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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le troisième rapport périodique présenté par la Fédération de Russie sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Le rapport de la Fédération de Russie a été présenté par Mme Olga Sharapova, Directrice du Département des questions sociales et médicales liées à la famille, à la maternité et à l'enfance au Ministère de la santé et du développement social. Elle a souligné que les principes énoncés dans la Convention sous-tendent l'action de la Fédération de Russie en faveur des enfants et que les efforts menés pour pleinement mettre en œuvre les recommandations antérieures du Comité se poursuivent. Mme Sharapova a mis l'accent sur les nombreux programmes mis en place au niveau fédéral dans les domaines de la santé et de l'éducation. La rougeole a pu être éradiquée et la tuberculose chez les enfants a pu être réduite, a-t-elle notamment fait valoir. Pour autant, les autorités ne sont pas satisfaites de la situation en ce qui concerne la santé des enfants, a-t-elle affirmé, soulignant que l'amélioration de la santé de la population reste une des priorités du Gouvernement. Pour ce qui est de la justice pour mineurs, la Fédération de Russie met en œuvre une politique qui s'efforce de respecter les normes internationales en la matière, a déclaré Mme Sharapova.

La délégation russe était également composée de l'Ombudsman pour les droits de l'enfant de Moscou, M. Alexey Golovan, ainsi que de représentants du Ministère de la santé et du développement social; du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la culture; du Ministère du développement régional; du Ministère de l'intérieur; du Ministère de l'éducation et des sciences; du Service fédéral des statistiques; du Service fédéral d'exécution des peines; du Comité de la Douma d'État pour les affaires des femmes, de la famille et des enfants.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la tragédie de Beslan; de la politique de décentralisation; du projet de plan national d'action visant à améliorer la situation des enfants; de la situation de l'éducation et de la santé; de l'adoption; de la situation des enfants des minorités; des enfants des rues; de la violence à l'encontre des mineurs; et de l'administration de la justice pour mineurs.

L'experte du Comité chargée de l'examen du rapport de la Fédération de Russie, Mme Nevena Vuckovic-Sahovic, a notamment souligné que si la taille, l'étendue du territoire, la variété des climats et le mélange d'ethnies et de religions font la richesse de la Fédération de Russie, ces caractéristiques sont aussi des facteurs fondamentaux des difficultés que rencontre le pays pour mettre en œuvre la Convention. L'experte a relevé que 55% des enfants du pays continuent de vivre en dessous du niveau de subsistance.


Le Comité tiendra la séance de clôture des travaux de sa quarantième session vendredi 30 septembre, à 10 heures, en rendant publiques les observations finales qu'il aura adoptées à huis clos sur les rapports des sept États parties qu'il a examinés au cours de cette session (Trinité-et-Tobago, Australie, Algérie, Ouganda, Chine, Finlande, Danemark et Fédération de Russie).

Présentation du rapport de la Fédération de Russie

Présentant le rapport de la Fédération de Russie, MME OLGA SHARAPOVA, Directrice du Département des questions sociales et médicales liées à la famille, à la maternité et à l'enfance au Ministère de la santé et du développement social, a souligné que les principes énoncés dans la Convention sous-tendent l'action de la Fédération de Russie en faveur des enfants. Les efforts visant à mettre pleinement en œuvre les recommandations antérieures du Comité ne sont pas terminés et se poursuivent, a-t-elle ajouté. Elle a affirmé que depuis la présentation du précédent rapport de la Fédération de Russie, en 2003, d'importants changements sont intervenus dans le pays. Le fédéralisme, en particulier, s'est développé et la décentralisation s'est accentuée. Il a été demandé aux régions de ne pas réduire leurs dépenses sociales afin que la situation ne se dégrade pas par rapport à ce qu'elle était avant cette réforme décentralisatrice, a précisé Mme Sharapova.

Mme Sharapova a mis l'accent sur les nombreux programmes mis en place au niveau fédéral dans les domaines de la santé et de l'éducation. D'autres programmes visent à permettre aux enfants d'avoir des loisirs, en particulier durant leurs vacances. La mortalité infantile et la mortalité maternelle ont été systématiquement réduites, a par ailleurs souligné Mme Sharapova. En outre, la rougeole a pu être éradiquée et la tuberculose chez les enfants a pu être réduite.

Pour autant, les autorités ne sont pas satisfaites de la situation en ce qui concerne la santé des enfants, a déclaré Mme Sharapova. L'amélioration de la santé de la population reste une des priorités du Gouvernement, a-t-elle ajouté. Elle a précisé qu'un grand projet national en faveur de la santé des enfants sera mis en œuvre dans les deux années à venir. La tendance a pu être inversée en matière de toxicomanie chez les enfants et les jeunes, a par ailleurs fait valoir Mme Sharapova. En outre, depuis mars dernier, une loi fédérale interdit la vente de bière aux mineurs et la consommation de bière par les mineurs dans les lieux publics. Citant le nombre de 12 000 enfants séropositifs dans le pays, Mme Sharapova a mis en avant l'important travail de prévention entrepris par les autorités pour éviter la transmission du VIH/sida de la mère à l'enfant.

Le soutien social en faveur des enfants handicapés relève des autorités fédérales - et donc d'un budget fédéral - et non plus des autorités locales comme cela était le cas par le passé, a par ailleurs indiqué Mme Sharapova. Les enfants handicapés reçoivent désormais une allocation mensuelle; en outre, ils reçoivent gratuitement des prothèses financées par le budget fédéral et par le fonds de protection sociale.

Pour ce qui est de la justice pour mineurs, la Fédération de Russie met en œuvre une politique qui s'efforce de respecter les normes internationales en la matière. Tout ce qui a trait à la justice pour mineurs a été revu depuis l'examen du précédent rapport du pays par le Comité, a fait valoir Mme Sharapova. Des peines de substitution à la privation de liberté ont été mises en place, au nombre desquelles figure le placement chez un tuteur ou dans une institution spécialisée, a-t-elle précisé. La privation de liberté ne peut être appliquée à des mineurs de moins de 16 ans pour des infractions mineures, a-t-elle ajouté. La Fédération de Russie reconnaît qu'il y a encore de nombreux problèmes à régler et beaucoup à faire dans le pays; mais elle entend tout faire pour préserver l'intérêt supérieur de l'enfant, a assuré Mme Sharapova.

Le troisième rapport périodique de la Fédération de Russie (CRC/C/125/Add.5) indique notamment que le nombre des personnes âgées de moins de 18 ans a diminué de 4,2 millions entre 1998 et 2001, du fait du faible taux de natalité. Au cours de la période 1999-2001, poursuit le rapport, les investissements de capital fixe ont augmenté de 43,3% dans le secteur de la santé et de 20,6% dans celui de l'éducation. Pour ce qui est du bien-être de la population, les conséquences de la crise de 1998 ont été pratiquement surmontées. Toutefois, si le nombre de chômeurs a diminué depuis, on a assisté, entre 1998 et 2002, à une augmentation régulière du nombre des mineurs qui se sont adressés aux services officiels de l'emploi pour qu'ils les aident à trouver un emploi; en 2001, ils ont été 1 663 100. Le rapport admet que des problèmes subsistent dans les principaux domaines de vie des enfants, au nombre desquels la désintégration de la famille, souvent liée à la violence, en particulier à l'égard des enfants, ce qui multiplie le nombre des enfants abandonnés, délinquants ou orphelins sociaux. La consommation d'alcool et de stupéfiants par des mineurs et la détérioration de leur état de santé constituent un grave problème, ajoute le rapport. Entre 1990 et 1999, le niveau de morbidité dû à la toxicomanie chez les adolescents a été multiplié par 9,6 et l'usage nuisible de stupéfiants par 4. Un autre problème de longue durée est celui de la pauvreté des familles avec enfants, laquelle, en dépit des mesures adoptées, n'a toujours pas reculé.

La loi fédérale sur les garanties fondamentales des droits des enfants, adoptée en 1998, dispose que la politique publique en faveur des enfants est un domaine d'action prioritaire des organes du pouvoir de la Fédération de Russie. Le nouveau Code fédéral du travail, entré en vigueur en 2002, a porté de 15 à 16 ans l'âge minimum d'accès à l'emploi. Le nouveau Code de procédure pénale, également entré en vigueur en 2002, énonce un grand nombre de garanties procédurales pour les mineurs qui sont conformes aux critères et normes de l'ONU en matière de justice pour mineurs. En outre, on voit se développer, parallèlement au Délégué fédéral aux droits de l'enfant, l'institution des délégués régionaux aux droits de l'enfant; en septembre 2002, des postes de délégués aux droits de l'enfant ont été créés dans 15 membres de la Fédération de Russie, parmi lesquels la République de Tchétchénie. À l'heure actuelle, on met la dernière main à l'élaboration d'un nouveau plan national d'action pour les enfants jusqu'en 2010, précise le rapport. Au cours de la période considérée, ajoute-t-il, l'un des secteurs les plus importants de l'application de la Convention a été l'action de lutte contre le phénomène des enfants abandonnés et sans abri. Le système d'exécution des peines du Ministère de la justice dispose de 64 colonies d'éducation où vivraient, à la fin de 2002, 10 900 jeunes délinquants condamnés à des peines privatives de liberté (ils étaient 22 000 à la fin de 1999).

En 2001, indique le rapport, les services compétents du Ministère de l'intérieur ont travaillé avec 289 800 parents qui ne s'acquittaient pas - ou alors de façon inadéquate - de leurs obligations en matière de soins aux enfants. Cette année-là, des mesures administratives ont été prises contre 253 000 parents négligents. Le traitement brutal des enfants est l'une des principales causes du phénomène des enfants des rues, affirme le rapport. En 2001, des avis de recherche ont été lancés au niveau local et fédéral concernant plus de 43 900 enfants et adolescents, soit 12% de plus qu'en 2000. On a retrouvé 41 200 mineurs. En huit mois d'activités du Centre interministériel de coordination de l'activité des autorités fédérales chargées de lutter contre le phénomène des enfants des rues, l'abandon des mineurs et la délinquance juvénile, les services compétents du Ministère de l'intérieur ont procédé à l'arrestation de 406 000 enfants des rues et autres mineurs abandonnés, dont 327 000 ont été rendus à leurs parents et les autres placés dans des établissements pour mineurs. S'agissant des questions de santé, l'un des problèmes les plus graves et préoccupants d'aujourd'hui est la propagation du VIH/sida. À l'heure actuelle, 220 000 personnes ont été officiellement infectées par le VIH, dont 4 743 enfants. Plus de 90% des personnes nouvellement infectées en 2001 et 2002 sont des toxicomanes.

En 2001, précise par ailleurs le rapport, on a enregistré 12 094 enfants de familles de réfugiés et de personnes déplacées, dont 12 044 enfants déplacés et 50 enfants réfugiés. La même protection est accordée à l'enfant réfugié vivant sans ses parents qu'à n'importe quel autre enfant privé définitivement ou provisoirement de son milieu familial pour quelque raison que ce soit. La situation dans le Caucase du Nord demeure un sujet de préoccupation quotidienne pour les dirigeants de la Fédération de Russie, indique par ailleurs le rapport. Dans le cadre du programme fédéral spécifique de relèvement de l'économie et de la sphère sociale de la République de Tchétchénie, on s'est employé en 2001 à remédier aux problèmes liés à la survie, au retour et à la réinstallation des personnes ayant dû quitter leur lieu de résidence permanente en République de Tchétchénie. À partir du 1er septembre 2000, le système d'enseignement de la Tchétchénie a recommencé de fonctionner normalement.


Examen du rapport

Questions et observations du Comité

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Fédération de Russie, MME NEVENA VUCKOVIC-SAHOVIC, s'est dite encouragée par la lecture de la partie introductive de ce troisième rapport périodique, qui montre que la Fédération de Russie semble avoir la capacité de reconnaître les problèmes auxquels elle reste confrontée du point de vue de la mise en œuvre de la Convention.

L'experte a souhaité obtenir davantage d'informations sur l'application, dans la pratique, de la législation adoptée afin d'améliorer la situation des enfants.

La Fédération de Russie est le plus grand pays du monde, mais n'est pas le plus peuplé. Sa taille, l'étendue de son territoire, la variété de ses climats et le mélange d'ethnies et de religions font sa richesse; mais ces caractéristiques sont aussi des facteurs fondamentaux des difficultés que rencontre le pays pour mettre en œuvre la Convention. La Fédération de Russie est tenue de déployer d'importants efforts pour assurer à l'ensemble de sa population, en particulier aux enfants, l'égalité d'accès aux services ainsi qu'une jouissance égale des droits de l'homme, a souligné Mme Vuckovic-Sahovic. Cette tâche énorme est rendue encore plus lourde par le difficile processus de transition, a-t-elle relevé. L'accès aux services sociaux, à la santé et à l'éducation, qui faisait la fierté de la période socialiste, a particulièrement souffert au cours de la transition, a-t-elle insisté. Bien que la situation se soit améliorée ces dernières années, il semble que les enfants soient encore affectés de manière disproportionnée puisque 55% d'entre eux continuent de vivre en dessous du niveau de subsistance.

L'an dernier, a rappelé Mme Vuckovic-Sahovic, la Fédération de Russie a été le théâtre d'un horrible acte de violence dans l'école de Beslan, en Ossétie du Nord. Plus de 330 personnes, dont la moitié étaient des enfants, ont été tuées. Toute notre compassion va aux enfants qui ont perdu leurs vies et à leurs parents, a déclaré l'experte, faisant état de préoccupations persistantes au sujet de plusieurs questions en rapport avec ces faits. Ainsi, les auteurs responsables de ces faits ont-ils été identifiés, a-t-elle demandé? En outre, qu'a-t-il été fait pour apporter tout le soutien financier et psychosocial nécessaire aux enfants ayant survécu et à leurs familles? Quels sont les problèmes que rencontrent les enfants survivants et dans quelle école vont-ils?

Mme Vuckovic-Sahovic s'est par ailleurs enquise de l'effet de la décentralisation sur le bien-être de l'enfant. Elle a également souhaité en savoir davantage sur ce qu'il est advenu du plan national d'action en faveur des enfants mentionné dans le rapport comme étant en préparation.

Mme Vuckovic-Sahovic a par ailleurs relevé qu'en ce qui concerne la recommandation antérieure du Comité au sujet de l'article 37(a) de la Convention sur la torture (sur l'interdiction de la torture et de l'application de la peine capitale ou de la prison à perpétuité aux personnes âgées de moins de 18 ans), le rapport indique que cette recommandation a été prise en compte mais sans donner d'information supplémentaire sur les mesures réellement prises ou sur l'évaluation des résultats dans ce domaine.


Cadre général d'application

En ce qui concerne la tragédie de Beslan, qui a ébranlé le pays, la délégation russe a exprimé sa vive reconnaissance à tous les pays du monde qui ont adressé leur sympathie voire une aide humanitaire suite à cette tragédie. À ce jour, les cliniques fédérales ont pu soigner près de 990 enfants, a indiqué la délégation. Une aide a également été apportée aux parents des victimes. Trois écoles ont été reconstruites en Ossétie du Nord. L'école qui a été détruite n'a pas été reconstruite, conformément au vœu des parents des victimes; c'est aujourd'hui un musée à la mémoire des victimes, a précisé la délégation. Elle a par ailleurs rappelé qu'un fonds de soutien aux victimes de Beslan avait été créé, qui a permis d'indemniser toutes les victimes et leurs familles. La délégation a précisé que 500 enfants ont été expédiés, avec leurs familles, en Ukraine; 200 en Bulgarie; 25 en Allemagne; et près de 150 en République tchèque. Avec la coopération du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), un centre a été mis sur pied qui se concentre sur la réadaptation des victimes et de leurs proches.

S'agissant des questions liées à la décentralisation, la délégation a notamment souligné qu'un ministère du développement régional avait été créé afin de coordonner les efforts de tous les ministères dans ce domaine. La délégation a par ailleurs affirmé que le budget fédéral avait veillé à accroître les prestations versées aux familles. Une commission interministérielle chargée des questions de la famille et de l'enfant a été mise sur pied, a-t-elle en outre rappelé.

La délégation a indiqué que le projet de plan d'action national visant à améliorer la situation des enfants a suscité des commentaires et observations émanant de toutes les parties concernées, y compris les organisations non gouvernementales, et dont il sera tenu compte. Ce projet de plan national d'action sera soumis pour approbation à la fin du mois de novembre et pourrait alors être définitivement adopté par signature d'un décret présidentiel.

La délégation a indiqué que la Fédération de Russie étudie actuellement la possibilité de ratifier la Charte sociale du Conseil de l'Europe.

La délégation a indiqué qu'un projet de loi sur les normes sociales minimales de la Fédération de Russie était en cours d'élaboration.

Plus de 400 organisations sont enregistrées qui s'occupent des problèmes dont souffrent les enfants, a par ailleurs indiqué la délégation.


Éducation

En ce qui concerne les questions d'éducation, un membre du Comité a relevé que si, en 2002, le budget fédéral de l'éducation dépassait certes celui de la défense, il restait néanmoins relativement faible par rapport à celui de la Pologne, des États baltes ou de la Hongrie. La délégation a indiqué que dans le projet de budget pour 2006, actuellement en discussion, il est prévu de consacrer 153 milliards de roubles du budget fédéral à l'éducation.

La délégation a par ailleurs fait valoir la baisse du taux d'analphabétisme enregistrée en Fédération de Russie chez les personnes de plus de 10 ans. Elle a également attiré l'attention sur l'enseignement gratuit complémentaire que reçoivent des millions d'écoliers dans les domaines d'activité créative qui les intéressent le plus. Les autorités ont mis en place un système de contrôle de la qualité de l'enseignement qui devrait être opérationnel à compter de 2007, a précisé la délégation.

Nombre d'enfants ne vont pas à l'école parce qu'ils n'ont pas les moyens de se payer les matériels scolaires nécessaires, a admis la délégation; aussi, une aide leur est-elle apportée sous forme de manuels scolaires gratuits et de vêtements, par exemple. Pour autant, il n'est pas possible d'avaliser l'assertion selon laquelle l'enseignement ne serait pas gratuit en Fédération de Russie, a tenu à souligner la délégation.

Le mois prochain, a indiqué la délégation, le Parlement pourrait être saisi d'un projet de loi visant à permettre de nouveaux types d'enseignements pour les enfants handicapés, notamment un enseignement à domicile qui pourrait être financé par l'État.

En ce qui concerne l'éducation dans le Nord-Caucase, la délégation a indiqué qu'à l'heure actuelle, la plus grande attention est accordée à la partie méridionale de cette région, un plan d'action ayant été adopté en ce sens. Onze jardins d'enfants et sept écoles supplémentaires ont été remis sur pied en République de Tchétchénie. On s'efforce d'assurer à ces enfants un enseignement dans leur langue. Trente langues sont utilisées dans les écoles de la Fédération de Russie pour dispenser un enseignement. Au total, ce sont plus de 70 langues qui sont enseignées dans le pays, a ajouté la délégation.

Les enfants peuvent-ils créer eux-mêmes des associations en dehors du cadre scolaire et, si oui, à partir de quel âge, a demandé un expert?


Cadre familial
Plusieurs membres du Comité ont relevé que le nombre d'adoptions internationales en Fédération de Russie a dépassé de loin celui des adoptions nationales. Qu'est-il fait pour encourager l'adoption nationale, notamment suite aux propos d'un procureur russe qui a parlé de véritable «business» associé aux adoptions internationales?

En Fédération de Russie, l'adoption est gratuite; l'administration ne perçoit pas d'argent, pour quelque type de dossier d'adoption que ce soit, de telle sorte qu'il ne saurait être question de parler de traite en Fédération de Russie dans le contexte de l'adoption, a assuré la délégation. Le Code de la famille a été modifié l'an dernier pour simplifier les procédures d'adoption, a-t-elle précisé. Il serait également faux de prétendre qu'il n'y a pas de contrôle des procédures d'adoption, a insisté la délégation.

La délégation russe a fait état d'un phénomène de hausse du nombre d'«orphelins de fait» dont les parents sont encore en vie. Seuls 10% des enfants orphelins sont de véritables orphelins, a affirmé la délégation; les autres peuvent être considérés comme des «orphelins sociaux». L'État se doit donc de faire face à cette situation par le biais de structures sociales de substitution telles que les familles d'accueil ou les villages d'enfants (comme il en existe en Carélie, par exemple). Quelque 6000 enfants sont accueillis dans des familles adoptives, a précisé la délégation. En outre, des foyers pour enfants s'efforcent de recréer une ambiance familiale.


Santé

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a notamment reconnu que la Fédération de Russie est fortement touchée par les maladies sociales telles que la toxicomanie et l'alcoolisme.

L'assistance médicale est gratuite pour les enfants, a rappelé la délégation; cela vaut tant pour les soins de santé primaire que pour les soins spécialisés. La délégation a souligné que si, par le passé, la toxicomanie était en Fédération de Russie le principal vecteur de propagation du VIH/sida, la maladie se transmet essentiellement, aujourd'hui, par les relations sexuelles. Près de 40% des personnes séropositives dans le pays sont des femmes en âge de procréer.

La délégation a indiqué que l' incidence de la tuberculose en Fédération de Russie avait été en hausse chez les enfants jusqu'en 2001. Mais grâce à la mise en œuvre d'un programme de prévention, ce problème a perdu quelque peu de son urgence. Le pays dispose d'un programme qui permet de traiter toutes les personnes atteintes par cette maladie, d'ailleurs en perte de vitesse chez les adultes également, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs fait valoir une tendance à la baisse des grossesses d'adolescentes dont le taux est tombé à 15 pour mille.

Un membre du Comité a relevé que la Fédération de Russie enregistre chaque année entre 2800 et 3000 suicides d'adolescents.


Enfants appartenant à des minorités, enfants des rues, enfants demandeurs d'asile

Plusieurs membres du Comité se sont inquiétés de la situation des enfants appartenant à des minorités. L'un d'entre eux a dénoncé la violence, la discrimination et la xénophobie dont sont victimes, en particulier, les populations migrantes en provenance des pays voisins de la Fédération de Russie. Un autre expert s'est inquiété de la situation des enfants rom, qui sont en butte aux violences policières et connaissent certaines formes de discrimination en ce qui concerne leur accès à l'emploi ou à l'éducation.

Un expert s'est enquis du sort des enfants sans papiers et de la situation des enfants non accompagnés dont, selon certaines informations, certains se seraient vus refuser l'autorisation de présenter une demande d'asile du fait qu'ils n'avaient pas de représentants légaux.

Un membre du Comité s'est inquiété du nombre élevé d'enfants des rues en Fédération de Russie, qui s'établirait à 600 000 selon les estimations.

La délégation a fait observer qu'il y a dans le pays des enfants âgés d'à peine 4 ou 5 ans qui mendient dans les rues, et qui ne tombent pas sous le coup du Code pénal, ce dont abusent leurs parents. Il n'en demeure pas moins qu'il faut prendre des mesures de prévention et de protection dans ce domaine, ce qui est fait sans tenir compte d'une quelconque manière de l'appartenance de l'enfant à tel ou tel groupe ethnique ou national, a assuré la délégation.

Au 1er janvier 2005, les enfants et les adolescents représentaient 2,6% des réfugiés, a par ailleurs indiqué la délégation. Le pays comptait en outre 43 000 sans-abri dont 3000 adolescents.

La délégation a par ailleurs fait part de l'existence d'un programme pour les petits peuples du Nord, qui comporte plusieurs volets consacrés à la santé, à l'éducation et au développement des infrastructures sociales.


Violence contre les enfants

Un expert s'est inquiété du phénomène des infanticides en Fédération de Russie; certes, il y a eu une tendance à la baisse ces dernières années, mais les informations disponibles laissent apparaître une reprise récente à la hausse.

En 2004, plus de 5000 délits de violence à l'encontre de mineurs, dont 2000 à caractère sexuel, ont été enregistrés en Fédération de Russie, a par ailleurs indiqué la délégation. Du point de vue pénal, a-t-elle précisé, la responsabilité pour acte de violence à l'encontre d'un enfant est la même, que cette violence s'exerce dans la rue, à l'école ou au sein de la famille.

À l'heure actuelle, a affirmé la délégation, la traite ou la vente de mineurs ne relève éventuellement que de cas totalement isolés. Il n'y a pas, en Fédération de Russie, de phénomène de vente d'enfants qui seraient envoyés à l'extérieur des frontières pour, par exemple, être livrés à des pervers sexuels, a insisté la délégation.


Administration de la justice pour mineurs

En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, un membre du Comité a relevé que si l'âge de la responsabilité pénale est fixé à 16 ans, il est néanmoins possible d'abaisser cet âge à 14 ans pour les infractions les plus graves. En outre, le rapport indique que 11 841 mineurs de moins de 14 ans ont été placés, en 2004, dans un centre de détention provisoire pour mineurs, a relevé l'expert, qui s'est demandé s'il ne fallait pas établir la liste exhaustive des infractions susceptibles de justifier une responsabilité pénale précoce? Ne faudrait-il pas exclure de manière définitive les mineurs de moins de 14 ans du système pénal, a-t-il insisté? Il semble qu'un mineur puisse partager la même cellule qu'un adulte, même si cela se fait dans certaines conditions particulières, s'est inquiété l'expert. Combien de mineurs tchétchènes sont détenus pour des actes criminels, où sont-ils détenus et quelles sont leurs conditions de détention, a-t-il en outre demandé? En 2004, plus d'un million de jeunes, dont 300 000 environ avaient moins de 14 ans, ont été conduits dans un commissariat parce qu'ils étaient soupçonnés d'avoir commis un délit, a relevé un membre du Comité. Qu'en est-il du traitement réservé à ces jeunes, a-t-il demandé?

La délégation a reconnu que la Fédération de Russie ne possède pas, actuellement, de tribunaux pour mineurs, bien que des projets-pilote aient été mis sur pied en ce sens. La réforme du Code de procédure pénale et d'application des peines entreprise ces dernières années va dans le sens d'une humanisation de la façon dont les peines sont purgées, a souligné la délégation, faisant notamment valoir que plusieurs milliers de mineurs ont été libérés l'an dernier avant d'avoir purgé la totalité de leur peine. Quant aux délinquants juvéniles d'origine tchétchène, au sujet desquels un membre du Comité a posé des questions, la délégation a souligné qu'en Fédération de Russie, les personnes qui ont commis des crimes sont condamnées indépendamment de leur nationalité, leurs conditions de détention étant les mêmes partout.

Relevant que la Fédération de Russie a signé le Protocole facultatif à la Convention sur l'implication des enfants dans les conflits armés, un membre du Comité a souhaité savoir quand le pays pensait être en mesure de ratifier cet instrument?

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, la rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Fédération de Russie, MME NEVENA VUCKOVIC-SAHOVIC, a remercié la délégation pour les nombreux renseignements complémentaires qu'elle a fournis aux experts. Les observations finales que le Comité présentera à la fin de la session, vendredi prochain, mentionneront les progrès réalisés mais feront aussi état d'un certain nombre de préoccupations liées, notamment, à la nécessité de renforcer la coordination des activités destinées aux enfants.

Le Comité devrait présenter des recommandations relatives à l'adoption de mesures visant la diffusion de la Convention et la formation des personnels en relation avec les enfants. Des mesures seront également recommandées afin d'améliorer les services d'éducation et de santé pour tous les enfants, a ajouté l'experte.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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