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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU ROYAUME-UNI
SUR L'IMPLICATION DES ENFANTS DANS LES CONFLITS ARMÉS

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, ce matin, le rapport initial du Royaume-Uni sur les mesures prises par ce pays pour se conformer au Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés.

Présentant le rapport du Royaume-Uni, M. Tom Jeffery, Directeur général du Service de l'enfance et des familles au Ministère de l'enfance, des écoles et des familles, a déclaré que son gouvernement a pris d'importantes mesures pour protéger les enfants de moins de 18 ans, qui ne peuvent s'enrôler qu'avec l'accord de leurs parents. Les bureaux de recrutement des trois armes dispensent une information complète sur les conditions du service. Les forces armées investissent beaucoup dans la formation des soldats, qui ont accès à des carrières très intéressantes au sein de l'armée, a fait valoir la délégation. Les jeunes de moins de 18 ans ne peuvent être envoyés au combat et des directives prévoient le retrait de ces jeunes de leurs unités en cas de risque.

La délégation du Royaume-Uni était composée de représentants des Ministères de l'enfance, de la défense et des affaires étrangères, ainsi que de la police des frontières du Royaume-Uni. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du recrutement de mineurs par les forces armées du Royaume-Uni et par des sociétés de sécurité privées, de la définition de la «participation directe» de mineurs aux conflits armés et des modalités de recrutement des mineurs par les forces armées du Royaume-Uni.

Le rapporteur du Comité pour le rapport du Royaume-Uni sur le Protocole facultatif, M. Awich Pollar, a observé que le Royaume-Uni est un membre actif dans le domaine de la protection des enfants contre l'implication dans les conflits armés au niveau international, mais le pays recrute toujours des enfants de moins de 18 ans. Le co-rapporteur, M. Kamel Filali s'est félicité de la collaboration de la délégation, tout en observant que des questions demeurent en suspens, notamment s'agissant de la diffusion du Protocole facultatif, de l'âge de recrutement, des conditions de libération des jeunes recrues au Royaume-Uni.

Le Comité adoptera, en cours de session, des observations finales sur les rapports du Royaume-Uni, qu'elle rendra publiques à l'issue de la session, le vendredi 3 octobre prochain


Le Comité entamera lundi matin, à 10 heures, l'examen des rapports présentés par la Tanzanie en vertu des deux Protocoles facultatifs de la Convention.


Présentation du rapport du Royaume-Uni

Présentant le rapport du Royaume-Uni, M. TOM JEFFERY, Directeur général du service de l'enfance et des familles au Ministère de l'enfance, des écoles et des familles, a notamment déclaré que la décentralisation des autorités n'a pas eu d'influence majeure sur les affaires militaires du Royaume-Uni. Le Gouvernement a pris d'importantes mesures pour protéger les enfants de moins de 18 ans, qui ne peuvent s'enrôler qu'avec l'accord de leurs parents. Les bureaux de recrutement des trois armes dispensent une information complète sur les conditions du service. Les forces armées investissent beaucoup dans la formation des soldats, qui ont accès à des carrières très intéressantes au sein de l'armée. Les jeunes de moins de 18 ans ne doivent pas être envoyés au combat et des directives prévoient le retrait de ces jeunes de leurs unités en cas de risque. Des progrès ont été réalisés mais des efforts doivent encore être consentis au niveau de l'environnement de formation, a reconnu M. Jeffery.

Le rapport initial du Royaume-Uni sur le Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/GBR/1) indique notamment que le Royaume-Uni a fait une déclaration au moment de la ratification (en juin 2003) du Protocole facultatif concernant l'âge minimum d'enrôlement (16 ans, soit l'âge minimum de fin de scolarité). Des dispositions ont été adoptées qui garantissent que le recrutement des jeunes de moins de 18 ans se fait toujours sur une base véritablement volontaire et avec le consentement éclairé du volontaire et de ses parents. L'âge minimum d'enrôlement reste fixé à 16 ans et il n'est pas prévu de changement à cet égard. Dans une étude récente, un éminent juriste spécialisé dans les droits de l'homme estime que les jeunes ayant les qualifications voulues pour faire une carrière militaire devraient pouvoir continuer à être enrôlés à l'âge de 16 ans et ainsi pouvoir participer à tous les aspects des missions incombant aux membres du personnel militaire à partir de l'âge de 18 ans.

Le rapport relève en outre que pour être compétitive sur le marché de l'emploi où la concurrence est de plus en plus forte, l'armée doit attirer des jeunes de 16 ans et plus vers des carrières en son sein. Les forces armées offrent des formations et des emplois intéressants et constructifs à de nombreux jeunes, qui leur donnent un sentiment de grand accomplissement et de valeur et le sentiment également d'être utile à la société dans son ensemble. Dans son troisième rapport de la session 2004-2005 sur le devoir de protection, le Comité de la défense de la Chambre des communes a souligné que l'armée ouvrait à de nombreux jeunes, en particulier ceux qui étaient issus de milieux pauvres ou défavorisés, des perspectives qu'ils ne se seraient peut-être pas vu offrir dans la vie civile. Il a évoqué aussi la forte capacité de l'armée à faire de recrues ayant peu d'instruction des personnels très entraînés, capables et performants et loué l'armée pour son engagement dans des programmes éducatifs de rattrapage. L'impossibilité de recruter dans ce groupe d'âge reviendrait à se priver de jeunes en fin de scolarité de grande qualité qui épouseraient d'autres carrières. L'armée aurait alors de gros problèmes d'effectifs étant donné que 30 % de l'ensemble du personnel recruté en 2006-2007 étaient âgés de moins de 18 ans.

L'enrôlement obligatoire dans les forces armées britanniques a été aboli en 1963. Le recrutement dans les forces armées britanniques se fait toujours sur une base volontaire et aucun postulant n'est admis si sa demande n'est pas accompagnée du consentement formel écrit de l'un de ses parents ou de son tuteur. L'âge de quiconque fait une demande d'incorporation dans les forces armées est soigneusement vérifié à partir de l'original de l'acte de naissance et d'autres papiers d'identité. Malheureusement, il est arrivé que, du fait de la pression qui s'exerce sur les unités avant leur déploiement, des soldats aient été envoyés par inadvertance sur le théâtre d'opérations avant d'avoir atteint leur dix-huitième anniversaire. Pour éviter que cela ne se reproduise, le système de repérage utilisé pour identifier les personnels lorsqu'ils arrivent sur le théâtre des opérations émet un message d'alerte lorsqu'une personne de moins de 18 ans est repérée et des contrôles quotidiens sont effectués pour garantir qu'aucune personne de moins de 18 ans ne s'y trouve. La conséquence directe des mesures prises a été que le nombre des membres du personnel militaire âgés de moins de 18 ans affectés à des opérations militaires est passé de 300 environ entre 1999 et 2003 à 18 seulement depuis que le Protocole facultatif a été ratifié en 2003. Aucune personne de moins de 18 ans n'a été affectée à des opérations militaires depuis juillet 2005.


Examen du rapport

Questions des membres du Comité

M. AWICH POLLAR, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport britannique sur l'application du Protocole facultatif, a observé que le Royaume-Uni est un membre actif dans le domaine de la protection des enfants contre l'implication dans les conflits armés, dans le cadre des initiatives de l'Union européenne comme des Nations Unies. Cependant, le Royaume-Uni recrute toujours des enfants de moins de 18 ans et d'autres limites d'âge sont problématiques dans ce pays, comme l'âge légal de consommation d'alcool. La définition des «hostilités directes» prête aussi à discussion, car elle ne permet pas de protéger efficacement les moins de 18 ans. Le gouvernement entend-il d'autre part mettre en œuvre les recommandations du rapport «Deepcut», concernant les modalités de recrutement de mineurs dans l'armée, a demandé l'expert.

M. KAMEL FILALI, co-rapporteur, s'est félicité de l'action positive des autorités du Royaume-Uni. Il a voulu savoir dans quelle mesure le Protocole facultatif est connu au Royaume-Uni et s'il est diffusé dans les écoles. Le concept de «participation directe» n'existe pas en tant que tel dans le droit britannique, les explications données par le rapport renvoyant seulement à la «pratique sur le terrain», a observé l'expert. Les jeunes de 17 à 18 ans, qui ont le droit d'être à bord d'un bâtiment de guerre, sont-ils protégés par le Protocole facultatif? M. Filali a voulu savoir si le système OPLOC d'identification des personnels militaires est appliqué sur les théâtres d'opération. Le Gouvernement britannique entend-il porter l'âge du recrutement à 18 ans, a demandé M. Filali.

En matière de recrutement par des groupes armés, le Comité a eu connaissance de recrutement de mineurs par des groupes paramilitaires en Irlande du Nord, a dit une experte. En outre, comment le Royaume-Uni peut-il s'assurer du non recrutement de mineurs par les sociétés privées de sécurité qu'il mandate en Iraq et en Afghanistan?

En quoi consistent au juste les techniques de recrutement, ont demandé des experts, préoccupés par la forte proportion, au sein des forces armées, de recrues âgées de moins de 18 ans provenant de milieux défavorisés et instruites au niveau du primaire seulement. Le grand nombre de suicides de jeunes recrues est aussi inquiétant, comme l'a révélé l'enquête sur l'affaire «Deepcut», a observé un expert: les mauvais traitements et le bizutage sont-ils contrôlés par les autorités militaires?

Des experts ont demandé quelles mesures étaient prises pour garantir l'information de parents et des familles des jeunes recrues et pour assurer la possibilité aux jeunes recrues de faire valoir leurs doléances.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions du Comité, la délégation a indiqué que la diffusion des dispositions du Protocole facultatif est assurée à tous les professionnels au contact avec les mineurs. Les forces armées n'assurent pas de formation spécifique systématique, mais émettent des directives opérationnelles faisant référence à la protection des droits de l'homme, s'agissant par exemple du traitement des prisonniers. Il est clair qu'un renforcement de la formation s'impose, a admis la délégation.

Le pourcentage de recrutement de mineurs s'établit à environ 30%, comme il a été dit, mais il n'est pas possible de confirmer le pourcentage de 50% de candidats appartenant à des familles défavorisées. Les forces armées recrutent leur personnel dans toutes les classes sociales, indépendamment des origines ou de l'orientation sexuelle. Les bureaux de recrutement sont répartis de manière égale sur tout le territoire national. Le recrutement dans les écoles ne se fait qu'à l'invitation des établissements eux-mêmes. Le Gouvernement n'entend pas revenir sur le recrutement dès 16 ans mais est tout aussi déterminé à empêcher d'envoyer des mineurs en situation de combat.

Les moins de 18 ans peuvent faire part de leurs griefs aux inspecteurs des installations militaires. Ces inspecteurs mènent des enquêtes et vérifient le bien-fondé des plaintes. L'indépendance du nouveau Commissaire chargé de la supervision des inspections est assurée, le Commissaire pouvant soit déposer plainte, soit soumettre les problèmes à la hiérarchie militaire.

Les recrues de moins de 18 ans peuvent quitter le service militaire avant de rentrer dans le service militaire adulte, sans être soumises à des conditions restrictives. Le cas est différent si le soldat s'est inscrit en tant que mineur et souhaite partir en tant que majeur, d'autres procédures étant appliquées.

En Irlande Nord, le recrutement par des sociétés militaires ou paramilitaires privées ne relève pas du droit international, compte tenu de la situation politique. Le Gouvernement du Royaume-Uni donnera ultérieurement des précisions sur le recrutement par des sociétés privées opérant à l'étranger.

La loi du Royaume-Uni ne donne pas de définition de la «participation directe» aux hostilités. On estime qu'une personne participe directement si elle est déployée dans une zone de conflit. Le déploiement ou non de personnes de moins de 18 dans un bâtiment de la Royal Navy dépend de l'appréciation que fait l'état-major du risque de conflit dans la zone d'engagement. S'il peut exister une menace sur le bâtiment en question, ou si un déploiement terrestre de soldats d'infanterie de marine embarqués est prévu dans une zone de conflit, on ne déploiera pas de personnel de moins de 18 ans.

Le traitement réservé par les forces britanniques aux enfants soldats ennemis capturés dépend des circonstances, les situations de combat directs entraînant des conséquences différentes que celle d'une perquisition par exemple. Les prisonniers mineurs sont cependant toujours considérés comme plus vulnérables. Les autorités militaires informent le Comité international de la Croix-Rouge de toute mise en détention d'un enfant mineur et, si possible, la famille concernée.

Les enfants anciens soldats qui demandent l'asile au Royaume-Uni sont accueillis dans l'un des 130 centres d'accueil de demandeurs d'asile, mais il est envisagé d'ouvrir un centre spécialisé à leur intention.

La poursuite, au Royaume-Uni, d'auteurs de recrutement d'enfants soldats de moins de 15 ans à l'étranger est possible, ce recrutement étant un crime de guerre, pour autant que cet acte ait été commis par une personne dépendant, d'une manière ou d'une autre, de la juridiction britannique.

Par ailleurs, le Gouvernement du Royaume-Uni a fixé huit critères d'évaluation des demandes d'autorisation d'exportation d'armes. La demande ne doit notamment pas entraîner de violation des engagements internationaux du Royaume-Uni, le Protocole facultatif faisant partie de ces engagements.

Un expert ayant demandé des précisions sur la notion d'«enfants potentiellement terroristes» mise en avant dans les rapports de l'État partie et sur les mesures prises pour éviter une utilisation excessive de la force militaire contre des mineurs, la délégation a précisé que la loi contre le terrorisme ne s'applique qu'aux adultes soupçonnés, et non à leurs enfants. Une experte s'est inquiétée de la possibilité de détenir des mineurs sans procès.

Les experts militaires de la délégation ont précisé, en réponse à des questions de suivi, qu'il n'existe pas de dispositions particulières dans le Code pénal pour les mineurs ayant commis des délits dans le cadre du service militaire. La comparution en cour martiale est réservée aux cas particulièrement graves. En outre, des sanctions disciplinaires tiennent compte de l'âge des justiciables.

La délégation a rappelé que les forces armées du Royaume-Uni sont composées de volontaires exclusivement. La durée contractuelle d'engagement est de quatre ans. S'il apparaît qu'une personne souhaite rompre son contrat, une décision administrative sera prise au cas par cas.


Observations préliminaires

M. KAMEL FILALI, co-rapporteur, s'est félicité de la collaboration de la délégation, tout en observant que des questions demeurent au sujet, notamment, de la diffusion du Protocole facultatif, de l'âge du recrutement, des conditions de libération des jeunes recrues au Royaume-Uni.


Conclusion par la délégation

M. TOM JEFFERY, chef de la délégation du Royaume-Uni, s'est dit satisfait des questions posées par le Comité et de la manière dont ses membres ont réagi aux progrès enregistrés par le Royaume-Uni. Le Royaume-Uni comprend parfaitement l'importance des conclusions finales que le Comité rendra le 3 octobre prochain, dont il tiendra pleinement compte dans l'application des mesures en faveur de la jeunesse dans les quatre nations. M. Filali pourra, lors de la visite qu'il effectuera au Royaume-Uni, constater la réalité de l'engagement du pays, a conclu M. Jeffery.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC08029F