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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU QATAR SUR L'IMPLICATION DES ENFANTS DANS DES CONFLITS ARMÉS

Compte rendu de séance
La délégation annonce que les réserves émises par le pays à l'égard de la Convention ont été retirées aujourd'hui

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, cet après-midi, le rapport initial présenté par le Qatar au titre du Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans des conflits armés. Le Qatar a annoncé à cette occasion que les réserves que le pays avait émises à l'égard de la Convention relative aux droits de l'enfant ont été retirées aujourd'hui même par le pays. Ainsi, s'agissant de l'âge à partir duquel on pouvait jusqu'ici se porter volontaire à un enrôlement dans l'armée, qui était auparavant de 14 ans, plus aucune disposition ne permet désormais de s'enrôler dans l'armée avant l'âge de 18 ans.

L'annonce du retrait des réserves du Qatar a été immédiatement saluée par la rapporteuse du Comité pour le rapport du Qatar, Mme Moushira Khattab. Elle a par ailleurs exprimé l'espoir que les recommandations du Comité aideront le pays à préparer le projet de loi sur les enfants, à amender le Code pénal et à renforcer l'institution nationale des droits de l'homme. Le Qatar dispose des ressources matérielles et de la volonté politique nécessaires, a conclu Mme Khattab.

En dépit des réformes entreprises tant au niveau de la législation que de la pratique et en dépit de la disponibilité de ressources matérielles, le Qatar fait encore face à certains défis et difficultés temporaires pour ce qui est de mettre en œuvre le Protocole de façon idéale, notamment s'agissant des organes de contrôle, a reconnu M. Ahmed Hussain Al-Hamadi, Directeur des affaires juridiques au Ministère des affaires étrangères du Qatar, qui présentait le rapport de son pays. Par ailleurs, il a fait valoir que les lois militaires qatariennes ont été passées en revue conformément aux obligations du pays telles qu'elles découlent des instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme qu'il a ratifiées, notamment la Convention relative aux droits de l'enfant et ses deux Protocoles facultatifs. Les lois en vigueur n'autorisent pas la conscription, a-t-il souligné. En outre, la loi ne prévoit aucune exception quant à l'âge minimum de 18 ans requis pour le service militaire, et ce, même en temps de guerre et en cas de mobilisation générale.

La délégation qatarienne était également composée du Représentant permanent du Qatar auprès des Nations Unies à Genève, M. Abdulla Falah Abdulla Al-Dosari, ainsi que de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la défense, du Conseil suprême pour les affaires familiales, de la Fondation qatarienne pour la protection des femmes et des enfants. La délégation a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, la situation des non qataris au regard des possibilités de recrutement dans l'armée et d'enseignement à l'Académie militaire; ou encore la législation en vigueur en matière de vente d'armes.


Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera une journée de discussion générale sur le thème «Ressources pour les droits de l'enfant - Responsabilité des États», investissements pour la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels des enfants et la coopération internationale (article 4 de la Convention).




Présentation du rapport du Qatar

Présentant le rapport de son pays, M. AHMED HUSSAIN AL-HAMADI, Directeur des affaires juridiques au Ministère des affaires étrangères du Qatar, a souligné que sous la direction de Sa Majesté le Cheikh Hamad bin Khalif Al-Thani, l'État du Qatar a mené une politique de réforme globale aux niveaux constitutionnel, politique, économique, social et culturel. Le thème de la promotion et de la protection des droits de l'homme constitue une pierre angulaire de cette politique, a précisé M. Al-Hamadi. Il a en outre fait valoir que les recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme du Qatar sont prises en compte par le Gouvernement.

M. Al-Hamadi a rappelé les diverses dispositions relatives à la famille, à la maternité et à l'enfance que contient la Constitution qatarienne, laquelle, en son article 21, précise que la famille est la base de la société et qu'elle doit être basée sur la religion, la moralité et le patriotisme. L'article 22 de la Constitution stipule en outre que l'État est tenu de protéger la jeunesse et de préserver les jeunes des causes de corruption et d'exploitation. Par ailleurs, a ajouté M. Al-Hamadi, la Constitution stipule que la politique étrangère du pays doit être guidée par les principes de préservation de la paix et de la sécurité internationales, de renoncement à la violence et à l'utilisation de la force, d'encouragement au règlement pacifique des différends internationaux et de coopération avec les nations éprises de paix. Aussi, le Qatar est-il soucieux de contribuer de manière effective aux forces de maintien de la paix et aux opérations humanitaires. En tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, le Qatar contribue aussi à soutenir les efforts du Conseil visant à assurer la non-implication des enfants dans des conflits armés, a déclaré M. Al-Hamadi.

M. Al-Hamadi a par ailleurs indiqué que les lois militaires qatariennes ont été passées en revue conformément aux obligations du pays telles qu'elles découlent des conventions internationales de droits de l'homme qu'il a ratifiées, notamment la Convention relative aux droits de l'enfant et ses deux protocoles. Les lois en vigueur n'autorisent pas la conscription, a-t-il souligné. La loi sur le service militaire de 2006 dispose qu'il faut avoir au moins 20 ans pour pouvoir être recruté comme officier, les candidats à d'autres grades militaires devant avoir au moins 18 ans. En outre, la loi sur le service militaire susmentionnée ne prévoit aucune exception quant à l'âge minimum de 18 ans requis pour le service militaire, et ce, même en temps de guerre et en cas de mobilisation générale.

Le Conseil suprême pour les affaires familiales est l'organe qui se trouve en première ligne pour tout ce qui a trait à la protection de la famille, de l'enfance et de la maternité au Qatar, a par ailleurs indiqué M. Al-Hamadi. En dépit des réformes entreprises tant au niveau de la législation que de la pratique et en dépit de la disponibilité de ressources matérielles, le Qatar fait encore face à certains défis et difficultés temporaires pour ce qui est de mettre en œuvre le Protocole de façon idéale. Il en va ainsi des relations entre l'État et les organes de contrôle ainsi que des capacités techniques, qui en sont au stade de l'instauration. Aussi, le Qatar s'attend-il à bénéficier des activités et programmes dans le domaine des droits de l'homme du Centre de formation et de documentation des Nations Unies pour l'Asie du Sud-Ouest et la région arabe, devant être établi à Doha sous la supervision du Haut Commissariat aux droits de l'homme.

Le rapport initial du Qatar au titre du Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/QAT/1) souligne d'emblée que la conscription n'existe pas au Qatar. La réglementation et les directives en vigueur établissent le caractère volontaire de l'engagement dans les forces armées, ajoute-t-il. Aucune disposition législative ou réglementaire régissant les forces armées qatariennes ne prévoit la participation directe ou indirecte de membres des forces armées âgés de moins de 18 ans à des hostilités. De plus, l'article 71 de la Constitution proscrit toute agression militaire. En l'absence d'enrôlement obligatoire, la question de l'existence d'une disposition législative permettant d'abaisser l'âge de l'enrôlement obligatoire en raison de circonstances exceptionnelles (comme l'état d'urgence) ne se pose pas. Au sujet de l'âge minimum de l'engagement volontaire, il faut savoir que dans les forces armées qatariennes, la gestion des ressources humaines repose uniquement sur l'engagement volontaire. L'âge est un critère prépondérant parmi les conditions fixées par les forces armées pour l'admission dans leurs rangs. Quiconque est nommé officier dans les forces armées qatariennes doit impérativement avoir au moins 18 ans révolus. Pour ce qui est du recrutement d'autres catégories de militaires dans les forces armées qatariennes, les candidats, entre autres critères, doivent avoir au moins 18 ans révolus et au plus 25 ans.

Les forces armées mènent des programmes d'incitation en direction des moins de 18 ans en vue d'assurer la mise en œuvre de la législation pertinente, concernant les dispositions propres à encourager les mineurs à s'inscrire dans des programmes pratiques administrés par les forces armées qatariennes dans le respect de la politique générale de l'État concernant la protection de l'enfance et dans le souci de promouvoir la réalisation des objectifs de la Convention relative aux droits de l'enfant et des droits reconnus à la famille en général. Le programme de formation est organisé chaque année à l'intention des garçons qatariens scolarisés dans le deuxième cycle du secondaire, ainsi que des élèves suivant les cours du matin. Les élèves bénéficient d'une prime mensuelle destinée à les mettre à l'abri du besoin et à leur permettre de suivre une instruction civique, morale et culturelle complète dans le cadre d'un programme élaboré avec soin en tenant compte des dispositions et garanties de la Convention relative aux droits de l'enfant et de ses deux protocoles facultatifs. La participation au programme de formation se fait sur la base du volontariat. Y sont admis les élèves remplissant les critères suivants: être de nationalité qatarienne; être médicalement apte; avoir au moins 14 ans révolus; être scolarisé à plein temps dans une école qatarienne; obtenir l'accord de son tuteur et signer le formulaire d'inscription; passer un entretien d'admission.

Observations et questions des membres du Comité

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Qatar, MME MOUSHIRA KHATTAB, a souligné que le Qatar a réalisé de grands progrès aux niveaux économique et social et a d'ores et déjà atteint, bien avant la date butoir de 2015, bon nombre des objectifs du Millénaire pour le développement. Mme Khattab a par ailleurs salué le rôle que joue le Qatar pour ce qui est d'assurer la sécurité collective des membres du Conseil de coopération du Golfe. Le Qatar n'est impliqué dans aucun conflit et aucun enfant du Qatar n'est impliqué dans un conflit, s'est par ailleurs réjouie Mme Khattab. Elle s'est également félicitée que la législation qatarienne n'envisage pas la possibilité d'abaisser l'âge minimum de l'enrôlement dans les forces armées, même en cas d'urgence; en effet, le Comité cherche toujours des garanties juridiques qui restent valables quelles que soient les circonstances.

Mme Khattab a relevé que le Qatar a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant avec des réserves, notamment quant à d'éventuelles interprétations de cet instrument qui seraient en contradiction avec la charia. Ces réserves sont-elles maintenues, a demandé Mme Khattab? Dix-huit ans après l'adoption de la Convention, aucune des dispositions de cet instrument ne s'est avérée contraire à la charia, a-t-elle fait observer; aussi, le Qatar devrait-il retirer sa réserve générale à ce sujet, a estimé Mme Khattab.

Mme Khattab a fait état d'informations selon lesquelles l'âge minimum pour se porter volontaire dans l'armée serait de 14 ans: la délégation est-elle en mesure de confirmer ou d'infirmer cette information, a-t-elle demandé? Elle a en outre relevé que la législation actuelle ne prévoit pas de poursuites en cas de recrutement d'enfants à des fins d'implication dans des hostilités. Elle a par ailleurs souhaité savoir ce qui en est de la juridiction du Qatar en dehors de ses frontières nationales pour ce qui est de poursuivre des actes considérés comme répréhensibles au regard du Protocole.

Mme Khattab s'est d'autre part enquise des mesures prises par le Qatar pour offrir un statut aux enfants victimes de conflits armés qui arrivent dans le pays.

Les enfants de moins de 18 ans qui suivent un enseignement dans les académies militaires se voient-ils dispenser des cours de maniement d'armes, a par ailleurs demandé Mme Khattab?

Un autre membre du Comité s'est interrogé au sujet d'une éventuelle tendance des enfants qatariens à se porter volontaire dans les forces armées parce qu'ils ne veulent plus suivre l'école.

Un expert a souhaité savoir si le Qatar envisageait des mesures pour énoncer une interdiction expresse de l'enrôlement d'enfants.

Le Qatar envisage-t-il de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, a demandé un autre expert?

Un membre du Comité s'est enquis de la réglementation en vigueur au Qatar au sujet de la vente d'armes.

Un expert s'est enquis de la place du Protocole dans l'ordre juridique interne qatarien.

Réponses de la délégation

En ce qui concerne la question des réserves générales émises par le Qatar à l'égard de la Convention relative aux droits de l'enfant, la délégation a annoncé que ces réserves ont été retirées aujourd'hui même par le pays. S'agissant en particulier de l'âge à partir duquel on pouvait jusqu'ici se porter volontaire à un enrôlement dans l'armée, qui était fixé à de 14 ans, plus aucune disposition ne permet désormais de s'enrôler dans l'armée avant l'âge de 18 ans, a précisé la délégation. Tout enrôlement avant cet âge est désormais considéré comme un crime, a ajouté la délégation. Certes, a précisé la délégation suite à l'intervention d'un membre du Comité qui souhaitait en savoir davantage au sujet de l'incrimination de l'enrôlement de mineurs dans l'armée, aucune disposition n'est prévue à ce sujet dans le Code pénal, mais le Code militaire de 2006 prévoit que l'enrôlement d'enfants de moins de 18 ans dans l'armée n'est pas possible. La délégation a indiqué ne pas être en mesure d'en dire davantage au sujet des autres réserves que le pays avait émises, la décision de retrait des réserves venant tout juste d'être prise en Conseil des ministres.

Les non-qatariwns n'ont pas le droit d'être recrutés dans l'armée, ni de suivre les cours de l'Académie militaire, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation qatarienne a admis qu'à l'issue d'un certain nombre d'enquêtes qui ont été menées, il était apparu que l'encouragement financier qui leur était proposé à cette fin stimulait les enfants à rejoindre l'armée.

En ce qui concerne la place du Protocole et plus largement de la Convention dans le droit interne, la délégation a indiqué qu'ils ont primauté sur le droit interne. Conformément à l'article 68 de la Constitution qatarienne, les instruments internationaux ont force de loi une fois qu'ils ont été ratifiés par le pays et publiés au Journal officiel.

La délégation a indiqué que la Commission nationale des droits de l'homme qatarienne a participé à la préparation du rapport sur l'exploitation des enfants publié l'an dernier ainsi qu'à la préparation du rapport sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant qui sera prochainement soumis au Comité; en revanche, il est vrai que cette institution n'a pas participé à la préparation du présent rapport, a ajouté la délégation.

Pour ce qui est des enfants réfugiés, la délégation a indiqué que le Qatar envisage sérieusement d'accéder à la Convention relative au statut des réfugiés.

En ce qui concerne la question de l'extraterritorialité juridictionnelle, la délégation a souligné que la juridiction qatarienne va très loin puisqu'il existe une juridiction extraterritoriale qatarienne pour les crimes liés, entre autres, aux stupéfiants, à la piraterie, à la traite d'êtres humains ainsi que pour les crimes susceptibles de constituer une menace pour le pays. Un membre du Comité ayant suggéré que cette juridiction extraterritoriale soit étendue pour toucher également les crimes commis à l'encontre des enfants à l'extérieur du Qatar, la délégation a assuré que l'intention du pays était bien d'inclure non seulement dans le Code pénal mais aussi dans la liste des crimes soumis à la juridiction extraterritoriale tous les actes contraires au Protocole, a indiqué la délégation.

Aucun permis de port d'armes n'est accordé sans autorisation délivrée à l'issue d'une très longue procédure et uniquement aux personnes âgées de plus de 21 ans, a fait savoir la délégation.

La Convention relative aux droits de l'enfant et le présent Protocole serviront de base à l'élaboration du projet de loi sur l'enfance que prépare actuellement le Qatar, a par ailleurs indiqué la délégation.

Le droit humanitaire international a été inscrit au programme des académies militaires, a aussi fait valoir la délégation.


Observations préliminaires

Dans ses observations préliminaires présentées à l'issue de cet examen, la rapporteuse du Comité pour le rapport du Qatar, MME MOUSHIRA KHATTAB, a souligné que le Qatar traverse actuellement une phase de développement et de transformation. Elle a exprimé l'espoir que les recommandations du Comité aideront le pays à préparer le projet de loi sur les enfants, à amender le Code pénal et à renforcer l'institution nationale des droits de l'homme dans un sens conforme aux Principes de Paris. Le Qatar dispose des ressources matérielles et de la volonté politique nécessaires, a souligné Mme Khattab. C'est une excellente nouvelle que celle du retrait des réserves que le pays a annoncée aujourd'hui, a-t-elle ajouté.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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