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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA NORVÈGE

Compte rendu de séance

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du cinquième rapport périodique de la Norvège sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Petter Wille, Ambassadeur pour les droits de l'homme et la démocratie au Ministère norvégien des affaires étrangères, a notamment fait savoir que le processus d'adhésion au Protocole facultatif instaurant un système de visites pour prévenir la torture est bien engagé et que la Norvège espère pouvoir le ratifier en 2008. Un projet de loi sur les migrations et les demandeurs d'asile a été présenté au Parlement et, en cas d'adoption, elle entrera en vigueur au 1er janvier 2010.

La délégation norvégienne était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la justice et de la police, du Ministère du travail et de l'intégration sociale et du Ministère de la santé.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Norvège, M. Fernando Mariño Menéndez, a souligné que la Norvège est un pays connu du Comité pour respecter les dispositions de la Convention contre la torture. Il a toutefois relevé des difficultés s'agissant du fonctionnement du Centre de rétention où sont internés les étrangers en attente d'examen de leur cas et dont il semble qu'il ne soit pas contrôlé par les tribunaux. Il semble aussi que dans la pratique, toutes les personnes qui viennent d'Ouzbékistan et qui ont été accueillies comme demandeurs d'asile en Norvège aient été renvoyées en Ouzbékistan sans que leur cas ait été examiné individuellement, a par ailleurs relevé le rapporteur. Il s'est en outre enquis des garanties prises par le Gouvernement et les forces norvégiennes présentes en Afghanistan afin d'assurer que les personnes remises par ces forces aux autorités afghanes soient traitées de manière conforme aux normes internationales. Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Norvège, M. Wang Xuexian, a relevé que le Médiateur norvégien critique les centres de rétention comme équivalant à des établissements carcéraux qui ne bénéficient pas des règlements applicables à de tels établissements et au sujet desquels il est particulièrement regrettable qu'ils ne fassent pas l'objet d'un contrôle externe. M. Wang s'est en outre inquiété de certaines allégations relatives au traitement des patients de certains hôpitaux.

Le Comité entendra mardi, à 15 heures, les réponses de la délégation norvégienne aux questions qui lui ont été posées par les experts.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation de l'Ouzbékistan aux questions que lui ont posées les experts vendredi matin.


Présentation du rapport de la Norvège

Présentant le rapport de son pays, M. PETTER WILLE, Ambassadeur pour les droits de l'homme et la démocratie au Ministère des affaires étrangères de la Norvège, a souligné que la torture et les mauvais traitements constituent les violations les plus épouvantables des droits de l'homme et de la dignité humaine. Aucune circonstance ne saurait justifier la torture, a-t-il ajouté. Il a en outre rappelé que la Norvège soutient financièrement le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture, depuis sa création.

M. Wille a par ailleurs fait savoir que le processus d'adhésion de la Norvège au Protocole facultatif se rapportant à la Convention est bien engagé (le Protocole facultatif établit un système de visites sur les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté, afin de prévenir la torture). La Norvège espère pouvoir ratifier cet instrument en 2008, après avoir engagé un processus de consultation avec la société civile au sujet de cette question, a-t-il précisé.

Le représentant norvégien a en outre expliqué qu'un Service d'immigration de la police nationale a été créé récemment, en 2004, et que les statistiques concernant ces questions restent donc encore limitées. Un projet de loi sur les migrations et les demandeurs d'asile a été présenté au Parlement, qui l'examinera au premier semestre de 2008; si cette nouvelle loi est adoptée, elle entrera en vigueur au 1er janvier 2010, a précisé M. Wille.

Tous les demandeurs d'asile qui arrivent en Norvège se voient offrir la possibilité d'être logés dans des centres de rétention en attendant que leur demande soit examinée, a indiqué M. Wille. De la nourriture et un logement sont donc offerts à ce groupe de population.

Les actes de mutilation génitale féminine sont sanctionnés en Norvège en vertu d'une loi adoptée en 1995, a par ailleurs fait valoir M. Wille.

Le cinquième rapport périodique de la Norvège (CAT/C/81/Add.4) indique que plusieurs nouvelles mesures ont été prises depuis la présentation du précédent rapport pour prévenir les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, notamment avec l'adoption d'une nouvelle disposition pénale relative à la torture et de nouvelles restrictions au régime de la mise au secret. La législation générale en matière de retour, d'expulsion et d'extradition n'a pas subi, en revanche, de modifications importantes au cours de la période considérée, poursuit le rapport. Une disposition pénale spécifique contre la torture a été adoptée le 2 juillet 2004, interdisant à un agent de la fonction publique de porter préjudice à une personne ou de lui infliger une douleur physique ou mentale aiguë aux fins d'obtenir d'elle des renseignements ou des aveux, dans le but de la punir, de la menacer ou de la contraindre, ou en raison de sa religion, de sa race, de sa couleur de peau, de son sexe, de ses préférences sexuelles, de son mode de vie ou de ses inclinations ou encore en raison de son origine nationale ou ethnique. L'auteur des actes de torture est passible d'une peine de prison d'une durée inférieure ou égale à 15 ans. Les actes de torture graves ayant entraîné la mort sont passibles d'une peine de prison d'une durée inférieure ou égale à 21 ans. Le rapport indique par ailleurs que le Code pénal norvégien fait actuellement l'objet d'une révision complète. Un livre blanc sur un nouveau code pénal a été soumis, en juillet 2004 au Parlement. Les dispositions proposées relatives à la compétence de la Norvège pour connaître des actes de torture sont pour l'essentiel identiques à la disposition existante, précise le rapport. Le livre blanc propose également une disposition énonçant expressément que la Norvège a compétence universelle pour connaître des infractions lorsque cette compétence découle de traités conclus avec d'autres États ou du droit international. Le rapport indique en outre que l'administration pénitentiaire peut avoir recours aux cellules disciplinaires, aux lits de contention ou à d'autres mesures de contrainte autorisées dans certaines situations, par exemple pour empêcher qu'une personne ne fasse l'objet d'une agression ou de blessures graves. Lorsque cela se produit, le recours à de telles mesures est signalé au niveau régional et/ou à l'administration pénitentiaire.

Le rapport précise par ailleurs que la loi sur la procédure pénale a été modifiée par la loi du 28 juin 2002, qui vise avant tout à limiter la pratique de la mise au secret et à renforcer le contrôle judiciaire en la matière. La mise au secret fait l'objet de délais fixés par le tribunal qui doivent être les plus courts possibles et ne peuvent dépasser deux semaines. Ce délai peut être prolongé par voie d'ordonnance d'une durée maximum de deux semaines à la fois. Si la nature de l'enquête ou d'autres circonstances particulières laissent à penser qu'un réexamen de la mesure au bout de deux semaines sera inutile et si l'accusé a plus de 18 ans, le délai peut être prolongé par périodes de quatre semaines. Des délais maximums ont été instaurés en ce qui concerne la mise au secret. Le prisonnier ne peut être détenu au secret pendant plus de six semaines consécutives lorsque l'infraction dont il est accusé peut donner lieu à une peine de moins de six ans d'emprisonnement. Lorsque la peine maximale encourue est de six ans d'emprisonnement, le prisonnier peut être tenu au secret pendant 12 semaines d'affilée. À titre exceptionnel, le détenu peut être tenu au secret pendant plus de 12 semaines si des circonstances particulières rendent cette mesure nécessaire. Un détenu âgé de moins de 18 ans ne peut en aucun cas être placé en régime d'isolement pendant plus de huit semaines consécutives, quelle que soit la peine maximale encourue.

Examen du rapport

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Norvège, M. FERNANDO MARIÑO MENÉNDEZ, a souligné que la Norvège est un pays connu du Comité pour respecter les dispositions de la Convention contre la torture. Il a rappelé qu'à l'instar de tous les autres traités internationaux ratifiés par le pays, cette Convention est intégrée dans le droit interne norvégien. M. Mariño Menéndez a par ailleurs salué la nouvelle procédure devant aboutir, d'ici 2008, à la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Il a également relevé la réforme annoncée du Code pénal norvégien et s'est félicité de l'implication de la société civile norvégienne dans le suivi des recommandations antérieures du Comité.

Néanmoins, a poursuivi le rapporteur, quelles assurances la Norvège peut-elle donner au Comité qu'il n'y a aucun risque de discrimination, quelle qu'elle soit, dans le contexte des motifs susceptibles de conduire à un acte de torture, conformément à ce qui est énoncé à l'article premier de la Convention.

M. Mariño Menéndez a en outre souhaité en savoir davantage au sujet de la détention au secret, des motifs susceptibles de la justifier et de la procédure y afférente.

Le rapporteur a déclaré que des difficultés ont été relevées dans le fonctionnement du Centre de rétention où sont internés les étrangers en attente d'examen de leur cas et dont il semble qu'il ne soit pas contrôlé par les tribunaux mais par la police seulement. L'expert s'est enquis du type d'inspections susceptibles d'être menées dans ce Centre. Qui peut procéder à de telles inspections, a-t-il demandé?

S'agissant de l'interdiction totale du refoulement d'un étranger vers un État où cette personne risque d'être soumise à la torture, M. Mariño Menéndez a affirmé que le principe de non-refoulement semble être reconnu et accepté par l'État norvégien. Néanmoins, il semble également que dans la pratique, toutes les personnes qui viennent d'Ouzbékistan et qui ont été accueillies comme demandeurs d'asile en Norvège aient été renvoyées en Ouzbékistan sans que leur cas ait été examiné individuellement; leurs demandes semblent avoir été appréhendées de manière groupée. L'Ouzbékistan est-il considéré comme un pays à risque, a demandé M. Mariño Menéndez?

Quelles garanties sont-elles fournies par le Gouvernement norvégien et les forces norvégiennes présentes en Afghanistan afin d'assurer que les personnes remises par ces forces aux autorités afghanes soient traitées de manière conforme aux normes internationales, a en outre demandé M. Mariño Menéndez? La situation des personnes ainsi remises aux autorités afghanes est-elle suivie par les autorités norvégiennes, a-t-il insisté?

M. Mariño Menéndez s'est d'autre part demandé si la définition du terrorisme retenue par la législation norvégienne n'était pas trop large.

Le droit pénal norvégien régit les infractions dont la Norvège peut poursuivre les auteurs, a poursuivi M. Mariño Menéndez. Or, a-t-il relevé, la législation norvégienne stipule que les poursuites ne sont engagées que si cela est nécessaire dans l'intérêt public. S'inquiétant de l'implication d'une telle disposition dans le contexte de l'application du principe de juridiction universelle, il a rappelé que la Convention contre la torture pose notamment l'obligation de poursuivre ou d'extrader tout étranger se trouvant sur le territoire norvégien et qui se serait rendu coupable d'un acte relevant de la Convention.

M. WANG XUEXIAN, corapporteur pour l'examen du rapport norvégien, s'est enquis de l'existence éventuelle d'un système de surveillance et d'évaluation de la formation dispensée aux agents de l'État dans les domaines intéressant la Convention.

M. Wang s'est par ailleurs enquis des délais de présentation d'une personne appréhendée devant un juge.

L'expert a par ailleurs relevé que l'isolement cellulaire a été aboli en tant que peine.

Le corapporteur a relevé que le Médiateur critique les centres de rétention comme équivalant à des établissements carcéraux qui ne bénéficient pas des règlements applicables à de tels établissements et au sujet desquels il est particulièrement regrettable qu'ils ne fassent pas l'objet d'un contrôle externe.

Entre janvier 2005 et juin 2007, il y aurait eu en Norvège 16 décès dans le cadre d'opérations de police (en détention ou au moment de l'arrestation), a poursuivi M. Wang. Dix de ces seize décès ont fait l'objet d'enquêtes, mais aucune procédure pénale n'a été recommandée, a-t-il relevé.

S'inquiétant de certaines allégations relatives au traitement des patients de certains hôpitaux psychiatriques, M. Wang a mentionné le cas d'une patiente qui aurait été attachée à 150 reprises sur une période de neuf mois.


Un autre membre du Comité a demandé si des décisions ont été prises par la Cour suprême norvégienne qui citent la Convention contre la torture. En cas de conflit entre la législation interne et la Convention contre la torture, laquelle de ces deux sources de droit prévaut-elle, a demandé cet expert? Est-il arrivé à la Norvège de demander des assurances diplomatiques et, dans l'affirmative, comment la Norvège envisage-t-elle de rendre le pays d'accueil responsable s'il ne respecte pas les assurances qu'il a données? Comment est traitée, en droit norvégien, la tentative de torture, a par ailleurs demandé cet expert? Qui est chargé des enquêtes relatives à des cas de torture en prison, a-t-il également demandé? Étant donné que l'isolement cellulaire a été aboli, quelles sanctions sont-elles appliquées en cas de non-respect des règles en prison, s'est interrogé cet expert? Par ailleurs, est-il vrai que des demandeurs d'asile ont été retenus en Norvège pendant plus de deux ans? S'agissant du traitement des patients des hôpitaux psychiatrique, cet expert a fait état du cas d'un patient détenu 30 jours sur 40 sans pouvoir bouger. Il s'est en outre enquis des mesures prises par la Norvège pour faire face au problème de la violence conjugale dont sont victimes les femmes, en particulier les femmes migrantes.

Un autre expert s'est inquiété d'informations selon lesquelles les agressions contre les juifs norvégiens en 2006 étaient les plus nombreuses depuis la Seconde Guerre mondiale.


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