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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA CROATIE SUR L'IMPLICATION DES ENFANTS DANS DES CONFLITS ARMÉS

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, ce matin, le rapport initial présenté par la Croatie au titre du Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans des conflits armés.

À l'issue de cet examen, le rapporteur du Comité pour le rapport de la Croatie, M. Brent Parfitt, a notamment suggéré que le pays procède à une comparaison entre le droit international et le droit interne afin de s'assurer qu'il a bien été donné effet, en droit interne, aux dispositions des instruments internationaux ratifiés par la Croatie. Au cours du débat, M. Parfitt s'est par ailleurs félicité que le recrutement de jeunes de 18 ans soit interdit en Croatie. Il a par ailleurs relevé que la législation croate prévoit des sanctions en cas de recrutement d'un mineur dans les forces armées.

Présentant le rapport de son pays, M. Branko Sočanac, Chargé d'affaires à la Mission permanente de la Croatie auprès des Nations Unies à Genève, a fait valoir que la loi sur la défense de 2002 tient compte des principaux objectifs du Protocole, notamment pour ce qui a trait à l'âge minimum de 18 ans pour la conscription et la participation dans des hostilités directes. En juillet 2007, des amendements ont été apportés à cette loi et aujourd'hui, seuls les personnes de 18 à 30 ans qui choisissent de servir peuvent être appelées à effectuer un service militaire volontaire. En Croatie, les conscrits ne peuvent être déployés sur les théâtres d'opérations de maintien de la paix à l'étranger, a par ailleurs souligné le représentant. En outre, aucune disposition législative n'autorise l'abaissement de l'âge de la conscription dans quelque circonstance que ce soit. Aucune école supérieure n'est gérée ou contrôlée par les forces armées en Croatie, a également indiqué le Chargé d'affaires.

La délégation croate était également composée de représentants du Ministère de la défense, du Ministère des affaires étrangères, du Bureau du Procureur général et de l'Université de Zagreb. Elle a fourni des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, l'application du Protocole en droit interne; la pénalisation du recrutement d'enfants en cas de conflit; la quasi-professionnalisation de l'armée croate; ou encore la vente et l'exportation d'armes.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial présenté par la Lituanie au titre, également, du Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans des conflits armés.



Présentation du rapport de la Croatie

Présentant le rapport de son pays, M. BRANKO SOČANAC, Chargé d'affaires à la Mission permanente de la Croatie auprès des Nations Unies à Genève, a fait savoir que dans son prochain rapport périodique, attendu pour 2008, la Croatie informerait le Comité en détail des progrès réalisés par le pays en matière de mise en œuvre de la Convention. Les recommandations adoptées par le Comité à l'issue de l'examen du deuxième rapport périodique de la Croatie, en 2004, ont servi de directives fondamentales pour la rédaction du nouveau Plan national d'activités pour les droits et les intérêts de l'enfant (2006-2012), a-t-il ajouté. M. Sočanac a par ailleurs souligné que la Croatie est membre du Conseil d'administration du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, ce qui a fourni au pays la possibilité d'élargir la portée de ses activités dans ce domaine, en particulier pour ce qui a trait à la présentation de sa législation et de sa pratique dans le domaine de la protection des droits de l'enfant. La Croatie figure parmi les premiers pays à signer la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention internationale sur les droits des personnes handicapées, a en outre fait valoir M. Sočanac.

M. Sočanac a déclaré que la loi sur la défense de 2002 tient compte des principaux objectifs du Protocole, notamment pour ce qui a trait à l'âge minimum de 18 ans pour la conscription et la participation dans des hostilités directes. En juillet 2007, des amendements ont été apportés à cette loi afin d'accorder au Parlement, sur proposition du Gouvernement et approbation préalable du commandant en chef, la possibilité de décider de ne pas appeler les recrues au service militaire obligatoire. Par conséquent, seules les recrues qui choisissent de servir peuvent être appelées à effectuer un service militaire volontaire (et ce, jusqu'à la fin de l'année où elles atteignent l'âge de 30 ans). Le service militaire volontaire peut aussi s'appliquer aux femmes, a précisé M. Sočanac. Il a souligné que ces nouvelles dispositions législatives constituent un pas de plus vers la réalisation de l'aspiration du pays à une professionnalisation de l'armée, conformément aux normes de l'OTAN. Il s'agit là, en outre, d'une réelle contribution à la mise en œuvre pratique du Protocole en Croatie.

En Croatie, il n'existe pas de possibilité légale pour l'opération de groupes armés distincts des forces armées, aucune activité de ce genre n'étant d'ailleurs enregistrée dans la pratique, a poursuivi M. Sočanac. Dans la législation croate, l'activité de groupes armés n'est pas envisagée en tant qu'acte criminel, a-t-il ajouté. Pour autant, le Code pénal interdit et punit fermement la pratique du recrutement d'enfants dans les forces armées nationales ou leur utilisation dans les hostilités directes en temps de guerre, de conflit armé ou d'occupation. La Croatie est en outre partie à la Convention internationale contre l'utilisation, le recrutement, l'utilisation, le financement et la formation de mercenaires, a précisé M. Sočanac.

En Croatie, les conscrits ne peuvent être déployés sur les théâtres d'opérations de maintien de la paix à l'étranger, a souligné le Chargé d'affaires. En outre, aucune disposition législative n'autorise l'abaissement de l'âge de la conscription dans quelque circonstance que ce soit, a-t-il fait valoir.

M. Sočanac a en outre indiqué qu'aucune école supérieure n'est gérée ou contrôlée par les forces armées en Croatie. Néanmoins, un conscrit est aussi un cadet, défini comme une «personne éduquée dans une école militaire sous un contrat d'éducation». Chaque membre des forces armées reçoit une éducation au droit international humanitaire, au droit des conflits armés et aux droits de l'homme, incluant les droits de l'enfant.

Le rapport initial de la Croatie au titre du Protocole facultatif se rapportant à l'implication des enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/HRV/1) souligne que selon la Constitution croate, les accords internationaux conclus et ratifiés qui sont entrés en vigueur font partie intégrante de l'ordre juridique interne et ont une autorité supérieure à celle des lois. En Croatie, les mineurs (personnes qui n'ont pas atteint l'âge de 18 ans) sont protégés par la législation nationale qui interdit leur enrôlement. Les mesures prises par la Croatie pour veiller à ce que les personnes qui n'ont pas atteint l'âge de 18 ans ne participent pas aux hostilités en leur interdisant de devenir membres des forces armées sont énoncées dans différents articles de la loi sur la défense nationale. En vertu des dispositions des articles 34, 42 et 43, l'obligation de participer au recrutement commence au début de l'année au cours de laquelle la personne astreinte aux obligations militaires atteint l'âge de 19 ans, et s'éteint dans tous les cas à la fin de l'année au cours de laquelle elle atteint 30 ans.

En Croatie, les soldats du contingent ne peuvent pas être affectés à des opérations de maintien de la paix ou à d'autres activités menées à l'étranger. S'agissant de la définition de la notion de «service militaire» en droit croate, le rapport précise que selon la loi sur la défense nationale, le service militaire consiste à préparer, former et organiser tous les citoyens croates capables afin qu'ils puissent accomplir des missions au sein des forces armées et participer à la défense nationale. Cette loi prévoit que l'institution du service militaire couvre le recrutement obligatoire, le service militaire obligatoire et le service obligatoire dans la réserve des forces armées. L'enrôlement obligatoire commence l'année au cours de laquelle le jeune homme (les filles ne sont pas visées) atteint l'âge de 18 ans et cesse lorsque le service militaire ou civil a effectivement commencé. En vertu de la loi, les obligations relatives à la conscription consistent pour l'appelé à se faire inscrire sur le registre militaire; passer des examens médicaux et autres, ainsi que des tests psychologiques dans des établissements médicaux civils pour que soit évaluée son aptitude médicale; passer devant la commission de recrutement qui évalue son aptitude à servir dans l'armée et détermine le service où il doit effectuer son service militaire; commencer son service militaire ou civil; répondre à un appel général ou individuel et remplir d'autres missions prévues par la loi.


Observations et questions des membres du Comité

M. BRENT PARFITT, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport croate, a félicité la Croatie pour tout ce qu'elle a fait pour mettre en œuvre le Protocole, lequel – convient-il de souligner – a primauté sur le droit interne croate. Le recrutement de jeunes de moins de 18 ans est interdit en Croatie, même si des jeunes de 17 ans peuvent, semble-t-il, être appelés à engager des procédures d'inscription en vue de leur future conscription, s'est en outre félicité M. Parfitt. Il a par ailleurs relevé que la législation prévoit des sanctions contre toute personne qui recruterait un mineur dans les forces armées, ce qui est rare puisqu'en général, les pays se bornent à interdire cette pratique sans fixer de sanction précise.

La délégation croate peut-elle confirmer que l'Ombudsman des enfants a juridiction sur les forces armées et la police, ce qui serait nécessaire aux fins de la mise en œuvre du Protocole, a par ailleurs demandé M. Parfitt?

Il semblerait que les services aux enfants réfugiés soient essentiellement fournis par des organisations non gouvernementales ou internationales; aussi, quels services sont-ils fournis en Croatie par l'État lui-même aux enfants touchés par des conflits armés qui se trouveraient dans le pays, a demandé M. Parfitt?

Le rapporteur pour l'examen du rapport de la Croatie a d'autre part souhaité savoir ce qui en est des exportations d'armes par la Croatie, en particulier à destination de pays ou d'agents susceptibles de recruter des enfants soldats.


Un autre membre du Comité a souhaité en savoir davantage au sujet de la contribution de la Croatie aux opérations de maintien de la paix. Une formation spécifique est-elle dispensée aux soldats qui sont appelés à servir dans des opérations de maintien de la paix? Quelles mesures seraient prises par la Croatie pour traduire en justice des Croates qui se seraient rendus responsables de violations de droits de l'homme dans le cadre d'opérations de maintien de la paix?

Un expert a souhaité savoir si les juges croates appliquaient directement les dispositions du Protocole.

Qu'en est-il en Croatie de la juridiction extraterritoriale pour des crimes commis dans des pays tiers et qui constituent des violations du droit international, a demandé un membre du Comité? Le droit pénal croate permet-il des poursuites contre des personnes qui se seraient rendues coupables de crimes contre l'humanité, en particulier de recrutement d'enfants dans des conflits armés, y compris dans des pays tiers, a également souhaité savoir un autre expert? De telles poursuites ont-elles déjà été engagées par la justice croate, a-t-il insisté?

La délégation croate a expliqué que la promulgation d'une législation interne n'est pas nécessaire pour donner effet aux dispositions d'un instrument international ratifié par la Croatie; en effet, les dispositions d'un instrument international dûment ratifié sont directement applicables en droit interne. À ce jour, aucun cas qui relèverait du Protocole n'a été présenté aux tribunaux croates, a précisé la délégation.

Un membre du Comité a affirmé que le Protocole est le type d'instrument international qui, pour voir ses dispositions appliquées, exige des États qu'ils prennent des mesures internes – par exemple, pour poursuivre des crimes commis à l'étranger, faute de quoi il sera pour le moins difficile de poursuivre de tels crimes sur la seule base du Protocole, car le simple fait que le Protocole ait primauté sur le droit interne n'autorise pas un juge à engager de telles poursuites.

Un membre du Comité s'est inquiété du risque – eu égard au taux de chômage relativement élevé, en particulier chez les jeunes – de falsification de documents qui pourrait amener des mineurs à se faire recruter dans l'armée.



Réponses de la délégation

En Croatie, le recrutement d'enfant dans un conflit est passible de sanctions au titre de l'article 158 du Code pénal, a souligné la délégation. En outre, la Croatie a ratifié en 1998 le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, a-t-elle rappelé.

Suite à l'amendement apporté au mois de juillet dernier à la loi sur la défense nationale, l'armée croate sera très bientôt devenue totalement professionnelle, a rappelé la délégation.

La délégation a indiqué que les autorités croates n'ont à ce jour eu connaissance d'aucune violation de droits de l'homme qui aurait été commise par des Croates opérant dans le cadre d'opérations de maintien de la paix à l'étranger.

L'Ombudsman des enfants, en Croatie, est un organe indépendant responsable devant le Parlement; son rôle est de contrôler le respect des droits de l'enfant, y compris pour ce qui est du recrutement éventuel d'enfants, a indiqué la délégation. Un enfant peut s'adresser directement à l'Ombudsman, notamment par le biais de l'un des trois bureaux régionaux dont dispose cet organe.

Deux catégories d'enfants sont visées par la loi sur l'asile, qui date de 2003, a par ailleurs indiqué la délégation. Il y a les enfants requérants d'asile et les enfants non accompagnés en Croatie – ces derniers ne demandant pas nécessairement l'asile dans le pays. Ces deux catégories d'enfants se voient assignées par les services sociaux des tuteurs qui sont chargés de veiller au respect de leurs droits, parmi lesquels figurent les droits aux services de santé et d'éducation.

La vente d'armes, «qui est une question quelque peu épineuse», est réglementée par la législation croate, a déclaré la délégation. En Croatie, a-t-elle précisé, une arme ne peut être obtenue que par la voie officielle et par une personne adulte, c'est-à-dire âgée de plus de 18 ans. Le Code pénal ne prévoit pas de délit particulier pour ce qui est du commerce d'armes légères à destination de pays où des enfants sont susceptibles de participer à des hostilités. Néanmoins, cette question est peut-être régie dans un autre cadre juridique que celui du Code pénal, a ajouté la délégation, indiquant ne pas être en mesure de fournir davantage de renseignements à ce sujet à l'heure actuelle.


Observations préliminaires

Dans ses observations préliminaires présentées à l'issue de cet examen, le rapporteur du Comité pour le rapport de la Croatie, M.BRENT PARFITT, a notamment félicité la délégation croate pour les réponses qu'elle a apportées aux questions posées par les experts. Il faudrait peut-être que le pays procède à une comparaison du droit international avec le droit interne afin de s'assurer qu'effet a bien été donné en droit interne aux dispositions des instruments internationaux ratifiés par la Croatie, a-t-il suggéré.

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