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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DU COSTA RICA

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné hier et ce matin le rapport périodique présenté par le Costa Rica sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport du Costa Rica qu'il rendra publiques à la clôture de la session, le 23 novembre prochain.

Mme Gioconda Úbeda, chef de la délégation du Costa Rica, a indiqué dans sa présentation que l'élaboration du rapport a été confiée à un groupe interministériel, en concertation avec les représentants de la société civile, y compris les groupes défendant les populations vulnérables. D'une manière générale, depuis 1989, le Costa Rica a connu des changements substantiels des points de vue juridique, économique et social. Durant la période couverte par le rapport, le taux de mortalité, le taux de scolarisation primaire et secondaire, l'espérance de vie ont tous fait des progrès considérables. Le système politique est maintenant caractérisé par une ouverture démocratique, le multipartisme étant devenu la règle, a ajouté l'ambassadrice costaricaine. Le Costa Rica connaît actuellement un «avantage démographique» lié à la jeunesse de sa population. Mais cette jeunesse doit être bien formée, faute de quoi le pays risque un renversement de tendance; c'est pourquoi les autorités souhaitent augmenter encore les dépenses sociales et celles liées à l'éducation.

La délégation du Costa Rica était également composée de Mme Laura Thomson, Représentante permanente du Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève; de Mme Alexandra Segura, Ministre conseillère; et de Mme Eugenia Gutiérrez, conseillère juridique. Elle a répondu à de nombreuses questions posées par les membres du Comité concernant en particulier les mesures concrètes prises par le pays dans la lutte contre la discrimination sexuelle, contre la pauvreté et pour l'intégration des migrants et des réfugiés; le respect des droits économiques, sociaux et culturels des populations autochtones; la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels; ou encore les conséquences, pour la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels des Costaricains, de l'adhésion au traité de libre-échange avec les États-Unis (CAFTA). À cet égard, la délégation a affirmé que cet accord sera le moteur de la croissance et du développement costaricains et que le Gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures correctives nécessaires pour toutes les populations dont les droits seraient lésés et pour garantir le respect des droits démocratiques de tous les citoyens.


Le Comité entame cet après-midi, à 15 heures, l'examen du cinquième rapport périodique présenté par l'Ukraine (E/C.12/UKR/5), qui doit se terminer en fin de journée demain.


Présentation du rapport du Costa Rica

MME GIOCONDA ÚBEDA, ambassadrice chargée de missions spéciales au Ministère des affaires étrangères et du culte du Costa Rica, a présenté le rapport de son pays, qui porte sur la période de 1990 à 2004. L'élaboration du rapport a été confiée à un groupe interministériel, en concertation avec les représentants de la société civile, y compris les groupes défendant les populations vulnérables (femmes, migrants). Le rapport initial, présenté en 1989, était un document purement juridique, omettant les aspects politiques liés à l'application des droits. Les observations formulées à cet égard par le Comité ont été prises en compte dans la préparation du rapport actuel. D'une manière générale, depuis 1989, le Costa Rica a connu des changements importants des points de vue juridique, économique et social. Sa population a ainsi augmenté d'un million d'âmes, soit près de 25%, 11% des résidents étant d'origine étrangère. Le taux de mortalité est en diminution, a par ailleurs fait valoir Mme Úbeda. Les populations des zones urbaines sont devenues majoritaires. La vie économique s'est concentrée dans le secteur tertiaire, avec une dépression concomitante du secteur agricole. La production s'est diversifiée et le tourisme est maintenant l'une des principales sources de revenu. Les années 1990 ont été aussi marquées par une augmentation de la pauvreté, un contrecoup de la crise de la dette. Une importante politique d'investissements sociaux dans l'éducation, le social et la santé (chacun recevant un tiers des investissements publics) a permis de réduire l'incidence de cette pauvreté. Durant la période concernée, le taux de mortalité, le taux de scolarisation primaire et secondaire, ainsi que l'espérance de vie ont tous fait des progrès considérables. Enfin, le système politique est caractérisé par une ouverture démocratique, le multipartisme étant devenu la règle. Un autre axe de l'action de l'État est la réduction du secteur du travail informel et la participation des femmes au marché de l'emploi.

Le Costa Rica jouit actuellement d'un «avantage démographique» lié à la jeunesse de sa population, a poursuivi Mme Úbeda. Cependant, cette jeunesse doit être bien formée, faute de quoi le pays risque un renversement de tendance dès 2045. Les autorités souhaitent donc augmenter encore davantage leurs dépenses sociales et celles liées à l'éducation. Dans ce secteur, des mesures doivent être prises pour améliorer les résultats et le taux de fréquentation scolaire. Le travail des femmes est aussi un défi considérable, de même que l'application du principe d'égalité salariale. Dans la lutte contre la pauvreté, le Costa Rica a mis l'accent sur les enfants, les personnes âgées en particulier, ce qui a permis une diminution de 3% du taux de pauvreté au niveau national (9% dans les régions ayant fait l'objet de mesures spéciales à cet égard).


Le rapport périodique du Costa Rica (E/C.12/CRI/4 - deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques présentés en un seul document) couvre une période de 15 années, allant de 1990 à 2004. Cette rétrospective, qui insiste sur la période la plus récente, dresse le tableau d'une période de réussites et d'échecs, et du rattrapage des dernières années grâce aux efforts d'investissement déployés par l'État en matière sociale. Il est également évident que, ces quinze dernières années, le Costa Rica a élargi et approfondi les droits civils, passant de la reconnaissance des libertés publiques et des droits civils de la personne à la mise en place des mécanismes nécessaires pour que les droits politiques, économiques, sociaux et collectifs aient leur reflet dans la politique nationale. La caractéristique principale de la réforme de l'État à laquelle le Costa Rica a procédé dans les années 1990 est le large développement de la protection et la consécration juridique des droits de l'homme. Le rapport indique notamment que le pays doit augmenter son budget social et rationaliser les ressources existantes. Pour cela, il doit résorber le déficit, qui provoque à la fois l'inflation et la réduction du pouvoir d'achat des Costaricains. En outre, l'État doit redéfinir et, dans certains domaines, concevoir à neuf, les politiques nationales s'étendant au-delà du mandat quadriennal des gouvernants. Le rapport reconnaît un manque de coordination entre certaines administrations publiques qui œuvrent dans le même domaine ou s'occupent des mêmes populations est évident. Est également apparue la nécessité que certains secteurs du pouvoir exécutif et de l'administration décentralisée fassent un meilleur usage et profitent mieux des ressources dont ils disposent, qu'elles soient financières ou humaines. Il est nécessaire d'incorporer l'axe transversal des droits de l'homme dans le Plan national de développement défini tous les quatre ans par le Gouvernement. Enfin, le Costa Rica doit investir davantage dans la formation des agents de la fonction publique en insistant sur les droits des citoyens, ce qui comporte un changement structurel dans le comportement des administrations publiques. Grâce à l'expérience acquise avec l'élaboration du présent rapport, on peut affirmer que cet investissement se traduirait par une meilleure gestion de la fonction et de l'administration publiques, avec des effets positifs sur le plan des droits des Costariciens.

Le rapport fait valoir d'importants progrès dans le domaine de la santé, qu'attestent les indicateurs clés que sont, par exemple, l'espérance de vie et la mortalité infantile. Ces succès sont le résultat d'un effort national soutenu pendant des dizaines d'années pour développer une politique de sécurité sociale à couverture universelle et consacrer un budget social considérable à la santé. Les services de santé du pays répondent à trois principes fondamentaux: universalité, solidarité et viabilité financière. Dans le domaine de l'enseignement aussi, le pays a avancé mais il doit encore résoudre de grandes difficultés. Il faut cependant savoir qu'en matière de fréquentation des établissements primaires, le Costa Rica a déjà atteint l'Objectif du millénaire. Par contre, les abandons scolaires en cours d'année posent un problème sérieux, auquel le pays veut faire face. Pendant les années 90, ces abandons ont augmenté de manière sensible, jusqu'à atteindre un point maximal de 16% en 1994, pour repasser ensuite à 11,4% en 2004, en raison des efforts déployés par le Ministère de l'éducation. La caractéristique principale de la réforme de l'État des années 1990 est le large développement de l'autorité et de la protection juridique des droits de l'homme, avec une série de lois protégeant directement les droits des groupes spécialement vulnérables: l'enfance et l'adolescence, les personnes âgées, les handicapés et les femmes. Cette amélioration de la protection des droits de l'homme a été marquée par la création en 1992 du Service de défense des habitants qui, de sa création à 2001, a ouvert 396 dossiers. Mais, du point de vue de la politique publique, la législation costaricaine est incomplète: elle reconnaît les droits et les obligations de l'État mais laisse au Gouvernement la définition de la base matérielle et institutionnelle de l'accomplissement de ses obligations. Le rapport souligne en outre le rôle d'une importance considérable joué par la Chambre constitutionnelle dans la vie costaricaine, puisqu'elle est devenue l'organe qui protège par excellence les droits de l'homme quand ceux-ci font l'objet d'une violation quelconque. Il faut dire que cette juridiction a produit au cours de son histoire une jurisprudence ample (plus de 1000 décisions par an depuis 2000) et transparente qui consacre des notions de protection qui découlent même du régime international de protection des droits de l'homme.


Examen du rapport

Cadre général d'application et dispositions générales du Pacte; non-discrimination

Un expert du Comité s'est félicité que le Pacte l'emporte sur la législation et la Constitution nationales, et peut être invoqué directement devant les tribunaux. Des interrogations demeurent cependant quant aux mesures prises pour lutter contre la discrimination raciale et pour la sanctionner. La loi criminalise-t-elle ce type de comportement? Dans quelle mesure les recommandations du Comité sont-elles prises au sérieux par l'administration costaricaine et incluses dans les politiques, a demandé un autre expert. Un expert a voulu connaître quelles mesures concrètes ont été prises, ou vont être prises, pour améliorer l'égalité entre les sexes, en termes de budget par exemple, ou de discrimination positive.

Un expert a regretté que le rapport ne contienne pas davantage d'exemples concrets illustrant la situation au Costa Rica. Il a notamment été observé que le référendum sur l'adhésion à l'Accord de libre-échange entre la République dominicaine, l'Amérique centrale et les États-Unis (CAFTA) a été emportée avec une marge très faible. L'adhésion nécessitera l'adoption de lois d'accompagnement qui risquent de compromettre les droits de certaines catégories de la population. Quelles mesures le Gouvernement va-t-il prendre pour indemniser ces victimes; dans quelle mesure l'adhésion risque-t-elle d'entraîner des restrictions dans le domaine de la propriété intellectuelle, avec des conséquences probables dans la production de médicaments génériques en particulier; quelles évaluations le Gouvernement a-t-il fait de l'impact de cet accord de libre-échange, ont voulu savoir plusieurs experts du Comité.

Des précisions ont été demandées sur les «réserves autochtones» et sur le respect des droits économiques, sociaux et culturels des nombreuses populations autochtones que compte le pays. Des informations portées à la connaissance du Comité laissent croire que le Conseil représentatif représente mal les intérêts de ces populations. D'autres questions ont porté sur les populations d'origine africaine, localisées sur la côte et qui ressentent une discrimination.

D'autres questions ont porté sur l'intégration et l'assimilation des migrants et des réfugiés au Costa Rica, en particulier sur l'état de préparation d'une nouvelle loi sur la question. Une experte du Comité a observé que le rapport cite (au paragraphe 297) au moins une disposition de la loi semblant justifier une forme de discrimination à l'embauche. Une autre experte a déploré que la lecture du rapport montre que certaines des préoccupations formulées par le Comité il y a dix-sept ans restent toujours d'actualité.

Un expert s'est félicité de ce que le Costa Rica ait procédé à une évaluation très pragmatique et particulièrement franche des problèmes qu'il rencontre. Les grands pays devraient s'inspirer de telles expériences.

Un membre du Comité a voulu savoir pourquoi le Gouvernement avait supprimé le Ministère de la condition féminine, une décision un peu paradoxale compte tenu des objectifs affichés. La délégation a fait savoir que l'INAMU avait quasiment rang de ministère, et qu'il n'y avait donc pas de recul. Par ailleurs, la délégation a indiqué que le Costa Rica a ratifié le Protocole de San Salvador, qui traite de sujets proches de ceux du Comité des droits économiques, sociaux et culturels. La situation politique du Costa Rica est par ailleurs actuellement peu propice à la ratification d'autres instruments internationaux relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels.

Un expert du Comité a évoqué le rôle néfaste de la corruption économique et politique dans la jouissance des droits économiques et sociaux et demandé quelles mesures le Gouvernement a pris dans ce domaine.

La délégation du Costa Rica a insisté sur les progrès accomplis pendant la longue période sous examen, avec de bons résultats en termes de lutte contre la pauvreté. Les défis identifiables sont répertoriés dans le rapport. Il faut remettre les problèmes rencontrés dans leur juste contexte. En ce qui concerne les progrès dans le domaine de l'équité, il faut se rappeler que cette démarche est progressive et doit tenir compte des facteurs culturels. En ce qui concerne les migrants, le problème n'est pas lié à la xénophobie, même si la loi votée l'an dernier est malheureuse à certains égards. Le Gouvernement a demandé aux grandes institutions internationales de l'aider à ajuster cette loi aux réalités costaricaines. D'autres déclarations malheureuses du nouveau ministre de la sécurité publique ne remettent pas en cause la vocation du Costa Rica en matière d'accueil et d'asile. Le Costa Rica a aussi renforcé ses mesures d'intégration sociale et économique des réfugiés. Le Costa Rica ne connaît pas de discrimination particulière à l'égard des populations d'origine africaine, a ajouté la délégation.

L'Accord de libre-échange CAFTA a été accepté par le Costa Rica dans le prolongement de la politique d'ouverture économique poursuivie par le pays depuis plusieurs années, a déclaré la délégation. La question demeure des incidences négatives de cet accord sur certains secteurs, positives sur d'autres, avec la nécessité de prévoir des mesures compensatoires. Ainsi, les barrières tarifaires devront tomber, ou au moins diminuer, avec des conséquences en termes de niveau de vie. Dans le même temps, il faudra prévoir des mesures de formation. Reste que le dialogue national qui s'est engagé autour de ces processus n'a pas été aussi fructueux qu'il aurait fallu, a convenu la délégation. L'an dernier, des mesures concrètes ont été prises en faveur des secteurs les plus précaires pour réduire les niveaux de pauvreté. La croissance économique assortie de développement humain et de programmes sociaux est cependant la solution choisie par le Costa Rica pour lutter contre la pauvreté et améliorer le développement humain.

D'une manière générale, les effets négatifs du traité de libre échange ne doivent pas occulter ses effets positifs, et vice-versa. Le Costa Rica est le dernier pays à avoir ratifié le CAFTA (2006). Le système national veut que ce genre de décisions ne puissent être prises qu'après mûre réflexion. C'était l'objet du référendum, processus participatif qui renforce encore la démocratie au Costa Rica. L'économie du pays est ouverte et tournée vers l'extérieur, une attitude qui garantira sa croissance pour autant que l'éducation notamment bénéficie d'investissements continus. Il faut relever que de nombreuses entreprises étrangères attendaient les résultats du référendum pour investir au Costa Rica, ce qui commence déjà à se concrétiser. L'Accord n'est cependant pas considéré comme la panacée et ses effets éventuels sur le système de sécurité sociale devront être surveillés avec vigilance par des autorités bien conscientes des enjeux. Le secteur potentiellement le plus vulnérable est l'agriculture. Mais c'est aussi l'agriculture qui peut profiter le plus de la suppression des tarifs douaniers aux États-Unis.

Le Costa Rica avait tenu compte des précédentes observations du Comité dans l'élaboration du présent rapport, qui a duré plus de deux ans, a assuré la délégation. Des lois ont été adoptées pour aider à la réalisation des droits, par exemple en matière de religion. Le droit a, dans ce cas, suivi l'évolution des idées dans la société.

La délégation a déclaré que l'égalité entre hommes et femmes est assurée par une politique nationale pour le respect de l'égalité, qui s'étendra sur dix ans. Six objectifs stratégiques transversaux le sous-tendent. L'Institut national de la femme (INAMU), mis sur pied avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), apporte un changement important pour le Costa Rica dans ce domaine, tout comme l'adoption de la loi sanctionnant les violences contre les femmes. Parmi d'autres mesures concrètes prises par le pays, la délégation a notamment attiré l'attention sur la réforme du code de travail en ce qui concerne le personnel domestique, la création d'une unité spécialisée dans l'égalité des sexes au Ministère du travail, l'ouverture de services spécialisés au niveau des municipalités, l'augmentation des salaires de certains emplois non qualifiés (domestiques par exemple), la formation des magistrats. En outre, vingt-six projets de lutte contre la pauvreté des femmes ont été lancés au niveau national, avec comme objectif la réinsertion sur le marché du travail. Cette action, qui portera ses fruits dans le moyen terme, est un processus dont le succès dépend du changement des mentalités. À ce stade, il convient de relever que les femmes ont une place de plus en plus importante dans la vie active. Les obstacles qui demeurent doivent encore être levés, et il est clair que la formation jouera un rôle prépondérant à cet égard, a estimé la délégation.

Concernant la primauté du Pacte sur le droit national, la délégation a indiqué que le Costa Rica a introduit deux changements importants dans son système juridique, le recours en habeas corpus et le recours en amparo. Le rapport donne trois exemples de jugements rendus dans des affaires ayant trait à la santé et à l'emploi. La Cour constitutionnelle fait référence au Pacte dans ses jugements dans des affaires économiques, sociales et culturelles, a fait valoir la délégation.

Des travaux sont en cours pour introduire des changements législatifs importants au bénéfice des autochtones, avec une participation à la définition des politiques de santé et d'éducation, a souligné la délégation. Les réserves où vivent les autochtones correspondent à des terres gérées en commun par ces populations, où elles sont en mesure de gérer leurs affaires selon leurs propres méthodes et tradition. La représentativité de la CONAI (Comisión Nacional de Asuntos Indígenas) est en effet sujette à caution, a reconnu la délégation, qui a assuré le Comité que les moyens de réformer cette institution sont à l'étude. La représentation au Parlement n'a jamais vraiment fait l'objet de débat, a-t-elle poursuivi. La fragmentation des collectivités autochtones a probablement fait obstacle au dépôt d'une candidature unifiée. Des candidatures isolées de femmes autochtones sont par contre à signaler, y compris au niveau du Parlement. La discrimination raciale n'est de loin pas systématique au Costa Rica, a assuré la délégation, même si des progrès sont à réaliser. Il n'existe pas de norme concrète contre un délit de discrimination. Cependant, il reste possible de réprimer de tels actes en faisant appel au principe de l'égalité. D'autre part, il est assez facile de faire recours à la Chambre constitutionnelle. Les personnes qui n'obtempèrent pas aux injonctions de cette Chambre dans une affaire de discrimination sont passibles de sanctions pénales et civiles. En outre, un projet de loi qui va bientôt être soumis au Parlement vise à inscrire dans le droit que le Costa Rica un État multiculturel.

En 1989, un programme de régularisation des personnes en situation illégale a permis de donner des papiers à 150 000 personnes (3% de la population du pays). Les étrangers ont quasiment les mêmes droits que les Costaricains dans les domaines notamment de la santé et de l'éducation. D'un point de vue pratique, le Costa Rica garde ses portes ouvertes. Le rapport mentionne un article de loi qui semble justifier la discrimination à l'embauche, a reconnu la délégation en réponse à une question, mais a souligné que cette disposition a été attaquée en justice et déclarée anticonstitutionnelle. Le Code du travail contient depuis 2001 un chapitre intitulé «non-discrimination», a-t-elle précisé.

En réponse à une autre question, la délégation a déclaré que son pays est confronté, comme d'autres, au problème de la corruption. Deux scandales ont ébranlé le pays il y a deux ans, deux anciens Présidents de la République étant poursuivis dans le cadre de ces affaires. Un organe indépendant a été institué pour enquêter sur les allégations de corruption et en poursuivre les responsables. La corruption existe, mais on ne peut dire qu'elle est généralisée à tous les niveaux. Les mécanismes juridiques existent pour lutter contre ce phénomène. Les fonctionnaires sont tenus de déclarer tous les détails relatifs à leurs possessions matérielles, ce qui permet de déterminer des changements de situation problématiques. La délégation a par ailleurs indiqué que la part des prêts internationaux dans le secteur de la santé représente moins d'un pour cent des investissements publics: les risques de corruption sont réduits d'autant.

Droit au travail, droit d'association, droit à la sécurité sociale

Un membre du Comité a demandé quelles mesures le Gouvernement avait prises pour réduire les disparités de revenus entre habitants. Quelles sont les raisons du fort taux de chômage des femmes au Costa Rica, a-t-il aussi été demandé. D'autres questions ont porté sur le statut des Costaricains d'origine africaine sur le marché de l'emploi; sur les garanties données par le Code du travail sur l'accès des migrants au marché du travail; sur les mesures positives prises pour l'emploi des jeunes, des personnes handicapées (dont 69% sont au chômage, selon le rapport), des femmes occupant des emplois très peu qualifiés; sur le respect de la loi sur les conditions de travail; sur l'ampleur de l'exploitation économique des enfants (travail forcé). En matière de sécurité sociale, un expert du Comité a souligné l'utilité des statistiques ventilées, qui permettent de mesurer les progrès accomplis. Par ailleurs, un expert a noté que le Costa Rica n'a pas ratifié la Convention de l'OIT sur la protection de la maternité, une décision que le rapport n'explique pas. Un autre expert a demandé si la décentralisation des hôpitaux et cliniques lancée il y a maintenant neuf ans avait donné des résultats positifs au point de vue de la qualité. Dans quelle mesure le modèle de sécurité sociale européen, auquel le rapport compare le système costaricain, peut-il s'appliquer à un pays en voie de développement, a-t-on voulu savoir. Par ailleurs un expert a estimé que la diminution du nombre des personnes non assurées en quatorze ans n'est pas très élevée. Un expert a demandé à la délégation à quelles causes on devait imputer l'exode rural massif que l'on constate au Costa Rica. En matière de droit à la santé, un expert a voulu savoir comment les dispositions du Pacte ont été mises en application dans le cas précis cité dans le rapport. Un autre expert a demandé si les «zones franches» au Costa Rica étaient soumises au droit du travail dans toute son étendue.

Des membres du Comité se sont interrogés sur les mesures adoptées en matière de lutte contre le chômage, sur la fixation d'objectifs et sur les réussites obtenues dans ce domaine. Une autre question a porté sur l'impact du déclin du secteur agricole au profit des services, en termes de droit à l'alimentation des communautés rurales en particulier. Une experte du Comité a relevé que des allégations concordantes, et même un rapport de juristes, font état de licenciements de travailleurs et de syndicalistes du secteur de l'exploitation bananière. Des informations précises ont été demandées à ce propos, ainsi qu'au sujet du sens du «mouvement de solidarité» dont il est souvent fait usage dans le rapport. La délégation a aussi été priée de démontrer dans quelle mesure les citoyens se prévalent de leur droit au travail, et de citer des décisions juridiques prises à l'appui de ce droit. Il a été observé que l'exode rural pourrait aussi s'expliquer par les mauvaises conditions de travail, au-delà des changements d'orientation de l'économie.

La délégation du Costa Rica a fait observer que les disparités de revenus sont en effet de plus en plus marquées. Pour y remédier, le Gouvernement a pris des mesures contre la pauvreté extrême qui ont permis d'en réduire l'incidence (-3,2%): transferts d'argent destinés à la poursuite d'études universitaires, mise à la disposition de repas dans les écoles, programmes d'accès au marché du travail, entre autres, toutes mesures destinées à combler le fossé social. L'idée du Gouvernement est d'appliquer, dans le cadre d'un plan d'action national 2006-2010, des mesures ciblées au profit des populations les plus directement touchées. De même, le taux de chômage des femmes a été fortement réduit (augmentation du taux d'emploi de plus de 1%). Le problème de l'égalité des salaires entre les sexes reste cependant posé.

Le processus d'intégration des réfugiés comprend plusieurs volets, notamment dans le domaine de l'emploi. Une certaine résistance à l'embauche de réfugiés est constatable sur le terrain. Des normes édictées par la Chambre constitutionnelle ont permis de faire sauter la limite de 10% imposée au recrutement de réfugiés. Leur droit au travail est désormais clairement réaffirmé.

En matière de protection sociale, la délégation a confirmé que le Costa Rica n'avait pas ratifié les Conventions n° 118 et 103 de l'Organisation internationale du travail (concernant respectivement l'égalité de traitement devant la sécurité sociale et la protection de la maternité). Néanmoins, la couverture sociale des Costaricains est assurée à 100% dans les cas d'urgence, à 90% pour la sécurité sociale générale. Le système social s'appuie sur trois piliers: accès universel, solidarité dans le financement de la couverture universelle, équité dans l'accès aux prestations. La qualité de la couverture varie selon les cantons: les cantons périphériques, ruraux et assez pauvres sont les moins bien couverts (de 53% à 63%). Il s'agit depuis quelques années pour le Gouvernement de renverser cette tendance et de mieux desservir ces zones excentrées en soins de santé primaires. Des progrès notables ont été réalisés dans le domaine de l'accès à la santé. D'autre part, en 14 ans, l'évolution de la population non couverte par le système social n'est en réalité pas si importante si l'on tient compte de l'évolution démographique générale, a observé la délégation.

La période couverte par le rapport a été marquée par une évolution économique caractérisée par la prépondérance du secteur touristique et la croissance des exportations. Il convient désormais d'ancrer cette économie d'exportation dans le tissu économique local, ceci afin de contribuer à lisser les disparités économiques entre régions.

La délégation a insisté sur le rôle et l'importance de la Chambre constitutionnelle, dont les décisions ont force de loi sur les autres juridictions, à peine de sanctions pénales. La Chambre statue rapidement et est facilement accessible par tous les citoyens. La «zone franche» (il en existe une seule) est une zone où l'on ne paie pas d'impôts, cependant les lois, et le droit du travail en particulier, s'y appliquent pleinement, comme dans le reste du pays.

La délégation a indiqué que le plan national 2006-2010 prévoit un volet consacré à l'emploi. Des dispositions y régissent la formation professionnelle (orientation, insertion), en rapport avec les municipalités de tout le pays; un programme d'inspection a été lancé, avec l'évaluation et la formation des personnes chargées du contrôle des conditions de travail. L'État se préoccupe en outre de préserver les conditions salariales des travailleurs, notamment des migrants. Quant au déclin du secteur primaire, il n'est pas absolu et le Costa Rica reste exportateur de café, de fleurs, entre autres. La délégation a précisé que le Gouvernement ne détient pas d'exploitation bananière. Il est cependant exact que le Costa Rica participe activement au système de plainte interaméricain: à la connaissance du Gouvernement costaricain, aucune plainte n'y a été recensée concernant des conflits dans le secteur bananier. Une plainte pour pratique déloyale a été classée faute de preuves par une cour costaricaine. La délégation a indiqué que chaque circonscription administrative du pays dispose d'une inspection du travail. Le Gouvernement quant à lui a pris des mesures de lutte contre les pratiques antisyndicales.

Les «mouvements de solidarité» rassemblent associations d'employeurs et d'employés depuis une vingtaine d'années, parallèlement aux syndicats. Ces deux types d'organisations cohabitent sans difficulté.

Quant aux preuves du respect du droit constitutionnel au travail, la délégation a assuré que plusieurs décisions ont été rendues sur cette base, notamment en 1994 et en 1999. Des études économiques montrent dans quelle mesure la main-d'œuvre étrangère a contribué à la croissance économique nationale.

La délégation a expliqué que les demandeurs d'asile obtiennent des droits dès que le statut de réfugié leur est octroyé. Depuis les années 2000, le nombre de ces demandes est en forte augmentation, s'agissant en particulier de ressortissants colombiens. L'État a donc pris des mesures impliquant les facultés de droit pour accélérer le traitement de ces demandes, le délai moyen étant tombé à quinze jours (le délai légal de réponse étant d'un mois). Par ailleurs l'État a mené une enquête pour déterminer le degré d'insertion des réfugiés au Costa Rica. L'enquête montre certaines difficultés d'intégration au marché du travail.

Protection de la famille, droit à un niveau de vie suffisant, droit de jouir du meilleur état de santé possible

Des membres du Comité ont demandé des précisions concernant la lutte contre l'avortement clandestin; l'ampleur et l'évolution de la violence domestique et les mesures juridiques et politiques prises pour y faire face et pour en secourir les victimes; le tourisme sexuel; l'impact des plans d'emplois pour les jeunes; la lutte contre la consommation de stupéfiants; l'interdiction ou non des châtiments corporels contre les enfants. Un autre membre a indiqué que certains des droits posés par le Pacte sont dits «indérogeables»: les États partie sont tenus de s'appliquer à les réaliser, en particulier en ce qui concerne le droit de s'habiller et de se loger, et ce d'une manière non pas progressive mais sans délai. C'est pourquoi le Gouvernement devrait renforcer ses efforts pour éliminer la faim et loger convenablement toute sa population.

Dans une autre intervention, un membre du Comité a demandé quelle est la proportion exacte de personnes vivant dans la pauvreté au Costa Rica, les indications à cet égard étant divergentes. Des précisions devraient être aussi apportées quant aux mesures prises pour venir en aide aux personnes désavantagées et marginalisées du point de vue de l'accès aux services de base et à l'emploi. Par ailleurs, le rapport ne dit rien de la justiciabilité du droit au logement, ni de la situation des squatters de terres et logements inoccupés. Dans ce contexte on doit se demander dans quelle mesure les droits des personnes expulsées de force de leur logement sont respectés, un aspect qui n'est pas traité par le rapport. Il a aussi été demandé si l'état des routes pouvait être un facteur de l'exode rural.

Un expert du Comité a constaté un changement méritoire mais modeste du nombre des grossesses d'adolescentes mais demandé des détails sur les mesures effectives prises pour remédier à ce problème. Le Gouvernement dit en effet avoir fait de la santé sexuelle des jeunes filles une priorité, ce qui est une bonne chose. Cette affirmation est cependant insuffisante tant qu'elle n'est pas étayée par des éléments tangibles. Le gouvernement s'est-il fixé par exemple des objectifs d'ici à la parution du prochain rapport? Comment traite-t-il la dimension culturelle de ce problème? Un expert a relevé des contradictions entre les dépenses de santé citées par le rapport et les statistiques de la Banque mondiale.

Il a été observé que le Costa Rica dispose de lois réprimant la traite des femmes et des enfants et la prostitution des enfants: combien de personnes ont été poursuivies pour de tels délits, a voulu savoir un membre du Comité, qui a aussi demandé de justifier la différence entre l'âge de consentement sexuel (13 ans) et l'âge de la majorité civile (18 ans). D'autres questions ont porté sur les mesures de lutte contre la consommation de drogues et contre la violence à l'école.

La délégation du Costa Rica a indiqué que le Gouvernement considère le droit au travail comme intimement lié au droit à un niveau de vie suffisant. Au Costa Rica, le seuil de pauvreté extrême tourne autour de 3,3%: il s'agit là des personnes les plus vulnérables, les plus exposées au risque de faim. «Cela ne signifie pas pour autant que dans nos rues errent des personnes en haillons, le ventre creux», a insisté la délégation: des programmes de cantines scolaires ont été mis sur pied pour les enfants les plus défavorisés; la couverture préscolaire est de 90%, 99% dans le primaire. D'une manière générale, le Gouvernement s'efforce de réduire la fracture sociale en visant prioritairement les personnes directement concernées. La délégation a précisé que 20% de la population était pauvre en 2006, une part tombée à 16,7% cette année. L'objectif de diminution de 4% d'extrême pauvreté est d'ores et déjà en passe d'être atteint.

Répondant aux questions sur le droit au logement, la délégation a indiqué que les expulsions sont soumises à des procédures très strictes visant à garantir les droits des personnes concernées. L'expropriation pour motif d'intérêt public donne droit à une indemnisation et dans certains cas à un relogement. Une commission nationale est habilitée à intervenir en amont pour prévenir les difficultés en cas d'expulsions prévisibles.

La justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels est consacrée par la jurisprudence, avec des effets variables selon les domaines. En matière de droit au logement, la responsabilité de l'État tient ainsi d'abord à la construction de logement puis à la facilitation de l'accès au logement. Il existe une jurisprudence concernant le logement, enjoignant l'État d'agir selon ces lignes mais lui laissant un important pouvoir discrétionnaire. L'État appui ainsi la construction de coopératives de logement par le biais des établissements financiers dépendant de lui. Les plaintes pour faire valoir les droits économiques, sociaux et culturels sont traitées par la Chambre constitutionnelle qui demandera à l'État d'intervenir pour répondre aux demandes du plaignant.

L'État mène une politique de lutte contre la pénurie de logement, a par ailleurs souligné la délégation. Quatre cent mille logements ont été ainsi construits en quelques années. Des subventions au logement et à l'accession à la propriété sont prévues pour les plus pauvres. Plusieurs dizaines de milliers de familles pauvres ou défavorisées ont bénéficié de mesures d'aide au logement adoptées par le Gouvernement depuis le début des années 1990. Les populations autochtones bénéficient d'aides personnalisées.

La délégation a indiqué que l'infrastructure routière, aéroportuaire et portuaire du pays nécessite une coûteuse remise à niveau. Cette question est liée à l'exode rural et aux conditions de vie dans ces régions. Cependant, on enregistre aussi un mouvement inverse, de citadins vers les campagnes. Le Gouvernement a préparé un projet de réhabilitation prioritaire du réseau routier national, financé par une réorientation de l'assiette fiscale.

La délégation a confirmé que 20% de grossesses concernent des adolescentes de 18 ou 19 ans. Les accouchements se déroulent en général dans de bonnes conditions, à l'hôpital. Le problème réside dans les conditions dans lesquelles se déroulent ces grossesses, dans l'attitude des pères et dans la perception sociale. L'État du Costa Rica est engagé à s'occuper particulièrement des mères adolescentes. Celles-ci ont le droit de bénéficier d'aides diverses, l'État devant notamment fournir des suppléments alimentaires et une aide prioritaire en matière d'éducation et de prévention des maladies. Plusieurs organismes officiels, ministères et autorités locales, sont chargés de cette action. La couverture est bonne à l'échelle du pays. La santé prénatale et post-partum est assurée. La Caisse de protection sociale a passé des alliances stratégiques avec des acteurs internationaux, notamment l'Organisation mondiale de la santé et le Fonds des Nations Unies pour la population, pour lancer des programmes de formation et de prévention des grossesses précoces, à l'intention des adolescentes mais aussi des fonctionnaires. Un manuel de prévention de la dépression et du suicide a été publié en 2005. Les autorités poursuivent globalement l'objectif de donner aux jeunes la maîtrise de leur santé reproductive et de leur permettre d'avoir une vie sexuelle compatible avec leur âge.

Les autorités constatent par ailleurs une croissance du tourisme sexuel et de l'exploitation sexuelle des jeunes, en parallèle avec l'explosion du tourisme. Le Costa Rica est vu comme un pays exotique, et l'on a trouvé des sites Internet le présentant comme une destination pour le tourisme sexuel. La loi est en cours de révision: prolongation du délai de prescription, protection renforcée des mineurs et aggravation des sanctions en cas de délit contre un mineur. Le Plan 2006-2010 contient des mesures d'action contre les causes structurelles de l'exploitation sexuelle, axées sur la protection juridique des victimes et la prévention. Des travailleurs sociaux et fonctionnaires ont été formés spécialement. Un code de conduite pour la protection des enfants contre le tourisme sexuel regroupe un certain nombre d'entreprises du secteur touristique (hôtels, location de voitures). Les autorités s'efforcent en outre d'apporter une aide psychologique aux victimes.

La délégation a indiqué que le viol est puni de la même manière qu'il intervienne ou non au sein d'un couple marié, le premier étant naturellement beaucoup plus difficile à établir. Les violences faites aux femmes, les violences domestiques en général sont traitées par un bureau spécial du procureur général et d'autres services de l'État. Des services de conseil, de soutien social et d'accueil sont offerts aux victimes ou aux femmes menacées.

Des normes existent pour encadrer, mais non interdire, les châtiments corporels à la maison ou à l'école. Les parents doivent faire preuve de modération et des sanctions sont prévues (et appliquées) en cas d'exagération. On constate cependant que les mentalités évoluent au sein de la société. Les enseignants s'autodisciplinent et sont nettement moins enclins à user de châtiments corporels. Un projet de loi est à l'étude pour légiférer en la matière et interdire expressément les châtiments corporels. Le principe est que les droits des parents et des enseignants ne sont pas illimités et que les enfants ont le droit à la protection de leur intégrité corporelle.

En matière de lutte contre les trafics d'êtres humains, le Costa Rica ne reste pas les bras croisés et a démantelé, l'an dernier, un réseau criminel, a fait valoir la délégation. Par ailleurs, un projet de loi est en préparation visant en particulier à systématiser le droit costaricain de l'asile. Des mesures y sont prévues en faveur des requérants, en termes d'aide à la constitution de dossiers ou de simplification du regroupement familial. Les informations relatives à l'entrée des réfugiés sont totalement confidentielles. En outre certains comportements contraires aux intérêts des populations migrantes sont criminalisés par le projet de loi.

Répondant à une question précise, la délégation a fait savoir que les allégations de détournement de fonds dans la caisse de sécurité sociale concernent un prêt de l'Espagne dévolu à l'achat de matériel. La gestion de la caisse de sécurité sociale n'est pas véritablement en cause, mais plutôt la répartition effectuée par l'administration centrale.


Droit à l'éducation, droit à la culture et aux bienfaits du progrès scientifique

Une membre du Comité a demandé dans quelle mesure la scolarité primaire était véritablement gratuit et quel était le salaire des enseignants du secteur public, par rapport à ceux du privé. Il a aussi été demandé le nom de la région comptant 95% d'analphabétisme, selon le rapport. Un autre expert a constaté que les populations autochtones semblent rencontrer les plus grandes difficultés à accéder au système scolaire, ce qui appelle des explications de la part de la délégation. Les personnes handicapées bénéficient-elles de facilités matérielles d'accès aux établissements scolaires? Des questions ont porté sur les mesures prises pour protéger les langues autochtones de l'extinction et pour valoriser le patrimoine culturel des populations autochtones, sur la nature exacte des réserves autochtones et sur l'existence ou non, au niveau constitutionnel, de mesures positives de protection de l'identité ethnique des populations autochtones.

Un autre expert a demandé des précisions sur le programme d'enseignement pilote. Existe-t-il un plan d'action pour intégrer les étudiants de toutes les ethnies dans les mêmes établissements scolaires et universitaires? Il a été porté à l'attention du Comité l'existence d'un manuel scolaire au contenu discriminatoire à l'encontre des Noirs.

Un membre du Comité s'est félicité de la qualité des réponses précises apportées ce matin aux questions. Il néanmoins tenu è souligné que, que quel que soit le secteur concerné, les obligations de l'État partie au regard du Pacte s'appliquent dans toutes les circonstances. Les abus commis dans les plantations de banane doivent donc faire l'objet de toute l'attention des autorités.

Répondant aux questions, la délégation du Costa Rica a indiqué que la scolarité de base et primaire est entièrement gratuite et universelle, obligatoire et ouverte à tous les résidents. L'État finance 93% des établissements scolaires. Le matériel n'est pas gratuit mais les écoliers pauvres bénéficient de programmes de soutien pour l'achat de manuels scolaires et d'uniformes, pour le transport; l'accès aux cantines scolaires est aussi garanti au moins une fois par jour. Par ailleurs les salaires des enseignants du secteur public sont équivalents à ceux du secteur privé. Il faut relever que les enseignants des zones rurales prennent leur retraite plus tôt pour aller enseigner dans le privé.

On enregistre des taux d'analphabétisme extrêmement élevés dans un nombre très restreint de localités particulièrement difficiles d'accès où vivent de petites populations autochtones. Le Gouvernement a de la difficulté à trouver des enseignants parlant la langue de ces populations. On travaille donc actuellement à la formation d'enseignants bilingues (langue autochtone en première langue, espagnol deuxième langue) et à la mise au point de matériel pédagogique adapté. Cette action entre par ailleurs dans le cadre de la défense des langues autochtones.

Globalement, l'objectif du Gouvernement est de faire passer le budget de l'éducation à 8% du PIB, contre 6% aujourd'hui. Le Plan de développement 2006-2010 prévoit la création d'un fonds pour les populations d'origine africaine et caraïbe et les migrants, ainsi que les populations vivant aux frontières. Le fonds a pour objet la création d'infrastructures au profit de ces populations et avec leur participation, pour améliorer l'accès.

Les programmes scolaires sont orientés sur l'éthique et la participation citoyenne à la société, sur l'estime de soi et l'identité des écoliers. L'objectif est d'armer les enfants pour la vie en société et de le prémunir contre des fléaux tels que la drogue et la violence. Le problème de l'abandon scolaire se pose surtout au niveau du secondaire, dont l'enseignement rebute certains enfants. Là aussi les autorités veulent introduire un enseignement faisant appel à l'intelligence de l'enfant, plutôt qu'à la répression.

L'enseignement pour les enfants handicapés est soumis à un cadre juridique et un effort particulier est déployé pour intégrer ces enfants aux établissements scolaires ordinaires. Les handicaps sont d'ordre mental, puis physique, puis multiple, par ordre décroissant. Des programmes de formation apprennent aux professeurs à gérer des enfants handicapés. Quant aux enfants pauvres victimes de handicaps, ils bénéficient d'un programme national offrant des primes et un soutien économique à plus de 1000 bénéficiaires.

La violence dans les écoles est une question préoccupante, tout comme la consommation de drogues. Le Costa Rica a lancé un programme de lutte contre ces phénomènes en collaboration avec l'Institut interaméricain des droits de l'homme. Des séances d'information et de sensibilisation sont organisées dans les collèges à l'intention des élèves mais aussi du corps enseignant. Le Plan national de développement prévoit lui aussi des mesures d'information à l'intention de la jeunesse. Un centre d'accueil va être ouvert en 2008 pour plus de mille jeunes concernés ou à risque. Ils y trouveront des services de traitement et de réinsertion. Le Gouvernement lance également des actions de prévention.

La seconde langue enseignée au Costa Rica est l'anglais, la troisième le français, a précisé la délégation.

L'État interdit la vente de terres des réserves autochtones à des personnes non autochtones. L'État a lancé un programme d'initiation à l'informatique au profit des populations autochtones et rurales. L'équipement est fourni par l'État.

Le Gouvernement agit également en matière d'amélioration de l'approvisionnement en eau potable et de l'assainissement, le problème étant situé au niveau de l'acheminement et du traitement des eaux usées, sur lesquels s'orientent les politiques publiques.

S'agissant de la situation dans le secteur bananier, la délégation a expliqué que l'État ne renonce en rien à ses responsabilités en ce qui concerne l'application des principes du Pacte. L'État n'emploie pas de travailleurs dans le secteur bananier, il n'a donc pas pu procéder à des licenciements, a-t-elle fait remarquer. D'autre part, il est constant qu'aucune plainte n'a été concrètement déposée pour abus. Par ailleurs, a précisé la délégation en réponse à une demande d'éclaircissement, l'Institut chargé des industries téléphonique et électrique est un fleuron économique et une fierté nationale: il agit dans les zones les plus reculées du pays au nom du seul intérêt public.


Conclusion

MME GIOCONDA ÚBEDA, chef de la délégation du Costa Rica, a conclu en relevant que ce dialogue devant le Comité avait été intense et riche d'enseignements. Le Costa Rica, en préparant le rapport, a constitué des équipes qui bénéficieront des commentaires du Comité. Le prochain rapport correspondra sans nul doute davantage aux attentes des membres du Comité, avec des informations actualisées. Le Gouvernement espère, grâce à des investissements accrus dans l'éducation, être en mesure de relever les défis rencontrés par un petit pays comptant 11% d'étrangers et 16% de pauvres, doté d'une infrastructure et d'un système éducatif perfectibles. Les populations les plus vulnérables, les autochtones et les migrants, continueront de faire l'objet de politiques ciblées. L'accord de libre-échange avec les États-Unis, validé par un référendum, et les exportations seront le moteur de la croissance et du développement costaricains. Le Gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures correctives nécessaires pour toutes les populations dont les droits seraient lésés et pour garantir le respect des droits démocratiques de tous les citoyens.

M. PHILIPPE TEXIER, Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a déclaré avoir apprécié la franchise et la sincérité du dialogue engagé avec la délégation du Costa Rica. Il a espéré que le prochain rapport serait soumis dans cinq ans.


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