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Examen du Cambodge devant le Comité des disparitions forcées : sont notamment abordées l’absence d’infraction autonome concernant la disparition forcée dans le Code pénal et les questions relatives à la traite de personnes

Compte rendu de séance

Le Comité des disparitions forcées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial du Cambodge sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation cambodgienne venue soutenir ce rapport, il a été souligné que le Cambodge reste à ce jour le seul pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) à avoir ratifié la Convention.

Une experte a toutefois regretté qu’il n’y ait pas d’infraction autonome concernant la disparition forcée dans le Code pénal cambodgien comme le prévoit pourtant la Convention.  L’experte a par la suite déploré qu’au Cambodge, il n’y ait pas de dispositions spécifiques visant à poursuivre l'enlèvement illicite d'enfant.  Elle a en outre demandé à la délégation de réagir aux informations faisant état d’un phénomène d’adoptions internationales illégales de 1979 à 2000.

Cette même experte a par ailleurs insisté sur l'importance de nouveaux efforts de la part du Royaume du Cambodge pour accepter la procédure prévue à l’article 31 de la Convention, concernant les plaintes individuelles devant le Comité. 

Le Comité est préoccupé par les informations qu’il a reçues concernant les pouvoirs étendus que la Loi sur la gestion de la nation en état d'urgence, promulguée en avril 2020, confère au Gouvernement pour restreindre sévèrement l'exercice d'une série de droits et libertés fondamentaux, a d’autre part indiqué l’experte. 

Selon certaines informations reçues par le Comité, le système judiciaire cambodgien ne semble pas complètement indépendant et impartial, a ajouté l’experte, avant de relever un nombre élevé d'allégations de corruption au sein du système judiciaire.

Une autre experte du Comité a relevé que, selon le rapport soumis par le Cambodge, le pays ne dispose d'aucun mécanisme formel spécifique pour traiter les actions urgentes transmises par le Comité.  Cette experte a par ailleurs relevé que selon les réponses de l’État partie, il n'y a aucune disposition dans le droit national cambodgien qui interdise explicitement l'expulsion, le retour où l'extradition d'une personne vers un autre État dès lors qu'il y aurait des motifs raisonnables de penser que cette personne pourrait y être exposée à un danger de disparition forcée. 

L’experte a demandé à la délégation de répondre aux allégations selon lesquelles les gouvernements régionaux cambodgiens n'ont pas mené d’enquêtes adéquates dans des cas de disparition forcée, y compris des cas de disparition transfrontière – notamment entre le Cambodge et d'autres pays dans la région du Grand Mékong.

S’agissant des disparitions forcées dans le contexte de la traite de personnes et dans le contexte migratoire, l’experte a relevé que beaucoup de Cambodgiens ont été victimes de traite d'êtres humains, notamment dans le cadre de l'industrie du sexe et des loisirs. D'autre part, le Cambodge est utilisé comme point de transit pour exploiter des victimes issues d'autres pays dans le cadre d'une traite asiatique, a-t-elle ajouté. Cette experte a rappelé que dans le cadre de l'Examen périodique universel (EPU), il avait été recommandé au Cambodge de renforcer les mécanismes judiciaires pour lutter contre la traite des êtres humains et d'interdire la vente d'enfants à des fins d’exploitation sexuelle dans le cadre du nouveau plan d'action pour l'élimination de la traite illégale d'êtres humains. L’experte s’est en outre enquise des mesures mises en place pour empêcher la disparition des migrants. 

Présentant le rapport de son pays, M. Keo Sothie, Vice-Président de la Commission cambodgienne des droits de l’homme du Gouvernement royal du Cambodge, a rappelé que son pays a une histoire tragique. Le Cambodge a ainsi subi le colonialisme, le génocide et la guerre civile, a-t-il souligné, rappelant que sous le régime des Khmers rouges, près de deux millions de Cambodgiens sont morts. Beaucoup des survivants vivent traumatisés, avec les souvenirs dudit régime et de leurs proches disparus, alors que certains se sont retrouvés handicapés, veufs ou orphelins. Les effets omniprésents des guerres continuent de marquer profondément le Cambodge, a insisté le chef de la délégation. 

L'un des premiers pas du Cambodge vers la paix et la réconciliation a été de demander justice et de punir les dirigeants les plus hauts et les plus responsables des Khmers rouges, a rappelé M. Keo. Le Cambodge continue de faire des progrès notables sur tous les fronts, a poursuivi le chef de la délégation. Au cours des deux dernières décennies, des millions de personnes sont sorties de la pauvreté, avec des moyens de subsistance décents, une éducation, une protection sociale et une espérance de vie considérablement accrue – laquelle est passée de 59 ans en 1998 à 76,8 ans en 2019. D'ici 2027, le pays va passer progressivement du statut de pays le moins avancé à celui de pays en développement, a ajouté le chef de délégation.

Le Cambodge a ratifié de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme pour démontrer son engagement en faveur de l'état de droit et de la protection et de la promotion des droits de l'homme, a poursuivi M. Keo. Le Groupe de travail de la Commission cambodgienne des droits de l'homme a finalisé le projet de loi sur l'organisation et le fonctionnement de l'institution nationale des droits de l'homme, sur la base des normes internationales, a-t-il indiqué.

Le Cambodge reconnaît que la disparition forcée est une grave violation des droits de l'homme, qu'il est nécessaire de punir les auteurs de tels actes et qu'il faut prendre les mesures nécessaires pour empêcher que ce crime odieux ne se reproduise, a ensuite déclaré le chef de la délégation. Au Cambodge, depuis la ratification de la Convention, personne n'est dans une situation de disparition forcée au sens de l'article 2 de la Convention, a-t-il affirmé. En aucun cas les situations de guerre ou les menaces de guerre, l'instabilité politique interne ou les urgences publiques ne peuvent servir de justification à une disparition forcée, a-t-il insisté. Le droit des Cambodgiens à la vie, à la liberté et à la sécurité est explicitement inscrit dans la Constitution, a-t-il rappelé, avant d’ajouter que le Cambodge a adopté un certain nombre de mesures juridiques, judiciaires et administratives, ainsi que diverses politiques, afin d'apporter des réponses rapides, efficaces et globales à tout problème lié aux disparitions forcées. 

La délégation cambodgienne était également composée, entre autres, de M. Dara In, Représentant permanent du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève ; de M. Neak Seakirin, Secrétaire d’État au Ministère de la justice ; ainsi que de représentants de la Commission cambodgienne des droits de l’homme, de la Police nationale et de la Mission permanente du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève. 

Au cours du dialogue, la délégation a notamment indiqué que la lutte contre la traite des êtres humains était une question prioritaire pour les autorités cambodgiennes. Il existe dans le pays tout un arsenal législatif qui permet d'aborder la problématique de la traite des personnes et de la réprimer, a-t-elle assuré, avant de souligner qu’un comité national chargé de traiter cette question avait été créé par le Gouvernement. 

Le Comité adoptera ultérieurement à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Cambodge et les rendra publiques à l’issue de cette session, qui s’achève le 1er mars prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité engagera un dialogue avec le Burkina Faso au titre de l’article 29(4) de la Convention, en vertu duquel « le Comité peut aussi demander aux États parties des renseignements complémentaires sur la mise en application de la présente Convention ».

Examen du rapport du Cambodge

Le Comité est saisi du rapport initial du Cambodge (CED/C/KHM/1), ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui lui avait été soumise par le Comité.

Présentation du rapport

M. KEO SOTHIE, Vice-Président de la Commission cambodgienne des droits de l’homme du Gouvernement royal du Cambodge, a rappelé que son pays a une histoire tragique. Le Cambodge a ainsi subi le colonialisme, le génocide et la guerre civile, a-t-il souligné, rappelant que sous le régime des Khmers rouges, près de deux millions de Cambodgiens sont morts. Beaucoup des survivants vivent traumatisés, avec les souvenirs dudit régime et de leurs proches disparus, alors que certains se sont retrouvés handicapés, veufs ou orphelins. Les effets omniprésents des guerres continuent de marquer profondément le Cambodge, a insisté le chef de la délégation. 

L'un des premiers pas du Cambodge vers la paix et la réconciliation a été de demander justice et de punir les dirigeants les plus hauts et les plus responsables des Khmers rouges, a rappelé M. Keo. Le Cambodge a choisi de ne pas se recroqueviller, de ne pas oublier ou ignorer les crimes passés qui ont été commis, mais de faire face à son passé génocidaire, a-t-il insisté. Outre son adhésion à la jurisprudence du droit pénal international, le Cambodge a également apporté une immense contribution aux efforts déployés à l'échelle mondiale et nationale pour lutter contre l'impunité des auteurs d'atrocités de masse, a-t-il affirmé. 

Le Cambodge continue de faire des progrès notables sur tous les fronts, a poursuivi le chef de la délégation. Au cours des deux dernières décennies, des millions de personnes sont sorties de la pauvreté, avec des moyens de subsistance décents, une éducation, une protection sociale et une espérance de vie considérablement accrue – laquelle est passée de 59 ans en 1998 à 76,8 ans en 2019. D'ici 2027, le pays va passer progressivement du statut de pays le moins avancé à celui de pays en développement, a ajouté le chef de délégation.

Le Cambodge a ratifié de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme pour démontrer son engagement en faveur de l'état de droit et de la protection et de la promotion des droits de l'homme, a indiqué M. Keo. En outre, le Cambodge n'a jamais refusé une demande de visite du Rapporteur spécial ou de tout autre partenaire de dialogue, et le Cambodge reste attaché à la protection et à la promotion des droits de l'homme aux niveaux national, régional et mondial, a-t-il souligné.

Le Groupe de travail de la Commission cambodgienne des droits de l'homme a finalisé le projet de loi sur l'organisation et le fonctionnement de l'institution nationale des droits de l'homme, sur la base des normes internationales, a d’autre part indiqué M. Keo.

Le Cambodge reconnaît que la disparition forcée est une grave violation des droits de l'homme, qu'il est nécessaire de punir les auteurs de tels actes et qu'il faut prendre les mesures nécessaires pour empêcher que ce crime odieux ne se reproduise, a poursuivi le chef de la délégation. Le Gouvernement royal du Cambodge a pris des mesures concrètes pour réitérer son engagement en la matière en ratifiant la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées le 27 juin 2013, a-t-il rappelé.

Au Cambodge, depuis la ratification de la Convention, personne n'est dans une situation de disparition forcée au sens de l'article 2 de la Convention, a déclaré M. Keo. En aucun cas les situations de guerre ou les menaces de guerre, l'instabilité politique interne ou les urgences publiques ne peuvent servir de justification à une disparition forcée, a-t-il insisté. Le droit des Cambodgiens à la vie, à la liberté et à la sécurité est explicitement inscrit dans la Constitution, a-t-il rappelé.

Le Cambodge a adopté un certain nombre de mesures juridiques, judiciaires et administratives, ainsi que diverses politiques, afin d'apporter des réponses rapides, efficaces et globales à tout problème lié aux disparitions forcées, a ajouté le chef de délégation. 

Le Cambodge a pris des mesures concrètes pour réaliser les aspirations sacrées du peuple en se transformant d'un champ de bataille, de désintégration nationale et de division territoriale en un pays de paix, d'unité, de démocratie, de respect des droits de l'homme et de l'état de droit, et de développement socioéconomique, a conclu M. Keo.

Questions et observations des membres du Comité

MME SUELA JANINA, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Cambodge, a demandé des informations sur la participation des organisations de la société civile à l’élaboration du présent rapport.  L’experte a ensuite demandé des informations concernant la création de l’institution nationale des droits de l’homme. Elle a également souhaité savoir quel était le statut de la Convention au sein de l’ordre juridique cambodgien.

Mme Janina a par ailleurs voulu savoir où en était l’acceptation par le pays des articles 31 et 32 de la Convention (concernant les communications) et a souligné que la procédure prévue à l'article 31 [à savoir les plaintes individuelles devant le Comité] garantit la protection des droits de la population en vertu de cette Convention. L’experte a insisté sur l'importance de nouveaux efforts de la part du Royaume du Cambodge pour accepter cette procédure. 

Mme Janina a ensuite demandé s’il existait dans la législation nationale une disposition explicite pour garantir la non-dérogation au droit de ne pas faire l'objet d'une disparition forcée.

Le Comité est préoccupé par les informations qu’il a reçues concernant les pouvoirs étendus que la Loi sur la gestion de la nation en état d'urgence, promulguée en avril 2020, confère au Gouvernement pour restreindre sévèrement l'exercice d'une série de droits et libertés fondamentaux, a d’autre part indiqué l’experte. 

Mme Janina a par ailleurs demandé des informations sur les progrès réalisés dans les enquêtes et les poursuites engagées contre les responsables de violations des droits de l'homme commises par le passé, s’agissant notamment d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées qui ont eu lieu après la signature des Accords de paix de Paris en 1991. 

L’experte a en outre regretté qu’il n’y ait pas d’infraction autonome concernant la disparition forcée dans le Code pénal cambodgien comme le prévoit pourtant la Convention. Elle a souhaité savoir si les autorités avaient prévu de revoir les peines encourues par les auteurs de disparition forcée. Elle a aussi souhaité connaître le délai de prescription pour le crime de disparition forcée. Mme Janina a également voulu savoir ce qui se passe dans le cas où un auteur présumé de disparition forcée commise à l'étranger se trouve sur le territoire du Cambodge.

L’experte a ensuite indiqué que selon certaines informations reçues par le Comité, le système judiciaire cambodgien ne semble pas complètement indépendant et impartial. Elle a en outre relevé un nombre élevé d'allégations de corruption au sein du système judiciaire.

Mme Janina a en outre demandé si était prévue la suspension d’un fonctionnaire soupçonné de disparition forcée.

L’experte a par la suite déploré qu’au Cambodge, il n’y ait pas de dispositions spécifiques visant à poursuivre l'enlèvement illicite d'enfants ; elle a souligné qu’il s’agissait là d’une catégorie spécifique de victimes, particulièrement vulnérables. Mme Janina a, dans ce contexte, souhaité connaître le contenu de la politique nationale pour la protection de l'enfance qui doit s'achever en 2029. 

Enfin, l’experte a demandé à la délégation de réagir aux informations faisant état d’un phénomène d’adoptions internationales illégales de 1979 à 2000. Il semblerait qu'il y ait un certain nombre de pays ayant interdit toute adoption d'enfants cambodgiens car selon eux, le Cambodge ne respectait pas les conditions liées à la protection internationale de l'enfance, a-t-elle observé.

MME BARBARA LOCHBIHLER, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Cambodge, a relevé que, selon le rapport soumis par le Cambodge, le pays ne dispose d'aucun mécanisme formel spécifique pour traiter les actions urgentes transmises par le Comité. Elle a dès lors demandé des informations sur la mise en œuvre d’une stratégie globale qui comprenne un plan d'action, assorti d’un calendrier, pour la recherche et l'enquête, exhaustives et impartiales, concernant les disparitions forcées présumées, en tenant compte de toutes les informations disponibles, y compris le contexte dans lequel la disparition a eu lieu. 

L’experte a rappelé que jusqu’à présent, le Comité avait émis quatre actions urgentes [au titre de l’article 30 de la Convention] concernant le Cambodge dont deux sont toujours en cours ; elle a demandé des informations actualisées sur ces deux dernières.

L’experte a également mentionné le fait que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge avait, lors de la présentation de son dernier rapport devant le Conseil des droits de l’homme, recommandé aux autorités du pays d’« assurer un suivi efficace des cas de disparition forcée et d'autres violations clés concernant les Cambodgiens et les ressortissants étrangers, en particulier pour surmonter l'atmosphère d'impunité ».

Mme Lochbihler a ensuite indiqué que selon les réponses de l’État partie, il n'y a aucune disposition dans le droit national cambodgien qui interdise explicitement l'expulsion, le retour où l'extradition d'une personne vers un autre État dès lors qu'il y aurait des motifs raisonnables de penser que cette personne pourrait y être exposée à un danger de disparition forcée.  D'autre part, il n'y a pas de mécanisme spécifique ni de critères qui s'appliquent à ce genre de situation en ce qui concerne le principe de non-refoulement, a-t-elle ajouté.  

L’experte a demandé à la délégation de répondre aux allégations selon lesquelles les gouvernements régionaux cambodgiens n'ont pas mené d’enquêtes adéquates dans des cas de disparition forcée, y compris des cas de disparition transfrontière – notamment entre le Cambodge et d'autres pays dans la région du Grand Mékong.

S’agissant des disparitions forcées dans le contexte de la traite de personnes et dans le contexte migratoire, l’experte a relevé que beaucoup de Cambodgiens ont été victimes de traite d'êtres humains, notamment dans le cadre de l'industrie du sexe et des loisirs. D'autre part, le Cambodge est utilisé comme point de transit pour exploiter des victimes issues d'autres pays dans le cadre d'une traite asiatique, a-t-elle ajouté. Mme Lochbihler a aussi rappelé que dans le cadre de l'Examen périodique universel (EPU), il avait été recommandé au Cambodge de renforcer les mécanismes judiciaires pour lutter contre la traite des êtres humains et d'interdire la vente d'enfants à des fins d’exploitation sexuelle dans le cadre du nouveau plan d'action pour l'élimination de la traite illégale d'êtres humains. Elle a dès lors souhaité savoir quelles mesures étaient prises pour lutter contre ce phénomène de traite des êtres humains.

L’experte a par ailleurs demandé ce qui a été fait du point de vue politique pour faire évoluer les processus migratoires sur la base des droits de l'homme, et s’est enquise des mesures mises en place pour empêcher la disparition des migrants. 

S’agissant des garanties juridiques fondamentales et de l'interdiction de tout placement en détention au secret, Mme Lochbihler s’est en outre enquise des mesures mises en place afin de garantir la mise en œuvre effective des garanties juridiques fondamentales pour les personnes privées de liberté. 

L’experte a aussi demandé comment était formé le personnel judiciaire s’agissant des dispositions de la Convention. 

Le Cambodge étant le seul pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) à avoir ratifié la Convention, Mme Lochbihler a demandé si le pays envisageait d’encourager les autres pays de la région à ratifier eux aussi cet instrument. 

L’experte a par ailleurs souhaité savoir s'il existe au Cambodge des dispositions spécifiques reconnaissant le droit de toute victime à avoir accès à la vérité, conformément à l'article 24 de la Convention. 

Une autre experte du Comité a demandé si une enquête pour disparition forcée pouvait être ouverte sans qu’une plainte n’ait été déposée. Elle a par ailleurs voulu savoir si les tribunaux militaires étaient compétents pour statuer sur des affaires de disparitions forcées, et a souligné que si tel était le cas, cela serait contraire aux dispositions de la Convention. 

Un expert a rappelé que l’inscription de la disparition forcée comme un crime autonome était une obligation prévue dans la Convention, car aucune autre infraction ne peut refléter la gravité de la disparition forcée.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué qu’il n’y avait pas eu de consultation des organisations de la société civile pour l’élaboration de ce rapport, mais que celui-ci avait été élaboré par la Commission cambodgienne des droits de l’homme, laquelle a un contact direct avec les organisations non gouvernementales.

S’agissant précisément de l’institution nationale des droits de l’homme, la délégation a précisé qu’un premier projet de loi la concernant a d’ores et déjà été approuvé. Ce projet porte notamment sur l’indépendance de cette institution, a indiqué la délégation, avant de souligner que quelque 32 consultations avaient été menées jusqu’à présent, à différents niveaux, concernant ce projet de loi. D’autre part, le projet a été diffusé pour commentaires auprès des acteurs concernés, y compris les universités et les représentants des minorités ; il a aussi été présenté au grand public pour qu’il puisse faire des commentaires, a fait valoir la délégation. 

La délégation a par ailleurs indiqué qu’il n’y avait pas de disparition forcée au Cambodge, et donc pas de statistiques dans ce domaine. Aucune affaire de disparition forcée n’est ouverte devant les tribunaux, a insisté la délégation, rappelant que c’est le Ministère de la justice qui est en charge de répertorier ces crimes. 

S’agissant des articles 31 et 32 de la Convention, la délégation a indiqué que, pour l’heure, le Cambodge n’envisage pas d’accepter ces articles. La raison en est que les autorités et la Commission cambodgienne des droits de l’homme devront en débattre, ce qui n’a pas été possible pour l’instant faute de temps, a-t-elle précisé. 

Il n’y a pas de disposition explicite qui empêche la dérogation au droit de ne pas subir une disparition forcée, notamment dans le cadre de l’état d’urgence, a ensuite reconnu la délégation, avant de souligner que jamais la loi qui invoque l’état d’urgence n’a été mise en œuvre dans le pays. A contrario, a toutefois souligné la délégation, aucune disposition ne permet à l’État de pratiquer des disparitions forcées en cas d’état d’urgence. Personne n’est exempté de ses responsabilités, y compris pénales, même dans le cas d’un état d’urgence, a d’autre part fait observer la délégation. 

La délégation a souligné que si le crime de disparition forcée n’est certes pas considéré comme un crime autonome dans le pays, le Cambodge n’en dispose pas moins d’un cadre législatif et judiciaire complet pour le combattre. Le Code pénal continent en effet un ensemble de dispositions qui permettent de lutter efficacement contre les disparitions forcées, notamment au travers des dispositions relatives aux arrestations illégales et aux abus de pouvoir. C’est pour cette raison que les autorités n’envisagent pas, pour l’instant, d’amender le Code pénal afin de faire de ce crime une infraction autonome, a expliqué la délégation. 

Etant donné que la disparition forcée n’est pas un crime autonome, les juges décident au cas par cas quelles sont les peines pour les auteurs, a ajouté la délégation, après avoir rappelé que le Code pénal prévoit pour les différents crimes des circonstances aggravantes ou atténuantes.

S’agissant de la responsabilité des supérieurs, la délégation a indiqué que les autorités allaient s’efforcer de transposer dans le droit interne les dispositions de la Convention en la matière..

Si une personne commet un acte de disparition forcée à l’étranger, la législation ne prévoit pas de compétence particulière de la justice cambodgienne, a fait savoir la délégation. S’il n’y a pas d’accord d’extradition avec l’État concerné, le Cambodge ne peut pas prendre de mesures particulières dans ce domaine. 

La délégation a par ailleurs souligné que la Constitution cambodgienne garantit l’impartialité et l’indépendance du pouvoir judicaire. Le Conseil supérieur de la magistrature, qui est un mécanisme constitutionnel, veille au fonctionnement indépendant et impartial du système judicaire, a-t-elle insisté, avant de rappeler que c’est une loi de 2021 qui régit la nomination, le transfert et la mise à pied des juges et magistrats, ainsi que le fonctionnement des tribunaux.

S’il est fait état de corruption, le Conseil supérieur de la magistrature doit mener des investigations et prendre des mesures telles que prévues dans la loi, a poursuivi la délégation, avant de préciser que c’est le Roi qui chapote le Conseil supérieur de la magistrature. Une instance indépendante a été créée pour lutter contre la corruption dans le pays, a en outre souligné la délégation. 

Le Cambodge garantit dans sa législation la protection des victimes et des témoins, a d’autre part indiqué la délégation.

La délégation a en outre donné quelques informations concernant les actions urgentes (au titre de l’article 30 de la Convention) mentionnées par une experte, en indiquant que dans ces cas, il ne s’agissait aucunement de disparitions forcées puisqu’il n’y a aucun élément de preuve faisant état de l’implication d’agents de l’État dans ces affaires. 

S’agissant du principe de non-refoulement, la délégation a souligné que le Cambodge reconnaît ses obligations dans ce domaine, notamment via la Constitution dont un article énonce clairement ce principe. Le non-refoulement fait aussi l'objet de diverses dispositions législatives, a-t-elle ajouté, précisant notamment que la législation sur l'entraide judiciaire précise qu'une autorité refusera la demande d'un État s’il ne satisfait pas à un certain nombre d’exigences. Si, par exemple, une personne risque d'être soumise à la torture en cas de renvoi par le Cambodge, cette personne ne sera pas renvoyée, a insisté la délégation. La législation cambodgienne s'efforce de transposer les dispositions des traités internationaux [ratifiés par le pays], mais à défaut, c'est le Code de procédure pénale qui fait foi ou un éventuel accord bilatéral d'extradition, a ajouté la délégation.

La délégation a également précisé qu’il existait une chambre d'appel chargée de procéder à une enquête afin de déterminer si l'extradition est justifiée et applicable.

S’agissant de l'entraide judiciaire dans le contexte de la traite de personnes, la délégation a indiqué que cette coopération était importante au sein des pays de l’ANASE, et a souligné qu’il existe un Livre blanc régissant toutes les questions et les procédures qui permettent de garantir l'entraide judiciaire dans le contexte pénal.

Pour ce qui est de la lutte contre la traite des êtres humains, la délégation a indiqué qu’il s’agissait d’une question prioritaire pour les autorités cambodgiennes. Il existe dans le pays tout un arsenal législatif qui permet d'aborder la problématique de la traite des personnes et de la réprimer, a-t-elle assuré.  Elle a par ailleurs indiqué qu’un comité national chargé de traiter cette question avait été créé par le Gouvernement. Six ministères se répartissent les différentes tâches pour lutter contre ce phénomène, a ajouté la délégation. La société civile est également consultée dans ce domaine.

Pour contribuer à la protection à la promotion des droits des travailleurs migrants, le Gouvernement cambodgien a adopté un certain nombre de politiques, de programmes et de plans stratégiques, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement a mis en œuvre un nouveau système permettant de mieux gérer les travailleurs migrants et les migrations dans le contexte du travail, a-t-elle indiqué. De même, des campagnes de sensibilisation ont été organisées pour mieux informer les citoyens cambodgiens qui souhaitent travailler à l'étranger, notamment sur les risques de traite. 

S’agissant de l'enregistrement des personnes privées de liberté, la délégation a déclaré que le pays respecte pleinement ses obligations au titre de l'article 17 de la Convention. Les autorités assurent que ces registres sont tenus à jour et couvrent les prisons, les centres de réhabilitation et les centres fermés.

Les arrestations et les détentions doivent être conformes à la loi et au Code de procédure pénale, a insisté la délégation. Lors de l'enquête, une personne peut, si elle est soupçonnée d'avoir participé à la commission de l'infraction, être arrêtée uniquement avec l’autorisation du procureur. Dès le moment de l'arrestation, la police doit informer le détenu de l’ensemble de ses droits, notamment celui de bénéficier de l'aide d'un conseil ou d'un avocat.

La loi relative à la justice pour mineurs prévoit un certain nombre de procédures spécifiques qui permettent de préserver les droits des mineurs, a d’autre part souligné la délégation. 

S’agissant des formations aux droits de l'homme, la délégation a notamment indiqué que les fonctionnaires qui travaillent autour de questions liées aux droits de l'homme sont encouragés à participer à des cours de formation et à des séminaires sur les sujets essentiels ayant trait à la sensibilisation aux droits de l'homme, afin de promouvoir et de protéger les droits de l'homme.  

S’agissant de la question de l’enlèvement illicite d’enfants, la délégation a estimé qu’il s’agissait d’une lacune de la législation cambodgienne que de ne pas avoir de dispositions spécifiques concernant la disparition forcée d’enfants. La délégation a demandé que le Cambodge puisse profiter de l’expertise du Comité sur cette question. Néanmoins, la délégation a indiqué que le Code pénal permettait de poursuive tout auteur d’enlèvement d’enfant.

S’agissant des adoptions internationales, la délégation a indiqué que le Cambodge est aujourd’hui partie à la Convention de la Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale et que le pays a saisi cette occasion pour adopter une loi sur les adoptions internationales afin de mettre en place un mécanisme chargé de régir ces adoptions. Avant cela, le pays a dû faire face à un très grand nombre d’orphelins dû au régime de Pol Pot, a rappelé la délégation : le pays a alors fait de son mieux pour s’occuper de ces enfants et des enfants ont été donnés à des familles pour qu’elles puissent les prendre en charge, a expliqué la délégation, avant de rappeler que le pays avait mis fin aux procédures d’adoption avec certains pays qui ne respectaient pas les normes internationales de protection de l’enfance.

S’agissant de la protection des enfants au Cambodge, la délégation a souligné que le pays était membre du partenariat mondial visant à mettre fin à la violence envers les enfants. Le pays a par ailleurs pris différentes mesures pour lutter contre l’exploitation sexuelles des enfants en ligne, a ajouté la délégation. 

S’agissant de la période des Khmers rouges, la délégation a indiqué que les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) prévoient des réparations aux parties civiles et à l’ensemble des victimes des Khmers rouges partout dans le pays. Les condamnés étant eux-mêmes indigents et incapables de donner une réparation monétaire aux victimes, les réparations envisagées par les CETC sont collectives et symboliques et comprennent par exemple une journée du souvenir pour les victimes, des documentaires, des programmes de sensibilisation, ou des expositions pour expliquer à la population le génocide et ses conséquences. Ces CETC sont aujourd’hui devenues un mécanisme résiduel et se concentrent sur l’archivage mais aussi sur la mise en place de projets en faveur des victimes, a indiqué la délégation. 

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CED.24.002F

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