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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE

Compte rendu de séance

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du quatrième rapport périodique de la Fédération de Russie sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Valery Loshchinin, Représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies à Genève, a fait valoir que, dans le droit interne russe, le concept de torture a été doté d'un sens plus large que celui énoncé dans la Convention contre la torture. La protection contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants est absolue en Fédération de Russie et ne saurait être limitée en aucune circonstance, y compris dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, a-t-il assuré. Il a par ailleurs indiqué que le Gouvernement a adopté au mois de septembre un programme fédéral pour 2007-2016 pour mettre en conformité les dispositions en matière de détention avec les normes du Conseil de l'Europe. Récemment, la Douma a adopté en première lecture un projet de loi prévoyant la création de tribunaux pour mineurs, a-t-il ajouté. En vertu d'un décret présidentiel récemment adopté, a-t-il poursuivi, est prévue la création de conseils sociaux dont le rôle sera notamment d'inspecter les lieux de détention préventive et autres lieux de détention.

Abordant la question du meurtre de la journaliste Anna Politkovskaïa, M. Loshchinin a indiqué que son Gouvernement n'avait aucune information qui permette de penser que ce crime pouvait être lié au fait que la journaliste cherchait à recueillir des informations sur des actes de torture dans la région du Nord-Caucase, comme l'a suggéré le Rapporteur spécial sur la torture, M. Manfred Nowak. S'agissant de la visite que M. Nowak devait effectuer en Fédération de Russie, il a souligné qu'elle avait été reportée du fait que «parmi les exigences présentées par M. Nowak en vue de cette visite, figuraient des aspects qui ne concordaient pas avec les exigences de la législation russe» et a assuré que la Fédération de Russie n'a aucune réticence à l'égard de cette visite. «Nous espérons que cette visite pourra se dérouler prochainement», a-t-il ajouté.

Outre M. Loshchinin, la délégation de la Fédération de Russie était également composée de représentants du Ministère de la défense; du Ministère de l'intérieur; du Ministère des affaires étrangères; du Service fédéral pour l'exécution des peines; et de la Mission permanente de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies à Genève. Elle a notamment informé le Comité des mesures prises pour réformer le système d'application des peines, pour prévenir les crimes au sein des forces armées et pour rendre les conditions de détention dans le pays conformes aux normes de la législation russe et du droit international. Un nouveau règlement intérieur a été adopté en 2005 pour les maisons d'arrêt, qui prévoit un examen médical obligatoire des personnes détenues à leur arrivée, durant leur détention et à leur sortie de la maison d'arrêt, a-t-il notamment été souligné. La délégation a aussi souligné que les dépositions obtenues en l'absence d'un défenseur et non confirmées devant un tribunal ne sont pas recevables.

La rapporteuse pour l'examen du rapport de la Fédération de Russie, Mme Felice Gaer, a notamment souhaité en savoir davantage sur les résultats des inspections opérées dans les lieux de détention. Elle s'est en outre enquise de la prise en compte du risque de torture dans le contexte de l'extradition de 14 Ouzbeks arrêtés en juin 2005 et accusés d'avoir pris part aux événements d'Andijan de mai 2005. Elle a aussi souhaité connaître les exigences de la législation russe évoquées par la Fédération de Russie pour reporter de la visite du Rapporteur spécial sur la torture, M. Manfred Nowak. Mme Gaer a par ailleurs souhaité savoir si les autorités russes avaient enquêté sur les faits évoqués dans le dernier article publié par Anna Politkoskaïa avant son assassinat. Mme Gaer a déclaré avoir reçu des informations faisant état de cas de détentions injustifiées et de personnes portées disparues en République de Tchétchénie. La co-rapporteuse, Mme Essadia Belmir, a pour sa part noté qu'il semble qu'en affirmé qu'en République de Tchétchénie, l'on soit presque dans une situation d'exception qui ne dit pas sans non. Elle a en outre affirmé que le pouvoir judiciaire souffre encore d'inefficacité, de partialité et surtout de corruption.


Cet après-midi, à 17 heures, les membres du Comité continueront de poser des questions à la délégation russe, qui présentera ses réponses lundi après-midi, à 15 heures. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité il entendra les réponses de la délégation du Burundi aux questions que lui ont adressées les experts hier matin.


Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, M. VALERY LOSHCHININ, Représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que la Fédération de Russie est partie à la quasi-totalité des instruments universels fondamentaux en matière de droits de l'homme et collabore avec les organes conventionnels de droits de l'homme, notamment avec le Comité contre la torture. Ces dernières années, a-t-il ajouté, une attention accrue a été accordée aux questions de la prévention active de la torture et de la sanction de la pratique inacceptable de la torture. La Fédération de Russie utilise activement les recommandations du Comité contre la torture pour orienter l'évolution de la législation nationale dans ce domaine. Des mesures ont donc été prises pour donner effet à ces recommandations, a insisté M. Loshchinin.

À titre d'exemple, M. Loshchinin a fait état de l'étape importante qu'a constitué l'intégration du concept de torture dans la législation nationale russe. Dans le droit interne russe, le concept de torture a été doté d'un sens plus large que celui énoncé dans la Convention contre la torture, même si la définition de la torture qui a été retenue ne concorde pas totalement avec les dispositions de l'article premier de la Convention, a précisé le Représentant permanent. Alors que la Convention parle uniquement de torture imputable aux agents de l'État ou autres personnes exerçant des fonctions officielles, le Code pénal russe étend la portée de la définition de la torture à toute personne âgée de 16 ans. La torture est passible de lourdes sanctions, a ajouté M. Loshchinin.

Le représentant russe a par ailleurs précisé que dans tous les cas de détention illégale ou d'enlèvements de citoyens, des enquêtes sont réalisées et, le cas échéant, des procédures pénales engagées. En Fédération de Russie, a-t-il ajouté, la protection contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants est absolue et ne saurait être limitée en aucune circonstance, y compris dans le contexte de la lutte contre le terrorisme; ce principe est consacré par une loi fédérale du 6 mars 2006 portant sur la lutte contre le terrorisme.

De nouvelles règles de fonctionnement interne des lieux de détention préventive et des établissements correctionnels ont récemment été fixées en vue d'améliorer les services médicaux et les conditions de détention des personnes détenues et condamnées, a poursuivi M. Loshchinin. Les autorités ne considèrent pas que les services médicaux dans les lieux de détention soient idéaux, mais des mesures ont été prises pour améliorer la situation dans ce contexte, a-t-il insisté. Le Gouvernement russe a adopté au mois de septembre dernier un programme fédéral pour les années 2007-2016 qui vise à faire en sorte que le traitement des personnes placées en détention préventive et autres personnes privées de liberté soit mis en conformité avec les normes du Conseil de l'Europe; ce programme est doté d'un budget équivalant à 2 milliards de dollars.

Récemment, la Douma a adopté en première lecture un projet de loi prévoyant la création de tribunaux pour mineurs, a par ailleurs indiqué M. Loshchinin. Il a en outre souligné que ces dernières années, les tribunaux militaires ont examiné un grand nombre d'affaires relatives au bizutage des recrues. Il existe certes en la matière des cas flagrants; mais il existe aussi dans ce domaine une transparence indéniable, puisque ces questions sont abordées dans les médias, a fait valoir le Représentant permanent de la Fédération de Russie. En vertu d'un décret présidentiel récemment adopté, a-t-il poursuivi, est prévue la création de conseils sociaux dont le rôle sera notamment d'inspecter les lieux de détention préventive et autres lieux de détention.

Abordant la question du décès de la journaliste Anna Politkovskaïa, M. Loshchinin a relevé que le Rapporteur spécial sur la torture, M. Manfred Nowak, avait suggéré dans une lettre que ce crime pouvait être lié au fait que la journaliste cherchait à recueillir des informations sur des actes de torture dans la région du Nord-Caucase: «Nous n'avons aucune information qui permette de penser que tel est le cas», a déclaré le Représentant permanent. Il a indiqué que cette affaire avait été transmise aux services spécialisés du Procureur général de la Fédération de Russie. S'agissant du report de la visite que M. Nowak devait effectuer en Fédération de Russie, M. Loshchinin a assuré que la Fédération de Russie n'a aucune réticence à l'égard de cette visite. Cette visite doit néanmoins s'effectuer dans le cadre de la législation russe, a souligné le Représentant permanent. Parmi les exigences présentées par M. Nowak en vue de cette visite, figuraient des aspects qui ne concordaient pas avec les exigences de la législation russe, a indiqué M. Loshchinin. M. Nowak a donc pris la décision de ne pas se rendre pour l'instant en Fédération de Russie. «Nous espérons que cette visite pourra se dérouler prochainement», a déclaré le Représentant permanent.

M. VLADIMIR SEMENYUK, Directeur adjoint du Service fédéral pour l'application des peines, a informé le Comité des mesures prises pour réformer le système d'application des peines. Plusieurs projets de lois en ce sens ont été transmis pour expertise à diverses organisations, a-t-il indiqué. Généralement, a poursuivi M. Semenyuk, la peine maximale de privation de liberté pour les mineurs ne doit pas dépasser dix ans. Les personnes inculpées pour un crime commis avant l'âge de 16 ans ne peuvent être punies d'une peine privative de liberté de plus de six ans, a-t-il précisé. Seule une petite partie des mineurs condamnés pour crime en Fédération de Russie est condamnée à une peine privative de liberté, a souligné M. Semenyuk; les mineurs condamnés à une telle peine sont alors détenus dans des établissements distincts de ceux accueillant les adultes condamnés.

M. Semenyuk a indiqué que le nombre de personnes placées en détention dans les colonies pénitentiaires est d'un peu plus de 690 000; en outre, 152 000 personnes prévenues et inculpées sont détenues dans les maisons d'arrêt. Il a en outre fait état d'un arrêt, datant d'octobre 2005 et relatif à l'octroi d'une aide médicale aux personnes placées en détention provisoire, en vertu duquel est garanti l'accès de ces personnes à une aide médicale conforme aux normes internationales, que ce soit pour le diagnostic d'une maladie ou pour son traitement. En 2005, on a dénombré 2088 personnes décédées dans les établissements pénitentiaires, a indiqué M. Semenyuk. Le taux de mortalité est 3,2 fois moindre dans les établissements pénitentiaires que dans l'ensemble du pays, a-t-il souligné.

M. VYACHESLAV TERESHENKO, Chef du Département juridique du Ministère de la défense de la Fédération de Russie, a quant à lui fait part des mesures prises en matière de prévention des crimes au sein des forces armées de la Fédération de Russie. Est en train d'être élaborée une charte des forces armées de Fédération de Russie qui sera conforme aux normes internationales en la matière, a-t-il notamment précisé. En vertu de la Constitution russe, a-t-il rappelé, la mise en détention ne peut être prononcée que par un juge. Il a fait part de l'élaboration d'un projet de loi relatif à la procédure de mise en détention disciplinaire dont la nouveauté est qu'en cas de violation grave imputable à un militaire, l'arrestation et le placement en détention peuvent être prononcés par le commandement avec l'accord du juge.

Afin d'éradiquer la pratique du bizutage, des mesures sont prises tant sur le plan réglementaire que sur le plan de l'éducation et de la prévention, a poursuivi M. Tereshenko. La durée du service militaire va être ramenée à 18 mois au 1er janvier 2007 et à 12 mois au 1er janvier 2008, a-t-il par ailleurs indiqué.

M. VALENTIN MILEHIN, Chef adjoint du Département de protection de l'ordre public au Ministère de l'intérieur de la Fédération de Russie, a fait part des mesures prises afin de rendre les conditions de détention dans le pays conformes aux normes de la législation russe et du droit international. Un nouveau règlement intérieur a été adopté en 2005 pour les maisons d'arrêt, qui prévoit un examen médical obligatoire des personnes détenues à leur arrivée, durant leur détention et à leur sortie de la maison d'arrêt, a-t-il indiqué. Le refus de procéder à un tel examen peut faire l'objet d'un recours devant le Procureur, a précisé M. Milehin. Il a en outre indiqué que 51 maisons d'arrêt ont été fermées en 2005 pour non conformité à la loi fédérale pertinente.

M. MIKHAIL LEBEDEV, Directeur adjoint du Département pour la coopération humanitaire et les droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a pour sa part rappelé qu'en Fédération de Russie, les dépositions obtenues en l'absence d'un défenseur et non confirmées devant un tribunal ne sont pas recevables. En 2004, 3635 collaborateurs des maisons d'arrêt et des établissements pénitentiaires ont fait l'objet de poursuites en justice, plusieurs d'entre eux ayant notamment été licenciés. Suite à l'entrée de la Fédération de Russie au Conseil de l'Europe, la peine de mort n'est plus appliquée dans le pays depuis 1996. En Fédération de Russie, l'extradition n'est pas accordée s'il n'est pas garanti que la personne extradée ne se verra pas infliger la peine capitale dans le pays vers lequel elle doit être extradée, a par ailleurs rappelé M. Lebedev. La Fédération de Russie accorde une attention particulière aux plaintes pour violations des droits de l'homme commises en République de Tchétchénie et répond en temps voulu aux réclamations des organes internationaux de droits de l'homme, a-t-il par ailleurs indiqué.

M. ALEXEY GOLTYAEV, Deuxième Secrétaire du Département pour la coopération humanitaire et les droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a souligné que les tribunaux de la Fédération de Russie se doivent d'appliquer les dispositions des instruments internationaux ratifiés par le pays, y compris la Convention contre la torture. L'utilisation de la torture à des fins d'obtention d'aveux est considérée comme un crime contre la justice, passible de peines d'emprisonnement. En outre, la torture est considérée comme un crime universel et la loi pénale protège à cet égard aussi bien les citoyens russes que les étrangers voire les apatrides, a souligné M. Goltyaev.

Le quatrième rapport périodique de la Fédération de Russie (CAT/C/55/Add.11), qui porte sur la période 2000-2004, indique que la loi fédérale 8 décembre 2003 modifiant et complétant le Code pénal assortit l'article 117 dudit Code d'une note selon laquelle le terme «torture» désigne les souffrances physiques ou mentales infligées à une personne aux fins d'obtenir d'elle une déclaration ou d'autres actes contraires à sa volonté, de la punir ou à d'autres fins. Le 1er juillet 2002 est entré en vigueur un nouveau Code de procédure pénale qui contient un certain nombre d'innovations, parmi lesquelles: la consécration du principe de l'interdiction de recourir à la violence et à la torture, d'accomplir des actes et de prendre des décisions de caractère humiliant à l'égard d'une partie à une procédure pénale, de la soumettre à un traitement dégradant ou mettant en danger sa vie ou sa santé; la limitation à 48 heures de la durée de la garde à vue d'un suspect; l'attribution au tribunal de la compétence exclusive pour ordonner le placement en détention provisoire et l'internement dans un établissement médical ou psychiatrique aux fins d'être soumis à l'examen d'experts ou à des mesures coercitives de nature médicale; l'abrogation de la disposition prévoyant le placement en détention provisoire à titre préventif pour des motifs liés au seul caractère dangereux de l'infraction; ainsi que l'introduction d'une disposition fixant le temps durant lequel un prévenu peut être placé en détention provisoire pendant l'examen de son cas par les tribunaux et les modalités de la prolongation de cette détention, réduisant ainsi de façon drastique (de plus de 40 000) le nombre de personnes placées en détention provisoire. Conformément à l'article 75 du Code de procédure pénale, les dépositions d'un suspect ou d'un inculpé faites au cours de l'enquête préliminaire ou de l'instruction en l'absence d'un défenseur − y compris lorsque l'assistance d'un défenseur a été refusée − et qui n'ont pas été confirmées par le suspect ou l'inculpé à l'audience, de même que les autres éléments de preuve recueillis en violation de la loi, sont irrecevables et ne peuvent pas être retenus à charge, précise en outre le rapport.

En ce qui concerne la situation dans la République de Tchétchénie, il convient de noter que les opérations antiterroristes conduites sur le territoire de celle-ci s'appuient sur la loi fédérale du 25 juillet 1998 relative à la lutte contre le terrorisme, qui a été considérée comme pleinement compatible avec les prescriptions de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par un groupe de travail réunissant des spécialistes russes et des experts du Conseil de l'Europe. Une disposition ajoutée au Code pénal en 2004 dispose que, dans le cas d'un certain nombre d'infractions visées dans le Code - telles que terrorisme, incitation au terrorisme, prise d'otage, organisation d'une formation armée illicite, banditisme, attentat à la vie d'une personnalité politique, notamment -, le suspect soumis à une mesure d'intervention préventive doit être inculpé au plus tard dans les 30 jours suivant l'application de la mesure en question et, dans le cas où le suspect a été gardé à vue avant d'être placé en détention provisoire, dans les 30 jours à compter du moment de son arrestation. Si aucune inculpation n'a été notifiée dans ce délai, la mesure d'intervention préventive est levée immédiatement.

Dans la période d'exécution d'opérations militaires et de mise en place d'organes du pouvoir légitimes et d'un ordre constitutionnel dans la République de Tchétchénie, il est particulièrement nécessaire d'assurer l'ordre public et la sûreté publique, ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les organes chargés de l'application des lois. Ainsi, dans cette phase des opérations antiterroristes, il importe de continuer à prendre toutes les dispositions nécessaires pour éviter que les militaires et les agents des organes chargés de l'application des lois ne commettent des infractions susceptibles de ternir l'image des autorités fédérales, affirme le rapport. Une directive du Commandement opérationnel régional a été communiquée en 2003 aux responsables des forces de l'ordre et des services de sécurité participant aux opérations antiterroristes pour prévenir les infractions et les violations des droits des citoyens par les effectifs des forces de l'ordre et des services de sécurité. La Procurature de la République de Tchétchénie et le parquet militaire du Groupe unifié dans la région du Nord-Caucase supervisent conjointement le respect de la légalité par les agents des opérations antiterroristes. En 2003, cette activité a conduit à l'ouverture de poursuites pénales contre des fonctionnaires des services du Ministère de l'intérieur et des militaires des forces fédérales dans le cadre de cinq affaires d'emploi de la contrainte physique ou psychologique à l'égard de civils, précise le rapport. Le substitut du Procureur de la République de Tchétchénie chargé de veiller au respect de la loi et le directeur adjoint de la Direction de l'administration pénitentiaire s'assurent chaque mois du respect de la légalité et des droits de l'homme dans les locaux de garde à vue et les maisons d'arrêt. Les organisations internationales de défense des droits de l'homme contrôlent, elles aussi, le respect des droits de l'homme dans les lieux de détention. Depuis 2000, des représentants du Comité européen pour la prévention de la torture se sont rendus à six reprises dans la République de Tchétchénie, à l'invitation du Gouvernement russe. En outre, les membres du CICR qui ont effectué une visite en novembre 2003 ont indiqué dans leur rapport que les conditions de détention dans les établissements de la Direction de l'exécution des peines et les locaux de garde à vue de la République de Tchétchénie étaient conformes aux normes internationales et continuaient d'évoluer favorablement. Depuis le lancement des opérations de lutte contre le terrorisme, la Procurature militaire a engagé 191 procédures pénales concernant des infractions commises par des militaires contre la population tchétchène, précise le rapport.


Examen du rapport

L'experte du Comité chargée de l'examen du rapport de la Fédération de Russie, MME FELICE GAER, a remercié la délégation pour les nombreuses réponses qu'elle a apportées, dans sa présentation, aux questions écrites que lui avaient adressées le Comité. Mme Gaer a toutefois souhaité savoir pourquoi les trois avocates (Mmes Komissarova, Dorogova et Golitsyna) engagées pour défendre un jeune homme détenu suite à un raid d'hommes armés sur la ville de Nalchik en octobre 2005 ont été dessaisies.

La rapporteuse pour le rapport russe a en outre souhaité en savoir davantage sur les résultats des inspections opérées dans les lieux de détention. La Fédération de Russie prévoit-elle de publier l'ensemble des rapports - et non pas seulement certains - rédigés à l'issue des inspections réalisées dans les lieux de détention du pays, a demandé la rapporteuse ?

S'agissant de l'extradition de 14 Ouzbeks arrêtés en juin 2005 et accusés d'avoir pris part aux événements d'Andijan de mai 2005, Mme Gaer s'est enquise de la procédure suivie dans le cadre de l'extradition de ces personnes. Qu'en a-t-il été de la prise en compte du risque de torture dans le contexte de l'extradition de ces personnes ?

Existe-t-il un programme de protection des témoins, notamment dans les affaires de torture, a par ailleurs demandé Mme Gaer ?

En ce qui concerne le meurtre choquant d'Anna Politkoskaïa, Mme Gaer a rappelé que cette journaliste avait déjà fait l'objet de menaces. Dans le dernier article qu'Anna avait publié avant son assassinat, elle parlait de l'affaire de l'extradition d'un Tchétchène, au mois d'août dernier, a rappelé Mme Gaer. Le Tchétchène en question décrivait ce qui lui était arrivé. Les autorités russes ont-elles enquêté sur les faits rapportés dans cet article, a demandé Mme Gaer ?

Quelle est la mission des troupes russes en République de Tchétchénie, a par ailleurs demandé Mme Gaer ? Elle a également souhaité savoir quelle est l'autorité ayant en charge l'inspection de ces troupes et quelle est l'autorité qui enquête dans les cas d'allégations de torture. Mme Gaer a indiqué avoir reçu des informations faisant état de cas de détentions injustifiées et de personnes portées disparues. Le nombre d'allégations portant sur des cas de personnes portées disparues est immense, a-t-elle insisté.

Mme Gaer a par ailleurs relevé qu'à l'issue de la visite qu'elle avait effectuée dans le Nord-Caucase en 2004, la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, Mme Yakin Ertürk, avait affirmé que les femmes sont victimes de violences, d'exécutions extrajudiciaires, de viols et autres traitements inhumains de la part des forces de sécurité. Y a-t-il des femmes gardiennes de prison, non seulement en République de Tchétchénie, mais aussi dans le reste du pays, a demandé Mme Gaer ?

Mme Gaer a par ailleurs souhaité connaître les exigences de la législation russe qui ont été invoquées pour reporter la visite du Rapporteur spécial sur la torture, M. Manfred Nowak.

Quel est la nature du contrôle judiciaire exercé sur les décisions prises en vertu de la loi contre le terrorisme, a par ailleurs demandé Mme Gaer ?

Les mesures prises pour lutter contre le bizutage au sein des forces armées sont certes très importantes, mais il n'en demeure pas moins que la pratique elle-même du bizutage n'a pas cessé pour autant, a poursuivi Mme Gaer.

La co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Fédération de Russie, MME ESSADIA BELMIR, a salué les importants efforts fournis par le pays, qui est en transition.

En République de Tchétchénie, il semble toutefois que l'on soit presque dans une situation d'exception qui ne dit pas sans non, a déclaré Mme Belmir. En témoigne le fait que, dans cette région, les procureurs ont un caractère militaire, a-t-elle précisé.

Prenant note du programme de réforme judiciaire mis en œuvre en Fédération de Russie, Mme Belmir a estimé que la démarche ne semble pas parvenir à assurer une véritable indépendance du pouvoir judiciaire, lequel – au regard des informations reçues - souffre encore d'inefficacité, de partialité et surtout de corruption. Ces maux sont liés à la nomination des juges; elle relève en effet de l'exécutif, ce qui fait planer un doute sur leur indépendance, a souligné Mme Belmir.

Mme Belmir a par ailleurs dénoncé le calvaire vécu par les femmes détenues.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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