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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE L'AUTRICHE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné aujourd'hui le quatrième rapport périodique présenté par l'Autriche sur la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

À l'issue de l'examen du rapport, le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, a notamment relevé des préoccupations sur la place du Pacte dans l'ordre juridique interne; le déséquilibre de la représentation des femmes dans la vie sociale et politique; certaines questions se rapportant à l'immigration, à l'extradition et à l'asile; ainsi que les nombreuses affaires en rapport avec l'incitation à la haine raciale. Il a toutefois conclu que l'administration de la justice et l'interprétation constitutionnelle des tribunaux autrichiens semblent évoluer dans le bon sens. Le Comité présentera, à la fin de la présente session, des observations finales concernant le rapport de l'Autriche.

Présentant le rapport de l'Autriche, Mme Ingrid Siess-Scherz, Directrice générale adjointe du Directorat des services juridiques et constitutionnels de la Chancellerie fédérale, a indiqué qu'une réforme constitutionnelle, en cours, devrait entraîner une nouvelle codification des droits fondamentaux, en mettant l'accent sur les droits sociaux et les droits de l'enfant. Par le biais de cette réforme, plusieurs institutions et mécanismes seront modifiés, tels que l'institution du médiateur ou les tribunaux administratifs. En outre, la création d'un tribunal fédéral sur l'asile est également en cours de discussion. Mme Siess-Scherz a également déclaré que même si le Pacte n'est pas considéré comme automatiquement applicable par le législateur autrichien, l'essentiel des droits de l'homme énoncés par le Pacte est pleinement garanti par la Constitution.

La délégation autrichienne était également composée de M. Wolfgang Petritsch, Représentant permanent de la Mission autrichienne auprès des Nations Unies à Genève; de Mme Ingrid Nikolay-Leitner, médiateur au sein de l'Organe de l'égalité des chances; de M. Wolfgang Bogensberger, du Ministère fédéral de la justice; de MM. Berndt Körner, Willibald Liberda, Albert Grasel et Walter Ruscher, du Ministère fédéral de l'intérieur; de M. Heinz Tichy, du Ministère fédéral de l'éducation, des arts et de la culture; de Mme Sigrid Zeichen, du service juridique de la Chancellerie fédérale; ainsi que de membres de la Mission permanente à Genève. La délégation a répondu aux questions de membres du Comité s'agissant notamment du statut du Pacte dans la législation interne, des programmes de formation des forces de l'ordre, des dispositions relatives à la garde à vue, des demandes d'asile et de l'enregistrement des communautés religieuses.


Le Comité entamera lundi matin, à 10 heures, l'examen du cinquième rapport périodique du Costa Rica (CCPR/C/CRI/5).







Présentation du rapport

MME INGRID SIESS-SCHERZ, Directrice générale adjointe du Directorat des services juridiques et constitutionnels de la Chancellerie fédérale de l'Autriche, a souligné que le rapport de son pays présente une vue d'ensemble des droits de l'homme en Autriche et prend en compte les observations du Comité. L'élaboration d'un cadre global des droits de l'homme n'est jamais pleinement accompli; la situation des droits de l'homme mérite toujours d'être améliorée. De par leur nature, les droits de l'homme font l'objet de difficultés constantes.

La chef de la délégation a indiqué qu'une réforme constitutionnelle est en cours actuellement en Autriche. Les premières recommandations formulées par un groupe d'experts ont déjà été publiées, les autres suivront dans les prochains mois. Toutes ces recommandations seront ensuite débattues devant les Chambres du Parlement. Cette réforme constitutionnelle devrait entraîner une nouvelle codification des droits fondamentaux, en mettant l'accent sur les droits sociaux et les droits de l'enfant. L'objectif de cette réforme est également d'améliorer le système de protection des droits de l'homme. Ainsi, l'institution du médiateur sera réformée et les tribunaux administratifs seront aussi modifiés afin de réduire entre autres la durée des procédures. La création d'un tribunal fédéral sur l'asile est également en cours de discussion. Il devrait aussi contribuer à la réduction du retard accumulé dans le traitement des demandes d'asile. L'Autriche est également en train de mettre en place un régime de partenariat pour les homosexuels afin d'améliorer les dispositions légales applicables aux partenaires du même sexe.

Les autorités autrichiennes ont reçu en mai 2007 la visite du Commissaire des droits de l'homme du Conseil de l'Europe. Le projet de rapport du Commissaire (que l'Autriche vient de recevoir) contient des recommandations portant sur le processus de réforme constitutionnelle. Ces recommandations ont immédiatement été transmises au groupe d'experts qui travaille sur le projet de réforme constitutionnelle. Mme Siess-Scherz a également déclaré que son pays va renforcer la participation de la société civile dans la préparation des rapports que l'État doit présenter sur la situation des droits de l'homme, même s'il existe déjà une coopération étroite dans certains domaines, notamment celui de la protection des minorités nationales.

Le processus de réforme constitutionnelle vise à renforcer tous les droits fondamentaux, a souligné Mme Siess-Scherz. Même si le Pacte n'est pas considéré comme automatiquement applicable par le législateur autrichien, l'essentiel des droits de l'homme énoncés par le Pacte est pleinement garanti par la Constitution. Enfin, Mme Siess-Scherz a tenu à s'excuser pour le retard dans la présentation de ce rapport; un retard dû à des problèmes de ressources internes, a-t-elle expliqué, avant d'assurer le Comité que depuis la présentation du précédent rapport, la promotion et la protection des droits de l'homme en Autriche ont été améliorées.

Le quatrième rapport périodique de l'Autriche (CCPR/C/AUT/4) indique notamment que la Convention européenne des droits de l'Homme a valeur constitutionnelle et que l'interdiction absolue de la torture, consacrée à l'article 3, est donc garantie par la loi constitutionnelle. La loi fédérale portant amendement du Code de procédure pénale de 1975 et qui doit entrer en vigueur 1er janvier 2008 contient notamment une disposition indiquant expressément que les déclarations des accusés, des témoins ou des coaccusés ne pourront, sous peine de nullité de la décision, être utilisées à l'encontre d'un accusé si elles ont été obtenues sous la torture. Le rapport note également que les mesures de protection contre la violence à l'égard des femmes ont donné des résultats très encourageants. La loi est de plus en plus largement et généralement connue du public, de même que les mesures d'accompagnement proposées par les centres d'intervention, et de fait, le nombre des interdictions d'accès au domicile est en augmentation. Cependant, il ne faudrait pas conclure pour autant que les violences domestiques augmentent en Autriche; il s'agit plutôt du succès d'un instrument permettant de lutter contre des violences familiales qui cessent d'être un sujet tabou. Le droit autrichien est donc devenu un modèle qui inspire des solutions similaires à d'autres pays européens.

Le rapport indique par ailleurs que l'arrestation et la détention d'étrangers en vertu d'une décision d'expulsion s'impose en attendant la délivrance de l'interdiction du territoire ou de l'ordre d'expulsion, ou pour permettre l'exécution de l'ordre d'expulsion, la reconduction à la frontière ou le transport en transit. Les autorités sont tenues par la loi de prendre des mesures pour garantir que la période de détention avant l'expulsion sera aussi courte que possible. Le placement en détention avant expulsion est décidé par voie de décret, susceptible d'appel devant une chambre administrative indépendante qui doit se prononcer dans un délai d'une semaine. Leurs décisions peuvent ensuite être contestées devant la Cour constitutionnelle ou la Cour administrative. En outre, chaque année, le ministre fédéral de l'Intérieur conclut des conventions de droit privé avec des organismes de secours qui s'engagent à fournir un soutien humanitaire, social et juridique aux détenus en attente d'expulsion, afin de mieux tenir compte des besoins spéciaux de ces personnes en matière de protection juridique liés à leurs difficultés de communication. Au moment où la décision de placement en détention avant expulsion est appliquée, le détenu est informé, dans une langue qu'il comprend, de la possibilité de se faire aider sur-le-champ par un assistant spécialisé. Toutefois, lorsqu'ils résident légalement sur le territoire fédéral, les étrangers ne peuvent être détenus dans un tel centre que s'il existe des raisons de penser, sur la foi de données factuelles, que l'étranger risque de se soustraire à la procédure.

Le Code pénal dispose que quiconque incite publiquement à la haine, et, d'une manière risquant de troubler l'ordre public, appelle ou incite à l'hostilité à l'égard d'une église ou d'une formation religieuse existant en Autriche, ou à l'égard d'un groupe spécifique déterminé par son affiliation à une telle église ou formation, ou à l'égard d'une race, une nation, un groupe ethnique ou un État, ou encore tente de les ridiculiser d'une manière contraire à la dignité humaine est passible d'une peine de prison maximale de deux ans. L'Office fédéral pour la protection de la Constitution et la lutte contre le terrorisme prend des mesures de plus en plus drastiques contre les manifestations skinheads de l'extrême droite. Une attention particulière continue d'être accordée à la sensibilisation des jeunes élèves. Au cours de leur formation de base et complémentaire, les agents de la force publique sont particulièrement formés et sensibilisés aux phénomènes susmentionnés. S'agissant des minorités, les règles juridiques et les compétences administratives diffèrent d'un groupe minoritaire à un autre. Ceci s'explique par l'évolution historique, les obligations issues du droit international, en particulier celles en faveur des groupes ethniques slovène et croate, et par les besoins spéciaux des différents groupes minoritaires. Aujourd'hui, les groupes suivants sont des groupes ethniques: les Slovènes en Carinthie et en Styrie, les Croates au Burgenland, les Hongrois au Burgenland, les Tchèques à Vienne, les Slovaques à Vienne et les Roms au Burgenland. Les membres des groupes ethniques d'Autriche sont des citoyens autrichiens dotés des mêmes droits que tous les autres citoyens. Par ailleurs, le système juridique autrichien comporte un certain nombre de lois qui concernent en propre les groupes ethniques et leurs membres. La discrimination est interdite et l'usage des langues est libre.


Renseignements complémentaires fournis par la délégation autrichienne

La délégation autrichienne a ensuite répondu à une liste de questions préalablement adressée à l'Autriche (CCPR/C/AUT/Q/4).

Cadre constitutionnel et juridique de l'application du Pacte et du Protocole facultatif

Si le Pacte n'est pas incorporé à la législation nationale, les garanties énoncées par le Pacte sont couvertes et mises en œuvre dans la législation interne. Elles font également partie de la Convention européenne des droits de l'homme. En outre, la Cour suprême a prononcé un jugement estimant que les dispositions du Pacte sont pleinement prises en compte dans le système interne.

Depuis 2004, la Commission de l'égalité est composée de trois instances de médiateurs: un médiateur pour l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes au travail; un médiateur pour l'égalité de traitement au travail, sans distinction d'origine ethnique, de religion ou d'idéologie, d'âge ou de préférences sexuelles; et un médiateur pour l'égalité de traitement sans distinction d'origine ethnique, compétent dans les autres domaines.
En 2006, le médiateur chargé de l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans l'emploi a reçu 3411 plaintes principalement au sujet de demandes d'informations, de problèmes de harcèlement sexuel et d'égalité de salaire. Le médiateur pour l'égalité de traitement au travail, sans distinction d'origine ethnique, de religion ou d'idéologie, d'âge ou de préférences sexuelles a pour sa part reçu 589 demandes d'intervention. Les sujets principaux visaient la discrimination en raison des origines ethniques ou de l'âge. Enfin, le médiateur pour l'égalité de traitement sans distinction d'origine ethnique compétent dans les autres domaines a reçu 375 demandes traitant en particulier de l'accès aux biens et aux services, de l'accès au logement et du harcèlement.

La délégation a expliqué que ces médiateurs ne peuvent pas prendre de décisions. Ils peuvent en revanche formuler des avis s'ils estiment que la législation a été violée. L'Autriche s'est également fixé comme objectif de créer une institution de prévention qui travaillerait avec le Bureau des Médiateurs.

La question de la discrimination, du racisme et de tous les phénomènes qui y sont liés est d'une importance centrale pour l'exécutif autrichien depuis 2001, date où l'Autriche a mis en place un concept structurel des droits de l'homme, a expliqué la délégation. Pour lutter contre les pratiques discriminatoires de la police à l'encontre des personnes d'origine ethnique différente, l'Académie de la sécurité s'occupe de la formation des fonctionnaires et des représentants de l'administration, en tenant pleinement compte de la dimension «droits de l'homme».


Non-discrimination et égalité de droits des hommes et des femmes

Au sujet de la représentation des femmes dans les différents organes politiques et administratifs, la délégation a indiqué que le Gouvernement fédéral compte neuf ministres de sexe masculin et cinq femmes. Dans certains Länder, il existe un bon équilibre: 4 femmes et 5 hommes. Dans la fonction publique, on compte 9 femmes sur 69 directeurs d'administration. En outre, le Gouvernement doit rendre compte au législateur sur l'égalité de traitement dans la fonction publique. La loi réglemente la discrimination positive et les ministères fédéraux sont contraints de décider de programmes pour favoriser la promotion des femmes.

S'agissant des plaintes pour discrimination à l'égard des femmes, y compris les plaintes pour harcèlement sexuel, deux commissions s'occupent de cela, l'une pour le secteur privé et l'autre pour la fonction publique. En 2006, 31 plaintes ont été déposées. Entre 1997 et 2007, il y a eu au total 283 plaintes.

Droit à la vie, interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants et traitement des prisonniers

La délégation a expliqué que les juges, procureurs et agents de la force publique reçoivent une formation qui se déroule en deux temps: d'abord la formation obligatoire à la fois théorique et pratique des étudiants en droit pendant quatre ans, puis une formation continue qui concerne les magistrats déjà nommés avec des cours et des séminaires. La délégation a fait remarquer que si cette dernière formation se fait sur une base volontaire, précisant que 90 % des magistrats y ont participé.

Une nouvelle loi, qui sera appliquée en janvier 2008, crée une nouvelle codification de la procédure pénale, a indiqué la délégation. Désormais, toute preuve obtenue sous la torture ne pourra être utilisée par les tribunaux. La nouvelle loi confère ainsi trois types de garanties: toute allégation d'abus dans ce contexte doit être transmise au procureur; les plaintes pour mauvais traitement ne doivent pas faire l'objet d'une enquête des services de sécurité mais des tribunaux; et toute information concernant des cas de mauvais traitements doit être communiquée à l'instance indépendante des droits de l'homme.

Au sujet de l'affaire concernant l'agent autrichien de la Police civile des Nations Unies accusé de mauvais traitements graves sur la personne d'un détenu d'origine albanaise pendant qu'il était au service de la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), la délégation a expliqué que cet officier de police a été condamné par contumace au Kosovo en octobre 2003 à une peine de prison de 3 ans. L'officier de police a fait appel, mais la cour d'appel ne s'est pas encore prononcée sur ce cas. Parallèlement, une enquête indépendante a également été réalisée contre cet agent.

L'Autriche comte actuellement 163 mineurs en détention, comprenant ceux en détention provisoire et ceux qui ont été condamnés, a indiqué la délégation. Ce chiffre est plutôt bas, a-t-elle ajouté. En règle générale, les mineurs doivent être détenus séparément des adultes. Cette règle s'applique sans exception la nuit. Toutefois, pendant la journée, la séparation n'est pas aussi marquée. Les mineurs ont beaucoup plus d'activités de loisirs à l'extérieur de leur cellule que les adultes. Ils passent 12 heures par jour en dehors de leur cellule, contre 8 pour les adultes. Une heure par jour d'exercice en plein air leur est également imposée.

La délégation a ajouté que de nombreuses mesures ont été prises pour améliorer les conditions de détention des ressortissants étrangers en attente de l'exécution d'un arrêt d'expulsion. Il faut toujours tenir compte du fait qu'il s'agit d'une procédure d'expulsion et non d'une sanction. Des prisons ont été adaptées pour accueillir ces personnes. Il s'agit souvent d'installations à ciel ouvert. Parmi les mesures prises pour améliorer les conditions de détention, la délégation a fait remarquer que les cellules doivent accueillir 6 personnes. Les cellules individuelles sont très rares, sauf à la demande de la personne ou pour des raisons disciplinaires ou médicales. Les hommes et femmes sont détenus séparément. Les détenus peuvent recevoir la visite de leur famille. Les mères peuvent garder avec elles leurs enfants. Il existe des pièces qui leur sont réservées avec des lits pour les enfants. Parmi les mesures pour rendre la détention moins difficile, du matériel sportif, des télévisions et des journaux sont mis à disposition. La possession d'objets personnels est également possible si elle ne représente pas un danger potentiel pour autrui. Un centre de détention permettant d'accueillir 250 personnes sera construit au cours de l'année 2008. Ce centre sera construit dans le seul but d'améliorer les conditions de détention de ces personnes. Les normes architecturales ont été respectées. Dans les centres de rétention qui existent actuellement, et qui étaient prévus au départ que pour de courts séjours, les personnes sont souvent contraintes d'y rester assez longtemps. L'Autriche encourage toujours les personnes détenues à quitter volontairement le pays. L'expulsion forcée n'est que le dernier recours. Un vaste réseau d'organisations non gouvernementales informe les personnes concernées de la possibilité de rentrer volontairement dans leur pays d'origine.

Élimination de l'esclavage et de la servitude

En ce qui concerne le trafic de la traite des êtres humains, la délégation a indiqué qu'un Plan d'action national contre la traite des êtres humains a été adopté par le Parlement. Il s'agit d'une coopération interdisciplinaire et d'un groupe spécial de lutte contre ce trafic placé sous l'égide du Ministère des affaires européennes et internationales. En outre, un coordonnateur national sera nommé au début de l'année 2008 pour faciliter les efforts dans ce domaine.


Observations et questions complémentaires des membres du Comité

Plusieurs membres du Comité ont demandé si tous les droits inscrits dans le Pacte trouvent réellement effet dans la Constitution autrichienne ? Pourquoi le Pacte n'est-il pas consacré par la législation interne? En outre, le Pacte contient des articles qui dépassent la portée de la Convention européenne des droits de l'homme, ont fait remarquer des membres du Comité. Par ailleurs, l'Autriche est l'un des États parties qui a fait le plus grand nombre de réserves au Pacte. Est-ce que l'Autriche pense évoluer à cet égard, a demandé un membre du Comité. L'Autriche n'a également pas répondu à certaines observations du Comité faisant notamment état de violations de certains articles du Pacte. Que se passe-t-il s'il y a conflit entre les dispositions du Pacte et la législation interne?

En ce qui concerne les programmes de formation des forces de l'ordre pour lutter contre les pratiques discriminatoires à l'encontre des personnes d'origine ethnique différente, ceux-ci insistent sur les personnes d'ascendance africaine mais ne semblent porter l'attention sur la situation des Roms. Un membre du Comité a demandé des éclaircissements sur la question.

S'agissant du faible nombre de plaintes pour discrimination à l'égard des femmes, un membre du Comité a demandé si les mécanismes existants ne mériteraient pas d'être améliorés.

Un expert a relevé qu'il existerait une sorte de hiérarchisation dans le traitement des cas de discrimination, notamment s'agissant des personnes handicapées. La délégation peut-elle apporter des informations à ce sujet?

Un membre du Comité a demandé des informations détaillées sur les visas humanitaires.

Un autre expert s'est dit surpris de constater qu'aucune assistance juridique n'est automatiquement proposée à toutes les personnes placées en garde à vue; d'autant plus que cette garde à vue peut durer jusqu'à 96 heures, ce qui constitue un très long délai. Il est en outre fait état, pendant les périodes de garde à vue, d'allégations de mauvais traitements à l'encontre de personnes issues d'origines ethniques différentes. Par ailleurs, la notification de ses droits à la personne placée en garde à vue se fait uniquement en langue allemande. Il conviendrait de traduire ce document en plusieurs langues, a fait observer un membre du Comité.

Plusieurs membres du Comité ont salué les efforts du Gouvernement pour améliorer la protection des droits de l'homme, notamment l'évolution de la législation pénale, qui permet dorénavant d'écarter les preuves lorsque celles-ci ont été obtenues sous la torture. Toutefois, quelle est la nature des éléments qui doivent être présentés à l'appui d'un rejet de telles preuves, a demandé un membre du Comité, qui a fait remarquer que les mauvais traitements en détention sont difficiles à démontrer.

D'avantage de précisions ont été demandées au sujet de l'affaire concernant l'agent autrichien de la police civile des Nations Unies accusé de mauvais traitements graves sur la personne d'un détenu d'origine albanaise pendant qu'il était au service de la MINUK. Où en est exactement la procédure?

Réponses de la délégation autrichienne aux questions complémentaires du Comité

Au sujet de la question de l'application du Pacte par les tribunaux, la délégation a dit ne trouver qu'une référence qui date de 1994 pour un cas relevant de la législation sur les étrangers. Cas dans lequel la Cour constitutionnelle a fait référence au Pacte. Mais il est vrai que la Cour constitutionnelle a davantage tendance à se référer à la Convention européenne des droits de l'homme. Par ailleurs, si deux arrêts de tribunaux civils, l'un de 1984 et l'autre de 1995, mentionnent que le Pacte ne s'applique pas directement, il est en revanche dit que le jugement doit être conforme au droit interne et aux obligations de l'Autriche en vertu du droit international.

Au sujet de la nomination des médiateurs, la délégation a rappelé que le Bureau du médiateur est composé de trois membres élus par le Parlement. L'idée de l'organe consultatif repose sur l'objectif d'un organe complètement indépendant pour tenir compte de tous les facteurs. Il pourrait s'agir de l'organe des droits de l'homme pour la prévention sous l'égide des bureaux des médiateurs. Toutefois, le groupe d'experts qui travaillent sur la réforme constitutionnelle n'a pas encore terminé la discussion en l'espèce.

En ce qui concerne la parité hommes-femmes, la délégation a indiqué qu'il n'existe pas actuellement d'initiatives visant à améliorer la présence des femmes au Parlement ou dans les autres organes au niveau des provinces. Toutefois, divers programmes encouragent les femmes à participer à la vie politique.

S'agissant de la formation des policiers, la délégation a déclaré qu'il n'a pas semblé nécessaire jusqu'à présent de devoir adapter les modules de formation à la situation des Roms. Afin de faire en sorte que les fonctionnaires de police agissent de manière convenable et ne se montrent pas racistes, toute personne qui souhaite devenir policier passe par plusieurs étapes, et doit notamment se soumettre à un examen par un psychologue. Au cours l'entretien, on essaye de savoir si cette personne a quelques réserves ou préjugés et pourrait alors se comporter de manière inadéquate devant certaines situations. En ce qui concerne les plaintes et les questions disciplinaires, la délégation a indiqué que 2077 plaintes ont été reçues en 2006 contre la gendarmerie et la police. Au moindre doute, une enquête est diligentée. Cette enquête n'est pas menée par la section dont dépend l'accusé mais par un autre département. Si le ministère public estime qu'il y a suffisamment de raison qui étayent cette accusation, des poursuites sont engagées et éventuellement une procédure pénale qui peut conduire à des sanctions et à une procédure civile. Une procédure disciplinaire peut également être engagée contre les fonctionnaires.

Répondant à une question sur la garde à vue, la délégation a expliqué qu'immédiatement après son arrestation, la personne arrêtée reçoit une note d'information qui explique en détails ses droits. Cette note est disponible en 27 langues aujourd'hui et bientôt en 52 langues.

Les personnes arrêtées doivent être informées au sujet du chef d'inculpation, de la raison pour laquelle elles sont arrêtées, elles ont aussi le droit de prendre contact avec un membre de sa famille, le droit de prendre un avocat et enfin le droit de refuser de répondre à l'interrogatoire sans avocat. La loi de la réforme de la procédure pénale modifiera cette législation afin de renforcer encore les droits de la personne arrêtée.
En réponse à une autre question, la délégation a indiqué qu'en 2006, l'Autriche a décidé d'octroyer un permis de résidence pour raisons humanitaires à des victimes de la traite des êtres humains; 680 permis ont été accordés.

La définition de la torture figurant dans la Constitution est très large et couvre entre autres l'article 7 du Pacte, qui traite de la torture, a déclaré la délégation. Par ailleurs, de fausses informations sur les conséquences du silence de la personne arrêtée sont considérées comme des méthodes illégales pour obtenir des aveux. Si des indications pourraient laisser soupçonner des actes de torture, il revient au parquet de démontrer qu'il n'y a pas eu de recours à la torture.

Au sujet de l'affaire concernant l'agent autrichien de la police civile des Nations Unies au service de la MINUK, la délégation a indiqué qu'il y a également une procédure pénale en Autriche mais qui est dépendante de la procédure en cours au Kosovo. L'Autriche attend de savoir si la procédure au Kosovo est close. Lorsque l'Autriche obtiendra cette information, une nouvelle procédure commencera alors sur le territoire autrichien avec les éléments dont dispose l'Autriche. En attendant, l'agent de police est suspendu de ses fonctions.


Suite des renseignements complémentaires fournis par la délégation autrichienne

La délégation autrichienne a ensuite repris ses réponses à la liste de questions (CCPR/C/AUT/Q/4).

Expulsion d'étrangers

Aucune action juridique ne peut être engagée contre une procédure d'expulsion accélérée car il s'agit d'une décision ministérielle. Si une détention est imposée, les voies de recours sont alors possibles. Les recours contre un arrêté d'expulsion émis en conjonction avec le rejet d'une demande d'asile n'ont normalement pas d'effet suspensif car l'objectif est d'accélérer la procédure, a insisté la délégation.

En réponse à une question sur l'interdiction de séjour prononcée contre des étrangers ayant grandi en Autriche et y étant établis de façon permanente, la délégation a expliqué qu'une condamnation à une peine d'emprisonnement de deux ans ou plus annule le statut de résident. Il ne s'agit pas d'une double peine car la personne n'est pas sanctionnée deux fois pour la même chose, a précisé la délégation.

Droit à un procès équitable

La question des remboursements des frais aux plaignants sans ressources lors de procédures devant le tribunal administratif est étudiée par le Bureau du médiateur qui souhaite aboutir à une décision formelle. Au sujet de la longueur des procédures engagées, l'Autriche veut un nouveau système avec plus de tribunaux administratifs aussi bien au plan fédéral qu'au plan des Länder afin de réduire la charge des tribunaux administratifs. Pour les autres tribunaux, le nouveau Code de procédure pénale prévoit les mesures qui doivent être prises pour accélérer les procédures. Tout prévenu a le droit de voir son cas réglé dans un délai raisonnable; si la personne est déjà en détention, elle a droit à une procédure rapide. Une nouvelle loi permet également un recours utile. Ce principe doit être respecté pendant la procédure. La personne peut demander l'arrêt de la procédure s'il est constaté que le délai est trop long et que l'affaire elle-même ne justifie pas un délai aussi long. Dans ce cas, le tribunal interrompt la procédure.

Liberté de religion; liberté d'opinion et d'expression; incitation à la haine raciale

Répondant à une question sur l'enregistrement des communautés religieuses, la délégation a déclaré que les communautés religieuses qui veulent obtenir un statut légal doivent respecter certaines conditions, notamment un nombre minimum d'adhérents. Cette décision a été prise face à l'importante augmentation de nouveaux courants religieux, de manière à s'assurer de leur stabilité.

Face aux actes de violence, de harcèlement verbal et de discrimination visant les juifs, les musulmans, ainsi que des membres de groupes de croyants non reconnus, le Ministère de l'Intérieur a mis en place un système de formation complémentaire pour les agents afin, notamment, de les sensibiliser à ce genre de questions et pour mener des enquêtes sur ces questions. L'Office fédéral de lutte contre le terrorisme a aussi reçu ce genre de formation. Enfin, l'étroite collaboration avec les organisations non gouvernementales à ce sujet a également été très satisfaisante, a ajouté la délégation.

Répondant à une question sur la concentration des médias, la délégation a indiqué qu'en 2000, le Gouvernement fédéral a créé de nouveaux organes pour parvenir à un contrôle plus efficace de la situation.

Priée d'expliquer pourquoi le nombre de plaintes, de poursuites et de jugements au titre de l'article 283 du Code pénal, qui érige en infraction pénale l'incitation à la haine raciale et religieuse, est si bas malgré de nombreuses informations faisant état de propos racistes tenus dans les milieux politiques et les médias, la délégation a déclaré qu'en 2006, il y a eu neuf inculpations et deux acquittements. En 2007, jusqu'à présent, il y a eu quatre inculpations et trois acquittements. Si ces chiffres sont si bas, c'est parce que les inculpations ne représentent que le sommet de l'iceberg; il y a bien plus de plaintes, a ajouté la délégation, mais tous les cas d'incitation à la haine raciale ne donnent pas lieu à l'application pleine et entière de cet article du Code pénal car en plus de l'incitation, il faut un passage à l'acte physique. Une réflexion est en cours pour amender cet article du Code pénal mais cela n'a pas encore abouti en raison d'un problème d'harmonisation avec le droit communautaire (européen).

S'agissant de la langue rom, la délégation a indiqué que le rom n'est enseigné comme langue secondaire qu'à Vienne.

Diffusion d'informations concernant le Pacte et le Protocole facultatif

La délégation a souligné que le rapport est le résultat d'un effort conjoint de la part de tous les Ministères aussi bien au niveau fédéral qu'au niveau des provinces (Länder). S'agissant de la diffusion des informations sur l'examen du rapport par le Comité, une liste comprenant toutes les recommandations du Comité et des autres organes conventionnels a été distribuée à tous les coordonnateurs des droits de l'homme.


Observations et questions complémentaires des membres du Comité (partie 2)

Un membre du Comité a relevé la baisse du nombre de demandes d'asile depuis 2002. Quelle en est la raison alors que le nombre de requérants d'asile en détention augmente? Quelle est la politique de l'Autriche en matière de regroupement familial ?

Sur la diffusion des recommandations et des observations du Comité, le public en est-il également tenu informé et sont-elles traduites en allemand ?

Un membre du Comité a demandé des explications sur la jouissance par la minorité slovène de Carinthie de ses droits linguistiques.

Un autre expert a demandé des précisions sur le respect du droit à la vie privée.

Quelles sont les dispositions juridiques qui s'appliquent au fonctionnement des communautés religieuses? Les communautés religieuses enregistrées ont-elles des droits différents de celles non enregistrées, ont également demandé des membres du Comité?

Un membre a estimé qu'il serait utile de savoir s'il existe un suivi dans les sanctions disciplinaires décidées à l'encontre de membres des forces de l'ordre .

Le Gouvernement a-t-il prévu des actions pour freiner les mouvements de haine à l'égard des juifs?

Renseignements complémentaires fournis par la délégation autrichienne

Le site Internet de la Chancellerie fédérale devrait bientôt se doter d'une page spéciale sur les droits de l'homme, avec bien entendu les informations sur le Comité et les réponses aux questions adressées à l'Autriche par le Comité. Le Gouvernement doit également réfléchir à un système pour donner suite de manière systématique aux recommandations du Comité.

En vertu de la Constitution, lorsque plus de 10% de la population d'une municipalité utilise une autre langue que l'allemand, les panneaux de signalisation doivent être écrits dans les deux langues. La délégation a reconnu que cela n'était pas le cas en Carinthie avec la minorité slovène.

S'agissant des demandes d'asile, l'Autriche constate une diminution de plus de 40% pour 2006 et de 8% pour les premiers mois de 2007. La délégation n'est pas en mesure d'expliquer cette diminution. Par ailleurs, le nombre de dossiers de demande d'asile en suspens diminue depuis décembre 2006. Davantage de ressources ont été mises à disposition pour traiter ces requêtes.

Au sujet de la détention des réfugiés pendant la procédure d'examen de la demande, la délégation a fait remarquer que les personnes qui arrivent en Autriche n'aiment pas être soumises à une procédure d'enquête qui déterminera si d'autres pays européens sont susceptibles de les accueillir. Souvent, ces personnes disparaissent dans la nature. C'est pour cela qu'il est donc parfois nécessaire de placer en détention des demandeurs d'asile afin d'éviter leur fuite.

Les interrogatoires des requérantes d'asile sont menés par des femmes lorsqu'un interrogatoire conduit par un homme pourrait causer des problèmes, a d'autre part indiqué la délégation.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires sur la mise en œuvre du Pacte en Autriche, le Président du Comité, M. RAFAEL RIVAS POSADA, a demandé à l'Autriche de présenter à l'avenir son rapport périodique dans les délais. Le Président a néanmoins souligné la qualité de ce rapport. Parmi les questions récurrentes, il a relevé entre autres la place constitutionnelle du Pacte. Par aillers, dans un pays développé comme l'Autriche, il y a un déséquilibre certain de la représentation des femmes dans la vie sociale et politique. Certains aspects de la pratique en matière d'immigration, d'extradition et d'asile comportent encore des anomalies, a estimé le Président. Les nombreuses affaires d'incitation à la haine raciale reconnues par l'État préoccupent la communauté internationale. Il semblerait en outre que des responsables politiques et des médias y aient pris part. Il est essentiel de redoubler d'efforts afin que les coupables soient poursuivis et jugés.

S'agissant de l'interprétation des effets des décisions fondées sur le Protocole facultatif relatif à l'examen des plaintes contre un État partie, le Comité estime qu'il est essentiel que les États acceptent d'être liés par les Conventions qu'ils ont ratifiées, a souligné le Président. Toutefois, il semblerait que l'administration de la justice et l'interprétation constitutionnelle des tribunaux autrichiens évoluent dans le bon sens, a conclu le Président.

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