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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE L'ITALIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier et ce matin, le cinquième rapport périodique présenté par l'Italie sur la mise en œuvre, par ce pays, des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Présentant des observations préliminaires à l'issue de cet examen, la Présidente du Comité, Mme Christine Chanet, a notamment relevé que la délégation avait clairement confirmé l'applicabilité du Pacte aux forces armées italiennes détachées à l'étranger. Parmi les préoccupations soulevées qui n'ont pas reçu suffisamment de réponses adéquates, figurent notamment celles qui concernent les propos xénophobes et racistes, a ajouté Mme Chanet, faisant notamment référence à des propos tenus par des représentants de la Ligue du Nord. La Présidente a en outre rappelé, en particulier dans le contexte des immigrants qui cherchent à rejoindre l'île de Lampedusa, l'obligation de ne pas renvoyer de personnes vers des pays où elles risquent d'être soumises à la torture ou à la peine de mort. En ce qui concerne la détention au secret, Mme Chanet a rappelé que, si la Convention européenne admet une durée de détention au secret de cinq jours, tel n'est pas le cas du Pacte et, du point de vue du Comité, une telle durée est jugée excessive. La Présidente du Comité a par ailleurs fait référence aux conclusions de certains rapporteurs spéciaux des Nations Unies qui ont attiré l'attention sur la nécessité de garantir le pluralisme des médias en Italie. Certains se sont aussi inquiétés de la faiblesse du Conseil supérieur de la magistrature.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales concernant l'Italie, avant de les rendre publiques à la fin de la session, le jeudi 3 novembre prochain.

Présentant le rapport de son pays, le Vice-Ministre italien de l'intérieur, M. Gianpiero D'Alia, a notamment déclaré que le terrorisme constitue une menace pour toutes les sociétés ouvertes et tolérantes. Pour combattre les ennemis de la liberté, nous ne pouvons renverser les institutions et limiter outre mesure les libertés des personnes, faute de quoi nous accorderions à nos adversaires une victoire authentique, a-t-il déclaré. Faisant observer que la dimension du phénomène d'afflux d'étrangers qui arrivent dans le pays de façon irrégulière revêt une importance toujours plus préoccupante, le Vice-Ministre a indiqué que l'Italie œuvre à la mise en place d'une loi organique sur l'asile politique, réclamée par le HCR et par les principales organisations non gouvernementales. Il a assuré qu'en abordant des problèmes tels que l'asile ou l'immigration clandestine, le respect des droits fondamentaux des personnes est le premier critère qui préside à l'action de son pays.

L'imposante délégation italienne était également composée du Chef de cabinet au Ministère de la justice, M. Settembrino Nebbioso; du Représentant permanent de l'Italie auprès des Nations Unies à Genève, M. Paolo Bruni; ainsi que de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de l'intérieur; du Ministère de la justice; du Ministère de la défense; du Ministère de l'égalité des chances. La délégation a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, de l'applicabilité du Pacte aux personnes relevant de la juridiction italienne dans le cas de troupes italiennes détachées à l'étranger; la situation de la population rom; les immigrants qui cherchent à rejoindre l'île de Lampedusa; la violence domestique; la violence policière; la liberté de religion; la liberté d'expression; l'indépendance des médias; et les conditions de détention dans les institutions pénitentiaires.


Le Comité examinera, le mardi 25 octobre à 11 heures, un projet de commentaire général révisé concernant l'article 14 du Pacte. Il abordera l'examen du rapport du Brésil le mercredi 26 octobre.


Présentation du rapport

Le Représentant permanent de l'Italie auprès des Nations Unies à Genève, M. PAOLO BRUNI, a présenté l'importante délégation de son pays, soulignant que la taille et la qualité de cette délégation témoignent de toute l'importance que le pays accorde à ce dialogue avec le Comité.

Présentant le rapport de son pays, le Vice-Ministre de l'intérieur de l'Italie, M. GIANPIERO D'ALIA, a souligné que depuis la présentation du précédent rapport de l'Italie, beaucoup de choses ont changé: le processus de mondialisation s'est répandu et de nouveaux défis, tels que le terrorisme et la délinquance organisée, se sont manifestés dans toute leur virulence. Ce qui est certain, a poursuivi le Vice-Ministre, c'est que les processus d'ajustement aux nouveaux défis nous créeront certes beaucoup de difficultés, mais pas au point de nous faire renoncer à ce patrimoine commun de nos cultures que sont les droits fondamentaux et la protection de la personne humaine partout et dans tous ses aspects. L'Union européenne vit en ce moment quelques turbulences et elle devra sûrement revoir quelques-unes de ses politiques; mais personne, certainement, ne remet en question les valeurs de référence sur lesquelles se fonde l'intégration européenne: la liberté, l'état de droit, la démocratie, le plus grand bien-être possible des citoyens.

Les droits et libertés fondamentaux, protégés par la Constitution italienne de 1948, ne peuvent être remis en question ou conditionnés en vertu d'une quelconque exception culturelle ou d'une quelconque forme de discrimination, a poursuivi M. D'Alia. Faisant observer que la dimension du phénomène d'afflux d'étrangers qui arrivent dans le pays de façon irrégulière revêt une importance toujours plus préoccupante, le Vice-Ministre a indiqué que l'Italie œuvre à la mise en place d'une loi organique sur l'asile politique, réclamée par le Haut Commissaire pour les réfugiés et par les principales organisations non gouvernementales. Il a assuré qu'en abordant des problèmes tels que l'asile ou l'immigration clandestine, le respect des droits fondamentaux des personnes est le premier critère qui préside à l'action de son pays. En effet, la lutte contre l'immigration clandestine ne s'inspire pas de pures intentions répressives, mais cherche avant tout à éviter que ces personnes n'endurent davantage de souffrances et de violations. L'immigration clandestine est le premier cercle d'un enfer dantesque fait de trafic d'êtres humains, de commerce d'organes, d'exploitation de la prostitution, de formes de travail au noir qui parfois se mutent en nouvelles formes d'esclavage. L'Italie, particulièrement exposée du fait de sa position géographique, se veut également en première ligne dans l'action de prévention et de lutte contre ces phénomènes.
Le terrorisme - mais cela vaut également pour d'autres phénomènes déviants tels que la délinquance organisée à un niveau national ou transnational, ou encore le commerce d'êtres humains ou l'asservissement des personnes à de nouvelles formes d'esclavage - constitue une menace pour toutes les sociétés ouvertes et tolérantes, a poursuivi M. D'Alia. Dans ce domaine, prévention et répression doivent aller de pair, mais dans le respect de nos valeurs constitutionnelles, a-t-il insisté. Pour combattre les ennemis de la liberté, nous ne pouvons en effet renverser les institutions en vigueur et limiter outre mesure les libertés des personnes, faute de quoi nous accorderions à nos adversaires une victoire authentique. Il ne saurait y avoir de troc entre sécurité et liberté, mais uniquement un soutien réciproque afin de garantir une des libertés fondamentales de la grande tradition démocratique européenne: l'affranchissement de la peur, a conclu le Vice-Ministre de l'intérieur.

Complétant cette présentation, M. SETTEMBRINO NEBBIOSO, Chef de cabinet au Ministère de la justice, a souligné que l'absence, dans le Code pénal italien, d'un crime spécifique de torture ne signifie aucunement que la torture existe en Italie. La torture n'existe pas dans le pays non seulement parce qu'il s'agit d'une pratique éloignée de la mentalité italienne mais aussi parce que certaines sections du Code pénal punissent sévèrement ce type de comportements, même si le terme de torture n'est pas spécifiquement employé dans le code. L'Italie envisage la possibilité, dans le contexte de l'ajustement de son système juridique au statut de la Cour pénale internationale, d'insérer le crime de torture dans son système juridique, par le biais d'une définition plus large et plus globale que celle des conventions internationales pertinentes, a indiqué le Chef de cabinet; néanmoins, rien ne changera quant au fond, avec ou sans mention du terme de «torture» dans le Code pénal, a-t-il précisé.

S'agissant du surpeuplement carcéral, M. Nebbioso a fait part du projet, doté d'un budget d'un milliard d'euros et en cours d'exécution, visant la construction de nouvelles prisons dans les 10 à 15 prochaines années.

Le cinquième rapport périodique de l'Italie (CCPR/C/ITA/2004/5), fournit notamment des renseignements concernant des incidents intervenus au cours de manifestations intervenues en 2001 à Naples et à Gênes. S'agissant des «événements de Naples», lors de la manifestation de clôture du «Troisième forum mondial», en mars 2001, à laquelle participaient environ 7000 personnes, plusieurs incidents caractéristiques d'un climat d'intolérance ont éclaté, notamment sur la place Municipio où un groupe d'émeutiers s'est mis à lancer quantité de pierres et objets contondants divers contre la police. Soucieuse de maintenir les manifestants sous contrôle, la police a chargé à plusieurs reprises et permis ainsi à la situation de revenir lentement à la normale, poursuit le rapport. La police a arrêté un certain nombre de manifestants et pris les mesures nécessaires en vue de leur inculpation et de leur placement en détention. À ce jour, plusieurs procédures criminelles sont toujours pendantes devant le bureau du procureur de Naples, y compris contre des fonctionnaires de la Polizia di Stato soupçonnés d'avoir molesté des manifestants. Le 26 mai 2003, le bureau du procureur de Naples a demandé que les personnes inculpées passent en jugement. Sur mandat d'assignation à domicile délivré par le magistrat instructeur du tribunal de Naples, les policiers mis en cause ont été suspendus à titre de précaution à compter du 26 avril 2002. Le mandat d'assignation à domicile a été annulé en mai 2002 par la chambre d'appel du tribunal, et ces policiers ont été rétablis dans leurs fonctions dès le lendemain de leur libération. S'agissant des «événements de Gênes», en référence aux événements particulièrement graves qui se sont produits au cours des manifestations organisées à l'occasion du Sommet du G8 les 19, 20 et 21 juillet 2001, le rapport cite des extraits du rapport final de l'enquête menée par la Commission mixte (qui a tenu ses délibérations dans le cadre de la première commission permanente du Sénat), à laquelle ont été transmis les résultats de l'enquête administrative diligentée par le Ministre. Il précise notamment que l'enquête préliminaire ouverte pour déterminer si des membres de la police s'étaient rendus pénalement responsables de violences à l'encontre des manifestants est toujours en cours au bureau du procureur de Gênes.
Le rapport indique par ailleurs que la commission de la justice de la Chambre des députés est actuellement saisie du texte mis à jour qui propose des mesures nouvelles et plus incisives pour lutter contre les cas de violence à l'occasion d'événements sportifs. Le mouvement skinhead s'est installé en Italie au début des années 90, rappelle par ailleurs le rapport. Étroitement associé au racisme et à la xénophobie, avec souvent un fort relent d'antisémitisme, il s'est particulièrement bien enraciné dans les régions du nord-est et à Rome, précise-t-il. Dernièrement, poursuit le rapport, la forte augmentation des flux migratoires clandestins, qui s'est aussi traduite par une hausse des activités illégales telles que l'exploitation de la prostitution, le trafic de stupéfiants et la petite criminalité, a sans aucun doute contribué à faire naître un sentiment de préoccupation et de malaise dans certains secteurs de l'opinion publique. Le rapport rappelle en outre que suite à la loi n°189 du 30 juillet 2002, un processus de régularisation a été entamé pour près de 700 000 travailleurs non communautaires présents en Italie, soit un nombre bien supérieur à celui visé par les précédentes «amnisties» en faveur des immigrés (244 000 en 1995 et 251 000 en 1998). Ces amnisties périodiques sont devenues nécessaires pour régulariser la situation des étrangers qui, faute de quoi, seraient condamnés à vivre perpétuellement dans l'illégalité.

Le rapport indique par ailleurs que du début de l'année 1999 au 20 septembre 1999, les centres de séjour et d'assistance temporaires ont accueilli 5864 étrangers, dont 43,64% ont été expulsés ou déboutés. Il fait d'autre part état d'une réforme fondamentale prévue par la loi constitutionnelle du 23 novembre 1999, qui a introduit les instruments d'un «procès équitable» dans l'article 111 de la Constitution. Un certain nombre de «nouvelles mafias», d'origine essentiellement russe et chinoise, continuent d'opérer en Italie, indique en outre le rapport. S'agissant de la situation dans les prisons, il reconnaît qu'elle reste grave, les pouvoirs publics ayant évalué à 41 602 places la capacité globale des prisons italiennes alors que dans le même temps, le nombre maximum de places nécessaires était fixé à 60 000 au vu des besoins.


Examen du rapport

Fournissant des renseignements complémentaires sur l'application des dispositions du Pacte en Italie, la délégation a notamment indiqué que son gouvernement est en mesure de retirer, par note verbale, un certain nombre des réserves que l'Italie maintenait à l'égard de diverses dispositions du Pacte.

Le Comité ayant souhaité savoir si le Pacte est applicable aux personnes relevant de la juridiction italienne dans les cas de troupes ou de forces de police italiennes détachées à l'étranger, la délégation a assuré le Comité que des mesures ont été prises pour assurer le plein respect du Pacte dans ce contexte. Des règles de comportement ont été communiquées aux troupes italiennes en Afghanistan et en Iraq; il leur est notamment demandé de ne pas livrer de prisonniers susceptibles d'être soumis à la torture ou à la peine de mort. Non seulement les modifications apportées au Code pénal militaire de guerre mais aussi toute une série de directives ministérielles permettent de garantir une conduite adéquate des forces armées italiennes opérant à l'étranger et d'assurer que les membres de ces forces respectent les droits de l'homme, a précisé la délégation.

L'Italie peut s'enorgueillir du fait que les mesures antiterroristes qu'elle a prises n'ont nullement porté atteinte aux droits fondamentaux des citoyens, a par ailleurs affirmé la délégation.

Le Comité ayant relevé qu'une partie de la population rom vivrait dans des camps, en marge de la société italienne, dans de mauvaises conditions de logement et d'hygiène, la délégation a assuré que l'Italie s'efforce de respecter la spécificité de ces nomades. Un membre du Comité a alors relevé que la communauté rom compte environ 120 000 individus dans le pays; beaucoup sont Italiens alors qu'ils sont souvent considérés dans le pays comme des étrangers. Nombreux sont ceux qui vivent dans des camps, parfois autorisés, parfois non, a poursuivi l'expert. Tous ces Roms ne sont pas des nomades et il ne faudrait pas les considérer comme tels, car cela peut mener à la mise en avant de solutions inadaptées, en tout cas pour un certain nombre d'entre eux.

En Italie, a précisé la délégation, les Roms sont environ 130 000, dont près de la moitié sont de nationalité italienne et jouissent tous de tous les droits fondamentaux garantis aux citoyens de la République, notamment les droits à la santé et à l'éducation. La délégation a fait état de la signature récente d'un protocole d'entente entre le Ministère de l'éducation et l'Association des nomades. En Italie, il n'est pas permis de créer des classes distinctes pour les enfants rom ou pour les enfants étrangers, a souligné la délégation; tous les enfants sont donc scolarisés dans les mêmes établissements. La délégation a par ailleurs rappelé que des dispositions spécifiques ont été prises pour assurer, sur la base d'un financement régional, la création d'aires de stationnement destinées aux nomades. Un projet de loi ad hoc, consacré exclusivement aux Roms, est en cours d'élaboration, a ajouté la délégation.

En cas de besoin, les étrangers, y compris les clandestins, peuvent être admis à l'hôpital pour y être soignés, a en outre fait valoir la délégation. Les femmes étrangères, même clandestines, peuvent accoucher à l'hôpital, a-t-elle insisté.

S'agissant des événements de Naples et de Gênes, la délégation a notamment rappelé que lorsqu'une affaire est devant la justice, le Gouvernement ne peut plus intervenir car la magistrature est indépendante en Italie. La délégation a par ailleurs mis en avant le critère de proportionnalité qu'il est demandé aux membres des forces de l'ordre de respecter dans le cadre de leur action face à des manifestants.

Priée d'indiquer les mesures spécifiques qui ont été adoptées pour assurer le suivi des plaintes déposées contre des Carabinieri ou des membres du personnel pénitentiaire, la délégation a affirmé que l'on ne peut pas dire que les Carabinieri ou le personnel pénitentiaire italiens infligent des mauvais traitements aux détenus; si cela arrive, les autorités pertinentes ne manqueront pas de les punir.

S'agissant des allégations d'abus de la force par la police, la délégation, répondant à une question sur les mesures effectivement prises face aux excès qu'auraient pu commettre des membres des forces de l'ordre, a souligné qu'il faudrait que lui soient présentés des cas précis. Priée de fournir des statistiques sur les cas de violence policière et les suites qui leur auraient été données, la délégation a notamment précisé que 12 Carabinieri ont été renvoyés devant la justice suite aux événements de Gênes. Amnesty International a pour sa part signalé 2 cas de violence en 2004 et aucun en 2003, a ajouté la délégation.

Le problème du trafic de personnes est un problème complexe, a par ailleurs indiqué la délégation. Au-delà de la répression du phénomène, une loi prévoit l'assistance et l'aide aux victimes de ce type de trafic.

Le Comité ayant relevé que les porte-parole de certains partis politiques auraient fréquemment recours à une propagande raciste et xénophobe, la délégation a souligné qu'en Italie, toute forme d'incitation à la haine est punie en vertu du Code pénal. Un membre du Comité a alors fait observer qu'à l'occasion du neuvième anniversaire de la Ligue du Nord, un responsable politique a affirmé qu'il ne manquait plus qu'à transformer le drapeau italien en y intégrant un croissant. Un autre est allé plus loin en déclarant: «ces musulmans croient avoir une civilisation supérieure à la nôtre, capable de nous concurrencer, et moi je crois qu'il est préférable pour eux de rentrer dans leur pays pour parler avec les chameaux et discuter avec les singes», a rapporté l'expert. Un autre aurait souhaité, à propos des fondamentalistes qu'il disait ne pas vouloir en Italie, «qu'ils aillent en enfer». Aussi, l'expert s'est-il enquis des mesures prises par les autorités judiciaires italiennes pour que de tels appels à la haine soient sanctionnés.
Les statistiques attestent que les actes racistes en Italie sont extrêmement rares, a fait valoir la délégation. En effet, le nombre de condamnations pour délits racistes et xénophobes a varié entre 1 et 4 entre 2000 et 2003, a-t-elle précisé.

La délégation a qualifié de totalement infondées les informations selon lesquelles l'Italie refuserait l'exercice du droit d'asile aux immigrants qui se rendent en particulier sur l'île de Lampedusa. Un membre du Comité ayant fait état d'informations selon lesquelles l'Italie intercepterait, parfois en dehors de ses eaux territoriales, des navires transportant des immigrants illégaux pour les reconduire dans leur pays d'origine, la délégation a assuré que les navires italiens n'effectuent que des interventions de secours et n'interviennent jamais pour refouler des embarcations. Il n'y a jamais eu de cas où des embarcations d'immigrants auraient été refoulées vers leur lieu d'origine, a-t-elle insisté. Cet été, 150 opérations de secours se sont déroulées en haute mer, qui ont permis de sauver un très grand nombre de personnes; sans ces interventions de secours, probablement aucune de ces personnes n'aurait survécu, a affirmé la délégation. Elle a dans ce contexte dénoncé les agissements de groupes criminels très puissants opérant en Libye. La délégation a attiré l'attention sur la surpopulation dont souffre le centre d'accueil de Lampedusa; la capacité de ce centre (un peu moins de 200 places) n'est plus adaptée au nombre de migrants se trouvant sur l'île.

Interrogée sur les mesures prises pour réduire de façon significative le surpeuplement carcéral, la délégation a indiqué qu'il y a actuellement près de 59 000 prisonniers détenus dans les 207 prisons que compte l'Italie, contre une moyenne de 30 000 dans les années 80. De nouvelles prisons ont été ouvertes dans plusieurs villes italiennes, a fait valoir la délégation. Certes, cela ne suffit pas et un programme à moyen et long terme, visant la construction de 12 nouvelles prisons, a donc été mis en place pour remédier au manque de places disponibles par rapport aux besoins, a précisé la délégation.

En ce qui concerne la violence domestique, la délégation a souligné que l'Italie accorde une grande importance à la protection des femmes et des enfants contre toute forme de violence. En 2001, une nouvelle loi a été adoptée qui envisage la possibilité de faire quitter le domicile conjugal à la personne qui s'est rendue coupable de violence au sein du foyer ; la personne ne peut alors plus revenir à son domicile sans autorisation du juge. Le juge peut également ordonner que la personne violente ne puisse pas s'approcher des lieux où elle risquerait de rencontrer sa victime, a précisé la délégation. Une autre loi a été adoptée, en 2001 également, qui porte amendement de plusieurs articles du Code civil en conférant au juge le pouvoir de priver le parent violent de son droit de garde sur les enfants. Ces dispositions ont permis de renforcer la protection des mineurs.

La liberté de religion est grande en Italie, a par ailleurs souligné la délégation. De ce point de vue, on envisage même d'adopter de nouvelles lois pour prendre acte des changements intervenus dans la composition démographique de l'Italie, a-t-elle précisé.

La liberté d'expression est un sujet complexe, a poursuivi la délégation, mettant l'accent sur la nécessité de trouver un équilibre entre protection de la vie privée des individus et respect de la liberté d'expression. Une nouvelle loi régissant la télévision a été adoptée, a rappelé la délégation.

Relevant que des chaînes de radio et de télévision sont concentrées dans quelques mains seulement, un membre du Comité a souhaité savoir ce qu'il en est exactement de l'indépendance des chaînes de télévision en Italie.

La délégation a notamment souligné que, selon la Constitution, chacun peut s'exprimer librement par la parole ou à travers la presse ou quelque autre média. Le crime de diffamation par voie de presse est passible d'une peine d'emprisonnement, a par ailleurs rappelé la délégation. Il ne fait aucun doute que la radio-télévision d'État, la RAI, n'est pas liée ou pouvoir politique, ni influencée par lui, a assuré la délégation, rappelant l'adoption de la loi Frattini sur les conflits d'intérêts.

Un membre du Comité a relevé que les Innus se sont dits gênés par les vols d'entraînement à basse altitude de l'armée de l'air italienne au-dessus du Labrador, au Canada.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires sur le rapport italien, la Présidente du Comité, MME CHRISTINE CHANET, a jugé particulièrement intéressants, animés et approfondis les débats qui se sont déroulés tout au long de ces deux séances d'examen du rapport. Un certain nombre de points restent encore à éclaircir et la délégation dispose de quelques jours pour y apporter des réponses par écrit et les transmettre au Comité, a-t-elle déclaré. Un certain nombre de projets ont certes été annoncés, a poursuivi Mme Chanet; mais le Comité ne peut qu'en prendre acte, sans en tenir compte au nombre des points positifs considérés comme acquis. Il en va ainsi de l'annonce de la levée prochaine de certaines réserves que l'Italie maintient à l'égard des dispositions du Pacte, a précisé la Présidente du Comité. Elle a en revanche relevé que la délégation avait clairement confirmé l'applicabilité du Pacte aux forces armées italiennes détachées à l'étranger.

Parmi les préoccupations soulevées qui n'ont pas reçu suffisamment de réponses adéquates, figurent notamment celles concernant les propos xénophobes et racistes tenus dans le pays et qui ont fait le tour du monde, a ajouté Mme Chanet. La question qui était posée dans ce contexte était celle des sanctions prévues et effectivement appliquées pour punir ce type de propos, s'agissant en particulier de ceux tenus par des représentants de la Ligue du Nord, a-t-elle ajouté.

Mme Chanet a en outre rappelé, en particulier dans le contexte des immigrants qui cherchent à rejoindre l'île de Lampedusa, l'obligation de ne pas renvoyer de personnes vers des pays où elles risquent d'être soumises à la torture ou à la peine de mort. Faisant par ailleurs référence à la discussion nouée autour de la situation des Roms, la Présidente a souligné que c'est un droit positif de protection des minorités que doit garantir l'État.

En ce qui concerne la détention au secret, Mme Chanet a rappelé que, si la Convention européenne admet une durée de détention au secret de cinq jours, tel n'est pas le cas du Pacte et, du point de vue du Comité, une telle durée est jugée excessive.

La Présidente du Comité a par ailleurs fait référence aux conclusions de certains rapporteurs spéciaux des Nations Unies qui ont attiré l'attention sur la nécessité de garantir le pluralisme des médias en Italie et sur la faiblesse du Conseil supérieur de la magistrature. Il y a en Italie - et ce n'est un mystère pour personne - des tensions entre les juges et les avocats et le pouvoir politique, a rappelé Mme Chanet.

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