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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DU DANEMARK

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le cinquième rapport périodique du Danemark sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Présentant des observations préliminaires à l'issue de cet examen, le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, a relevé la richesse des informations fournies par la délégation sur les mesures positives prises au Danemark afin de promouvoir les droits des populations du Groenland et des îles Féroé. Il a aussi souligné la nécessité pour tout État partie de réfléchir au retrait des réserves qu'il maintient à l'égard de dispositions du Pacte. À cet égard, le Comité reste préoccupé qu'en dépit des réformes, le Danemark continue de maintenir une distinction fondée sur la gravité des infractions pour déterminer si un droit de recours est permis ou non suite à une condamnation. Le Président du Comité a aussi souligné que dans la pratique, la reconnaissance d'une «Église nationale» peut entraîner des discriminations.

Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport du Danemark, qu'il rendra publique à la fin de la session, le 31 octobre prochain.

M. Allan Rahbol Jacobsen, Chef du Groupe des droits de l'homme au Ministère danois des affaires étrangères, a rappelé la forte conviction du Danemark selon laquelle la paix, la sécurité, le développement et la stabilité ne peuvent durablement être instaurés que sur la base des droits de l'homme. Il a ajouté que son pays avait adressé, il y a sept ans, une invitation permanente à toutes les procédures spéciales de droits de l'homme des Nations Unies afin qu'elles se rendent dans le pays. Le chef de la délégation a par ailleurs indiqué qu'un projet de loi sur l'autonomie du Groenland a été soumis en mai dernier et doit entrer en vigueur le 21 juin 2009, journée de fête nationale du Groenland. Il a aussi attiré l'attention sur l'adoption, en juin 2006, de la plus importante réforme de la police et des tribunaux jamais adoptée depuis plusieurs générations.

La délégation du Danemark était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la justice; du Ministère des réfugiés de l'immigration et de l'intégration; du Ministère des affaires ecclésiastiques; du Département de l'égalité entre les sexes; du Ministère des affaires étrangères des îles Féroé; et du Département des affaires étrangères du Groenland. Elle a répondu aux questions posées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la faible participation des organisations non gouvernementales à la préparation du rapport, des conditions de détention, de la violence contre les femmes, de la liberté religieuse face à l'existence d'une «Église nationale», des questions relatives aux populations autochtones et minoritaires, de la question des «assurances diplomatiques» en cas d'extradition, ou encore des allégations de survols non autorisés de l'espace aérien danois par des avions de la CIA. À cet égard, la délégation a indiqué qu'une enquête sur la question a été diligentée et que les résultats devraient être rendus publics le 23 octobre prochain. La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur l'amendement récent faisant du recours à la torture une circonstance aggravante en cas d'infraction au Code pénal. En outre, une personne condamnée par un jury peut désormais interjeter appel de sa condamnation, a fait valoir la délégation.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de Monaco (CCPR/C/MCO/2).


Présentation du rapport

M. ALLAN RAHBOL JACOBSEN, Chef du Groupe des droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères du Danemark, a affirmé la forte conviction du Danemark que la paix, la sécurité, le développement et la stabilité ne peuvent durablement être instaurés que sur la base des droits de l'homme. Une culture indifférente à l'égard des souffrances d'autrui est insupportable, a-t-il ajouté. M. Jacobsen a rappelé qu'il y a sept ans, le Danemark avait adressé une invitation permanente à toutes les procédures spéciales de droits de l'homme des Nations Unies à se rendre dans le pays.

M. Jacobsen a indiqué qu'en mai dernier, la Commission d'autonomie groenlando-danoise (Selvstyrekommissionen) a présenté au Gouvernement danois et au Landsstyre (Gouvernement autonome du Groenland) un projet de loi sur l'autonomie du Groenland. Avec l'accord du Parlement du Groenland et du Parlement danois, l'autonomie doit entrer en vigueur le 21 juin 2009, journée de fête nationale du Groenland, a-t-il précisé. Évoquant les principaux éléments de ce projet de loi, il a expliqué que les autorités autonomes pourront décider d'assumer des pouvoirs législatifs et exécutifs dans un grand nombre de domaines. Les seuls domaines de responsabilité que les autorités autonomes ne pourront pas assumer ont trait à la Constitution, à la politique étrangère, à la défense, à la politique sécuritaire, à la Cour suprême, à la citoyenneté et aux politiques monétaires et de taux de change. M. Jacobsen a en outre exposé les principaux éléments des futures relations économiques entre le Groenland et le Danemark, précisant notamment que les subventions du Gouvernement (qui restent inchangées, au même niveau qu'en 2007) seront réduites du montant correspondant à la moitié des revenus tirés des activités minières excédant un total annuel de 75 millions de couronnes danoises.

Conformément au mandat de la Commission d'autonomie groenlando-danoise, les propositions de cette Commission devront rester dans le cadre de la Constitution tout en présentant la manière dont le Groenland peut devenir un état indépendant si le peuple du Groenland venait un jour à le souhaiter. Si une telle décision venait à être prise par ce peuple, des négociations devraient être engagées entre le Landsstyre et le Gouvernement en vue de conclure un accord sur l'application de l'indépendance. Avant d'entrer en vigueur, un tel accord devrait obtenir l'aval du Landsting et du Folketing (Parlement danois); mais avant d'être soumis au Parlement danois, cet accord devrait être approuvé par un référendum au Groenland.

M. Jacobsen a par ailleurs indiqué qu'en juin 2006, le Parlement danois a adopté la plus importante réforme de la police et des tribunaux jamais adoptée depuis plusieurs générations. L'application de cette réforme a commencé le 1er janvier 2007 et le processus doit se poursuivre jusqu'en 2011, a-t-il précisé. La réforme des tribunaux a vu le nombre de tribunaux de district réduit de 82 à 24, la grande majorité des cas étant désormais appelés à être traités en première instance par les tribunaux de district, y compris pour les affaires pénales les plus graves.

Le cinquième rapport périodique du Danemark (CCPR/C/DNK/5) indique notamment que la population du Groenland est presque exclusivement composée d'un peuple autochtone doté d'une langue et d'une culture différentes de celles des Danois. Les modalités de l'autonomie interne du Groenland ont été disposées par la loi no 577 du 29 novembre 1978 sur l'autonomie interne du Groenland, en vertu de laquelle le Groenland est une communauté séparée au sein du Royaume du Danemark. La loi sur l'autonomie interne stipule en outre que la population résidant au Groenland jouit de droits fondamentaux à l'égard des ressources naturelles du Groenland. Au 1er juillet 1998, la responsabilité de la gestion des matières premières a été transférée au Gouvernement du Groenland en vertu d'un accord entre le Gouvernement danois et le Gouvernement du Groenland. Le pouvoir de décision commun établi en vertu de la loi sur l'autonomie interne n'a pas été amendé et le pouvoir législatif en la matière continue d'incomber au Parlement danois. Le rapport indique par ailleurs qu'«une nouvelle Constitution des îles Féroé a été élaborée et le Comité constitutionnel des îles Féroé a soumis un projet de proposition le 18 décembre 2008. La nouvelle Constitution comprendra notamment des dispositions relatives à un futur référendum sur la sécession des îles Féroé d'avec le Royaume du Danemark. Cette nouvelle Constitution entrera en vigueur après son adoption référendaire par le peuple des îles Féroé», précise le rapport.

Le paragraphe 2 de l'article 78 de la Constitution prévoit que les associations qui recourent à la violence ou qui cherchent à atteindre leurs objectifs par la violence, par l'incitation à la violence ou par l'emploi de moyens analogues destinés à influencer les personnes professant des croyances différentes peuvent être dissoutes par décision judiciaire. Outre les associations visées au paragraphe 2 de l'article 78 de la Constitution, les associations poursuivant des objectifs illégaux peuvent être dissoutes en application du paragraphe 1 de l'article 78. Par conséquent, le droit danois autorise la dissolution d'associations poursuivant des objectifs illégaux, y compris les associations qui ont pour objectif une activité raciste contraire à la loi.

La loi de 2005 sur l'interdiction du traitement différencié sur le marché du travail interdit toute discrimination directe et indirecte pour des motifs fondés sur la race, la couleur, la religion ou la foi, l'opinion politique, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap ainsi que l'origine nationale, sociale ou ethnique. La loi interdit la discrimination en matière d'embauche, de licenciement, de mutation et de promotion ainsi que la discrimination en matière de rémunération et de conditions de travail et elle protège par ailleurs contre tout harcèlement. La première affaire de discrimination fondée sur le handicap a été portée devant un tribunal local, qui a rendu sa décision en juillet 2006. Cette décision a fait l'objet d'un appel devant la Haute Cour, indique le rapport.

S'agissant des plaintes concernant la police, le rapport indique que de 1997 à 2005, le nombre de plaintes contre la police dont les commissions d'examen des plaintes ont été saisies est passé de 645 à 934. L'augmentation du nombre total d'affaires s'explique en partie par la hausse du nombre d'affaires liées à la circulation routière.

Examen du rapport

Renseignements complémentaires

Fournissant des renseignements complémentaires en réponse à une liste de questions écrites du Comité, la délégation du Danemark a notamment indiqué que le Premier Ministre des îles Féroé avait recommandé, dans une motion soumise au Parlement des Féroé en avril 2007, de mettre sur pied un comité parlementaire ad hoc dans le but de rédiger une Constitution pour les îles Féroé. Le programme du nouveau Gouvernement issu des élections générales du 19 janvier 2008 indique que les travaux sur une constitution des îles Féroé devront être finalisés, un rapport soumis au parlement et un référendum organisé en 2010. La délégation a précisé qu'il n'est finalement pas fait mention de référendum dans le rapport qui a été soumis au Parlement.

La délégation a par ailleurs indiqué qu'il n'y avait pas, à l'heure actuelle, de délibérations quant à un éventuel retrait des réserves que le Danemark a émises à l'égard du paragraphe 5 de l'article 14 du Pacte concernant le droit de faire appel de la déclaration de culpabilité et de la condamnation dans des affaires pénales.

Le comité mis en place pour examiner et évaluer le système actuel de traitement des plaintes déposées contre la police doit soumettre son rapport dans le courant de cet automne, a d'autre part fait savoir la délégation. Elle a par ailleurs souligné que le 1er janvier prochain, le Bureau de l'égalité de traitement commencerait à opérer, couvrant pour cela tous les domaines de discrimination mentionnés dans la législation anti-discrimination du Danemark.

La délégation a rappelé que le 17 juin dernier, le Code pénal danois a été amendé de manière à intégrer un article spécifiquement consacré à la torture. Cet amendement est entré en vigueur le 1er juillet dernier et considère que le recours à la torture pour commettre une quelconque violation du Code pénal constitue une circonstance aggravante.

Conformément à la loi sur les étrangers, a poursuivi la délégation, un étranger ne peut pas être renvoyé dans un pays où il existe un risque que la peine capitale, la torture ou tout traitement inhumain ou dégradant lui soient appliqués.

Entre 2000 et 2005, on estime que le nombre de femmes victimes de violence conjugale a diminué d'un tiers, a en outre indiqué la délégation.

S'agissant des allégations selon lesquelles la CIA aurait utilisé l'espace aérien danois et groenlandais sans autorisation, la délégation a indiqué qu'une enquête sur la question a été diligentée par une équipe spéciale présidée par le Ministère des affaires étrangères. Avec un léger retard sur ce qui était initialement prévu, les résultats de cette enquête devraient être rendus publics le 23 octobre prochain, a précisé la délégation. Aucune décision n'a jamais été prise au Danemark d'accepter des «assurances diplomatiques» dans des procédures d'expulsion, a en outre assuré la délégation.

Les incidents assimilables à des abus ou à des mauvais traitements à l'encontre de prisonniers sont rares, a assuré la délégation. Durant la période 2003-2007, trente décès en prison ont été rapportés, a-t-elle ajouté.

Il est impossible de maintenir une personne en détention sans que ne lui ait été signifié un chef d'accusation, a par ailleurs assuré la délégation.

Questions supplémentaires des membres du Comité

Un membre du Comité a demandé à la délégation si la société civile au Danemark était très active dans le domaine des droits de l'homme. Il s'est en outre enquis de ce qui est fait pour veiller à ce que la situation des droits de l'homme soit placée au cœur des débats relatifs à l'autonomie s'agissant du Groenland et des îles Féroé. Relevant que, selon la délégation, il n'y a pas, à l'heure actuelle, de délibérations quant à un éventuel retrait des réserves que le Danemark a émises à l'égard du Pacte, l'expert a espéré qu'il ne fallait pas en tirer la conclusion que le Danemark refuserait purement et simplement d'envisager tout retrait de réserve. Tout en saluant l'énergie avec laquelle le Danemark défend le statut de l'Église nationale et assure qu'il ne s'agit pas d'une forme quelconque de discrimination religieuse, l'expert a souhaité que le pays réfléchisse à la question de savoir si la notion même d'Église d'État ne constitue pas en elle-même un problème au regard de l'article 18 du Pacte. Il semblerait que certaines justifications avancées pour maintenir le statut de cette Église d'État ne soient pas vraiment convaincantes, a insisté l'expert. Il a ajouté, suite aux réponses de la délégation, le Danemark devrait retirer à l'Église nationale sa fonction d'enregistrement des naissances.

Un autre membre du Comité a évoqué la question récurrente de l'incorporation du Pacte dans le droit interne danois en relevant qu'aucune réponse parmi toutes celles avancées par le Danemark n'est vraiment satisfaisante. À ce sujet, il est dit que le Pacte est évoqué devant les tribunaux; mais «évoquer» ne signifie pas «invoquer», a souligné cet expert. Aussi, a-t-il souhaité connaître les raisons de cette obstination à ne pas incorporer le Pacte dans le droit national, contre l'avis même de la Commission d'incorporation. L'expert a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur la loi relative à la limitation de la détention provisoire, en dépit du peu de recul dont disposent les autorités pour analyser l'application de cette loi récente.

Un expert a souhaité savoir si la loi sur les étrangers incorpore le principe selon lequel une personne ne peut pas être renvoyée dans un pays où elle risque d'être soumise à la torture, conformément à l'article 7 du Pacte.

Il est regrettable que le rapport de l'équipe de travail interministérielle chargée d'enquêter sur les allégations de vols non autorisés d'appareils de la CIA dans l'espace aérien danois ne soit pas encore publié, a ajouté cet expert. Il a souhaité en savoir davantage non seulement sur la centaine de survols du territoire danois par des appareils de la CIA, mais aussi sur l a quarantaine d'escales qui auraient été effectuées sur territoire danois. Quelle est la position du Danemark s'agissant des «assurances diplomatiques», en particulier au regard de l'article 7 du Pacte, même si le pays assure ne pas recourir à de telles assurances?

Relevant que 83% de la population du Danemark appartiennent à l'Église nationale, un expert a souhaité en savoir davantage sur les 17% restants. L'Église luthérienne est qualifiée d'Église du peuple danois, a relevé cet expert; aussi, s'est-il demandé si les 17% restants ne feraient pas partie du peuple danois. Il a indiqué avoir quelque difficulté à concilier les privilèges dont jouit cette Église nationale avec la démocratie laïque dont se prévaut le Danemark. Le Danemark connaît-il le phénomène de l'extrémisme religieux et, le cas échéant, quelles en sont les sources, a demandé l'expert ?

Un membre du Comité a relevé qu'il n'y a pas de limite maximale quant à la détention des requérants d'asile au Danemark et, dans la mesure où la durée de cette détention va parfois jusqu'à deux ans, s'est demandé s'il ne s'agissait pas là de facto d'une sanction pénale alors que cette question n'est pas une question pénale mais administrative. L'expert a aussi demandé quelles sont les mesures envisagées par le pays pour s'adapter à la nouvelle directive européenne sur le retour.

Un membre du Comité a salué l'attachement du Danemark à la cause de l'éradication de la torture et a fait valoir que le Comité n'a été saisi d'aucune allégation de torture concernant ce pays.

Réponses de la délégation

S'agissant de la faible participation de la société civile et des organisations non gouvernementales à l'exercice de préparation du présent rapport du Danemark, la délégation a suggéré que ce fait surprenant était peut-être dû au fait qu'il n'y avait pas d'organisation faîtière qui se serait sentie particulièrement concernée par toutes les questions intéressant le Comité. La délégation a toutefois reconnu que l'avis des ONG n'a pas été directement sollicité par les autorités. Concrètement, a-t-elle poursuivi, les ONG s'intéressent au Pacte, mais essentiellement lorsqu'elles ont une question particulière à régler et qu'elles cherchent pour cela à se référer à cet instrument et aux observations finales du Comité. Ce qui semble davantage intéresser le public danois, ce sont les engagements du pays vis-à-vis de l'Europe (Union européenne), a ajouté la délégation.

La délégation a précisé, s'agissant des réserves que le Danemark a émises à l'égard du paragraphe 7 de l'article 14 du Pacte, que la question ne fait pas l'objet d'un examen par les autorités. Ces réserves procèdent du désir constant du pays de respecter scrupuleusement les dispositions des instruments internationaux auxquels il souscrit, la délégation se demandant si le Danemark était peut-être trop scrupuleux.

Selon la politique suivie par le Danemark, les délinquants mineurs ne doivent pas être emprisonnés; ils doivent être placés dans des institutions sociales. Mais certains d'entre eux sont si violents qu'ils ne peuvent être maintenus dans de tels centres sociaux, même si ces centres disposent parfois de quartiers de sécurité renforcée, a expliqué la délégation. Moins d'une vingtaine de mineurs sont détenus en prison au Danemark, a-t-elle poursuivi; il est donc difficile de construire des locaux spéciaux à leur intention, sauf à tous les regrouper dans le même endroit. Dans ce contexte, la délégation a ajouté ne pas être en mesure de garantir que plus jamais un mineur ne serait détenu avec des adultes au Danemark.

En ce qui concerne les délais maxima de détention préventive, la délégation a souligné que tout détenu non remis en liberté sous 24 heures a la possibilité de s'entretenir avec un avocat avant d'être présenté devant le juge. Les statistiques les plus récentes, présentées au Parlement en juin 2008, laissaient apparaître qu'en juin 2006, la plus longue période de détention avant jugement avait été d'environ deux ans et concernait une affaire de trafic de drogues impliquant près d'une trentaine d'accusés.

Pour ce qui est de la détention en isolement, la délégation a indiqué que le seul aspect qui la différencie de la détention ordinaire réside dans l'absence de tout contact avec les autres prisonniers.

De janvier 2006 à août 2008, il y a eu 15 affaires de violations du code de conduite à l'égard des prisonniers, a par ailleurs indiqué la délégation.

S'agissant des questions intéressant les femmes, la délégation a indiqué qu'au mois de mai dernier, le Parquet a publié des instructions concernant la lutte contre la violence domestique afin, notamment, d'améliorer l'efficacité des enquêtes. Il existe à travers le pays 45 «refuges» pour femmes victimes de violence; ces refuges publient un rapport annuel sur la situation de la violence contre les femmes.

Interrogée sur les mauvais traitements à l'encontre des femmes migrantes, la délégation a reconnu qu'il s'agit effectivement de femmes qui se trouvent souvent dans des situations précaires. Les services disponibles pour les femmes victimes de violence s'appliquent bien sûr également aux femmes migrantes, a ajouté la délégation, précisant que des services d'interprétation peuvent être mis à leur disposition.

S'agissant des allégations de vols non autorisés d'avions de la CIA dans l'espace aérien danois, la délégation a rappelé que l'on attend encore les résultats de l'enquête menée à ce sujet par les autorités danoises. Sur la question des «assurances diplomatiques», la délégation a souligné qu'aucune décision définitive n'a été prise à ce sujet, d'autant moins que le débat sur la question n'a pas encore été entamé. Il est à ce stade impossible de dire s'il y aura finalement une loi s'agissant de cette question. Dans les rares affaires où la sécurité de l'État est en question, les informations ne peuvent pas être invoquées, pas même à huis clos, devant les tribunaux, de sorte qu'il est difficile de déterminer s'il faut ou non procéder à l'extradition d'une personne dans ce contexte.

Le Danemark est un pays où la liberté religieuse est totale, a par ailleurs assuré la délégation. Plus de cent communautés religieuses sont reconnues et approuvées dans le pays et jouissent de toute une gamme de droits. La seule différence entre l'Église nationale et les autres communautés religieuses a trait aux subventions et à l'enregistrement des naissances (l'Église nationale étant chargée de tenir les registres d'état civil).

Les requérants d'asile mentionnés par un expert qui ont été renvoyés en Iraq n'étaient pas des terroristes et ne représentaient aucun danger pour la sécurité nationale, a d'autre part indiqué la délégation. Le Danemark estime que la période de détention pour les requérants d'asile doit être la plus brève possible et c'est ce qui explique qu'aucune durée minimale ni maximale n'ait été fixée en la matière, a par ailleurs affirmé la délégation.

Le Danemark ne dispose pas de loi antiterroriste particulière. S'il y a certes eu un attentat perpétré au Pakistan contre l'ambassade du Danemark, il n'y a jamais eu à ce jour d'attentat sur le territoire danois lui-même; il n'y a eu que des tentatives d'attentats. De ce fait, les condamnations qui ont pu être prononcées l'ont été pour tentative d'attentat, les peines étant alors moins lourdes qu'en cas d'attentat mené à terme.

S'agissant du citoyen danois détenu à Guantanamo pendant une période d'un ou deux ans, la délégation a indiqué qu'il vit actuellement au Danemark où – en raison de la couverture médiatique que pouvait susciter son cas – il a accepté un régime de changement d'identité et vit désormais sous un autre nom.

Il n'y a pas d'obstacle juridique à l'incorporation du Pacte dans le droit interne, a par ailleurs souligné la délégation; il s'agit d'une question politique, le Danemark n'estimant pas qu'il est juridiquement nécessaire de procéder à une telle incorporation. La délégation a par ailleurs indiqué que suite à la réforme du système de la justice rendue par un jury, entrée en vigueur le 1er janvier de cette année, le Danemark respecte désormais pleinement les dispositions du paragraphe 5 de l'article 14 du Pacte puisqu'une personne condamnée par un jury peut désormais interjeter appel de sa condamnation par ledit jury.

Le Danemark ne reconnaît qu'un peuple autochtone; c'est celui de la communauté du Groenland, à savoir les Inuits, a indiqué la délégation.

Les Roms ne sont pas enregistrés en tant que tels par les autorités, qui ne disposent donc pas de données concernant leur nombre, a indiqué la délégation. Les Roms disposent de droits égaux sur l'ensemble du territoire, a-t-elle ajouté, précisant que certains sont de nationalité étrangère alors que d'autres sont de nationalité danoise. Certains sont bien intégrés mais d'autres ont du mal à s'intégrer à la vie danoise, a souligné la délégation.

Des experts s'étant enquis de la situation de la minorité allemande au Danemark, la seule minorité que le pays semble reconnaître, la délégation a expliqué que la minorité allemande au Danemark est reconnue comme minorité en vertu de la Convention-cadre du Conseil de l'Europe. Elle a précisé qu'il s'agit de la seule minorité danoise à laquelle la Convention-cadre s'applique. Les Allemands sont devenus une minorité au Danemark parce que les frontières ont bougé, c'est-à-dire en raison des événements historiques, ce qui n'est pas le cas, par exemple, des Roms, a fait valoir la délégation.

Un membre du Comité ayant demandé les raisons invoquées par la Cour suprême pour statuer que le peuple Thulé n'était pas un peuple autochtone distinct, malgré la perception des intéressés.


Pour ce qui est du statut de la tribu de Thulé, la délégation a indiqué que ni les habitants du Groenland ni ceux des îles Féroé ne seraient particulièrement heureux d'être considérés comme des minorités. Aussi, la question de leur statut au regard de la notion de minorité ne se pose-t-elle pas, a souligné la délégation. Le Groenland est peuplé de nombreuses tribus qui parlent des langues différentes, mais toutes ces tribus, en tant que telles, ne sont pas considérées comme des peuples autochtones; c'est l'ensemble de la population du Groenland qui est considérée comme autochtone, a souligné la délégation.

La délégation danoise a par ailleurs indiqué que le Pacte n'a pas encore été traduit en féroïen.


Observations préliminaires

Le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, a déclaré que les membres du Comité ont reçu une information riche concernant les mesures positives prises au Danemark afin de promouvoir plus avant les droits des populations du Groenland et des îles Féroé.

Il est important d'insister sur la nécessité pour tout État partie de réfléchir au retrait des réserves qu'il maintient à l'égard de telle ou telle disposition du Pacte, a par ailleurs souligné M. Rivas Posada.

Le Comité reste préoccupé qu'en dépit des réformes introduites, le Danemark continue de maintenir une distinction fondée sur la gravité des infractions pour déterminer si un droit de recours est permis ou non suite à une condamnation.

Par ailleurs, le Comité n'est pas pleinement satisfait de constater que les normes du Pacte ne constituent qu'un fondement du droit interne qui, en tant que tel, peut, soit être pris en compte, soit être écarté. Or, toutes les dispositions du Pacte doivent faire partie du droit interne aux fins de garantir leur respect, a insisté M. Rivas Posada.

Le Président du Comité a par ailleurs fait remarquer que dans la pratique, reconnaître une Église nationale peut entraîner des discriminations ou des inégalités entre les citoyens.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CT08017F