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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE L'UKRAINE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, depuis hier après-midi, le cinquième rapport périodique présenté par l'Ukraine sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité adoptera au cours de la session des observations finales sur le rapport de l'Ukraine qu'il rendra publiques à la clôture, le 23 novembre prochain.

Présentant le rapport de son pays, Mme Lydia Drozdova, première Vice-Ministre du travail et des affaires sociales de l'Ukraine, chef de la délégation, a attiré l'attention sur les changements positifs intervenus en Ukraine concernant la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, mentionnant en particulier l'adoption d'une loi et de décrets garantissant l'égalité entre les sexes; le remaniement du Code du travail dans le sens d'une interdiction de la discrimination à l'embauche et au niveau salarial, notamment. La situation sur le marché du travail s'est améliorée au cours de l'année écoulée grâce aux conditions économiques, mais aussi grâce aux mesures actives de l'État. Fin 2006, l'Ukraine a ratifié la Charte sociale européenne, ce qui devrait favoriser une amélioration des conditions de vie et une meilleure réalisation des droits économiques, sociaux et culturels dans le pays.

La délégation ukrainienne était également composée de représentants des Ministères de la justice, du travail et des affaires sociales, de l'économie, de l'éducation et des sciences, de la famille et des sports et des affaires étrangères, ainsi que du Comité d'État pour les nationalités et les religions. Elle a répondu aux questions des membres du Comité concernant en particulier la politique ukrainienne de lutte contre les discriminations; les mesures prises pour prévenir les accidents du travail et pour faire respecter les droits des travailleurs, en particulier dans le secteur minier; le respect des droits économiques, sociaux et culturels des minorités rom et tatar; ou encore les mesures prises pour lutter contre la traite des êtres humains et l'exploitation des enfants, et pour prévenir ces fléaux.



Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du quatrième rapport périodique de Saint-Marin (E/C.12/SMR/4).



Présentation du rapport

MME LYDIA DROZDOVA, première Vice-Ministre du travail et des affaires sociales de l'Ukraine, a affirmé que des changements positifs sont intervenus en Ukraine concernant la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Ainsi a été adoptée une loi et des décrets garantissant l'égalité entre les sexes. Elle a ajouté que le Gouvernement est tenu d'étudier la loi afin d'y débusquer les éléments discriminatoires. Le Code du travail a été remanié dans le sens d'une interdiction de la discrimination à l'embauche et au niveau salarial, notamment. La situation sur le marché du travail s'est améliorée au cours de l'année écoulée grâce aux conditions économiques, mais aussi grâce aux mesures actives de l'État. Par rapport à 2005, le pourcentage de la population active est en croissance et le chômage en diminution. Les tendances à l'augmentation de la population active se sont confirmées en 2007, pour se rapprocher des niveaux constatés dans l'Union européenne. La pauvreté s'est stabilisée globalement par rapport à 2001, à 28%. Le seuil de pauvreté absolue est fixé à 4,30 dollars, à parité de pouvoir d'achat. Des mesures sont prises pour augmenter le salaire réel en agissant sur le niveau de salaire minimal et sur la productivité du travail.

La chef de la délégation a fait valoir que les relations dans le domaine du travail sont l'objet d'une nouvelle loi votée récemment avec l'approbation des partenaires sociaux et consacrant pour la première fois au niveau législatif le principe du dialogue social tripartite. Fin 2006, l'Ukraine a ratifié la Charte sociale européenne. On s'attend ainsi à une amélioration des conditions de vie et à une meilleure réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Un projet de loi vise l'instauration d'un régime de sécurité sociale garanti par l'État. La loi fixe les modalités d'application de ses dispositions, en particulier dans le domaine de l'assurance maladie, dont les régimes (maladie, accident) seront unifiés. L'assurance vieillesse est également concernée par ces mesures. En avril 2007, le Parlement a adopté une loi garantissant un régime de pensions générale et professionnelle. La transition vers un système de protection axé sur les familles passe par une révision générale du système existant. Le critère pour l'accès à ce système sera le revu. Mme Dorzdova a en outre évoqué les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre la violence domestique et la traite des personnes. D'autres programmes gouvernementaux visent à améliorer la situation des enfants des rues, et plus généralement pour la concrétisation des droits des enfants. L'Ukraine fonde son action en matière de droits économiques, sociaux et culturels dur les instruments internationaux pertinents: elle se félicite à cet égard de l'adoption du Protocole facultatif, un outil indispensable pour le contrôle du respect de ces droits.

Le cinquième rapport périodique présenté par l'Ukraine (E/C.12/UKR/5) indique en particulier que l'Ukraine travaille depuis 2001 à la formulation d'une stratégie d'élimination de la pauvreté et, à cette fin, a élaboré un programme coordonné d'application de cette stratégie. En outre, un ensemble de mesures concrètes visant à éliminer la pauvreté est approuvé chaque année et les indicateurs de la pauvreté font l'objet d'une surveillance permanente. Des programmes régionaux de lutte contre la pauvreté sont élaborés et mis en pratique, portant essentiellement sur les aspects suivants: assurer un accroissement du revenu de la population et une réduction des disparités économiques en élevant le niveau des salaires; renforcer la caisse des pensions dans le cadre d'une réforme des pensions; renforcer les mesures d'appui ciblé en faveur de certaines catégories de personnes. Le niveau des garanties sociales minimales de l'État a également augmenté dans des proportions importantes. En particulier, le salaire minimal a augmenté de 26,7 % en 2005. Les programmes d'emploi prévoient des mesures consistant notamment à améliorer le niveau de compétences des travailleurs, à aligner la composition de la main-d'œuvre et les niveaux de qualification sur les besoins du marché du travail et à améliorer les modalités du soutien social aux chômeurs afin de les aider à retrouver un emploi productif. L'application du Programme sur l'emploi pour 2001-2004, a permis de créer plus de 2,3 millions d'emplois. La Loi prévoit des garanties supplémentaires concernant l'emploi de certaines catégories de personnes qui ont besoin d'une protection sociale et ne sont pas en mesure d'affronter sur un pied d'égalité la concurrence sur le marché du travail. Beaucoup d'attention est accordée à l'apprentissage de métiers qui permettent aux personnes sans emploi, en particulier aux femmes, de s'épanouir en tant que petits entrepreneurs indépendants. Le respect des droits syndicaux est garanti par la Constitution, les lois sur les associations, sur les syndicats, sur les négociations et accords collectifs et sur le règlement des conflits du travail et le Code du travail, indique par ailleurs le rapport ukrainien. En particulier, nul ne peut être contraint ou empêché de faire grève. Le droit de grève ne peut être interdit qu'en vertu d'une mesure législative. La loi sur le règlement des conflits du travail impose des restrictions au droit de grève; elle spécifie en particulier qu'il est interdit de faire grève dans les cas où l'arrêt du travail fait peser une menace sur la vie et la santé de la population et sur l'environnement. Les syndicats peuvent être créés sans autorisation préalable sur la base du libre choix de leurs membres.

Le rapport indique en outre que le problème de la violence à l'égard des femmes n'est pas spécifiquement ukrainien. En 2002, la Loi sur la protection contre la violence dans la famille est entrée en vigueur et le Conseil des ministres a approuvé le règlement relatif à l'examen des déclarations et communications concernant les actes de violence commis dans la famille ou la menace effective de tels actes. Une étape importante en vue de la solution des questions liées à la violence familiale a été franchie par le Ministère de l'intérieur qui a pris l'initiative de modifier le Code des infractions administratives en ce qui concerne les sanctions prévues pour la commission d'actes de violence familiale ou le non-respect d'une ordonnance de protection. Les principes juridiques et organisationnels de la prévention de la violence familiale sont donc consacrés par la loi. En Ukraine, la violence familiale est considérée comme l'une des principales causes de l'absence de domicile fixe, de la toxicomanie et de l'alcoolisme. Le plus souvent, les victimes de la violence sont les femmes. La Loi prévoit la création, au sein des organes du Ministère de l'intérieur, de services d'inspecteurs d'arrondissement de la milice et de la section pénale de la milice chargée des problèmes des mineurs et des problèmes de la prévention de la violence familiale. Il convient également de noter que l'Ukraine est l'un des premiers pays européens à avoir modifié son Code pénal national en y introduisant un article spécial qui érige la traite des êtres humains en infraction pénale. Le Conseil suprême a adopté en janvier 2006 la Loi portant modification du Code pénal ukrainien en aggravant les sanctions prévues pour la traite des êtres humains et l'incitation à la pratique de la prostitution. Enfin, tenant compte de la gravité des problèmes auxquels la minorité nationale tsigane est actuellement confrontée en Ukraine et de l'importance que les organisations internationales attachent à leur règlement et afin de créer les conditions nécessaires à l'intégration des tsiganes dans la société ukrainienne et de permettre aux membres de ce groupe ethnique d'exercer leurs droits et libertés dans les domaines social, économique, culturel et éducatif, le Conseil des ministres de l'Ukraine a, le 11 septembre 2003, approuvé le Programme de renaissance sociale et culturelle des tsiganes d'Ukraine pour la période s'achevant en 2006.


Examen du rapport

Questions relatives au suivi des précédentes recommandations du Comité

La délégation de l'Ukraine a déclaré que la loi ukrainienne pose l'égalité des droits entre tous les citoyens. Il existe 1972 organisations de défense des minorités pour lesquelles l'e pays, en tant qu'État multiethnique, consacre beaucoup de moyens. Le Gouvernement s'apprête à créer un Conseil consultatif pour discuter des problèmes rencontrés par les minorités et mettre au point des politiques favorables à leur épanouissement culturel. Un autre volet de l'action du Conseil sera d'étudier les relations entre les minorités et le reste de la population. Les informations en possession de la délégation ne font pas état de plaintes pour discrimination formulées par des Roms. Ceux-ci sont dûment enregistrés à l'état civil, a-t-elle ajouté.

Les droits des minorités nationales relèvent du Ministère de l'intérieur, a expliqué la délégation. Les organes judiciaires veillent au respect des droits des minorités. Les agissements des groupuscules racistes et autres sont surveillés. Cependant, les organisations non gouvernementales font état de violences et 23 plaintes ont notamment été déposées par des personnes d'origine africaine. Chaque service et chaque Ministère disposent d'un service spécial chargé de contrôler l'absence de discrimination.

Les personnes handicapées bénéficient de toute l'attention du Gouvernement, qui a dépensé des sommes importantes pour leur réhabilitation. Au niveau des régions, des centres de réinsertion prennent en charge les personnes handicapées isolées. Plus de cent millions de dollars sont consacrés aux associations de personnes handicapées. Des mesures ont été prises pour garantir l'accès physique des personnes handicapées aux infrastructures. Un corps d'inspection des bâtiments contrôle le respect des dispositions en la matière. Les allocations pour personnes handicapées ont été révisées à la hausse en 2005, a en outre fait valoir la délégation.

Répondant à des questions sur la parité entre hommes et femmes, la délégation a notamment indiqué que les services gouvernementaux centraux et régionaux emploient près de 75% de femmes. Au niveau des postes de direction centrale, les femmes sont représentées à hauteur de plus de 60%. Dans l'administration locale, les femmes sont aussi majoritaires. La question de la parité au Parlement fait l'objet d'un projet de loi imposant de contingents féminins au Parlement et dans les candidatures des partis politiques.

Le Gouvernement a en outre pris des mesures pour lutter contre le chômage des femmes, avec des résultats en progrès mais globalement toujours moins bons que ceux des hommes, a déclaré la délégation. Elle a précisé que 5% des emplois de certains secteurs sont réservés aux femmes, sous peine d'amendes assez fortes. L'agence nationale pour l'emploi aide les femmes à s'orienter sur le marché de l'emploi et s'autonomisent dans la recherche d'emploi. Des formations professionnelles sont organisées à leur intention. Pour assurer la parité dans le travail, la loi interdit la discrimination à l'embauche et dans le développement de carrière.

Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail est sanctionné par la loi par trois ans d'emprisonnement au maximum, a d'autre part indiqué la délégation. Tout employeur doit protéger ses employées de tout harcèlement.

La délégation de l'Ukraine a également fait valoir que son Gouvernement a pris et prend un grand nombre de mesures pour la stabilisation macroéconomique du pays, ce qui permet de renforcer sur les garanties sociales par l'intermédiaire de l'amélioration des conditions économiques de la population. La pauvreté est ainsi en recul par rapport au début des années 2000. Les pensions, les prestations sociales de l'État et le salaire minimal sont réadaptés périodiquement, la dernière fois en 2006 et dans des proportions importantes. L'allocation chômage correspond à 50% du salaire minimal, conformément aux prescriptions de l'Organisation internationale du travail. Plus de trois millions de familles bénéficient de l'aide sociale, dont le montant est défini par le budget de l'État à plus de deux milliards de dollars. L'égalité salariale est garantie en Ukraine, où les différences de salaires entre hommes et femmes à travail égal sont inexistantes.

La délégation ayant été priée d'expliquer pourquoi le Gouvernement ukrainien n'avait pas traduit dans la langue officielle les dernières recommandations finales du Comité, elle a fait savoir que ces recommandations ont bel et bien été traduites.

La délégation a indiqué que l'Ukraine est en pointe dans la lutte pour la réalisation des droits des enfants, qui sont protégés contre l'exploitation au travail. Une organisation de surveillance contrôle le respect de la loi à cet égard. Des études ont montré que 3500 enfants mineurs travaillent en Ukraine, dont près de mille en situation illégale. Des poursuites ont été engagées, aboutissant à l'inculpation d'une soixantaine de chefs d'entreprise.

La délégation de l'Ukraine a aussi indiqué que le Gouvernement avait pris des mesures pour lutter contre l'économie informelle et l'emploi illégal, en concertation avec les employeurs et les syndicats. D'autres mesures sont prises pour favoriser la culture d'entreprise. L'État cherche à garantir le respect des lois sur le travail, notamment en matière de salaire, à élaborer un mécanisme de lutte contre la fraude fiscale et le travail au noir et à élaborer un système d'information transversal. Le système des retraites va être refondu dans le sens d'une meilleure lutte contre l'économie souterraine.

Les juges sont tenus de prendre en compte les dispositions du droit international, comme le prescrit le code de procédure. La Cour constitutionnelle cite systématiquement les normes internationales dans le domaine des droits de l'homme à l'appui de ses décisions, par exemple dans des jugements sur la peine de mort, les droits syndicaux, la gratuité de l'éducation et du matériel pédagogique. Quant au poste d'ombudsman, son financement est assuré par une ligne budgétaire ordinaire.

Un Comité de surveillance des conditions de travail dans les mines s'efforce d'y favoriser une réduction de la mortalité. Un système de contrôle à quatre échelons prévoit des contrôles par les industriels mais aussi par des commissions interdisciplinaires de l'État. En mars dernier, le Conseil des Ministres a donné son feu vert à l'exploitation de certaines mines, moyennant autorisation du Comité de surveillance. Le Code pénal a été aménagé et prévoit désormais des peines de privation de liberté en cas d'infractions aux normes de sécurité dans ce secteur.



Cadre général de l'application du Pacte

Un membre du Comité a demandé des précisions sur le rôle de l'instance nationale chargée de suivre l'application des précédentes recommandations du Comité. Il a également été demandé des précisions sur le degré d'indépendance dont bénéficie l'ombudsman national. Le Comité avait également demandé des données comparatives sur l'évolution de la situation en matière d'égalité des femmes et de droits syndicaux. Qu'en est-il en particulier de la possibilité offerte de contourner l'obligation du respect des droits syndicaux au motif de l'intérêt de l'État? Une autre question encore sans réponse concerne le problème de l'exploitation et la traite des enfants: l'organe national de lutte contre ces phénomènes est-il doté des ressources adéquates?

Un membre du Comité a constaté, à la lecture du rapport, d'importants progrès en termes de création d'emplois, qui se chiffrent par millions. Les salaires augmentent également très rapidement. Un membre du Comité a demandé quelle était l'opinion du Gouvernement de l'Ukraine quant au Protocole facultatif au Pacte, qui offrirait à ses citoyens une voie de recours auprès du Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

Il a été observé qu'un citoyen ne peut saisir la Cour constitutionnelle, garante de l'application des droits protégés par le Pacte. Seul l'ombudsman est habilité à agir devant la Cour. La délégation a été priée de donner des exemples de telles saisines, et du traitement réservé à ces actions. Quelles garanties juridiques existent-elles du respect des droits économiques, sociaux et culturels des citoyens ukrainiens?

Un membre du Comité a demandé des renseignements sur la répartition du travail entre l'Ombudsman et le Procureur général, tous deux chargés de surveiller le respect des droits économiques, sociaux et culturels. Par ailleurs, des informations indiquent que les accidents du travail sont particulièrement nombreux en Ukraine, ce qui laisse soupçonner des violations du Code du travail. Le Procureur général agit-il avec toute la diligence voulue à cet égard? La question de l'indépendance et de l'impartialité de l'ombudsman peut aussi se poser, compte tenu du fait qu'il siège apparemment au Parlement.

La délégation ukrainienne a souligné que de nombreux citoyens ukrainiens partent travailler à l'étranger. Ces personnes sont assez jeunes et ont souvent des enfants. Les personnes victimes de la traite d'êtres humaines se retrouvent généralement en Turquie, en Russie et en Pologne. L'Ukraine est l'un des premiers pays européens à inclure dans son Code pénal le délit de traite d'êtres humains. L'État consacre désormais davantage de ressources à la lutte contre ce phénomène. Les services ukrainiens ont ainsi rapatrié plus de quatre cents personnes en six mois, démantelé neuf organisations criminelles, poursuivi et jugé près de 200 criminels. Pour renforcer cet effort, l'Ukraine a adopté un programme d'action national, axé notamment sur l'identification des crimes, le renforcement de l'action juridique, la formation des jeunes et la réinsertion des victimes. Ce programme national s'accompagne de programmes locaux pris en charge par les régions, en fonction de leurs situations propres, les régions frontalières étant davantage confrontées au problème de la traite d'êtres humains.

Un comité de coordination regroupant les Ministères de la famille, de l'intérieur et des finances en particulier, ainsi que les organes de police, assure la coordination de l'effort national. Un groupe d'experts composé de représentants des organisations de la société civile et des autorités est à la disposition du comité. En 2007, 147 contrôles ont été effectués. Pour prévenir la traite des êtres humains, les organes de police ont créé une base de données des travailleurs du sexe. Le Ministère de l'intérieur entretient par ailleurs des relations étroites avec les forces de police d'autres États européens, ainsi qu'avec certaines associations professionnelles telles les agences de mannequins.

Les personnes victimes de la traite bénéficient de l'aide juridique. Les services sociaux gèrent des centres mobiles qui ont déjà assuré trois cents consultations de prévention. Des services téléphoniques de conseils gratuits ont été mis sur pied, notamment à l'intention des femmes. L'Ukraine a aussi mis sur pied cinq centres de réinsertion des victimes, sans compter une soixantaine d'autres structures de la société civile. Les centres d'État offrent une aide sociale, juridique et professionnelle. L'aide médicale est dispensée par les instances provinciales. Près de mille femmes ont bénéficié des services du centre ouvert à Kiev. On engage aussi les médias à sensibiliser la population au problème de la traite des êtres humains. La délégation a enfin confirmé l'augmentation des actions pénales, qui témoigne de la volonté de l'État de lutter contre ce fléau.

L'ombudsman est investi de ses fonctions par le Parlement, à bulletin secret, a expliqué la délégation ukrainienne. Il renvoie certains dossiers aux services pertinents, pour complément d'information. Il dispose de sa propre équipe et doit chaque année rendre compte des plaintes reçues et des mesures prises. Le Parlement, s'il estime que l'ombudsman n'est pas assez actif, peut le démettre de ses fonctions. Par ailleurs, un député ne peut occuper une autre fonction, une exigence qui s'applique aussi à l'Ombudsman. Le Procureur général est chargé des mises en accusation et de protéger la population. Il effectue pour ce faire un contrôle général de l'application des lois. Il peut assister aux séances de travail de toutes les institutions de l'État et se rendre sans entrave auprès de toute entreprise et instance nationale. Il peut en outre inviter des hauts fonctionnaires à l'informer de toute affaire dont il est saisi. Ses pouvoirs sont donc très étendus. Les ressources nécessaires à ses activités sont inscrites au budget. Si l'ombudsman constate des infractions, il entame des poursuites par le biais des organes judiciaires compétents. Un projet de loi soumis au nouveau Parlement vise cependant à modifier ce statut. L'ombudsman peut pour sa part saisir la Cour constitutionnelle. Chaque citoyen peut demander à cette Cour de se pencher sur son cas. Le recours à la Cour européenne des droits de l'homme ne peut intervenir qu'après épuisement de toutes les voies de recours nationales.

Le bilan de l'action de l'ombudsman est débattu en ce moment même au Parlement ukrainien, qui va également se pencher sur le rôle qu'il sera appelé à jouer dans la mise en œuvre des recommandations du Comité contre la torture.

La délégation a aussi indiqué que toutes les personnes se trouvant sur le territoire national bénéficient de la protection de la loi.

Concernant la ratification des conventions internationales, la délégation a expliqué qu'elle ne peut intervenir qu'après que le Parlement ait approuvé les amendements législatifs nécessaires à l'application des nouvelles dispositions. Des accords de protection sociale des travailleurs migrants ont été signés avec une vingtaine d'États ainsi qu'avec l'Union européenne. D'autres accords bilatéraux sont en négociation avec cinq États. L'Ukraine envisage en outre de ratifier prochainement quatre nouvelles conventions importantes de l'Organisation internationale du travail (cinquante-quatre documents sont déjà ratifiés).


Lutte contre la discrimination

Un membre du Comité a salué la ratification par l'Ukraine de nombreuses conventions internationales importantes, notamment de la Charte sociale européenne. Certains textes importants n'ont cependant toujours pas été ratifiés, tels la Convention sur la réduction des cas d’apatridie: nombre de citoyens d'anciennes républiques de l'URSS résident ainsi en Ukraine sans bénéficier d'une protection sociale. On constate aussi des discriminations de la part d'agents de la police ou encore sur le marché de l'emploi contre certaines catégories de population, Roms et Tatars de Crimée en particulier. Or, souvent, il semble que l'on impute au «hooliganisme» des comportements ouvertement racistes ou antireligieux. Des précisions ont été demandées sur les mesures actives prises pour la minorité rom, notamment s'agissant de leur scolarisation. En outre, les minorités juive et musulmane ont-elles la possibilité de jouir de leurs droits culturels?

Les chiffres fournis dans le rapport de l'Ukraine montrent que les femmes sont toujours victimes de discrimination, au Parlement par exemple, a déclaré un membre du Comité. Le Gouvernement a-t-il adopté des mesures pour améliorer la représentation des femmes dans l'appareil gouvernemental et pour sensibiliser les juges aux obligations en matière de parité? Des membres du Comité ont demandé des précisions sur le système de quotas rejeté par le Parlement et dont le rapport fait mention. Plus généralement, des informations ont été réclamées sur les politiques antidiscrimination engagées par le Gouvernement en faveur des femmes, des minorités ethniques et des minorités sexuelles, et sur les résultats tangibles des mesures, politiques et études mentionnées dans le rapport.

La délégation ukrainienne a fait état à cet égard de la préparation d'un texte, avec la participation des minorités concernées, visant à imposer des mesures de lutte contre les agressions à caractère antireligieux. D'autre part, la loi prévoit d'une manière générale des sanctions contre la discrimination, pouvant aller jusqu'à cinq ans de réclusion. Il existe en Ukraine un grand nombre d'organisations non gouvernementales nationales et locales. Leurs rôles et activités doivent être prises en compte pour se faire une image de la situation générale en Ukraine. Cependant, les allégations de violations des droits doivent toujours être vérifiées. Les problèmes auxquels les gens se heurtent sont de nature généralement socio-économique, mais leur perception est souvent ramenée à une question d'appartenance ethnique, a expliqué la délégation. Les informations dont dispose la délégation sont confirmées et vérifiées. On ne peut certes pas contester l'existence d'infractions au niveau des autorités locales, mais on ne peut en déduire une tendance.

Répondant à des questions concernant la minorité rom, la délégation a indiqué qu'entre 2003 et 2006, plus de 8000 hectares ont été affectés aux Roms vivant essentiellement dans la région de Transcarpathie. Une réserve foncière, des réseaux d'aide médicale ont été créés à leur intention. Leur conditions de vie sont prises en considération. Des efforts sont également consentis au plan de l'infrastructure. Plus de huit mille familles ont bénéficié des aides de l'État, qui accorde en outre des allocations maternité et des allocations par enfant, ainsi que des aides aux mères célibataires et aux familles démunies. Le problème du non enregistrement dans les registres de l'état civil concerne 610 adultes et 471 enfants, soit un pourcentage très faible de la population. Le Gouvernement agit par ailleurs dans le domaine culturel en organisant par exemple un festival d'art rom, rassemblant des artistes de toute l'Europe. En matière d'emploi et de formation professionnelle, le Gouvernement encourage en particulier la création de petites entreprises. Reste un problème réel en matière de recrutement des Roms, qui ne sont pas assez intégrés au marché du travail, a admis la délégation ukrainienne, qui a toutefois souligné que le Gouvernement maintient des relations officielles avec les associations représentatives du peuple rom.

La délégation a fait état de vingt-trois agressions contre des personnes d'origine africaine l'an dernier en Ukraine. Les autorités ont récemment reçu la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), qui a accordé son satisfecit à l'action de l'Ukraine, tout en lui recommandant une meilleure collaboration avec les organisations non gouvernementales. La délégation a déclaré que les cas d'antisémitisme recensés en Ukraine ont toujours été isolés. Les sanctions infligées aux auteurs des actes de vandalisme ou propos antisémites ont été sévères, en particulier contre certaines publications pseudo scientifiques. La délégation a observé que la loi ne facilite pas l'incrimination de la profanation de sépultures, assimilée au «hooliganisme». En matière de prévention, le Gouvernement a décidé d'augmenter le niveau de sensibilisation de la population. Il faut à cet égard avoir conscience du fait que les mentalités n'évoluent que lentement, et que la tolérance dépend en grande partie de la sécurité économique de la population.

Depuis le 1er janvier 2007, on comptait plus de trois cent cinquante communautés religieuses musulmanes enregistrées de Tatars de Crimée, en légère augmentation par rapport à 2006. Il existe encore d'autres communautés non répertoriées. La province de Crimée compte 176 lieux de prière, en augmentation de cinq unités. Les organisations indépendantes disposent, quant à elles, de huit lieux de culte. On compte au total près de 190 imams.

La délégation ukrainienne a indiqué que la représentation des femmes au Parlement (7% actuellement) va être régie par une loi imposant un certain niveau de présence féminine dans les listes des partis. Le Parlement a par ailleurs instauré un Comité de contrôle des droits des minorités composés de 25 parlementaires. Le Parlement est par ailleurs fermement engagé dans le respect des droits de l'homme en Ukraine, contrairement à ce que le rapport peut laisser entendre. Cependant il est vrai qu'aucune femme n'est membre du Conseil des Ministres. Elles sont par contre très bien représentées dans la structure de direction du pouvoir exécutif (jusqu'à 49%), ainsi que dans les organes locaux et centraux. Par comparaison avec les hommes, davantage de femmes occupent des postes administratifs de direction. L'Ukraine prévoit par ailleurs des cours de recyclage professionnel à l'intention des femmes qui souhaitent changer de carrière. Les femmes dotées d'une faible formation peuvent s'adresser au service de l'emploi qui met à leur disposition des formations adaptées. Tous les cours de recyclage sont gratuits.

D'une manière générale, la Constitution pose le principe de l'égalité des chances et des droits socio-économiques entre hommes et femmes. Il a fallu adapter d'anciens textes et en adopter de nouveaux pour donner corps à ce principe. Ainsi le Code du travail impose-t-il désormais des obligations précises aux employeurs. Une autre loi consacre le droit des organisations non gouvernementales d'intervenir lors de la violation de certains droits et de contrôler l'application de la législation nationale. Les autorités s'efforcent par ailleurs de sensibiliser l'opinion au sujet de l'importance de la notion d'égalité entre les sexes, grâce à des séminaires et autres moyens de diffusion de l'information.

Près de 1300 organisations non gouvernementales participent à la réalisation des objectifs du Millénaire au niveau de l'Ukraine. Au niveau de certaines municipalités, l'élaboration de la documentation relative aux objectifs précis est confiée à des organisations féminines, par exemple. En outre, le Gouvernement a préparé un nouveau rapport sur les objectifs du Millénaire pour le développement sous l'angle de l'égalité entre les sexes, avec détermination d'objectifs concrets et de buts précis à atteindre.

La situation des réfugiés est régie par une loi spéciale adoptée en 2001, a encore indiqué la délégation ukrainienne. Il manque toujours un mécanisme d'intégration des réfugiés dans la société. Une nouvelle loi, en cours de rédaction, prévoit l'introduction d'un droit à l'aide humanitaire temporaire pour les personnes ayant déposé une demande d'asile. Une nouvelle commission interministérielle sera en outre chargée d'étudier les questions liées à l'accès des réfugiés au marché de l'emploi. De fait, l'Ukraine manque encore d'expérience dans le domaine de l'accueil des réfugiés. La population éprouve toujours un sentiment de crainte devant les étrangers, cela est indéniable.


Droit au travail, conditions de travail, droits syndicaux, droit à la sécurité sociale

Un membre du Comité a relevé que les sources officielles ukrainiennes font état d'une sous représentation des femmes dans les organes de l'État, contrairement à ce qui a été dit plus tôt. D'après les informations disponibles, la majorité des chômeurs sont des femmes, lesquelles se voient en outre généralement proposer les travaux les moins bien rétribués. Il est possible que des freins à la formation continue soient à mettre en cause. La délégation a été priée de dire si son Gouvernement comptait ratifier les conventions de l'Organisation internationale du travail sur la sécurité au travail et la protection des femmes enceintes.

Des allégations font état de corruption de dirigeants syndicaux et de laxisme de la part de certains inspecteurs du travail, relativement à des accidents survenus dans les mines qui n'ont par ailleurs fait l'objet d'aucune poursuite judiciaire.

Il est également apparu que les conditions de création de syndicats indépendants ne sont pas toujours réunies en Ukraine, des indications faisant état de menaces proférées par des employeurs contre des employés cherchant à s'affilier. Le problème avait d'ailleurs déjà été signalé en 2001 par le Comité. L'une des causes de cette situation est peut-être à chercher dans la qualité de la formation des personnes chargées de l'inspection du travail, a suggéré le Comité. Enfin il semble que l'ombudsman n'accepte pas toujours de recevoir des plaintes de travailleurs salariés estimant leurs droits bafoués. Quelle est la position du Gouvernement s'agissant de la nécessité d'améliorer la protection juridique des travailleurs?

La délégation ukrainienne a précisé que le droit national prévoit la limitation du droit de formation d'un syndicat uniquement en cas de guerre ou de menace à la sécurité nationale. Il existe 125 syndicats en Ukraine et une cinquantaine d'associations nationales et régionales. De l'avis du Ministère des affaires sociales, la création de nouvelles structures ne pose pas de problème particulier. La création d'un nouveau syndicat dépend en premier lieu des autorités administratives locales, les propositions émanant des institutions d'État étant transmises au Ministère des affaires sociales. Le nouveau syndicat est enregistré par la suite au niveau national. On ne peut donc pas dire que le mouvement syndical soit réprimé en Ukraine, au contraire, il se développe. Le Ministère des affaires sociales s'attache à résoudre les difficultés concrètes des personnes travaillant dans ce système, lequel peut certes être encore perfectionné. Il faut noter que les trois régions de production minière bénéficient d'accords-cadres adaptés à leurs circonstances particulières.

La délégation a rappelé que l'Ukraine est un pays indépendant depuis peu, auquel il manque une longue phase de développement institutionnel.

La délégation a aussi indiqué qu'un effort considérable reste à accomplir dans le domaine du renouvellement des infrastructures vétustes héritées de l'ère soviétique, et sources d'accidents mortels. L'inspection du travail doit être parallèlement renforcée. Or il est vrai que l'action de l'État a, jusqu'ici, été davantage concentrée sur l'aide sociale, au détriment de l'inspection du travail, une tendance qui va changer dès 2007. Entre-temps, l'inspection du travail a tout de même dénoncé de nombreux cas d'infractions aux lois sur le salaire minimal.

Par ailleurs il a été observé que le PNB de l'Ukraine a chuté durant la période sous examen. Quelles sont les conséquences de cet état de fait pour les assurances sociales? Les budgets des fonds sociaux représentent environ un milliard de dollars, avec un PIB de cent milliards, a répondu la délégation. L'insuffisance des fonds n'est donc pas imputable à l'évolution du PIB. Le problème est à chercher dans la transition difficile du système d'économie planifiée de l'ère soviétique.

La délégation a répondu à une question sur l'applicabilité de la loi sur l'emploi des handicapés en précisant que la loi prévoit un quota de 4% sur les effectifs des entreprises réservés aux personnes handicapées. Cette disposition a été combattue par une vaste coalition d'intérêts privés, mais le Gouvernement a tenu bon et a maintenu ce principe. Il va cependant de soi que certains secteurs (mines, sidérurgie lourde) sont moins propices à l'emploi des personnes handicapées. Près de 400 000 personnes handicapées travaillent actuellement en Ukraine. Des programmes de réinsertion et de rééducation professionnelles sont organisés à leur intention. Un accord fructueux a d'ailleurs été passé dans ce domaine avec l'Organisation internationale du travail et un centre de rééducation autrichien. Un réseau ukrainien assure des formations au niveau des régions, sous la coordination d'un Centre national.

Répondant à des questions sur le paiement de salaires inférieurs au minimums légaux, la délégation ukrainienne a indiqué que la loi définit quels sont les minimums vitaux en fonction d'une méthode de calcul tenant compte des prix d'un panier de biens. Les montants sont modulés en fonction de l'âge et de la situation des personnes au plan de l'emploi, et révisés chaque année. Les observations statistiques montrent qu'en une année le nombre de travailleurs touchant moins que le revenu minimal a diminué. En outre, on constate une multiplication des catégories de revenus de la population


Protection de la famille

Le Comité contre la torture a, dans ses dernières recommandations, pris note du faible taux de dénonciation et de sanction des violences familiales devant les tribunaux, a relevé un membre du Comité. Des témoignages font aussi état de la difficulté pour les victimes à saisir la milice et le parquet. Quand le projet de loi relatif à la violence familiale sera-t-il examiné, et prévoit-il une criminalisation des actes de violences familiales.

Le Rapporteur spécial sur la vente des enfants a dit que le nombre des enfants de la rue en Ukraine augmente: ils seraient ainsi douze mille dans la seule ville de Kiev. Que font les autorités municipales?

À ce propos, la délégation ukrainienne a évalué à sept mille le nombre total des enfants ukrainiens vivant dans la rue. Il se peut que les statistiques soient inexactes et que certains enfants soient comptés plusieurs fois. Quoi qu'il en soit un programme national a été adopté en 2006 de secours aux enfants privés de soins parentaux. L'État intensifie son contrôle du respect des obligations parentales. Les services sociaux et de l'enfance, le Ministère de l'intérieur ont organisé en 2006 80 000 visites de foyers, ce qui a permis de détecter près de 7000 familles défaillantes. Plus de 3000 décisions de déchéance des droits parentaux ont été rendues en 2006. Ces résultats s'expliquent non par une recrudescence du phénomène, mais par la décision prise en 2005 d'agir de manière plus systématique pour réaffirmer les devoirs parentaux. Les enfants abandonnés sont accueillis dans 95 foyers ou, de plus en plus souvent, placés dans des familles. Le Gouvernement agit donc dans une double optique de prévention et d'aide aux enfants sans soins.

Plus de 300 000 enfants orphelins vivent dans des orphelinats ou dans des familles. Les allégations de mauvais traitements reçus dans les orphelinats / internats sont exagérées, a estimé la délégation. L'État tente cependant de réduire le nombre d'enfants internes et de mieux tenir compte de leurs besoins.

Mille cinq cent procès ont été intentés contre des parents ayant manqué à leurs devoirs. Cependant, la loi ne prévoit que des poursuites civiles pour ce type de délit. Une loi amendée est en cours d'examen au Parlement, qui prévoit l'introduction dans le Code pénal de dispositions relatives aux violences domestiques. Les chances d'adoption de ce texte sont bonnes.


Santé

Un membre du Comité a demandé des précisions sur la stigmatisation et la discrimination dont sont victimes les personnes vivant avec le sida, en particulier le groupe des 15-29 ans. Le Comité a aussi demandé des détails sur la stratégie concrète du Gouvernement en matière de prévention de la tuberculose et du sida, compte tenu de la propagation rapide de ces maladies. Le sida en particulier touche une personne sur 70 en Ukraine.

Répondant à des questions sur l'organisation de la santé, la délégation ukrainienne a indiqué que les indices concernant le financement de la santé montrent un doublement des dépenses, en termes de pourcentage du PNB, à plus de 3% en 2007, qui se confirmera en 2008. Par habitant, les dépenses ont été multipliées par cinq depuis 2001, à environ 100 dollars. La médecine est gratuite pour une bonne partie de la population. Cependant, la Constitution précise que la gratuité dépend des capacités budgétaires de l'État consacré à la santé. Certains domaines sont dans ce contexte prioritaires: la maternité, la lutte contre la tuberculose et le sida en particulier.

Des programmes-cadres d'action sanitaire ont permis de parvenir à une diminution, depuis 2002, du taux de mortalité et d'invalidité. L'application du programme de santé génésique a permis de faire chuter le taux d'avortement de 27% à 18%. La mortalité due à la tuberculose est globalement en régression depuis 2006, après une période d'augmentation légère entre 2001 et 2005. Cette tendance baissière se confirme en 2007 jusque dans les zones rurales. L'État continue cependant d'accorder toute son attention au problème de la tuberculose.

La délégation a aussi reconnu que des difficultés demeurent dans l'accès des populations rurales à la santé. Le nombre d'établissements de santé y est en effet inférieur par rapport à la densité de population. Pour remédier à cette situation, l'État fournit une aide médicale par l'intermédiaire de «brigades de médecins» dispensant des soins ambulatoires dans les provinces.

L'une des priorités de la politique de santé nationale est la lutte contre le sida, qui bénéficie d'une double stratégie de prévention de la maladie et de soutien aux personnes séropositives et malades, dans le cadre d'un programme qui se poursuivra jusqu'en 2011. L'Ukraine met aussi en œuvre, depuis 2004, un plan quinquennal dont les principaux résultats ont été l'ouverture de trente-cinq centres régionaux de diagnostic et de soins. Depuis 2001, l'Ukraine met des médicaments antirétroviraux à la disposition de 60 000 malades. En 2007, le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose a octroyé un crédit pour la lutte contre le sida en Ukraine.

Les services spécialisés de l'État ont reçu en 2006 trois mille requêtes d'assistance après des violences domestiques. L'État a lancé un programme de responsabilisation parentale et de prévention dans les familles présentant des risques de violence contre les enfants et les femmes. Si les mesures de prévention et d'accompagnement social se révèlent insuffisantes, les victimes de violence sont accueillies dans vingt-deux centres d'hébergement et de conseil. Sept cent cinquante femmes et enfants ont été accueillis en 2006 dans ces centres. Les autorités ont aussi mis sur pied des lignes d'appel gratuites et anonymes. Un service de réaction d'urgence a été instauré par le Ministère de la famille, mobilisant tous les services publics, auxquels s'ajoutera probablement un numéro d'urgence à deux chiffres d'ici à fin 2007.

Environnement

La «Loi fondamentale sur l'environnement» guide l'action de l'État en matière de protection de l'environnement, indiqué la délégation. L'État a fixé des objectifs chiffrés de réduction de la pollution atmosphérique qui sont en passe d'être atteints. La superficie consacrée aux parcs naturels est en augmentation, l'objectif étant d'atteindre 7,5% de la superficie totale du pays. La poursuite de cet objectif a cependant pris du retard. La diminution de la production des gaz à effets de serre passe notamment par une modernisation de l'appareil industriel national, avec en point de mire les objectifs fixés par le Protocole de Kyoto.


Logement

La Constitution affirme le droit des citoyens au logement et une aide au logement en cas de besoin. Mais la réalité sur le terrain est différente, a souligné un membre du Comité. Ainsi, de nombreux Roms et certains Tatars en particulier vivent dans conditions extrêmement précaires. Dans quelle mesure les expulsions forcées sont-elles pratiquées dans le respect des principes du Pacte?

D'une manière générale, la Constitution garantit le droit au logement, dans des termes repris d'ailleurs tels quels du Pacte, a indiqué la délégation. Cependant il faut encore que les programmes d'application soient financés par des ressources publiques, a admis la délégation.

La délégation a indiqué que la précarité des conditions de vie des Tatars de Crimée fait l'objet de mesures correctives de la part de l'État. L'Ukraine a agi sur une base volontaire pour faire revenir 250 000 Tatars antérieurement et injustement déportés. Un programme spécial a été adopté l'an dernier pour le financement de la réadaptation de ces populations. Il prévoit des mesures favorables à la création d'emplois et d'entreprises, ainsi qu'à la vie culturelle. L'État a consenti beaucoup d'investissements d'équipement en seize ans: 440 000 m2 de logement, 2000 nouvelles places dans les écoles, 853 kilomètres de canalisations d'eau, etc. D'autres investissements importants sont prévus dans le domaine du logement et de la construction d'infrastructures telles qu'écoles et cliniques, notamment. Près de 78 000 Tatars de Crimée se sont déjà vus attribuer des parcelles agricoles, sans compter des cas de «réappropriation spontanée». Cependant la question foncière reste complexe. Les pouvoirs des autorités locales, qui sont chargées des modalités de la réinstallation des personnes déplacées, devront être revus à la hausse; les organes du pouvoir central ne sont pas directement concernés par cette organisation. Une indemnisation pour la confiscation des terres lors des déportations est à l'étude. Reste encore à résoudre la question de la nationalité d'autres personnes rapatriées appartenant des minorités autres que tatar. Un registre général des personnes concernées sera établi. La loi sur les minorités ethniques est en cours de révision dans le sens de l'octroi de la nationalité ukrainienne aux Tatars.

Au sujet des Roms, la délégation a indiqué que les services communautaires de la région transcarpathique font l'objet d'une réorganisation. Des services publics ont été mis sur pied au profit des Roms (état civil par exemple), un effort important a été fait pour installer de nouvelles lignes téléphoniques. Les expulsions forcées de Roms ne sont pas attestées. Quant aux évacuations de Tatars dont il a pu être question, il s'agit probablement de la déportation de 1944, ou encore d'évacuations résultant d'une procédure de saisie.


Traite des êtres humains

Un membre du Comité a demandé quel type de campagne de sensibilisation à la traite des êtres humains le Gouvernement envisageait de lancer. Compte tenu de l'échec des mesures prises à ce jour, peut-être l'Ukraine devrait-elle identifier le «chaînon manquant» de son action et s'attacher à prendre des mesures concrètes dans ce domaine.

La délégation ukrainienne a constaté que l'Ukraine n'échappe pas aux fléaux de prostitution et de la pornographie impliquant des enfants. Le Code pénal réprime la diffusion de pédopornographie. Cent soixante et onze personnes ont été inculpées à ce titre, plusieurs centaines d'autres pour incitation à la prostitution. L'État a lancé une action de sensibilisation et de formation des services de la milice concernés par la protection de la jeunesse. Un travail similaire est accompli auprès des médias et des intervenants de la société civile concernés. Cette année, vingt mille visites ont été organisées dans les familles «à risque», celles dont les enfants risquent de se retrouver à la rue et donc concernés au premier chef par la prostitution. Certaines raisons de l'apparition des phénomènes d'exploitation et de prostitution des enfants sont connues: il s'agit de la nécessité économique qui étreint les familles pauvres. En 2006, 366 personnes ont été jugées pour des faits liés à la traite de personnes.



Droit à l'éducation, droit à la vie culturelle

Un membre du Comité a voulu savoir dans quelle mesure la gratuité de l'enseignement s'applique à tous les niveaux, et si l'éducation est véritablement ouverte à toutes les classes sociales et toutes les minorités.

La délégation ukrainienne a indiqué que la gratuité est assurée dans les écoles d'État ainsi que dans les établissements territoriaux. En 2000, les établissements d'enseignement supérieur gratuit comptaient 30% des étudiants inscrits. Des dispositions ont été prises ultérieurement pour fixer à 50% la proportion des étudiants inscrits gratuitement. Au niveau des institutions locales, le taux est fixé à 52%.

Au niveau moyen, l'enseignement général est obligatoire et gratuit, accessible donc à toutes les couches de la population. La qualité de l'enseignement entre régions est déterminée par la qualité de la formation des enseignants, qui a des répercussions pour les élèves. Les régions rurales moins développées sont moins bien loties au niveau du matériel que les grands centres industriels. Les programmes d'équipement des régions dépendent des affectations budgétaires et de l'existence ou non d'élites urbaines, qui ont accès aux moyens d'information modernes.

Les Tatars de Crimée ne bénéficient pas de quotas de place dans les universités. Des quotas ont par contre été mis en place pour les personnes handicapées et les victimes de la catastrophe de Tchernobyl par exemple.

Répondant à une autre question, la délégation a indiqué que l'enseignement supérieur ukrainien est encore partiellement calqué sur le système russe. Simultanément, des mécanismes ont été mis en place pour rapprocher l'Ukraine du système d'organisation des études supérieures dit «de Bologne».

Une autre question ayant porté sur le droit des minorités à recevoir un enseignement dans leurs langues, la délégation a fait état de l'existence de programmes spécifiques à l'intention de 3300 Tatars de Crimée en particulier, dans un certain nombre des lycées généraux et techniques. Par ailleurs, l'État a lancé un programme de reconstruction et de rénovation de six lycées où sera dispensé un enseignement en langue tatare. D'autres projets scolaires sont en cours avec l'aide de partenaires internationaux, notamment de la Turquie. Des manuels scolaires spécialisés sont en cours de préparation ou de révision, sous la supervision de l'Académie ukrainienne des sciences.

La délégation a indiqué que la Constitution ukrainienne appelle à la préservation des langues et cultures minoritaires. L'Ukraine ne donne pas encore de définition des «populations autochtones». La loi prévoit que toute personne qui n'est pas ukrainienne de souche peut bénéficier du statut juridique de «minorité». Le russe, le roumain, le hongrois, le tatar, le grec moderne et le yiddish, notamment, sont des langues d'enseignement autorisées en Ukraine. La ratification de la Convention-cadre sur les minorités nationales est intervenue en janvier 2007, celle de la Charte sur les langues régionales et nationales en 2003, a aussi précisé un membre de la délégation.

Pour remédier aux revenus insuffisants des enseignants au niveau universitaire, tels que mentionnés par un membre du Comité, l'Ukraine procède à une révision des barèmes de la fonction publique, a indiqué la délégation. Les salaires ont ainsi augmenté de 40% dans le premier semestre 2007. Cette revalorisation se poursuivra en 2008.

On mesure des différences d'accès aux écoles rurales, de montagne et urbaines. Un programme de transports scolaires et d'accueil en internat est prévu pour certaines régions. L'équipement en matériel informatique des écoles ukrainiennes est garanti quasiment à 100%, a assuré la délégation.

Conclusion de la délégation

MME LYDIA DROZDOVA, chef de la délégation ukainienne, a indiqué que d'autres réponses écrites seront apportées aux questions orales qui n'ont pu trouver de réponses aujourd'hui. Les recommandations du Comité sur les mesures prises jusqu'ici par l'Ukraine pour la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels figureront dans le rapport de l'ombudsman. L'Ukraine est tout à fait consciente qu'elle doit poursuivre ses efforts dans ce domaine, a enfin déclaré Mme Drozdova.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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