Aller au contenu principal

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE SE PENCHE SUR LE SUIVI DE SES OBSERVATIONS FINALES ET SUR SA PROCÉDURE DE PLAINTES

Compte rendu de séance

Le Comité contre la torture s'est penché, ce matin, sur le suivi donné par les États parties aux observations finales qu'il adopte à l'issue de l'examen de leurs rapports, ainsi que sur le mécanisme de suivi des plaintes individuelles qui lui sont adressées au titre de l'article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Mme Felice Gaer, rapporteuse du Comité pour le suivi des observations finales, a souligné qu'il est important pour les États parties non seulement de se conformer aux dispositions de la Convention et, pour cela, de s'acquitter des obligations qui sont les leurs en vertu de cet instrument, mais également d'appréhender les recommandations du Comité avec sérieux. Or, force est de constater que les observations et conclusions formulées par le Comité ne sont pas toujours suivies d'effet, a-t-elle ajouté. Aussi, pour évaluer si la situation change réellement dans les pays concernés, les États sont-ils invités à informer le Comité des actions et mesures concrètes qu'ils ont prises pour donner effet à certaines de ses recommandations.

Sur les 67 États dont le rapport de suivi devait être envoyé au Comité avant la présente session, 50 ont fourni des informations, soit un taux de 74%. Un examen attentif montre que ceux qui ne répondent pas à cette demande de suivi sont souvent ceux qui accumulent du retard pour la présentation de leur rapport. Parmi les 17 pays qui n’ont pas transmis leurs rapports de suivi - et auxquels un rapport a été envoyé - figurent huit États africains, quatre États d’Europe de l’Est, deux d’Asie, deux d’Amérique latine et un d’Europe occidentale.

Assurer le suivi des observations finales revient à évaluer leur impact, a souligné Mme Gaer. Pour ce qui est du contenu des recommandations, a-t-elle indiqué, les cinq questions les plus fréquemment soulevées ont trait à la nécessité de mener des enquêtes impartiales, promptes et efficaces ; à la protection juridique ; au droit de porter plainte ; aux poursuites et sanctions ; et à l’amélioration des conditions de détention. Mme Gaer s’est interrogée sur la pertinence qu'il y aurait à hiérarchiser les différentes recommandations par ordre d’importance - voire à limiter à quatre ou cinq le nombre de recommandations - et s'est demandée si le Comité ne devrait pas effectuer des visites sur le terrain. Enfin, elle a fait observer qu’il y aurait beaucoup de leçons à tirer du fonctionnement d’autres mécanismes de protection et de suivi.

Dans la discussion qui a suivi cette présentation de Mme Gaer, plusieurs membres du Comité se sont interrogés sur les moyens de garder à l'œil les États parties, a fortiori lorsque des choses graves s’y produisent. À cet égard, il est important de ne pas laisser de vide et d’assurer la responsabilisation continue du pays, a souligné une experte. Il convient de veiller à ce que la procédure de suivi ne soit pas figée, a-t-il également été souligné. Il a été proposé que pour chaque État partie, dans le cadre du processus d'examen des rapports, le Comité crée un lien entre le suivi de ses observations antérieures et la rédaction du prochain rapport devant être examiné. A par ailleurs été soulevée la question de la normalisation de la procédure de suivi. Un expert a estimé qu'au vu de leurs différences, les pays ne peuvent être tous abordés de la même manière. Le Président du Comité, M. Claudio Grossman, a toutefois jugé essentiel que le Comité conserve une certaine cohérence - de fond mais aussi de procédure - face à la diversité des pays, afin de veiller à ce qu’aucun d'eux n’ait le sentiment d’avoir été lésé dans le traitement qui lui a été accordé. Tout en admettant qu’une meilleure efficacité puisse passer par l’identification de priorités, il a fait remarquer qu’il est difficile de dégager des priorités d'une Convention dont toutes les dispositions doivent être mises en pratique.

Le Comité a ensuite entendu son rapporteur chargé du suivi des plaintes, M. Fernando Mariño Menéndez, qui a rappelé qu'en vertu de l'article 22 de la Convention, tout État partie peut déclarer à tout moment qu'il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d'une violation, par un État partie, des dispositions de la Convention.

Le rapporteur a attiré l’attention sur un cas impliquant une personne de nationalité indienne expulsée du Canada. Lors de l’examen de cette affaire, le Comité a constaté qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention, relatif à l’extradition d’une personne vers un autre Etat où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture. Or, l’État partie ne pense avoir violé aucune disposition de la Convention ; il n’envisage pas de communiquer davantage avec les autorités indiennes. Face au refus absolu du Canada de respecter la décision du Comité, M. Mariño Menéndez s’est interrogé sur la pertinence de classer ou non l’affaire. Plusieurs experts se sont sur ce point inquiétés du risque de créer un précédent. Il a été proposé de conserver l’affaire ouverte, de continuer à recevoir des informations de la part du requérant sur les dommages subis et de rappeler au Canada ses responsabilités ainsi que la position du Comité.

Le Rapporteur a aussi évoqué une autre affaire impliquant le Canada, appelée « Falcon Rios », qui a été classée, le requérant étant retourné de son plein gré au Mexique.

M. Mariño Menéndez a par ailleurs proposé que le Comité attende des réponses supplémentaires de la part du requérant dans le cadre d’une affaire impliquant l’Espagne et où les articles 12 et 13 de la Convention - relatifs aux enquêtes impartiales et au droit de porter plainte - auraient été violés. Le dialogue se poursuit en outre avec l’Espagne pour ce qui est d’une autre affaire relative à l’obligation de prévenir la torture, d’imposer des sanctions appropriées et d’indemniser le requérant.

Un autre cas examiné par le Comité concerne la Tunisie et l’absence d’enquête pour un cas de torture. Le rapporteur a ici proposé au Comité de remercier l’État partie de se montrer disposé à ordonner l’exhumation du corps, comme l’a souhaité un parent du requérant. M. Mariño Menéndez a suggéré que le Comité indique à la Tunisie que l’obligation qui lui est faite de procéder à une enquête impartiale suppose qu’elle veille à ce que toute exhumation soit conduite de manière impartiale en présence d’experts indépendants.

Enfin, s’agissant d’une affaire impliquant également la Tunisie et liée au droit à une enquête impartiale et au droit de porter plainte, M. Mariño Menéndez a proposé de poursuivre le dialogue avec l’État partie, ce dernier ayant fait valoir que les moyens de recours internes n’avaient pas été épuisés par la requérante; est ainsi posé la question de la recevabilité de cette plainte.

Les recommandations concernant le suivi des plaintes telles que ci-dessus mentionnées ont été entérinées.

La prochaine séance publique du Comité contre la torture aura lieu demain, mardi 17 novembre, à 15 heures. Le Comité tiendra une réunion avec les membres du Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, institué en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CAT09036F