le Gouvernement a continué à accroître son budget social qui représente désormais le principal poste budgétaire du pays avec 26% des dépenses totales du Gouvernement. Le Gouvernement a par ailleurs pris diverses mesures pour protéger les personnes pauvres et défavorisées qui rencontrent des difficultés financières, a poursuivi M. Lee. À titre d'exemple, il a indiqué que le Gouvernement a – en abaissant les critères pour en bénéficier – continué d'élargir l'éligibilité au Système national de sécurité des moyens de subsistance de base, un filet de sécurité visant à garantir le «minimum national» pour la classe à bas revenus. En révisant la Loi sur la fourniture d'une aide sociale d'urgence, le Gouvernement a également élargi l'éligibilité et l'accès à l'aide sociale d'urgence. En outre, le Gouvernement s'est efforcé d'étendre les soins de santé publique essentiels en vue de parvenir à l'universalité du système de soins de santé. Les personnes qui ne sont pas couvertes par le système national d'assurance santé peuvent bénéficier d'un programme d'aide médicale, a précisé M. Lee.

Le deuxième changement important intervenu dans le pays du point de vue socioéconomique a trait à l'augmentation impressionnante du nombre des travailleurs migrants et des mariages internationaux, a poursuivi le Représentant permanent. Ainsi, a-t-il souligné, la société coréenne est-elle en train de se transformer rapidement en une société multiculturelle. Le nombre d'étrangers vivant en République de Corée excède désormais 1,1 million, a-t-il précisé. Aussi, le Gouvernement a-t-il entrepris de prendre un certain nombre de mesures visant à assurer une intégration souple des étrangers et à favoriser la diversité culturelle au sein de la société coréenne, a-t-il ajouté. M. Lee a notamment évoqué ici la Commission pour la politique d'immigration mise sur pied en 2006 et la Loi sur le traitement des étrangers en Corée adoptée l'année suivante. Sur la base de cette dernière loi, le premier Plan national pour la politique d'immigration a été élaboré au mois de décembre dernier. L'an dernier, a ajouté le Représentant permanent, la Loi sur le soutien aux familles multiculturelles a été adoptée pour faciliter l'intégration sociale des familles ayant des origines multiculturelles. Le Gouvernement a mis en place à travers le pays une centaine de centres de soutien aux familles multiculturelles, qui sont chargés d'apporter à ces familles des services complets incluant des conseils, une éducation linguistique et culturelle et des avis juridiques.

Le troisième changement majeur intervenu récemment dans le pays du point de vue socioéconomique est d'ordre démographique et résulte de la faible fertilité et du vieillissement rapide de la population que connaît la République de Corée, a poursuivi M. Lee. Pour cette année, le taux de personnes âgées de plus de 65 ans dans le pays est de 10,7%; or, on estime qu'il atteindra 20% d'ici 2026. En 2008, a indiqué le Représentant permanent, le Gouvernement a introduit le système de pensions de retraite pour les personnes âgées afin d'atténuer la pauvreté parmi ces personnes et leur assurer une plus grande stabilité économique et sociale. M. Lee a par ailleurs fait part du plan global visant à développer la main-d'œuvre féminine mis en place par la République de Corée, auquel il convient d'ajouter des mesures visant à promouvoir l'emploi des femmes.

Répondant ensuite aux dernières en date des observations finales du Comité, M. Lee a indiqué que son pays avait mis sur pied, en mai 2007, un Plan national d'action pour la promotion et la protection des droits de l'homme. En outre, afin de suivre de manière complète et intégrée les différentes questions et politiques de droits de l'homme, le Gouvernement a créé en mai 2006, au sein du Ministère de la justice, le Bureau des droits de l'homme. M. Lee a par ailleurs fait valoir qu'en mars 2005, le Gouvernement a finalement aboli le système Ho-ju (système patriarcal), amendant les dispositions pertinentes du droit civil afin d'établir un système familial plus équitable. Il s'agit là d'une étape historique: la société coréenne, profondément enracinée dans la tradition confucéenne, a pris une mesure résolue pour éliminer une pratique majeure de discrimination entre les sexes qui a dominé la société coréenne pendant des siècles, a insisté le Représentant permanent.

Ayant également à l'esprit la recommandation du Comité à ce sujet, le Gouvernement a, en janvier 2005, adopté la Loi sur les syndicats de fonctionnaires qui octroie aux agents de la fonction publique le droit de créer des syndicats et de s'y affilier ainsi que le droit d'engager des négociations collectives. Néanmoins, a ajouté M. Lee, le droit de grève des fonctionnaires reste limité en raison de la nature publique de leur travail et de la nécessité d'assurer la continuité des fonctions de l'État.

Quant aux travailleurs «non réguliers», a poursuivi M. Lee, la Loi sur les travailleurs employés à durée déterminée, notamment, stipule que la durée d'emploi ne doit pas excéder pour cette catégorie. La délégation a précisé qu'après deux ans de contrat, l'employeur est tenu de convertir un contrat à durée déterminée, en contrat à durée indéterminée.

Le Gouvernement a par ailleurs pris des mesures afin de venir en aide aux groupes vulnérables de la société, tels que les enfants, les personnes handicapées et les travailleurs migrants, a poursuivi M. Lee. Ayant rappelé que lors du précédent examen du rapport de son pays, le Comité avait fait part de sa préoccupation face à l'incidence croissante de l'exploitation sexuelle des enfants et des violences à leur encontre, M. Lee a indiqué qu'en avril 2008, le Gouvernement a annoncé un plan complet de contre-mesures visant à protéger les femmes et les enfants. La loi sur le bien-être des enfants a été révisée en 2000 et des peines plus strictes ont été imposées pour les cas de violences contre les enfants.

S'agissant enfin de la protection des travailleurs migrants et de leurs enfants, M. Lee a rappelé qu'en 2004, le Gouvernement a introduit le système de permis de travail qui vise à protéger le statut juridique des travailleurs migrants et à interdire toute discrimination à leur encontre. En vertu de ce régime, le droit du travail s'applique également aux travailleurs étrangers. En outre, le Gouvernement garantit le droit à l'éducation pour les enfants de migrants, quel que soit leur statut de résidence, a indiqué le Représentant permanent.

En dépit de tous les efforts consentis, a conclu M. Lee, il reste encore à faire pour la pleine réalisation des droits prévus par le Pacte. Cela n'est pas dû à un manque de volonté de notre part, mais plutôt au fait que le processus dynamique consistant à dégager un consensus social parmi plusieurs chemins de vie possibles prend souvent du temps, a-t-il souligné.

Le troisième rapport périodique de la République de Corée (E/C.12/KOR/3) assure que depuis la présentation du second rapport périodique en 1999, le Gouvernement n'a pas ménagé ses efforts en vue d'améliorer les droits économiques, sociaux et culturels du peuple coréen, notamment ceux des minorités, et il a agi pour traiter les points soulevés dans les observations finales concernant le deuxième rapport périodique. Parmi les faits les plus marquants, il convient de mentionner l'amendement du Code civil en mars 2005 pour abolir le système patriarcal du chef de famille. Conformément au Code civil amendé, les parents peuvent décider d'un commun accord que le nom de famille et l'origine des enfants soient ceux de la mère; le nom et l'origine des enfants peuvent être modifiés dans leur intérêt. La nouvelle législation entrera en vigueur en 2008. Aussi, la loi sur l'établissement et le fonctionnement de syndicats des employés de la fonction publique, amendée le 27 janvier 2005, garantit aux fonctionnaires le droit, autrefois limité, de former des syndicats et de procéder à des négociations collectives. Le Gouvernement a expérimenté différentes mesures destinées à réduire la fracture sociale et améliorer la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels des groupes socialement vulnérables que sont notamment les pauvres, les personnes âgées et les enfants. Dans certains domaines, cependant, la République de Corée ne s'est pas encore conformée aux prescriptions du Pacte; mais elle est bien résolue à faire de son mieux pour renforcer les droits économiques, sociaux et culturels dans la mesure permise par les ressources disponibles, indique le rapport.

En mai 2006, poursuit le rapport, le Gouvernement a institué le Bureau des droits de l'homme au sein du Ministère de la justice et l'a chargé de formuler et mettre en œuvre les politiques nationales relatives aux droits de l'homme, parmi lesquelles le Plan d'action national pour la promotion et la protection des droits de l'homme, d'enquêter sur les affaires de violation de ces droits, d'améliorer les institutions travaillant dans ce domaine et de fournir protection et réparation aux victimes d'infractions. En outre, le Gouvernement a créé la Commission nationale des droits de l'homme, le 25 novembre 2001; elle est notamment chargée de faire des recommandations pour l'amélioration des politiques et des lois, de donner son avis sur les questions humanitaires d'actualité, de rédiger et proposer des recommandations sur le Plan d'action national, de mener toute une série d'enquêtes sur la situation des droits de l'homme, d'améliorer les institutions et les pratiques des services publics, d'enquêter et formuler des recommandations sur les pratiques discriminatoires, et de conduire des actions d'éducation et de sensibilisation aux droits de l'homme.

En avril 2002, le Gouvernement a décidé d'accorder un visa de résident permanent (F-5) aux ressortissants étrangers détenteurs d'un visa de résident (F-2) établis dans le pays depuis plus de cinq ans. En septembre 2005, la loi amendée sur le contrôle de l'immigration a réduit de cinq à deux ans la période minimale requise des conjoints étrangers de ressortissants coréens détenteurs d'un visa F-2 pour obtenir un visa de résident permanent (F-5). Le droit à l'emploi des étrangers qui disposent d'un visa F-5 ne connaît pratiquement aucune restriction. Les conjoints étrangers (visa F-2) de ressortissants coréens souhaitant obtenir un emploi en Corée doivent obtenir un permis de travail. Toutefois, depuis septembre 2005, la loi amendée sur le contrôle de l'immigration autorise les étrangers appartenant à la catégorie sociale des bas salaires à chercher un travail sans avoir à demander un permis de travail. Depuis l'introduction du régime des permis de travail en août 2004, l'effectif total des travailleurs étrangers recrutés jusqu'en avril 2006 était de 106 333 personnes, indique le rapport.

Le rapport indique en outre qu'en 2001, l'effectif des travailleurs temporaires était de
3 millions 635 mille personnes en août et représentait ainsi 26,8 % de la masse salariale. Depuis, le nombre de ces travailleurs n'a cessé d'augmenter, jusqu'à atteindre 5 483 000 personnes en août 2005, soit 36,6 % de la main-d'œuvre totale. Quoique les fonctionnaires soient privés du droit à l'action collective, certaines mesures viennent contrebalancer cette restriction. Par exemple, en cas d'échec des négociations collectives, les parties conjointement ou chacune pour sa part peuvent saisir la Commission nationale des prud'hommes pour demander sa médiation ou son arbitrage. La médiation et l'arbitrage sont conduits par la Commission de médiation des relations professionnelles dans la fonction publique, qui est composée de personnes représentant l'intérêt public. Une proposition arbitrale, une fois confirmée, a les mêmes effets qu'une convention collective.


Examen du rapport

Questions des membres du Comité

Abordant les questions relatives au cadre général d'application du Pacte, un membre du Comité a demandé si les droits énoncés dans le Pacte peuvent être invoqués devant les tribunaux de la République de Corée. Un autre expert a relevé que les avocats en République de Corée semblent penser que les droits économiques, sociaux et culturels ne sont que des droits de seconde catégorie qui ne seraient pas contraignants. Pourquoi les effectifs de la Commission nationale des droits de l'homme ont-ils été réduits de 30%, a par ailleurs demandé cet expert? Il a été indiqué au Comité que cette Commission ne s'occupait pas de recours en cas de violations des droits économiques, sociaux et culturels, s'est inquiété un autre expert. Un autre membre du Comité s'est inquiété de la situation de cette Commission nationale des droits de l'homme, en particulier pour ce qui a trait à son indépendance.

Un membre du Comité a constaté qu'il il existe en République de Corée des signes manifestes de progrès dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels, ce qui ne signifie pas qu'il ne reste pas encore à faire en la matière, a-t-elle précisé. Un autre membre du Comité s'est toutefois dit déçu que le constat que le Comité avait fait lors de l'examen du précédent rapport de la République de Corée soit toujours valable, à savoir que le développement économique du pays ne s'accompagne pas de mesures en faveur des plus démunis. La plupart des problèmes continuent d'exister et certains se sont même aggravés, a poursuivi cet expert. Un autre membre du Comité s'est enquis du pourcentage de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté.

Un expert a souligné qu'en dépit d'une forte croissance économique, la concurrence, la flexibilité du travail ou encore la réduction des dépenses ont entraîné une régression générale dans tous les domaines des droits économiques, sociaux et culturels. Des biens publics – santé, éducation, approvisionnement en eau, électricité – ont été privatisés. Cela est d'autant plus préoccupant que la diminution du rôle de l'État ne lui permettra pas de s'acquitter de ses obligations en vertu du Pacte face aux interventions de tiers (notamment les entreprises ayant acquis les biens publics privatisés), s'est inquiété cette experte.

La loi sur les étrangers dont s'est dotée la République de Corée ne répond pas aux préoccupations du Comité, en particulier pour ce qui a trait aux garanties de non-discrimination en matière de nationalité, a déclaré un expert. La législation en vigueur en République de Corée rend vraiment difficile la naturalisation des étrangers, a souligné un autre expert. Un membre du Comité a déploré la persistance de certaines formes de discrimination, en particulier à l'encontre des enfants: enfants handicapés, enfants nés hors mariage, enfants issus de familles monoparentales et enfants issus de familles de migrants. La délégation confirme-t-elle ces informations et peut-elle indiquer les mesures prises pour remédier à cette situation?

Il semblerait en outre qu'en dépit de l'abolition du système patriarcal dit Ho-jo, il y ait toujours différentes formes de discrimination à l'égard des femmes, notamment dans le domaine du travail, ainsi qu'à l'égard des femmes migrantes, a-t-il été souligné.

S'agissant de l'emploi et les conditions de travail, une experte a demandé comment était calculé le salaire minimum et dans quelle mesure est-il adapté au coût de la vie, a demandé une experte? Le grand nombre d'heures de travail effectuées par les travailleurs en République de Corée s'accompagne d'un grand nombre d'accidents voire de décès au travail, a par ailleurs relevé l'experte, soulignant en outre le faible nombre d'inspecteurs du travail dans le pays. Quelles mesures sont-elles prises pour traiter le problème du chômage des jeunes, a par ailleurs demandé une experte? Une experte s'est demandée si la définition de ce qui constitue une grève légale en République de Corée n'était pas par trop restrictive.

Un membre du Comité a déclaré que des problèmes continuent de se poser en République de Corée s'agissant de l'application du Pacte aux travailleurs migrants. Il a notamment dénoncé les restrictions imposées à la mobilité des travailleurs migrants sur le marché de l'emploi. Le taux d'accidents parmi les travailleurs migrants est plus élevé que parmi les travailleurs locaux. Se posent également des problèmes de harcèlement sexuel et de violences à l'encontre des travailleuses migrantes, a souligné cet expert. Il a également dénoncé le caractère restrictif de la législation de la République de Corée en matière de lutte contre la traite de personnes, en ce sens que la législation n'interdit spécifiquement que la seule traite à des fins de prostitution.

Il semble que pour ce qui a trait au logement, aux expulsions forcées et aux sans domicile fixe, il n'y ait pas eu de progrès en République de Corée depuis l'examen du précédent rapport du pays, a relevé un expert. Les autorités seraient-elles disposées à adopter un moratoire sur les expulsions forcées jusqu'à ce que le pays se dote d'une législation adéquate, a demandé un expert? Entre 2007 et 2010, 130 000 logements auront été détruits à Séoul et seuls une petite partie d'entre eux seront remplacés, s'est inquiété un autre membre du Comité.

Abordant les questions relatives à la situation en matière de santé, un membre du Comité s'est enquis des causes de l'augmentation considérable des personnes atteintes par le VIH/sida en République de Corée. La privatisation des services de santé ne risque-t-elle pas d'entraver l'accès aux soins de santé, s'est pour sa part inquiété un expert? Un membre du Comité a fait état d'un rapport datant de 2002 selon lequel de 70 à 80% des adolescentes enceintes ont recours à l'avortement, l'utilisation des contraceptifs par les adolescentes étant par ailleurs très faible.

D'autres questions on notamment porté sur le grand projet de développement dit des Quatre rivières qui, selon certains commentateurs, ne dégagera pas de revenus réellement conséquents; aussi, peut-on se demander si les importantes sommes affectées à la réalisation de ce projet gigantesque n'auraient pas été mieux utilisées si elles avaient été allouées à des programmes sociaux efficaces.

Un membre du Comité a rappelé que les contrats de location de terres agricoles à l'étranger, comme ceux que l'entreprise Daewo s'est efforcée de passer avec Madagascar et les Philippines, violent les droits à l'alimentation et au travail dans les pays où ces terres sont louées. Un autre membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles en République de Corée, l'autonomie alimentaire serait assez faible, ce qui pourrait motiver la recherche à l'étranger de contrats d'exploitation agricole par des entreprises coréennes.

Il semble y avoir un problème en ce qui concerne l'approvisionnement en eau potable, a relevé un membre du Comité. Récemment, en effet, le Ministère de l'environnement a trouvé des substances cancérigènes dans un grand nombre de bouteilles d'eau. Un autre expert s'est inquiété des informations faisant état d'une contamination, au radon notamment, des eaux de 150 villages en République de Corée.

Le système de sécurité sociale n'est pas universel et certaines personnes n'y ont pas accès, les critères étant en effet assez restrictifs, s'est inquiété un autre membre du Comité.

Les universités coréennes comptent-elles beaucoup d'étudiants étrangers, compte tenu des difficultés linguistiques liées à la difficulté de la langue coréenne, a demandé un expert, relevant des informations selon lesquelles il y en avait environ 22 600 en 2005.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions sur le cadre général d'application du Pacte, la délégation a indiqué qu'il n'a pour l'instant jamais été directement invoqué lors dans une affaire ou lors d'un procès devant les tribunaux ordinaires; en revanche, des jugements de la Cour suprême ou du Conseil constitutionnel se sont appuyés sur le Pacte, a-t-elle fait valoir. La plupart des droits économiques, sociaux et culturels sont déjà garantis par la Constitution et couverts par la législation nationale, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne la Commission nationale des droits de l'homme, la délégation a précisé que la réduction des effectifs de cette institution a été de 21% et non pas de 30% comme cela a été dit. Cette réduction ne vise pas à en réduire les fonctions ou le rôle de la Commission mais plutôt à en accroître l'efficacité, a-t-elle expliqué. La Commission nationale doit suivre les conseils du Gouvernement, qui contrôle son budget, conformément à la règle applicable à tous les organes gouvernementaux, a ajouté la délégation. Elle a indiqué ne pas partager l'avis selon lequel l'indépendance de cette Commission aurait été réduite; en effet, la nomination du président d'une institution nationale de droits de l'homme par le Président de la République du pays concerné est fréquente à travers le monde et cela ne constitue en rien une infraction au Pacte, a insisté la délégation.

La délégation a indiqué qu'une équipe spéciale avait été mise sur pied afin d'élaborer un projet de loi mis à jour contre la discrimination. Les motifs de discrimination seront précisés dans le projet de loi qui sera présenté, a-t-elle ajouté, après avoir reconnu que le précédent projet de loi ne contenait pas une liste exhaustive de ces motifs.

Répondant à des questions sur la discrimination entre hommes et femmes, la délégation a notamment indiqué que depuis 1998, la nationalité de l'enfant n'est plus déterminée par la seule nationalité du père mais aussi de la mère, a indiqué la délégation. Les étrangers doivent résider en République de Corée pendant cinq ans avant de pouvoir faire acte de candidature à l'octroi de la nationalité, a-t-elle ajouté. Un texte de loi prévoit qu'à travail égal, les hommes et les femmes doivent percevoir la même rémunération, proscrivant ainsi toute forme de discrimination entre hommes et femmes dans ce domaine, a poursuivi la délégation. En fait, le fossé existant entre les salaires des hommes et ceux des femmes est dû au fait que les femmes interrompent leur carrière au moment d'élever leurs enfants, a expliqué la délégation.

Eu égard notamment aux problèmes de sécheresse que rencontre la République de Corée, les avantages économiques du projet de développement mentionné par un membre du Comité – le projet de restauration des Quatre rivières – sont énormes, ce qui permet de dire que ce projet est un succès, sans compter qu'il créera des emplois, a par ailleurs déclaré la délégation.

En réponse aux préoccupations exprimées par des membres du Comité s'agissant des contrats de location de terres agricoles à l'étranger passés par certaines multinationales avec certains pays, la délégation a indiqué que le Gouvernement de la République de Corée attache la plus grande importance à la coopération et à la responsabilité qu'il doit assumer à cet égard et s'attache également à rappeler leurs responsabilités aux principales entreprises multinationales.

Le nombre de travailleurs temporaires en République de Corée s'élève à 1,6 million, a par ailleurs indiqué la délégation. Néanmoins, la part des travailleurs temporaires dans la main-d'œuvre totale diminue depuis 2007, ce qui est en particulier dû au fait que la politique d'emploi du Gouvernement s'est adaptée à la crise économique. Le Gouvernement prévoit une réduction fiscale en faveur de l'employeur pour chaque travailleur qui passerait d'un contrat à durée déterminée à un contrat à durée indéterminée, a précisé la délégation. Afin de renforcer la protection sociale des travailleurs temporaires, il est prévu qu'ils puissent percevoir les prestations de chômage même s'ils n'ont pas souscrit d'assurance chômage, a-t-elle ajouté.

Depuis 2002, la République de Corée a fait de grands progrès en ce qui concerne les travailleurs migrants qui, jusqu'à cette date, ne pouvaient travailler que comme stagiaires ou apprentis, a souligné la délégation. Depuis, environ 200 000 travailleurs migrants ont pu entrer sur le marché du travail en vertu du régime de permis de travail qui a été mis en place, a-t-elle précisé. Ce régime prévoit un mécanisme en cas d'accident de travail touchant des travailleurs migrants. En ce qui concerne l'accès des travailleurs migrants aux soins de santé, la délégation a expliqué que les travailleurs migrants qui sont couverts par une assurance santé sont, après trois ans de travail, bénéficiaires de tous les services médicaux, jusqu'à un certain taux de couverture. Pour ceux qui n'ont pas accès à des soins médicaux – sauf, bien entendu, ceux dispensés à des fins humanitaires – ils peuvent avoir recours à des prestations spéciales ou à des emprunts, a déclaré la délégation.

En 2007, a poursuivi la délégation, a été introduite une loi visant à promouvoir l'emploi des personnes handicapées et la République de Corée est donc en train de mettre en œuvre le programme y afférent. En 2010, le nombre de personnes handicapées employées dans l'administration et dans le secteur public sera encore augmenté, a-t-elle ajouté.

Pour l'année 2008, le taux de chômage en République de Corée se situait à 3,2% et l'on s'attend à ce qu'il augmente en 2009, étant donné qu'il se situait à 3,7% en juillet dernier, a par ailleurs déclaré la délégation. Les allocations chômage ont été introduites pour la première en République de Corée en 2005 et depuis cette date, le système d'allocations chômage n'a cessé d'être perfectionné, les autorités étant conscientes de l'importance que revêt ce système pour la protection sociale globale.

S'agissant des conditions de travail, la République de Corée compte 250 inspecteurs du travail censés inspecter quelque 1,2 million de lieux de travail, a par ailleurs indiqué la délégation. Néanmoins, on assiste actuellement à une diminution du taux d'accidents de travail, notamment grâce au travail de ces inspecteurs mais aussi grâce aux activités des agences publiques chargées de veiller à la sécurité sur les lieux de travail.

Répondant à des questions sur les droits syndicaux et droit de grève , la délégation a expliqué que c'est au tribunal, après que le bureau du Procureur et la police ont identifié l'objet de la grève, de se prononcer sur la légalité d'une grève. L'occupation pacifique d'un local de travail est acceptable si la grève est légale, a-t-elle ajouté. Si la grève n'est pas motivée par l'amélioration des conditions de travail ou n'est pas pacifique, elle sera considérée comme illégale et conduira à des sanctions pour violation du Code du travail, a précisé la délégation. Les grèves à motivation politique sont interdites, a-t-elle insisté. En 2008, sur 108 grèves, 17 étaient illégales, soit 15% du total, a par la suite précisé la délégation. À la fin octobre 2009, seules 8 des 101 grèves enregistrées jusque-là pour cette année ont été déclarées illégales, a-t-elle indiqué. La protection syndicale couvre les seuls travailleurs légaux; les travailleurs illégaux s'excluent donc par eux-mêmes de cette protection, a en outre souligné la délégation.

La République de Corée a créé les «zones économiques libres» ou zones franches en s'efforçant de ne pas porter atteinte au droit du travail, mais il n'a pas toujours été aisé de faire en sorte que les entreprises étrangères se plient aux normes locales, a reconnu la délégation. Il est difficile, par exemple, d'imposer à ces entreprises d'appliquer les règles relatives, par exemple, à l'emploi des personnes handicapées.

Il est vrai qu'en comparaison avec la situation qui prévaut en la matière dans nombre de pays développés, il reste encore de nombreux progrès à faire en République de Corée en ce qui concerne le montant et le taux de couverture des pensions de retraite, a d'autre part reconnu la délégation. Aussi, cette question fera-t-elle partie des priorités de la prochaine campagne électorale, a-t-elle précisé.

Le droit pénal coréen ne limite pas la définition de la traite de personnes à la seule traite à des fins d'exploitation sexuelle, a par ailleurs contesté la délégation, précisant que la définition retenue par le législateur coréen porte également sur l'enlèvement et les disparitions de personnes, y compris en dehors du pays.

En réponse aux questions sur l'accès à l'eau potable, la délégation a indiqué qu'au total, les nappes phréatiques du pays renferment 3,7 milliards de tonnes d'eau; or, 0,9% seulement de cette quantité sont utilisés par les entreprises commercialisant l'eau en bouteilles, de sorte que l'on ne peut pas dire que ces dernières soient responsables de l'épuisement des nappes phréatiques. Il est vrai qu'a été trouvée une faible quantité de radon dans certaines eaux souterraines du pays, a par ailleurs reconnu la délégation. En réponse à certaines préoccupations exprimées au sein du Comité, la délégation a indiqué que 79 marques d'eau en bouteilles avaient été testées et que des signes de présence de substances cancérigènes avaient été relevés dans les eaux commercialisées par sept entreprises; étant donné qu'au moment des faits, les entreprises visées n'étaient en infraction avec aucune réglementation en vigueur et étant donné en outre qu'elles ont volontairement rappelé leurs stocks, leurs noms n'ont pas été dévoilés, a expliqué la délégation. D'autre part, les normes ont été révisées en septembre dernier et la qualité requise pour l'eau est désormais conforme aux normes de l'OMS pour ce qui est des substances incriminées.

Les agriculteurs coréens ont parfois dû renoncer à leurs activités compte tenu de la chute des prix du riz, a en outre souligné la délégation. Le Gouvernement est conscient qu'il est urgent de faire face aux difficultés rencontrées par les agriculteurs coréens, a-t-elle poursuivi, précisant que d'ici la fin de cette année, devrait être achevée la mise au point d'une feuille de route à l'horizon 2020 destinée à assurer un meilleur environnement pour les agriculteurs du pays. Pour autant, le pays est entièrement autosuffisant pour ce qui est du riz – principale denrée alimentaire du pays, a souligné la délégation.

En ce qui concerne les questions de logement, la délégation a notamment fait part de l'objectif du Gouvernement visant à ce qu'au moins 12% du parc immobilier en République de Corée soit offert à la location, ce qui correspond aux moyennes au sein de l'OCDE. La proportion de logements insalubres est passée de 23% en 2000 à 13% en 2005, ce qui témoigne de l'amélioration sensible qu'ont connue les conditions de logement des habitants de la République de Corée, a par ailleurs souligné la délégation.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a indiqué qu'il y a dans le pays des écoles qui dispensent une éducation en partenariat avec des entreprises de certains secteurs. À compter de l'an prochain, ce système sera étendu, a-t-elle précisé. Ces écoles dites «de vocation» sont libres d'établir leurs programmes, a-t-elle ajouté. Des cours de langues, y compris bien entendu des cours de coréen, sont dispensés aux étudiants étrangers en République de Corée, a poursuivi la délégation. Pour ces étudiants étrangers, des cours sont assurés tant en coréen qu'en d'autres langues, a-t-elle souligné.


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