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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE L'ALBANIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier et ce matin, le premier rapport initial présenté par l'Albanie sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité présentera des observations finales sur le rapport de l'Albanie à la fin de la session, le 24 novembre prochain.

Présentant le rapport de son pays, M. Ferit Hoxha, Secrétaire général du Ministère des affaires étrangères, a rappelé que son pays a ratifié le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en 1991, à la veille de l'immense processus de transformation dans lequel s'est engagé le pays à la chute de la dictature communiste. Depuis lors, l'Albanie a profondément changé et, après une période de turbulences sociales et politiques au cours des années 1990, la situation des droits de l'homme s'y est considérablement améliorée. Cependant, l'Albanie est encore confrontée à certains problèmes, avec des répercussions directes pour le respect des obligations du pays en vertu du Pacte, puisqu'elle souffre d'un manque de capacités à préparer les rapports périodiques. Des efforts importants ont été consentis pour garantir le plein exercice des droits consacrés par le Pacte, notamment par l'adoption de mesures législatives appropriées, dont la loi de 2004 sur l'égalité entre les sexes qui prévoit en particulier la protection des femmes enceintes, des mesures en faveur de l'emploi des femmes appartenant à des groupes défavorisés.

La délégation de l'Albanie était également composée de représentants du Ministère de la santé, du Ministère de la justice, du Ministère du tourisme, de la culture, de la jeunesse et des sports, du Ministère du travail et des affaires sociales et du Ministère de l'intérieur. La délégation a répondu à des questions des experts du Comité concernant notamment les mesures prises par l'Albanie pour garantir l'indépendance des juges, faire respecter le principe d'égalité entre les sexes, concrétiser le droit à la santé et protéger les droits des minorités présentes sur son territoire, en particulier les Roms.


Le rapport de l'Albanie était le dernier devant être examiné à la présente session, qui se termine le 24 novembre. Lors de la séance de clôture, le Comité présentera ses observations finales concernant les rapports présentés au cours de la session par les Pays-Bas, El Salvador, le Tadjikistan, l'ancienne République yougoslave de Macédoine et l'Albanie.


Présentation du rapport initial de l'Albanie

M. FERIT HOXHA, Secrétaire général du Ministère des affaires étrangères, a rappelé que l'Albanie a ratifié le Pacte en 1991, à la veille de l'immense processus de transformation dans lequel s'est engagé le pays à la chute de la dictature communiste. Depuis lors, l'Albanie a profondément changé et, après une période de turbulences sociales et politiques au cours des années 1990, la situation des droits de l'homme s'y est considérablement améliorée. Il n'est certes pas facile de doter le pays d'un nouveau cadre juridique, de former une nouvelle génération de fonctionnaires qualifiés, ni de redonner espoir à une société déprimée. C'est pourquoi l'Albanie est encore confrontée à certains problèmes, avec des répercussions directes pour le respect des obligations du pays vis-à-vis du Pacte, puisque l'Albanie souffre d'un manque de capacités à préparer les rapports qu'elle doit rendre.

M. Hoxha a souligné que, de par la Constitution, tout instrument international devient automatiquement partie intégrante du système judiciaire national et est en principe directement applicable. En cas d'incompatibilité, la norme internationale prévaut sur la norme nationale. Des efforts importants ont été consentis pour garantir le plein exercice des droits consacrés par le Pacte, notamment par l'adoption de mesures législatives appropriées. Parmi ces dernières, M. Hoxha a cité l'adoption en 2004 d'une loi sur l'égalité entre les sexes qui prévoit en particulier la protection des femmes enceintes, des mesures en faveur de l'emploi des femmes défavorisées et des femmes rom. D'autres mesures favoriseront dès 2007 la participation égale des hommes et des femmes dans les processus de décision, avec en point de mire la réduction du nombre des actes de violence et du trafic à motivation sexuelle, ainsi qu'une réduction des stéréotypes sexistes dans la société albanaise.

L'application du droit à un niveau de vie décent a fait l'objet de mesures ciblées soutenues par les institutions internationales, comme le Programme alimentaire mondial et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance. Dans le domaine de la santé, M. Hoxha a cité l'adoption par le Gouvernement de cinq stratégies nationales destinée à renforcer le système sanitaire national. La lutte contre le VIH/sida fait l'objet de mesures de sensibilisation spéciales en direction des jeunes, des femmes, des Roms et des toxicomanes.

Le Gouvernement de l'Albanie est enfin convaincu que la pauvreté extrême est l'obstacle principal à la réalisation des droits de l'homme. C'est pourquoi il a présenté devant le Conseil des droits de l'homme, avec neuf autres pays de la région, un projet de résolution demandant la préparation de directives sur les droits des pauvres. M. Hoxha a conclu sa présentation en rappelant que l'Albanie est membre de l'Organisation internationale de la francophonie.

MME ENINA BALILI, experte chargée des questions d'éducation au Ministère des affaires étrangères, a fait état des principaux progrès réalisés par l'Albanie dans le cadre de la réalisation du droit à l'éducation, relevant que les dépenses consacrées à l'enseignement contribuent à améliorer la qualité de l'éducation, au bénéfice en premier lieu des enfants des familles pauvres vivant dans les régions rurales et périurbaines. L'objectif du Gouvernement est donc de renforcer la qualité de l'enseignement et de développer un système qui permette aux jeunes diplômés de s'intégrer dans les marchés de l'emploi, d'assumer leurs devoirs civiques et de contribuer au renforcement de la compétitivité économique du pays. À cette fin le Gouvernement a adopté, entre autres mesures, une stratégie nationale pour l'éducation 2005-2015 relative à la formation pré-universitaire, stratégie qui s'accompagne de financements spécifiques. Un autre indicateur de l'engagement du Gouvernement est l'augmentation du budget consacré à l'éducation, qui dépasse maintenant 5% du PIB. Il est notamment prévu dans ce cadre de doubler le salaire des enseignants, a enfin fait valoir Mme Balili.

Le rapport initial de l'Albanie (E/1990/5/Add.67) indique notamment que la Constitution garantit l'égalité de tous devant la loi. Les droits et libertés fondamentaux, ainsi que les devoirs prévus dans la Constitution valent également pour les étrangers et les apatrides présents sur le territoire de la République d'Albanie, pour autant que la Constitution ne rattache pas l'exercice de tel ou tel droit ou liberté à la possession de la nationalité albanaise. Par une série de mesures pratiques détaillées dans le rapport, l'État veille dans ce cadre au respect de l'égalité de traitement vis-à-vis des personnes souffrant de handicaps divers, des familles nombreuses et des personnes âgées. De même, il œuvre à la réalisation du principe de l'égalité entre hommes et femmes, ayant en particulier ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ainsi que son Protocole facultatif. De même, le Parlement albanais a adopté en 2004 un projet de loi relatif à une société fondée sur l'égalité des sexes, soutenu par un certain nombre de députés. La loi a pour objectif d'assurer l'égalité des droits entre les hommes et les femmes conformément. Elle prévoit des mesures concrètes pour favoriser l'égalité des chances entre les sexes, afin d'éliminer toute discrimination directe et indirecte.

Le rapport décrit également l'action du Gouvernement en matière de promotion du droit au travail (lutte contre le chômage, promotion du principe de rémunération égale pour un travail de valeur égale, garantie de liberté syndicale, entre autres); d'application du droit aux assurances sociales, relevant que si l'Albanie n'est pas partie aux Conventions de l'OIT N° 102, 121, 128, 130 ou 168, elle n'en a pas moins mis sur pied plusieurs régimes de sécurité sociale: assurance maladie; assurance maternité; assurance et les pensions pour handicap; assurance chômage. Le rapport donne également des indications sur les mesures juridiques prises pour la préservation de l'environnement et des ressources naturelles. Il est également indiqué que depuis 1960 la législation prévoit huit années de scolarité obligatoire gratuite pour tout le monde. De même, la Constitution garantit le droit des minorités nationales à un enseignement dispensé dans leur langue maternelle.


Examen du rapport

Cadre d'application du Pacte, questions générales

Un expert s'est félicité de la franchise dont fait preuve la délégation en admettant que certaines dispositions du Pacte ne sont pas encore appliquées. Il est d'ailleurs constant que l'Albanie a hérité du régime communiste d'une masse de problèmes sociaux et économiques qui entravent encore son action.

Un expert ayant souhaité des précisions sur le poids de l'héritage du passé en matière des droits des femmes par exemple, M. Hoxha, chef de la délégation, a rappelé que les femmes sous l'ancien régime communiste n'étaient, d'une certaine façon, pas l'objet de discrimination dans le sens où elles étaient tout autant opprimées que les hommes. Mais l'on ne saurait toutefois parler d'une situation particulièrement favorable.

Interrogée sur la volonté politique de faire appliquer le principe d'égalité des chances entre hommes et femmes, la délégation a notamment précisé que la loi prévoit depuis 2005 que le Comité gouvernemental pour l'égalité des chances est composé de trois sections et secrétariats techniques chargés de veiller à l'égalité entre les sexes et de prendre en outre des mesures pour le respect des droits des handicapés et des enfants. Ces organes œuvrent déjà à la mise au point d'une stratégie nationale pour l'égalité entre les sexes, un document qui sera finalisé à la fin 2006, accompagné d'un plan d'action. Les objectifs principaux sont la création d'un cadre institutionnel, l'assistance sociale et la lutte contre les stéréotypes dans les médias.

Une experte ayant demandé quelles mesures sont prises pour préserver le tissu social dans les régions rurales de l'Albanie, M. Hoxha a expliqué que le paysage démographique a fortement changé depuis quinze ans. Les premiers émigrés ont été des personnes vivant en milieu rural, qui représentent, aujourd'hui encore, près de 50% de la population. Un autre phénomène a été celui de l'exode vers la capitale, Tirana. Les conditions de vie dans l'«Albanie profonde» sont de fait assez rudes, organisées autour de l'agriculture et de l'élevage. Cependant, les populations rurales peuvent compter avec les transferts d'argent opérés par les travailleurs migrants au profit des familles restées au pays. Quoi qu'il en soit, l'Albanie doit œuvrer à l'amélioration de ses infrastructures et de son réseau de communication, un souci majeur pour le Gouvernement. Un cadre de coopération a été défini dans ce contexte avec le Programme des Nations Unies pour le développement.

Une experte ayant relevé qu'à côté du cadre juridique formel démocratique, il existe des droits coutumiers et traditionnels qui entravent l'accès de la femme à certains de ses droits fondamentaux, M. Hoxha a précisé à cet égard que le droit coutumier, relique du passé, ne fait pas du tout partie du droit national de l'Albanie. Ses résidus culturels continuent cependant d'influencer certains aspects des relations sociales, comme dans le domaine des «crimes d'honneur», a reconnu le représentant. La loi prévoit des peines plus sévères pour lutter contre la «vendetta» et les policiers ont reçu une formation spécialisée.

Une experte du Comité ayant relevé que les renseignements obtenus laissent entendre que, dans la réalité de la vie sociale, le droit coutumier (kanun) continue d'influencer les mentalités, la délégation a confirmé cette réalité dans certaines régions rurales, en matière d'héritage par exemple. La discrimination à l'encontre des femmes dans ce contexte fait l'objet d'actions d'organisations non gouvernementales locales. La loi interdit formellement d'attaquer les jeunes filles et les fillettes; le niveau des crimes de sang a diminué depuis le début de l'année, même si quatre femmes ont été agressées dans le cadre du droit coutumier. Le Gouvernement lutte fermement contre la perpétuation des vendettas; il a organisé des ateliers de sensibilisation en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance. L'action est à ce jour concluante, a estimé la délégation.

À la question de savoir si le Centre national albanais des droits de l'homme répond aux Principes de Paris concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l'homme, la délégation a notamment assuré qu'il n'existe pas de lien entre cette organisation non gouvernementale indépendante et le Gouvernement. Sa mission est de promouvoir l'éducation aux droits de l'homme dans le cadre d'une société civile stable. Cette organisation a fait partie du Groupe de travail pour la préparation des rapports soumis aux organes conventionnels.

La délégation a aussi indiqué que le premier rapport aux organes conventionnels des Nations Unies n'avait pu être présenté qu'en mai 2001, après un retard de six ans. Des efforts considérables ont été accomplis depuis lors, plus aucun retard n'étant désormais à déplorer. Le Gouvernement albanais a toujours fait la preuve de sa volonté de collaborer avec les organisations non gouvernementales pour la préparation de ces rapports. L'assistance technique du Haut Commissariat et du Programme des Nations Unies pour le développement a été mise à profit pour la préparation du présent rapport, a précisé la délégation en réponse à un membre du Comité.

Répondant aux questions des membres du Comité, M. Hoxha a admis certaines lacunes et confusions dans les réponses données dans le rapport s'agissant notamment de la possibilité d'invoquer le Pacte devant les tribunaux, en particulier dans le domaine de l'égalité entre hommes et femmes. M. Hoxha a aussi admis les problèmes que connaît le système judiciaire albanais, soulignant à cet égard les difficultés de la transition de son pays après cinquante ans d'un communisme obscurantiste au point de faire perdre à la population le sens du bien commun. La corruption dans le pays est un fait avéré et c'est un grand souci pour la société albanaise en général, comme l'ont montré les dernières élections législatives, a reconnu M. Hoxha. Le lien entre la justice et les autres organes gouvernementaux et la société en général est complexe. Le Haut Conseil de la justice contrôle l'activité de la justice et l'on recense déjà plusieurs cas de sanctions prises à l'encontre de magistrats défaillants. Le Gouvernement a instauré des règles précises pour la nomination des nouveaux juges, ceux-ci devant être diplômés d'une école spécialisée. Reste que les juges hérités des anciens cadres continuent d'exercer, avec des conséquences parfois indésirables.

M. Hoxha a précisé par ailleurs que les tribunaux albanais ont rendu des jugements sur les questions soulevées par l'application du Pacte. Cependant, ces jugements ne font pas référence explicitement aux articles même du Pacte: les codes spécifiques albanais couvrant les mêmes sujets, c'est à eux que les tribunaux font référence dans leurs arrêts. Un autre membre de la délégation a confirmé que la Cour constitutionnelle avait à plusieurs reprises invalidé des projets de loi contraires aux dispositions du Pacte.

La délégation a par ailleurs précisé que l'ombudsman national a pour mission de défendre les citoyens contre les abus de l'administration. Il est en mesure d'émettre des propositions d'action juridique. L'administration est tenue de lui fournir toute l'information dont il a besoin.

Une seule restriction s'applique au droit des personnes handicapées de se marier, a précisé la délégation: les personnes souffrant de graves maladies mentales doivent disposer de la conscience des obligations qu'impose l'institution du mariage.

La loi albanaise est conforme aux principes internationaux des droits de l'homme. Dans une affaire récente, la Cour constitutionnelle a constaté que la loi enfreignait les traités internationaux signés par l'Albanie relativement à la peine de mort. L'Albanie a, depuis, signé la Convention européenne interdisant la peine de mort et ses Protocoles facultatifs.

Une experte juridique de la délégation albanaise a indiqué que l'indépendance du système judiciaire est reconnue en Albanie, notamment à l'égard du pouvoir politique. Cependant, des difficultés ont émergé pendant les années 1990 en raison de la corruption et du manque de professionnalisme des juges. L'Albanie accorde par conséquent la plus grande importance au renforcement des capacités du personnel judiciaire, avec la création d'une école supérieure qui dispense, outre une formation de base, une formation continue. L'on constate déjà une amélioration des capacités du personnel judiciaire et une diminution de la corruption. L'Albanie s'efforce également de renforcer les contrôles internes. Il existe une loi spéciale régissant le fonctionnement du Haut Conseil de la justice, dont les membres sont élus par les magistrats. La Cour constitutionnelle est chargée de la protection des droits constitutionnels; elle prend surtout des décisions relatives aux droits civils et politiques. Enfin c'est l'article 18 de la Constitution qui fixe le principe de l'interdiction de la discrimination, a précisé la délégation, relevant que des mesures ponctuelles, mais non globales, de «discrimination positive» sont possibles dans le respect toutefois des limites prévues par la Convention européenne des droits de l'homme.

Plusieurs membres du Comité ont fait état d'informations sur la corruption du système judiciaire albanais et de son incompétence. Il semble aussi que les magistrats sont désignés par le pouvoir politique: si cela est vrai, pourquoi le Conseil de la magistrature n'a-t-il pas pris les mesures correctrices nécessaires? Un autre expert, saluant les progrès indéniables accomplis dans le secteur judiciaire depuis la chute du communisme, a néanmoins relevé que le pouvoir judiciaire ne jouit que d'une confiance très limitée dans le public, tant il apparaît incapable d'assumer sa mission de protection des droits des citoyens.

Répondant à d'autres questions, la délégation a d'autre part confirmé que le taux de natalité albanais est en régression, surtout en comparaison avec l'époque communiste. Ce phénomène est certainement lié avec des facteurs internes, tels que le changement de mode de vie et des évolutions culturelles, y compris la généralisation de la politique de planification familiale. Les migrations ne sont probablement à cet égard qu'un facteur parmi d'autres.


Migrations, traite des personnes

Un expert ayant demandé pourquoi l'Albanie n'a pas ratifié la Convention des Nations Unies sur la protection des travailleurs migrants, compte tenu de l'importance de l'émigration en Albanie, la délégation a indiqué que les autorités ont préféré suivre la voie de la Convention européenne en la matière, compte tenu des ses effets plus directement mesurables et adaptés à la situation de son pays. Répondant à d'autres questions sur le problème des migrations, la délégation a précisé que la majorité des émigrants albanais se trouvent en Grèce, en Italie et en Suisse. Il est impossible de chiffrer cette émigration, une estimation couvrant la période 1991-2006 se situant autour du million de personnes. Les conditions de vie des Albanais dans leurs pays de destination sont celles des toutes les personnes à la recherche de meilleures conditions de vie, c'est-à-dire difficiles et avec leur lot d'arbitraire. Les pays d'accueil comme la Grèce ont fait des efforts pour régulariser leur situation, avec l'octroi de permis de séjour, voire de régularisations massives dont profitent aussi les Albanais. Le Gouvernement s'efforce pour sa part de rappeler à ses interlocuteurs leurs obligations résultant des instruments internationaux qu'ils ont ratifiés; il cherche par ailleurs à signer avec eux une convention générale relative à la couverture sociale des travailleurs migrants albanais.

La délégation a en outre indiqué que l'Albanie est désormais associée aux institutions et initiatives européennes relatives aux migrations, aux demandes d'asile et au rapatriement des personnes résidant à l'étranger sans autorisation. Il est ainsi possible de lutter contre l'émigration illégale sur un pied d'égalité avec les autres pays de l'Europe. Un accord a été signé avec l'Union européenne sur la réadmission des résidents illégaux en 2005. Les migrations s'accompagnent parfois d'actes criminels. Le pays a ratifié dans ce contexte des instruments internationaux de lutte contre la traite et les trafics illicites, l'Albanie étant un pays de transit et de destination de la traite d'êtres humains. Cependant, des progrès importants ont été réalisés dans la lutte contre ces phénomènes, qu'il s'agisse de modifications du Code pénal ou de la participation à une équipe spéciale régionale de lutte contre cette catégorie de crimes. La coopération avec les services de police des pays voisins a également été renforcée. Ces mesures ont contribué à compliquer les activités des délinquants, l'action du Gouvernement étant orientée sur la lutte contre la traite des femmes (19 cas résolus) et des enfants à destination d'autres pays de l'Europe de l'Est et occidentaux. Des programmes de protection des témoins sont désormais prévus par la loi albanaise, de même qu'elle établit une coordination des institutions chargées des enquêtes.


Minorités

Un certain nombre d'allégations font état de persécutions commises par les forces de l'ordre contre les Roms, lesquels subiraient également des discriminations dans l'exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, a relevé un expert. D'autres allégations font état de mesures de discrimination à l'encontre des personnes handicapées, dans le domaine du mariage en particulier. Un expert a voulu savoir quelles mesures sont prises protéger la petite minorité grecque des discriminations, et pour défendre les droits des travailleurs albanais émigrés. Quelle est l'importance numérique respective des minorités? Combien de Roms, et combien d'"Égyptiens», dont certains rapports laissent entendre qu'ils ne sont pas reconnus comme minorité et qu'ils ne sont pas protégés par la Constitution albanaise.

En réponse à ces questions, la délégation a informé le Comité que trois minorités ethniques sont reconnues, grecque (1,2% de la population), macédonienne (moins de 1%) et monténégrine (moins de 1% également), ainsi que deux minorités linguistiques, dont la minorité rom: cette dernière compte environ 92 000 personnes, réparties en deux sous-minorités, dont l'une qui se qualifie elle-même d'égyptienne, mais sans reconnaissance du Gouvernement de l'Égypte. En 2003, le Gouvernement a adopté une stratégie globale d'amélioration des conditions de vie de la population rom. L'Albanie dispose d'un arsenal juridique complet destiné à faire respecter les droits des minorités, Roms compris. Des cas isolés de mauvais traitements par la police sont à déplorer, mais liés davantage aux dysfonctionnements des forces de l'ordre qu'à une volonté de nuire aux Roms en particulier. Tous les cas signalés ont fait l'objet d'enquêtes et, le cas échéant, des sanctions ont été prises contre les responsables, a assuré M. Hoxha.

Quant aux rapports entre les autorités et la minorité grecque, ils sont excellents, a dit la délégation, sous la supervision d'un comité d'État lui-même conseillé par des membres de conseils représentant les différentes ethnies.

Un membre du Comité s'est dit étonné d'entendre que les Roms ne sont pas considérés comme une minorité ethnique, mais uniquement comme une minorité linguistique. Contrairement à ce qui a été dit, les Roms semblent bien constituer la première minorité ethnique d'Albanie. Qu'en est-il plus précisément du statut des Roms «égyptiens», ont également demandé plusieurs experts du Comité, un expert rappelant qu'un émir albanais fut à l'origine de la dynastie régnant en Égypte jusqu'à la seconde guerre mondiale. Quoi qu'il en soit, il apparaît que ces personnes peuvent être considérées à tout le moins comme des non nationaux, a dit l'expert: il resterait alors à déterminer comment l'Albanie s'applique à défendre les droits économiques de ces personnes dans cette optique, une obligation qui découle ipso facto des dispositions du droit international.

La délégation a expliqué que la répartition entre minorités ethniques et linguistiques a été opérée en fonction des dispositions de la Convention européenne sur la protection des minorités ratifiée par l'Albanie. Les Roms dont il est question sont citoyens albanais. Certains revendiquent par ailleurs une appartenance ethnique que le Gouvernement a choisi de respecter. Roms ou Égyptiens, il s'agit d'une minorité présente sur tout le territoire albanais, a précisé la délégation.

Droit au travail, droit à la sécurité sociale

L'Albanie déploie une stratégie nationale d'emploi et de formation professionnelle, a indiqué la délégation en réponse à plusieurs questions sur ce thème. Les chiffres du chômage correspondent au nombre de personnes inscrites dans les agences nationales pour l'emploi. La loi prévoit la promotion de l'emploi des femmes et des mesures de sécurité. Un programme spécifique a ouvert des postes à l'intention des femmes demandeuses d'emploi. Un décret adopté en 2004 par le Ministère du travail organise la formation professionnelle des jeunes filles rom, en particulier.

À la question de savoir si les allocations sociales sont ciblées en faveur des familles qui en ont vraiment le plus besoin, la délégation a précisé que toute famille qui répond aux critères fixés par la loi a droit à une aide financière illimitée. Près de 120 000 familles en bénéficiant actuellement, il est clair que des fraudes sont possibles, des enquêtes sont d'ailleurs en cours à ce propos.

Le taux de chômage, qui touche environ 14% de la population active, est particulièrement élevé chez les Roms et les Égyptiens (90%), a reconnu la délégation, qui a ajouté que le phénomène est difficile à expliquer, mais provient probablement de très fortes lacunes en matière d'éducation. Les Roms sont néanmoins intégrés au système national de protection sociale, comme les autres citoyens albanais. L'allocation de chômage est versée pendant un an, à 100%.

Un programme d'incitation au travail a été lancé au profit des mères de familles nombreuses, des femmes souffrant de handicaps et des femmes rom, a indiqué la délégation en réponse à des questions sur les politiques d'action affirmative du Gouvernement à l'intention des groupes les plus défavorisés.

Un membre du Comité ayant voulu savoir si le niveau du salaire minimum permet à une famille d'ouvriers de vivre correctement, M. Hoxha a fait savoir que le niveau du salaire minimum dans le secteur public est révisé chaque année en fonction de l'évolution du coût de la vie. La prestation actuelle est de 140 dollars par mois, une somme qui permet tout juste de couvrir les besoins de base, a-t-il reconnu.

En réponse à d'autres questions, la délégation a indiqué que le principe de l'égalité du salaire pour un travail égal, est inscrit dans la loi et parfaitement respecté. La fiche de salaire albanaise est limpide, les catégories professionnelles immuables, aussi ne compte-t-on pas de cas de discrimination salariale à l'égard des femmes, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs reconnu que l'inspection du travail est encore déficiente en Albanie et qu'il est en l'état difficile de donner des précisions sur l'incidence des accidents professionnels. Il semble pourtant que le nombre des accidents est en baisse, avec 51 accidents en 2005 et 34 en 2006 (chiffres provisoires).

La délégation a dit ne pas disposer de chiffres précis quant aux cas de harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Cependant les médias se sont faits l'écho de cas survenus récemment. L'Albanie ne possède pas de lois spécifiques à ce sujet, les incidents étant généralement incriminés comme autant d'abus de pouvoirs.


Liberté syndicale

Un expert du Comité ayant demandé des précisions sur la représentativité des syndicats, la délégation a fait savoir que le droit de grève et de former des syndicats est pleinement consacré par la loi albanaise. Deux confédérations syndicales principales existent en Albanie, lesquelles comptent chacune 90 000 membres et sont affiliées à des fédérations européennes ou mondiales. Le rapport initial donne des informations sur la liberté syndicale et le droit du travail.

Un expert ayant observé que de nombreux secteurs d'activité, y compris le secteur public en général, sont privés du droit de grève, la délégation a confirmé ces informations, précisant que la participation aux associations professionnelles est néanmoins autorisée. La délégation a aussi confirmé que les enseignants engagés au niveau municipal ont le statut de fonctionnaires, à côté des autres employés de l'administration et des institutions indépendantes mais relevant de l'autorité de l'État, et qu'ils n'ont donc pas le droit de grève. Les grèves doivent être précédées d'une procédure de négociation et, en cas d'échec, d'un préavis.

Un expert ayant demandé quels mécanismes autres que le droit de grève permettent aux fonctionnaires de faire connaître leurs doléances, la délégation a signalé l'existence d'une commission de la fonction publique, dont les arbitrages ont force de loi. Ses décisions sont elles-mêmes attaquables devant les Cours d'appel.


Sécurité sociale

Aucun obstacle juridique ne s'oppose à la ratification des Conventions de l'Organisation internationale du travail relatives à la protection sociale, a indiqué la délégation, précisant qu'il s'agissait d'une question de temps et non d'absence de volonté politique. Une réforme des services sociaux a par ailleurs été introduite en mars 2005: elle prévoit une stratégie nationale qui sera complétée par un plan d'application. La réforme des services sociaux est engagée, avec notamment leur décentralisation et l'octroi de licences à des opérateurs publics et privés pour la fourniture de certaines prestations sociales. Trois autres normes seront introduites au profit des personnes handicapées, des personnes victimes de la traite et des personnes âgées, a ajouté la délégation.

La Convention de l'Organisation internationale du travail sur la maternité a été ratifiée, ainsi que celle relative aux pires formes de travail des enfants (n°182); d'autres ratifications sont à l'étude, a indiqué la délégation.


Protection de la famille

Un expert ayant observé que l'Albanie n'a pas ratifié le Protocole facultatif à la Convention des droits de l'enfant relatif à la participation des enfants aux conflits armés, la délégation a fait valoir que son Gouvernement ne voit aucun obstacle à la ratification de ce protocole, précisant que plusieurs autres instruments dans ce domaine ont été signés mais pas encore ratifiés. Le Gouvernement a pris des mesures spécifiques de lutte contre les pires formes de travail des enfants qui sont basées sur les dispositions de la Convention n°182 de l'Organisation internationale du travail. La loi réglemente strictement la durée du travail des enfants et prévoit les modalités de leur formation professionnelle. Les mineurs peuvent occuper certains postes ne présentant pas de risques pour leur santé. Le travail de nuit leur est interdit.

Le Ministère du travail a mis en place une unité spéciale chargée de lutter le travail des enfants en 2002. Cette unité met en place des programmes et des projets et informe le public. Un autre organe de coordination est chargé de mettre en œuvre le programme national d'élimination du travail des enfants. L'action vise dans un premier temps les pires formes du travail des enfants. Des stratégies et politiques sont étudiées à cet égard en collaboration avec des partenaires de la société civile.

L'âge du mariage est fixé à 18 ans en général. Les relations sexuelles avec des mineurs de moins de 14 ans sont sanctionnées par le Code pénal par 7 à 15 ans de prison (de 15 à 25 ans si elles s'accompagnent de violence); et avec des mineurs de 14 à 18 ans par 5 à 15 ans (20 ans ou plus si elles s'accompagnent de violence).

La loi albanaise relative aux enfants est conforme à la Convention sur les droits de l'enfant. La définition de l'enfant en Albanie est celle qu'en donne ladite Convention, soit un individu âgé de moins de 18 ans.

Les autorités luttent contre la violence domestique commise contre les femmes et les jeunes filles en procédant à une refonte de la loi sur l'égalité entre les sexes. Le cadre juridique prévoit déjà l'égalité entre tous les citoyens, mais les violences de toute nature exercées par les proches est encore peu signalé par les victimes. La stratégie nationale permettra de récolter des données sur ces agissements et de protéger les femmes victimes avec l'appui des organisations non gouvernementales, en particulier.

L'Albanie est préoccupée par le nombre des viols commis sur des mineurs (quinze cas) et par les 23 cas de traite de femmes recensés. On peut en outre craindre des cas de traite d'enfants. Le Code pénal incrimine la prostitution et la traite des personnes. Toute personne qui s'adonne à la prostitution est passible de sanctions. L'exploitation de la prostitution est aussi condamnée le Code pénal, de même qu'il prévoit des peines contre les formes d'exploitation liées à la prostitution. Le Code pénal inclut ses dispositions dans son chapitre concernant la protection de la moralité publique, ce qui est insuffisant dans la mesure où il s'agit de violations des droits de la personne; un changement est à l'étude.

Des stratégies nationales de lutte contre la traite des personnes sont déjà appliquées en Albanie, elles prévoient en particulier la protection des témoins. Les enfants victimes de la traite sont notamment protégés par un accord passé avec la Grèce, visant à faciliter le retour des enfants d'un pays à l'autre. Des campagnes de réinsertion scolaire des enfants des rues sont en outre menées. Une ligne téléphonique d'aide gratuite a été mise en place afin que puissent être dénoncés les cas de traite. Des mesures d'aide sociale et éducative sont à l'étude. Le Ministère du tourisme mène une action de sensibilisation sur le problème de la traite des femmes et des enfants. Les victimes potentielles, en particulier les jeunes enfants, sont la cible de campagnes de sensibilisation aux dangers qu'elles peuvent courir.

Revenant sur des questions liées à la structure sociale encore patriarcale et à l'application du kanun, le code d'honneur traditionnel, la délégation, tout en confirmant leur existence dans certaines régions, a minimisé leur influence au niveau global étant donné l'existence d'un cadre juridique permettant aux femmes et aux enfants, notamment, de faire valoir leurs droits. Au niveau de la société civile, d'importants efforts sont déployés pour résoudre les conflits par la négociation et pour garantir la scolarisation des enfants pris dans les conflits.

Quant à la polygamie, elle est interdite par la loi et aucun cas n'a encore été signalé en Albanie, a dit la délégation en réponse à la question d'un expert.


Droit à un niveau de vie acceptable, droit au logement

Un membre du Comité a observé que, selon les chiffres 2002 du Gouvernement albanais, un quart de la population vivait sous le niveau officiel de pauvreté, dont la moitié ont moins de 21 ans. Les communautés rom et égyptienne sont les plus touchées.

En réponse à d'autres questions, la délégation a notamment indiqué que des programmes sociaux de logement sont prévus pour les personnes vivant en région urbaine; le but est d'aider toutes les personnes qui en ont besoin à accéder à un logement. La loi exige des municipalités qu'elles prévoient des mesures d'aide au logement dans la mesure de leurs moyens. Elles ont commencé à distribuer des questionnaires destinés à préciser l'ampleur de la demande. Des familles ont déjà pu obtenir des logements. Il est prévu d'élargir la portée de ces programmes qui bénéficieront de financements publics.

Suite à une question sur les conditions dans lesquelles sont menées les expulsions de Roms et d'Égyptiens vivant dans des logements illégaux, la délégation a précisé que l'expulsion forcée est considérée comme un mesure de dernier recours, à n'utiliser qu'après avoir épuisé les autres possibilités. Cette mesure peut s'accompagner de mesures compensatoires pour les personnes qui les subissent. Par ailleurs l'expulsion forcée ne s'applique que dans des cas d'utilité publique.

En 2005, le PIB par habitant a atteint 2580 dollars, en augmentation probable en 2006. Cette évolution positive est favorable aux classes les plus pauvres, comme l'a montré une étude statistique menée avec la Banque mondiale entre 2002 et 2005 auprès de plus de 3500 foyers. L'étude conclut à une répartition satisfaisante des fruits de la croissance, grâce notamment à la libéralisation de l'économie. La croissance est aussi due aux transferts de fonds en provenance de l'étranger. La consommation réelle des familles pauvres a augmenté de 11%. Plus de 18,5% de la population est pauvre, contre plus de 20% en 2002. Les trois quarts des pauvres vivent en région rurale et de montagne. L'étude confirme le rôle important de la croissance dans la réduction de la pauvreté. Le Gouvernement entend donc poursuivre dans sa politique économique actuelle.


Droit à la santé

L'Albanie a pris des mesures pour mettre gratuitement certains médicaments à la disposition de la population. La qualité des produits alimentaires est contrôlée par un service national. L'utilisation des préservatifs est encouragée pour limiter la diffusion du VIH/sida.

Un membre du Comité ayant fait état d'informations selon lesquelles, en 1989, 50% des décès de femmes étaient causés par des avortements mal pratiqués, la délégation a affirmé que l'Albanie est préoccupée par le problème de l'avortement. L'interruption de grossesse est interdite après la douzième semaine. Il est pratiqué dans des cliniques privées et d'État. Certains établissements ont dû être fermer pour avoir pratiqué des avortements au-delà du délai légal. On ne signale pas aujourd'hui de cas de décès maternel causé par un avortement. Un nouveau modèle d'autorité sanitaire régionale a été mis sur pied, accompagné d'une nouvelle stratégie de formation à la santé. Le rôle du ministère de la santé sera renforcé, la qualité des services devant être améliorée.

Les soins de santé mentale seront bientôt régis par de nouvelles normes de traitement prévoyant la fermeture des structures étatiques traditionnelles au profit d'unités de soins autonomes et décentralisées. Quant aux soins dentaires, un problème important en Albanie, la priorité est à l'amélioration de la qualité des services aux patients.

Fournissant des renseignements complémentaires sur les questions de santé, la délégation a notamment indiqué qu'une loi antitabac a été approuvée il y a quelques jours. Par ailleurs, le sida et les maladies sexuellement transmissibles sont en très forte progression depuis 1995 et des mesures ont été prises par le Ministre de la santé pour faire face à la pandémie. Par ailleurs 13,2% des personnes âgées de 19 à 22 ans se sont révélées positives au dépistage de l'hépatite. La syphilis a aussi fait un retour inquiétant. L'Institut pour la santé indique que le nombre de séropositifs dans le pays est de 201 (139 hommes, 62 femmes); la moitié de ces personnes sont dans des situations de vulnérabilité.

Des activités de formation sont organisées et l'utilisation des préservatifs encouragée auprès des jeunes. Les éducateurs et les membres des forces armées sont sensibilisés aux exigences de la prévention du sida. Des centres de dépistage anonymes ont été ouverts.


Droit à l'éducation, droit de participer à la vie culturelle

En réponse à plusieurs questions des membres du Comité, la délégation a fait valoir que l'Albanie s'efforce d'accueillir dans ses écoles tous les enfants sans exception. Le Ministère de l'éducation a adopté un nouveau plan pour l'enseignement pré-universitaire. La durée de l'enseignement obligatoire a été portée à neuf ans; le système va progressivement être mis en conformité avec ceux des pays voisins. Le plan prévoit aussi l'introduction de services de soutien psychologique aux élèves, en particulier aux élèves rom. D'autres mesures concernent explicitement la scolarisation des Roms, les autorités académiques locales étant tenues d'informer régulièrement sur la réalisation de ces mesures.

Le Ministère de l'éducation a lancé une initiative de rattrapage à l'intention des enfants rom ayant abandonné leur scolarité. Des instructions gouvernementales visent à faciliter l'inscription de tous les enfants, y compris ceux ne disposant pas de certificat de naissance. Le Ministère a aussi décidé de construire des écoles dans les zones en besoin. Des crèches et des classes spéciales ont été créées dans différentes régions du pays à l'intention des Roms. Des classes d'alphabétisation ont été ouvertes. Les enseignants ont été recrutés autant que possible au sein de la communauté rom. Le Gouvernement incite les familles à envoyer leurs enfants dans les établissements scolaires ainsi mis à leur disposition, établissements qui prévoient un enseignement de la langue rom.

Un expert ayant voulu savoir quelles normes minimales l'État a imposées au secteur de l'éducation privée, qui est florissant en Albanie, la délégation a précisé que le secteur privé est autorisé par une disposition de la Constitution. Trente-trois établissements pré-universitaires privés respectent les différents cycles d'enseignement et les directives ad hoc promulguées par le Ministère. Les établissements privés doivent, depuis 1995, obtenir une autorisation formelle d'exercer; ils regroupent entre 3% (préscolaire) et 70% (formation technique) de la population scolaire. Leurs principaux atouts sont perçus par la population comme étant la formation aux langues étrangères, l'accès à un personnel qualifié et des ressources pédagogiques importantes. Cependant, aucune étude systématique n'a pu établir les niveaux de qualité respectifs des enseignements privé et public, dont il faut remarquer que le second accueille toujours 98% des élèves. Les universités privées quant à elles sont au nombre de seize, localisées pour l'essentiel à Tirana.

Face à cette concurrence, et malgré l'augmentation du budget consacré à l'école publique, le Gouvernement est conscient qu'il devra consentir des moyens plus importants encore, surtout dans le post-secondaire, afin de mieux répondre aux besoins du marché du travail. L'État entend aussi veiller à ce que les zones défavorisées soient dotées des ressources scolaires adéquates.

La délégation a précisé que les salaires des enseignants à l'université dépendent de leurs diplômes, et qu'ils sont très supérieurs à ceux des enseignants des autres cycles.

Le nombre de nouveaux étudiants inscrits dans les universités est fixé par des quotas. Des concours nationaux sont organisés chaque année; en fonction des résultats obtenus, les étudiants peuvent s'inscrire gratuitement dans les universités et les départements. Les étudiants ayant échoué aux concours peuvent s'inscrire dans les universités privées.

Le Ministère destine des bourses partielles ou complètes aux étudiants les plus nécessiteux, vivant très loin de chez eux ou issus de milieux défavorisés. Les montants sont révisés à la hausse si l'étudiant obtient de bons résultats.

Un expert ayant demandé quel pourcentage du budget national est accordé à la politique culturelle de l'État, la délégation a indiqué que ce chiffre était de 0,5%. L'État, par le biais du Ministère de la culture, et à défaut de stratégie culturelle nationale, n'en promeut pas moins les différents aspects de la culture albanaise, par des subventions à l'édition ou à la création théâtrale par exemple.

Des éclaircissements ont été apportés concernant les poursuites judiciaires engagées par le Gouvernement contre un professeur de géographie au motif de «menées antinationales», comme le signalait un expert du Comité avec quelque inquiétude. Le litige portait en fait sur un problème de droit d'auteur, a tenu à préciser la délégation.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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