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COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE : EXAMEN DE LA QUESTION DE LA RÉFORME DES ORGANES CONVENTIONNELS

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a procédé, ce matin, à un échange de vues avec Mme María Francisca Ize-Charrin, fonctionnaire chargée du Haut Commissariat aux droits de l'homme, sur la question de la réforme des organes conventionnels.

Dans ce cadre, M. Linos Alexander Sicilianos, chargé par les membres du Comité de présenter une synthèse du débat général que le Comité a tenu hier sur la question de la réforme, a souligné que toute réforme du système des instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme devrait avoir pour seul but de renforcer ce système. Si elle devait intervenir, la mise en place d'un organe unifié ne devrait pas avoir pour effet d'atténuer l'attention accordée notamment à la question de la discrimination raciale, véritable défi pour la plupart des sociétés contemporaines. Si les membres du Comité appuient pleinement les objectifs de la réforme proposée par Mme Louise Arbour, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, ils sont en revanche plus sceptiques face à l'idée qu'une instance unique pourrait être la réponse appropriée.

Répondant aux interrogations des experts, Mme Ize-Charrin, du Haut Commissariat, a notamment déclaré que l'idée de la création d'un organe unifié permanent ferait l'objet de larges consultations et que l'avis des parties concernées serait pris en compte dans le cadre d'un processus aussi participatif que possible. Un document de travail, qui sera prêt au début 2006, sera soumis à l'appréciation des différentes parties concernées.

Mme Ize-Charrin s'est par ailleurs dite pleinement consciente de la crainte exprimée par les membres du Comité que la création d'un organe unifié ait pour effet de réduire l'intérêt accordé à la question, essentielle, de la discrimination raciale. Elle a rappelé à cet égard que, dans son plan d'action, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme avait estimé que la question de la discrimination était l'un des principaux défis dans le domaine des droits humains.

Plusieurs experts ont pris la parole pour exprimer leurs vues concernant le projet de réforme des organes conventionnels. Un expert a ainsi demandé si la réforme envisagée nécessiterait l'adoption d'un protocole. En outre, un expert a posé la question de la motivation des États. Vont-il voir, dans cet organe unifié, une instance plus efficace et plus contraignante, comparable à une juridiction internationale, ou vont-il appuyer la réforme en considérant qu'il pourrait en résulter une allègement de leurs obligations ?


Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale termine demain sa présente session. Il examinera, à partir de 10 heures, son rapport annuel et devrait rendre publiques, dans le courant de la journée, ses observations finales sur les rapports examinés au cours de la session.




Présentation liminaire

M. Linos Alexander Sicilianos, membre du Comité chargé de la question de la réforme, a présenté une brève synthèse de l'échange de vues auquel a procédé le Comité le mercredi 17 août dernier. Au cours de cette discussion, a déclaré M. Sicilianos, les membres du Comité ont souligné que toute réforme du système des traités devrait avoir pour seul but celui de son renforcement. Dans ce contexte, plusieurs experts ont estimé que la question de la lutte contre la discrimination raciale devrait être mise en valeur dans le cadre de la réforme parce qu'elle représente un véritable défi pour la plupart des sociétés contemporaines. Enfin, les experts ont souhaité que la réforme soit fondée sur une large consultation, associant les États parties, les organes conventionnels, les institutions nationales relatives aux droits de l'homme ainsi que les organisations non gouvernementales.

Les membres du Comité appuient pleinement les objectifs de la réforme tels qu'ils ont été précisés par Mme Louise Arbour, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. Ainsi, le Comité appuie les objectifs visant à promouvoir la visibilité du système conventionnel, son renforcement, l'unification de ses méthodes de travail et les mesures visant à lui donner une plus grande cohérence. M. Sicilianos a alors souligné que les experts s'étaient demandés par quels moyens il était possible d'atteindre ces objectifs. L'organe unique est-il la réponse la plus appropriée ? À cet égard, a indiqué M. Sicilianos, le sentiment d'ensemble était le scepticisme.

M. Sicilanos a ensuite rappelé que, selon les membres du Comité, la création d'un organe unique nécessiterait l'adoption d'un protocole d'amendement. Cet instrument s'attacherait aux questions d'ordre institutionnel, laissant en l'état les articles de fond des différents instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. M. Sicilianos a estimé que l'adoption d'un tel protocole pourrait durer près de dix ans. Au cours de cette période, il se pourrait que le système actuel soit mis en veilleuse par certains États, qui pourraient être tentés de différer la présentation de leurs rapports périodiques en attendant l'entrée en vigueur du nouvel organe unifié.

M. Sicilianos a par ailleurs indiqué que les membres du Comité s'étaient penchés sur les moyens de renforcer le système actuel, par le biais notamment de la présentation d'un document de base élargi et de rapports ciblés, la mise en œuvre des recommandations des présidents de comités, l'institution d'un organe unique pour traiter des communications individuelles.


Réponses du Haut Commissariat aux droits de l'homme

Répondant aux interrogations des membres du Comité, Mme María Francisca Ize-Charrin, fonctionnaire chargée du Haut Commissariat aux droits de l'homme, a notamment déclaré que l'idée de la création d'un organe unifié permanent ferait l'objet de larges consultations et que l'avis des parties concernées seront pris en compte, dans le cadre d'un processus aussi participatif que possible. Aucune décision n'a été prise à ce jour, a précisé Mme Ize-Charrin, qui a insisté sur le fait qu'en tant que membres des organes conventionnels, les propositions des experts sont d'une grande importance. Un document de travail relatif à la création d'un organe unifié sera élaboré par le Haut Commissariat et, dans ce contexte, les membres des comités seront les premiers consultés. À cet égard, elle a précisé qu'un forum de discussion en ligne serait mis en place. Les experts seront tenus informés de son lancement par courrier. Ce processus devrait permettre d'aboutir à un document de travail au début 2006. Il sera alors soumis à l'appréciation des différents acteurs concernées.

Mme Ize-Charrin s'est dite pleinement consciente de la crainte exprimée par les membres du Comité que la création d'un organe unifié ait pour effet de réduire l'intérêt accordé à la question, essentielle, de la discrimination raciale. À cet égard, elle a rappelé que, dans son plan d'action, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme avait estimé que la question de la discrimination était l'un des principaux défis à relever dans le domaine des droits humains, « nous empêchant de réduire le fossé entre la théorie et les discours et la réalité ». Mme Ize-Charrin a par ailleurs déclaré qu'il était encore trop tôt pour répondre à certaines questions d'ordre technique posées par les membres du Comité, notamment en ce qui concerne la présentation d'un rapport unique devant l'organe unifié.


Observations de membres du Comité

Un membre du Comité a demandé à Mme Ize-Charrin si elle disposait d'éléments d'information concernant le soutien politique des États et des entités de la société civile à la réforme proposée. Quel sera le fondement de la décision des États, a-t-il demandé ? Vont-il voir dans cet organe unifié une instance plus efficace et plus contraignante, comparable à une juridiction internationale ? Ou alors, vont-il appuyer la réforme en considérant qu'il pourrait en résulter une allègement de leurs obligations ?

Un autre membre du Comité, relevant que Mme Ize-Charrin avait précisé que, dans la réflexion sur la création d'une instance unifiée, il était tenu compte des expériences régionales, a rappelé qu'à bien des égards le modèle européen mettait en œuvre une approche sectorielle des droits de l'homme et non une approche unifiée. L'expert a ajouté qu'il en allait ainsi également dans le système inter-américain, dans une moindre mesure toutefois. Par ailleurs, a demandé l'expert, le Haut Commissariat pense-t-il qu'un instrument conventionnel est indispensable à la réforme telle qu'elle est envisagée à l'heure actuelle ?

Un autre membre du Comité s'est pour sa part demandé, dans le cas où un protocole serait nécessaire à l'institution d'un organe unifié, quelles mesures seraient prises pour assurer le fonctionnement du système pendant une période de transition qui pourrait durer des années.

Un autre expert a pour sa part estimé qu'il serait peut être opportun d'envisager une réforme progressive.

Une experte a déclaré que Mme Ize-Charrin avait apaisé certaines de ses craintes en affirmant que la réforme envisagée ne se ferait pas dans la précipitation et que les membres des différents comités seraient pleinement associés au processus de consultation. L'experte a insisté sur la nécessité de préserver les acquis importants de chaque comité. Elle a émis des doutes quant à l'utilité de fusionner les différents comités en une seule instance. Une «compression» des différents instruments serait pénalisante pour les droits de l'homme, a-t-elle estimé. En Afrique, a-t-elle précisé, nous avons commencé par la mise en place d'un système unique de protection des droits de l'homme et nous en venons aujourd'hui à une approche sectorielle des droits humains. Quand la tendance est à la mise en œuvre d'approches sectorielles pourquoi les Nations Unies s'engageraient-elles dans un processus inverse ?

Un membre du Comité a mis en garde contre toute velléité en matière de réforme. On ne doit pas «faire une réforme pour faire une réforme» et l'on doit se garder de toute illusion en la matière. La question qui nous est posée est celle de l'obtention d'un engagement plus ferme des États en matière de droits de l'homme. Comment obtenir un engagement plus ferme des États à la cause des droits de l'homme ? Dans ce contexte, il convient d'envisager plusieurs options possibles et de ne pas en retenir une seule.

Un expert s'est demandé pourquoi, de toutes les réformes qui ont été envisagées au cours des années en vue d'accroître la visibilité du système onusien de protection des droits de l'homme, une seule subsiste, celle de la création d'une instance unifiée.


Renseignements complémentaires du Haut Commissariat aux droits de l'homme

Répondant aux questions posées par les experts, Mme María Francisca Ize-Charrin a notamment déclaré que si elle n'était pas en mesure de répondre à toutes les questions posées par les experts, elle avait pris note des nombreux avis exprimés, soulignant qu'ils seraient très utiles dans le cadre de l'élaboration du document de travail. Le dialogue avec les États a tout juste commencé, a-t-elle ajouté. Plusieurs représentants d'États parties ont appuyé l'idée de la production d'un document de base élargi et de rapports ciblés. Mme Ize-Charrin a dit que le Haut Commissariat avait besoin de l'aide des experts sur des questions techniques et, par exemple, pour partager leur expérience régionale. Elle a déclaré que la question du financement du nouveau système devra être examinée et a indiqué que des estimations seront présentées ultérieurement. Les États se sont engagés à augmenter le budget ordinaire du Haut Commissariat et il pourra également compter sur des ressources extrabudgétaires accrues, a-t-elle déclaré. Mme Ize-Charrin a par ailleurs déclaré que si le rapport du Secrétaire général évoque la mise en place d'un système unifié, il n'en existe pas moins un grand nombre de modalités possibles.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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