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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE L'AZERBAÏDJAN

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique de l'Azerbaïdjan sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Khalaf Khalafov, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan, a souligné que la Constitution azerbaïdjanaise garantissait l'égalité de tous les citoyens, quelle que soit leur origine ethnique, religieuse ou raciale. La législation nationale prévoit la responsabilité pour les actes visant l'incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse; les atteintes à la dignité humaine; ou encore l'imposition de restrictions ou de privilèges fondés sur l'origine, a-t-il par ailleurs indiqué. Il a tenu à souligner que les faits criminels fondés sur la discrimination raciale sont très rares en Azerbaïdjan. Il a aussi fait valoir que les visas d'entrée et de sortie pour les étrangers et apatrides titulaires d'une autorisation de résidence temporaire ou permanente ont été abolis le 1er juillet dernier. Conscient de la responsabilité qui lui incombe en matière de protection des réfugiés et des personnes déplacées, le Gouvernement continue de mettre en œuvre une série de mesures visant à améliorer leur situation sociale et économique ainsi que leur intégration temporaire dans la société, gardant à l'esprit la réalisation, à l'avenir, de leur droit à retourner en toute sécurité sur leurs terres d'origine. Le principal problème auquel est confronté l'Azerbaïdjan demeure le conflit qui l'oppose depuis longtemps à l'Arménie au sujet du Nagorno-Karabakh occupé par l'Arménie. «En raison de la politique de nettoyage ethnique menée par l'Arménie, plus d'un million d'Azerbaïdjanais sont devenus réfugiés et personnes déplacées internes et cela a incontestablement un impact négatif sur la réalisation de leurs droits de l'homme», a déclaré M. Khalafov.

La délégation azerbaïdjanaise était également composée du Vice-Ministre des affaires intérieures, M. Oruj Zalov; du Vice-Ministre à la sécurité nationale, M. Ali Shafiyev; du Vice-Ministre de la justice, M. Togrul Musayev; de la Vice-Ministre de la culture et du tourisme, Mme Sevda Mammadaliyeva; du Vice-Ministre de l'éducation, M. Elmar Gasimov; ainsi que de représentants du bureau du Procureur général et du Ministère des affaires étrangères. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, du conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan au sujet du Haut-Karabakh; de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; des activités du bureau du médiateur; de la situation des requérants d'asile tchétchènes; de la lutte contre la traite de personnes; des mariages avec des étrangers; du droit de tous à l'éducation; de l'accès aux services de santé pour les étrangers et apatrides; de la lutte contre l'incitation à la haine nationale, religieuse ou raciale; ou encore de la lutte contre le terrorisme.

À l'issue de cet examen, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Azerbaïdjan, M. Régis de Gouttes, a relevé, au nombre des progrès réalisés par le pays, la consécration de la liberté de culte et de conscience; l'intensification de la lutte contre la traite de personnes; les efforts déployés pour améliorer l'indépendance et le fonctionnement de la justice; les mesures prises pour lutter contre les mauvais traitements imputables aux membres de la police; et les mesures prises en faveur des nombreuses déplacées. Restent les quelques difficultés persistantes, parmi lesquelles, en premier lieu, la prégnance du conflit du Nagorno-Karabagh, avec toutes les conséquences qui en résultent pour la population. À cet égard, M. de Gouttes a pris note de la déclaration de volonté de l'Azerbaïdjan d'engager un processus de négociations afin de promouvoir une réconciliation entre les Azerbaïdjanais et les Arméniens. Un autre problème est celui des difficultés persistantes auxquelles sont confrontées les personnes déplacées pour l'accès au logement, à l'emploi, aux services de santé et d'éducation et pour l'accès à leurs propriétés perdues. La situation est également difficile pour les réfugiés et demandeurs d'asile.

Le Comité adoptera, lors de séances privées, des observations finales sur ce rapport, qui seront rendues publiques à l'issue de la session, le vendredi 28 août prochain.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la Colombie (CERD/C/COL/14).

Présentation du rapport de l'Azerbaïdjan

M. KHALAF KHALAFOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan, a souligné que d'importantes réformes constitutionnelles sont intervenues en Azerbaïdjan au mois de mars dernier. Ces réformes visent à renforcer encore davantage la protection effective des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a-t-il précisé. En outre, une nouvelle forme de démocratie directe a été introduite dans la Constitution avec la possibilité offerte aux citoyens de lancer une initiative législative si elle recueille le soutien de 40 000 électeurs.

Tout au long de son histoire, l'Azerbaïdjan n'a cessé d'être connu pour son niveau élevé de tolérance et pour son respect des différents groupes ethniques et des différentes religions, a poursuivi M. Khalafov. La Constitution du pays assure l'égalité de tous les citoyens, quelle que soit leur origine ethnique, religieuse ou raciale, a-t-il fait valoir. La législation nationale prévoit la responsabilité pour les actes visant l'incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse; les atteintes à la dignité humaine; ou encore l'imposition de restrictions ou de privilèges fondés sur l'origine nationale, raciale ou religieuse, a par ailleurs indiqué le Vice-Ministre. À ce stade, il a tenu à souligner que les faits criminels fondés sur la discrimination raciale sont très rares en Azerbaïdjan. À titre d'exemple, il a précisé qu'en 2008, seule une personne a été condamnée pour des actes visant l'incitation à la haine et à l'hostilité nationales, raciales, sociales ou religieuses.

M. Khalafov a par ailleurs fait état des mesures prises par l'Azerbaïdjan en matière de lutte contre le trafic de personnes, citant notamment le Plan national d'action et la loi spécifique adoptés dans ce domaine. Au cours de l'année 2008, a-t-il précisé, 76 crimes liés au trafic de personnes ont été enregistrés, des poursuites pénales ayant été engagées contre 96 personnes; quelque 52 personnes ont été placées en résidence temporaire dans les centres prévus pour accueillir les victimes de trafic de personnes.

Le Vice-Ministre azerbaïdjanais a par ailleurs indiqué qu'un projet de code des migrations était en cours d'élaboration dans son pays. Au mois de mars dernier, a-t-il ajouté, le Président de la République de l'Azerbaïdjan a publié un décret dont l'objet est de simplifier les procédures régissant l'octroi aux étrangers et aux apatrides de l'autorisation de résider et de travailler légalement en Azerbaïdjan. Depuis le 1er juillet dernier, les visas d'entrée et de sortie pour les étrangers et apatrides titulaires d'une autorisation de résidence temporaire ou permanente en Azerbaïdjan ont été abolis; ainsi, ces personnes peuvent-elles quitter l'Azerbaïdjan et y entrer sur simple présentation du passeport et des certificats pertinents délivrés par le Service d'État pour les migrations. Au mois d'avril 2009, l'Azerbaïdjan comptait quelque 4643 travailleurs étrangers enregistrés dans le pays, a indiqué M. Khalafov. Il a souligné qu'aucune norme, dans la législation azerbaïdjanaise, ne prévoit d'ajuster l'enregistrement des personnes sur leur lieu de résidence et leur lieu de séjour sur la base de leur origine nationale et ethnique.

Entre 2002 et 2008, a poursuivi M. Khalafov, le taux de pauvreté est passé de 46,7% à 13,2%. Au 1er janvier dernier, le taux de chômage se situait à 6,1%, a-t-il ajouté. Pour 2009, les dépenses sociales représentent 40% du budget de l'Azerbaïdjan, a-t-il également indiqué. Depuis 2006, a-t-il fait valoir, une aide sociale est accordée aux familles à faible revenu; au début de l'année 2009, une telle aide avait été apportée à quelque 163 409 familles dont 9% étaient des familles de réfugiés.

Conscient de la responsabilité qui lui incombe en matière de protection des réfugiés et des personnes déplacées, le Gouvernement de l'Azerbaïdjan continue de mettre en œuvre une série de mesures complexes visant à améliorer la situation sociale et économique de cette catégorie de personnes ainsi que leur intégration temporaire dans la société, gardant à l'esprit la réalisation de leur droit à retourner en toute sécurité, dans l'avenir, sur leurs terres d'origine. Grâce aux activités menées en faveur de ces personnes, le taux de pauvreté les frappant a été réduit de 74% à 30%, a fait valoir M. Khalafov.

L'Azerbaïdjan a mis en place des conditions d'égalité pour les activités de toutes les minorités religieuses qui existent dans le pays, a poursuivi le Vice-Ministre des affaires étrangères. Ainsi, les membres des minorités religieuses vivent-ils dans la compréhension et le respect mutuels. Des musulmans, des russes orthodoxes, des juifs et d'autres communautés religieuses agissent librement et sans rencontrer aucun obstacle, a insisté M. Khalafov, rappelant que la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion et de conviction, Mme Asma Jahangir, avait elle-même relevé le niveau élevé de tolérance prévalant dans le pays lors de sa visite en Azerbaïdjan en 2006. Au total, 364 communautés religieuses sont enregistrées en Azerbaïdjan, a précisé M. Khalafov. Il a souligné que la promotion du dialogue interculturel et interreligieux fait partie des priorités de la politique étrangère de l'Azerbaïdjan. L'Organisation de la Conférence islamique a déclaré Bakou capitale de la culture islamique pour 2009, a-t-il rappelé.

M. Khalafov a par ailleurs assuré que l'Azerbaïdjan ne ménage aucun effort pour maintenir et développer les valeurs culturelles des minorités nationales et des groupes ethniques qui vivent dans le pays. De nombreux centres culturels et autres organisations publiques des minorités nationales fonctionnent à travers le pays, a-t-il précisé. Afin de préserver et de développer les langues des minorités, une attention particulière est accordée à l'éducation de ces langues dans les écoles, a-t-il ajouté.

Le principal problème auquel est confronté l'Azerbaïdjan demeure le conflit qui l'oppose depuis longtemps à l'Arménie au sujet du Nagorno-Karabakh. La région du Nagorno-Karabakh de l'Azerbaïdjan, qui constitue près de 20 % du territoire de l'Azerbaïdjan, et sept districts limitrophes sont occupés par l'Arménie. En raison de la politique de nettoyage ethnique menée par l'Arménie, plus d'un million d'Azerbaïdjanais sont devenus réfugiés et personnes déplacées internes et cela a incontestablement un impact négatif sur la réalisation de leurs droits de l'homme et de leurs libertés fondamentales, a déclaré le Vice-Ministre azerbaïdjanais. Malheureusement, en raison de cette situation, l'Azerbaïdjan n'est pas en mesure de s'acquitter de ses obligations internationales en matière de promotion et de protection des droits de l'homme dans ses territoires occupés. L'Azerbaïdjan n'en reste pas moins engagé en faveur du règlement pacifique du conflit du sur la base du respect de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'inviolabilité des frontières internationalement reconnues de l'Azerbaïdjan, a indiqué M. Khalafov.

Le sixième rapport périodique de l'Azerbaïdjan (CERD/C/AZE/6) souligne que la composition plurinationale et pluriconfessionnelle de la population est une caractéristique marquante de l'Azerbaïdjan contemporain. Les dispositions fondamentales de la politique à l'égard des groupes nationaux sont énoncées dans la Constitution, qui garantit l'égalité de tous les citoyens de la République d'Azerbaïdjan, quelles que soient leur ethnie, leur religion ou leur race. De plus, en raison de particularismes historiques, économiques et culturels, la psychologie de la population azerbaïdjanaise s'est formée au fil des siècles au moule de la tolérance et du respect des cultures des autres peuples et minorités nationales, souligne le rapport. Le problème le plus grave auquel est confronté l'Azerbaïdjan demeure le conflit qui l'oppose à l'Arménie au sujet du Haut-Karabakh, cette région, qui constitue près de 20 % du territoire de l'Azerbaïdjan, et sept districts limitrophes étant occupés par l'Arménie. En dépit des demandes claires du Conseil de sécurité, que l'Arménie continue d'ignorer, près de 20 % du territoire de l'Azerbaïdjan reste sous occupation, rappelle le rapport.

Durant l'agression contre l'Azerbaïdjan, la partie arménienne s'est rendue coupable de violations flagrantes du droit international humanitaire, ainsi que de nombreux massacres, exécutions extrajudiciaires, actes de tortures et autres peines ou traitements cruels et inhumains envers d'innocents citoyens de l'Azerbaïdjan, des otages et des prisonniers de guerre. Les efforts des autorités azerbaïdjanaises en faveur d'un règlement rapide et pacifique du conflit, de la libération des territoires occupés et du retour des personnes déplacées se heurtent à la mauvaise volonté de l'Arménie, qui exige l'indépendance du Haut-Karabakh ou le rattachement à l'Arménie de cette partie du territoire azerbaïdjanais. Alors que l'occupation d'une partie du territoire de l'Azerbaïdjan par l'Arménie et la politique de nettoyage ethnique de cette dernière se soient soldées par plus d'un million de réfugiés et déplacés et que les Azéris aient été chassés des terres occupées, les quelque 30 000 Arméniens de souche vivant actuellement en République d'Azerbaïdjan n'y sont exposés à aucune discrimination, assure le rapport.

Le rapport indique par ailleurs qu'à l'heure actuelle, l'Azerbaïdjan compte 1760 établissements préscolaires dont 10, accueillant un total de 635 enfants, dispensent une éducation et une formation exclusivement en russe et 6, accueillant un total de 280 enfants, exclusivement en géorgien. D'autres établissements dispensent un enseignement en russe et parallèle avec l'enseignement en azéri et un enseignement en géorgien en parallèle avec l'enseignement en azéri.

Examen du rapport de l'Azerbaïdjan

Questions et observations des membres du Comité

M. RÉGIS DE GOUTTES, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Azerbaïdjan, a rappelé que l'Azerbaïdjan a ratifié la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale dès 1996 et présenté, depuis, trois rapports périodiques, dont le dernier a été examiné en mars 2005.

M. de Gouttes a par ailleurs relevé que selon le rapport présenté aujourd'hui par l'Azerbaïdjan, les Azéris constituent 90,6% de la population. Les minorités sont évaluées au nombre de 15 et représentent, pour ne citer que les plus importantes, 2,2% de la population en ce qui concerne les Lezguiens, 1,8% en ce qui concerne les Russes, 1,5% en ce qui concerne les Arméniens et 1% en ce qui concerne les Talichs. M. de Gouttes s'est enquis des derniers renseignements disponibles concernant la composition démographique de la population de l'Azerbaïdjan.

Évoquant la prégnance du conflit qui oppose l'Azerbaïdjan à l'Arménie au sujet de la région du Haut-Karabakh, M. de Gouttes s'est notamment enquis des mesures prises en faveur des personnes déplacées, notamment en matière d'accès à l'emploi, à l'éducation ou encore au crédit. Le Comité apprécierait en outre obtenir des renseignements sur les derniers développements de la politique menée par le Gouvernement dans quatre domaines particulièrement sensibles en Azerbaïdjan: la lutte contre la traite des êtres humains; l'immigration, le contrôle des migrants et la lutte contre les filières de migration illégale; la lutte contre le terrorisme et les mesures adoptées à l'encontre des organisations terroristes, de leurs complices et des islamistes extrémistes fondamentalistes; la pauvreté et les mauvaises conditions socioéconomiques dont continue de souffrir une partie de la population, notamment dans les régions rurales et montagneuses, en dépit de la richesse que représente par ailleurs l'exploitation pétrolière dans le pays. M. de Gouttes a relevé que le Comité pour la protection des droits des travailleurs migrants s'est dit préoccupé par les informations selon lesquelles les travailleurs migrants, notamment ceux qui sont irréguliers ou sans papiers et leurs familles, seraient victimes de diverses discriminations en matière d'emploi, d'éducation, de logement, d'accès à la justice et aux services de santé.

M. de Gouttes a salué le caractère positif de l'adoption, par ordonnance présidentielle en date du 28 décembre 2006, d'un Plan d'action national pour la défense des droits de l'homme; de l'affirmation du principe de non-discrimination et d'égalité des droits pour tous dans l'article 25(3) de la Constitution; ou encore de la consécration de la liberté de culte et de conscience. L'expert s'est toutefois enquis de la nature et des résultats des enquêtes menées par le Ministère de la sécurité nationale sur les actes de haine raciale tels que visés par l'article 283 du Code pénal (qui incrimine les actes visant à susciter la haine nationale, raciale, sociale ou religieuse). M. de Gouttes a également souhaité en savoir davantage au sujet des activités du Commissaire aux droits de l'homme (ou Médiateur/Ombudsman) dans le domaine de la lutte contre le racisme, des plaintes qu'il a reçues et de sa contribution dans la préparation du présent rapport périodique de l'Azerbaïdjan.

En ce qui concerne l'article 4 de la Convention (contre l'incitation à la discrimination raciale), les textes répressifs applicables en Azerbaïdjan sont certes nombreux, mais il n'est pas certain que toutes les incriminations énumérées dans cet article de la Convention aient encore été prises en compte, a poursuivi M. de Gouttes. Il s'est en outre enquis d'exemples pratiques de peines effectivement prononcées et appliquées dans les cas de traite de personnes signalés dans le rapport.

À la lecture de l'ensemble des données relatives à la politique d'immigration et au contrôle des migrants qui sont fournies dans le rapport de l'Azerbaïdjan, M. de Gouttes s'est demandé si le rapprochement et le traitement en commun de la question des migrants irréguliers et de celle des terroristes ou des islamistes extrémistes ne risquent pas de conduire à un amalgame préjudiciable à ceux parmi les immigrés – même irréguliers – qui n'ont aucun lien avec le terrorisme et qui peuvent se trouver dans une situation de vulnérabilité particulière.

M. de Gouttes a par ailleurs demandé à la délégation de fournir des données statistiques sur la représentation des différents groupes et minorités ethniques dans l'Assemblée nationale, dans les assemblées municipales, ainsi que dans la Commission électorale centrale et dans les commissions électorales de district.

L'expert a en outre souhaité savoir si le Gouvernement azerbaïdjanais disposait d'un premier bilan des mesures prises dans le cadre du Programme national pour l'amélioration des conditions de vie et la promotion de l'emploi des réfugiés et des victimes de déplacements forcés adopté le 1er juillet 2005. Quelles sont les mesures qui ont été adoptées pour remédier aux conditions sociales et économiques très difficiles dans lesquelles continuent de vivre les personnes déplacées et pour éliminer les obstacles qu'elles rencontrent pour l'accès à l'emploi, au logement et aux services de santé? Une attention particulière a-t-elle été portée à la situation des femmes et des enfants, en particulier pour ce qui concerne l'accès de ces enfants aux écoles ordinaires et non plus séparées? Quelles sont les mesures qui ont été prises pour assurer aux Russes d'origine tchétchène les mêmes droits sociaux et économiques que ceux des autres demandeurs d'asile et pour combattre la discrimination ou la stigmatisation sociale dont ils sont l'objet, a par ailleurs demandé M. de Gouttes ? S'agissant de l'application du principe de non-refoulement des demandeurs d'asile, comment le Gouvernement parvient-il à concilier ce principe avec le combat qu'il entend mener fermement contre les immigrés clandestins, les filières de migration illégale, les terroristes, leurs complices et les islamistes extrémistes fondamentalistes, a en outre demandé l'expert?

M. de Gouttes s'est d'autre part enquis des mesures prises par le Gouvernement pour informer le public et les victimes de leurs droits, pour faciliter l'accès à la justice et pour sensibiliser les agents chargés de l'application des lois à l'importance de la répression des actes de discrimination raciale.

M. de Gouttes a également souhaité connaître les mesures qui ont été prises pour garantir l'enseignement et l'instruction en langues arménienne et talich dans certaines écoles. Il s'est en outre enquis des enseignements tirés jusqu'ici des activités du Conseil consultatif constitué des dirigeants des principales confessions qui a commencé ses travaux en 2007.


Un autre membre du Comité a déploré que l'information relative à la composition démographique de la population qui est fournie dans le rapport soit déjà dépassée. Il a souhaité savoir si des membres de minorités figurent parmi le personnel chargé de l'application des lois, en particulier dans les zones à fort peuplement minoritaire. Il a aussi relevé qu'au vu des informations fournies par le pays, il est difficile de discerner si des Roms vivent sur le territoire de l'Azerbaïdjan. Il a par ailleurs souhaité savoir s'il y avait une base ethnique à l'autonomie de la République autonome du Nakhitchevan, un autre membre du Comité demandant quelle était l'origine ethnique de ses habitants.

Un autre expert a relevé que selon les informations fournies, l'ombudsman avait reçu, durant la période couverte par le rapport, quelque 42 260 plaines - 8600 plaintes ayant été reçues pour la seule année 2008; plus d'un tiers des plaintes ont trait à des atteintes aux droits civils et les deux tiers à des droits économiques, sociaux et culturels. Aussi, cet expert a-t-il souhaité connaître la proportion de plaintes retenues comme justifiées et, dans le cas des plaintes recevables, la nature des recours et dédommagements accordés aux plaignants.

La situation des personnes déplacées reste un problème capital pour l'Azerbaïdjan, a souligné un expert. Certes, cette situation résulte d'un conflit; mais ce conflit a cessé il y a 16 ans, en 1993, et ces personnes restent aujourd'hui dans une situation difficile, notamment en termes d'emploi et de logement, ne bénéficiant pas de conditions de vie égales à celles des autres citoyens du pays.


Réponses de la délégation

Répondant aux questions et observations des membres du Comité, la délégation de l'Azerbaïdjan a notamment indiqué que l'Ombudsman, dans le cadre de ses compétences, a rejeté en 2008 un peu plus de la moitié des plaintes qui lui ont été présentées et en a examiné 48,8%.

La délégation a par ailleurs fait savoir que le processus de recensement de la population en Azerbaïdjan doit s'achever en 2011. L'Azerbaïdjan a souscrit à la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur la protection des minorités nationales, et les autorités azerbaïdjanaises entendent appliquer de façon plus exhaustive qu'auparavant la totalité des dispositions de cet instrument, a-t-elle ajouté. Elle a par la suite précisé que les pièces d'identité en Azerbaïdjan ne contiennent aucune mention de l'appartenance à une quelconque minorité ethnique ou nationale et que tous les citoyens d'Azerbaïdjan peuvent donc exercer pleinement leurs droits sur un pied d'égalité.

Le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan a eu et continue d'avoir des incidences très lourdes sur l'ensemble de la situation dans toute la région du sud du Caucase, dans la mesure où cela engendre des problèmes très graves dans les domaines du développement durable et de la coopération régionale, a souligné la délégation. L'Azerbaïdjan n'en est pas moins engagé en faveur d'un règlement pacifique de ce conflit, a-t-elle ajouté. Le processus de règlement pacifique avance avec difficulté, mais un processus positif permet d'envisager l'avenir avec espoir, a déclaré la délégation. Elle a affirmé qu'il n'existe pas d'autre exemple dans le monde où un conflit a été suivi d'une épuration ethnique totale de tous les territoires occupés; c'est un fait sans précédent, a-t-elle insisté. Les Arméniens qui vivent en Azerbaïdjan n'y subissent aucune discrimination; ce sont généralement des personnes issues de mariages mixtes et bon nombre d'entre elles travaillent dans les institutions de l'État, a par ailleurs indiqué la délégation.

En ce qui concerne la République autonome du Nakhitchevan, la délégation a attiré l'attention sur la spécificité géographique de cette région de l'Azerbaïdjan, qui est un territoire originel de l'Azerbaïdjan. Depuis toujours, la population de cette région est en majorité azerbaïdjanaise, a souligné la délégation. Le fait que l'autonomie ait été accordée à cette région s'explique par des raisons historiques, les régions du sud du Caucase ayant subi d'importantes modifications de frontières au fil de l'histoire. Ainsi, à la création de l'Arménie, le Nakhitchevan est devenu une enclave et a reçu le statut d'autonomie.

S'agissant de la place de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale dans l'ordre juridique interne de l'Azerbaïdjan, la délégation a indiqué que conformément à la Constitution, les traités internationaux auxquels le pays est partie font partie intégrante de l'ordre juridique interne de l'Azerbaïdjan. En cas de contradiction entre un acte législatif azerbaïdjanais, à l'exception de la Constitution, et un traité international, c'est ce dernier qui prévaut.

Pour les six premiers mois de l'année 2009, 47 faits liés à la traite de personnes ont été enregistrés, a par ailleurs indiqué la délégation. En vertu des textes en vigueur, les personnes victimes de la traite d'êtres humains sont accueillies dans un centre spécialisé pour un délai de 30 jours qui peut être prolongé. Pour le premier semestre de 2009, 30 personnes et un enfant au total ont ainsi été accueillis avant d'être insérés dans la société, a précisé la délégation. Elle a par la suite fait part de l'adoption du deuxième plan de lutte contre la traite de personnes pour la période 2009-2013. Un groupe de travail sur la lutte contre la traite de personnes a été créé, a-t-elle ajouté. Elle a précisé que du point de vue de la traite de personnes, l'Azerbaïdjan est plutôt un pays de transit.

Pour ce qui est des requérants d'asile tchétchènes, la délégation a indiqué que les nombreux Tchétchènes qui ont reçu le statut de réfugié en Azerbaïdjan l'ont obtenu pour des motifs humanitaires; il n'y a pas d'autre motif à l'octroi du statut de réfugié à ces personnes.

S'agissant du système judiciaire de l'Azerbaïdjan, la délégation a souligné que ce sont les tribunaux qui sont les garants des droits des citoyens, y compris des minorités nationales. Les principes démocratiques de l'administration de la justice ont notamment été reflétés dans la loi sur les tribunaux et les juges, a-t-elle indiqué. En Azerbaïdjan, le Tribunal constitutionnel est chargé de veiller au respect des dispositions de la Constitution par les organes de l'État. Depuis 2004, en coopération étroite avec le Conseil de l'Europe, l'Azerbaïdjan a entrepris de consolider la base judiciaire de l'activité des tribunaux, afin de les rendre conformes aux normes européennes. Le Conseil judiciaire, organe permanent et indépendant a notamment été créé pour assurer l'indépendance des juges, l'organisation du système judiciaire ainsi que les nominations aux postes vacants, entre autres. Neuf des 15 membres de ce Conseil sont des magistrats – en fait des juges; il y a aussi une présence de l'exécutif, du législatif et du barreau. La délégation a par ailleurs souligné que des cours d'appel régionales ont été mises en place à travers le pays.

À la question de savoir si les statistiques reflètent bien la réalité en Azerbaïdjan, la délégation – après avoir cité des chiffres laissant apparaître que le nombre d'affaires liées à des violations de dispositions de la Convention est insignifiant – a assuré que c'était bien le cas en Azerbaïdjan. Le niveau d'éducation en Azerbaïdjan est assez élevé, notamment parmi les membres des minorités nationales qui connaissent bien leurs droits, a fait valoir la délégation. Par ailleurs, l'Azerbaïdjan bénéficie d'un niveau de tolérance élevé, a-t-elle répété.

La délégation a souligné que les autorités azerbaïdjanaises sont soucieuses de veiller à ce que les citoyens ne subissent aucune atteinte à leurs droits et libertés. Depuis 2003, près de 320 infractions pour atteintes aux droits et libertés des citoyens de la part d'agents des forces de l'ordre ont été enregistrées: 18 agents ont été traduits en justice et une cinquantaine ont été licenciés, alors que d'autres se sont vu imposer des sanctions administratives ou disciplinaires.

Il n'y a pas, en Azerbaïdjan, de restrictions particulières concernant le mariage d'Azerbaïdjanais avec des étrangers, a par ailleurs assuré la délégation. En ce qui concerne l'enregistrement des naissances, en particulier pour les enfants étrangers, la délégation a notamment indiqué que depuis janvier 2007, 780 enfants sont nés en Azerbaïdjan de parents tous deux migrants; or, chacun de ces enfants a reçu une attestation de naissance et une carte de santé électronique.

La délégation a rappelé que l'article 283 du Code pénal azerbaïdjanais traite de l'incitation à la haine nationale, religieuse ou raciale et prévoit des sanctions sévères allant de trois à cinq ans d'emprisonnement pour ce délit. Depuis 2005, a indiqué la délégation, trois infractions aux dispositions de cet article du Code pénal ont été enregistrées et ont fait l'objet de poursuites pénales, a précisé la délégation.

En Azerbaïdjan, tous les citoyens, sans discrimination aucune, ont droit à l'éducation, a par ailleurs souligné la délégation. En outre, un décret prévoit que les citoyens ont le droit de choisir leur langue d'enseignement. Ainsi, est-il possible de recevoir un enseignement dans les langues des minorités nationales, même si l'enseignement de la langue et de l'histoire azéris reste, dans ce cas, obligatoire.

Selon la loi, a par ailleurs indiqué la délégation, les étrangers et apatrides ont droit aux services de santé gratuits dans les services médicaux de l'État.

La délégation a indiqué que la lutte contre le terrorisme est régie en Azerbaïdjan par la loi d'ensemble sur la lutte contre le terrorisme qui a fait l'objet de certaines modifications, s'agissant notamment du concept même de terrorisme. En outre, des amendements ont été apportés au Code pénal pour tenir compte des nouvelles formes du terrorisme, s'agissant notamment du financement du terrorisme. En 2007, a notamment indiqué la délégation, un groupe appelé Armée du Nord et comprenant plus de 50 membres a été identifié, dont l'objet était de mener des actes terroristes et d'inciter à certains sentiments parmi certains croyants en Azerbaïdjan. La délégation a fait part des condamnations prononcées à l'encontre de certaines personnes qui ont été traduites en justice dans le cadre de la lutte antiterroriste.

Un membre du Comité s'étant enquis du statut juridique des propriétés laissées derrière eux par environ un million d'Azéris qui ont dû quitter leurs foyers du Nagorno-Karabagh en raison du conflit, la délégation a rappelé que plus de 750 000 personnes ont été expulsées du Nagorno-Karabagh et des districts limitrophes. Tous les biens de ces personnes ont été inventoriés, a-t-elle indiqué; quant à savoir comment ces personnes vont être indemnisées ou voir leurs biens restitués, cela relève du processus de règlement politique du conflit, a déclaré la délégation.

En réponse à une autre question, la délégation a indiqué qu'en 2007, le Procureur d'Azerbaïdjan a examiné plus de 160 affaires de meurtres imputables à des groupes armés arméniens dans le territoire occupé du Nagorno-Karabagh.

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires à l'issue de cet examen, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Azerbaïdjan, M. Régis de Gouttes, a remercié la délégation azerbaïdjanaise pour la qualité et l'abondance des réponses qu'elle a apportées aux questions des experts, ce qui témoigne bien de la volonté de poursuivre le dialogue entre l'Azerbaïdjan et le Comité. À l'issue de ce dialogue, on peut dire que cet examen a fait apparaître, d'une part, des progrès, des évolutions très positives et, de l'autre, l'existence de certains problèmes et obstacles qui ont d'ailleurs été reconnus par la délégation. Au nombre des progrès, figurent l'adoption du plan national d'action pour les droits de l'homme, la ratification par l'Azerbaïdjan d'un grand nombre d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, la consécration de la liberté de culte et de conscience, l'intensification de la lutte contre la traite de personnes, les efforts déployés pour améliorer l'indépendance et le fonctionnement de la justice, ainsi que les mesures prises pour lutter contre les mauvais traitements imputables aux membres de la police, sans parler des mesures prises en faveur des nombreuses personnes déplacées ou encore de la réforme des visas pour étrangers.

Restent les quelques difficultés persistantes, parmi lesquelles, en premier lieu, la prégnance du conflit opposant l'Azerbaïdjan et l'Arménie au sujet du Nagorno-Karabagh et des sept districts limitrophes, avec toutes les conséquences qui en résultent pour la population, a poursuivi M. de Gouttes. À cet égard, l'expert a pris note de la déclaration de volonté de l'Azerbaïdjan d'engager un processus de négociations afin de promouvoir une réconciliation entre les Azerbaïdjanais et les Arméniens. Un autre problème est celui des difficultés persistantes auxquelles sont confrontées les personnes déplacées pour l'accès au logement, à l'emploi, aux services de santé et d'éducation et pour l'accès à leurs propriétés perdues. La situation est également difficile pour les réfugiés et demandeurs d'asile, en particulier pour les requérants d'asile russes d'origine tchétchène. Pour ce qui est de la lutte contre la traite de personnes, il convient de maintenir les efforts dans ce domaine, a ajouté M. de Gouttes. Il a enfin soulevé le problème de l'insuffisante mise en œuvre pratique de la législation visant à lutter contre la discrimination raciale.


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