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Examen de la Finlande au Comité contre la torture : sont notamment évoquées les questions relatives aux migrations et à l’asile, à la surpopulation des lieux de détention et à l’imprescriptibilité du crime de torture

Compte rendu de séance

 

 

Le Comité contre la torture a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport présenté par la Finlande au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation finlandaise venue soutenir ce rapport, un expert a fait observer que la plupart des décisions – sinon toutes – rendues par le Comité contre la torture au sujet des communications [plaintes individuelles] déposées contre la Finlande [au titre de l’article 22 de la Convention] au cours de la période couverte par le présent rapport portaient sur des contestations d'expulsions et d'extraditions. Aussi, cet expert a-t-il voulu savoir comment la Finlande vérifiait que les droits et les besoins des personnes sont protégés lorsqu'elles sont renvoyées de la Finlande vers leur pays d'origine ou vers un pays tiers.

Ce même expert s’est en outre dit très étonné de constater que, selon le présent rapport finlandais, aucune mesure n'a été prise pour éliminer la prescription pour le crime de torture au motif que, « de l'avis du Gouvernement, le libellé de la Convention contre la torture n'exige pas que ledit crime soit imprescriptible ». L’expert a ensuite fait état des préoccupations exprimées par le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition au terme d’une visite en Finlande, concernant le fait que « la discrimination, le racisme et la haine à l'égard des Sami sont encore omniprésents dans la société finlandaise » : à cet égard, le Comité s'intéresse aux traitements susceptibles de causer des souffrances mentales, a-t-il été précisé.

Tout en jugeant positif que la Finlande se soit engagée à examiner et à appliquer les recommandations des organismes internationaux de défense des droits de l'homme, à créer une base de données sur les droits de l'homme et à impliquer la société civile dans l'élaboration des politiques dans ce domaine, une experte a pour sa part rappelé que le Comité avait encouragé le pays, par le passé, à créer un mécanisme national de prévention de la torture (MNP) qui soit distinct de l'Ombudsman parlementaire. Le Comité, a en outre rappelé l’experte, a déjà recommandé à la Finlande de mettre fin à la détention de prévenus dans les locaux de la police. La même experte a par ailleurs fait observer que le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) s’est dit préoccupé par le fait que tous les locaux de détention de la police ne soient pas régulièrement visités par des infirmières ou d'autres professionnels de la santé, y compris des psychiatres.

Tout en saluant les efforts de la Finlande pour moderniser les prisons et autres lieux fermés, cette experte a en outre relevé un problème de surpopulation des lieux de détention.

Une autre experte a fait état d’une nette amélioration au fil des ans des conditions de vie dans les établissements psychiatriques, les maisons de retraite et autres [établissements] en Finlande. Toutefois, a-t-elle relevé, l’enfermement forcé de patients en psychiatrie est une pratique courante et peu contrôlée – et le Comité a connaissance d’allégations selon lesquelles les personnes âgées placées en institution sont, elles aussi, très souvent enfermées pendant des périodes prolongées.

Selon de nouvelles dispositions législatives que le Gouvernement envisage d’adopter, le respect du principe de non-refoulement ne sera pas systématiquement garanti en Finlande, a pour sa part relevé un expert avec préoccupation.

Présentant le rapport de son pays, Mme Krista Oinonen, Directrice de l'unité chargée des juridictions et conventions de droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères de la Finlande, a notamment évoqué la situation à la frontière orientale de la Finlande où, a-t-elle affirmé, les autorités russes organisent activement l'entrée instrumentalisée de citoyens de pays tiers, dans le but de semer la discorde et la désunion en Europe et de saper le soutien à l'Ukraine. Pour calmer la situation, le Gouvernement finlandais a fermé la frontière, a expliqué Mme Oinonen. Elle a précisé que si l’on peut comprendre que la situation est très difficile pour les citoyens russes et les personnes ayant la double nationalité qui vivent en Finlande, la sécurité des frontières est une question tellement cruciale pour la Finlande qu'elle restera prioritaire jusqu'à ce qu'une solution permanente soit trouvée.

Mme Oinonen a ensuite indiqué que le programme du Gouvernement finlandais contenait plusieurs initiatives relatives à la politique d'asile, afin de rendre le système plus efficace, d'attribuer l'aide aux personnes les plus vulnérables et d'éviter les abus. Les personnes qui fuient la guerre, les persécutions et les violations des droits de l'homme ont le droit de demander l'asile, a-t-elle souligné, avant d’indiquer que la loi sur les étrangers allait être modifiée pour introduire la nouvelle procédure frontalière conformément aux procédures d'asile européennes, en vue d'améliorer l'examen des demandes non fondées et le retour des demandeurs dont la demande a été rejetée, dans le plein respect du principe de non-refoulement.

S’agissant des conditions de détention, la cheffe de délégation a rappelé que le Comité s’était intéressé aux installations sanitaires des prisons d'Helsinki et de Hämeenlinna. Elle a fait savoir que, depuis 2018, toutes les cellules des prisons avaient été équipées d'installations sanitaires appropriées pour les détenus. D’autre part, depuis 2022, des quartiers séparés ont été ouverts, dans certaines prisons, pour les prisonniers et prévenus mineurs afin de les séparer des détenus adultes.

Mme Oinonen a ensuite fait savoir qu’en 2023, le contrôle interne de légalité des Forces de défense finlandaises s’était concentré sur la formation des conscrits à l'usage de la force. Le même contrôle interne effectue également un audit sur les lieux de détention des personnes privées de liberté au sein des Forces de défense – audit dont les résultats seront publiés et portés à l'attention des personnes auditées pour qu'elles prennent d'éventuelles mesures.

Pour renforcer les garanties juridiques des patients, a poursuivi Mme Oinonen, la médication involontaire d'un patient en observation ou en traitement psychiatrique involontaire exige désormais la publication d'une décision administrative, si le patient n’est pas d’accord pour être traité ou s’il ne peut exprimer sa volonté. Cette décision peut faire l’objet d’un appel.

La délégation finlandaise était également composée, entre autres, de Mme Heidi Schroderus-Fox, Représentante permanente de la Finlande auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Parlement et des Ministères de la justice, de l’intérieur, de la défense, et des affaires sociales et de la santé.

Au cours du débat, la délégation a notamment fait observer que les crimes contre l’humanité – et les crimes de guerre – sont imprescriptibles et que les actes de torture sont souvent qualifiés comme tels. La torture est en outre un crime inscrit au titre de la compétence [juridictionnelle] universelle de la Finlande, a ajouté la délégation.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Finlande et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 10 mai prochain.

 

Lundi prochain, à 16 heures, le Comité se penchera sur le suivi des articles 19 et 22 de la Convention et sur la question des représailles. 

 

Examen du rapport

Le Comité est saisi du huitième rapport périodique de la Finlande ( CAT/C/FIN/8 à paraître en français), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise au pays.

Présentation

Présentant le rapport de son pays, MME KRISTA OINONEN, Directrice de l'unité chargée des juridictions et conventions de droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères de la Finlande, a d’abord indiqué que son Gouvernement est résolu d’examiner chaque année, à compter de 2024, les décisions, conclusions et recommandations adressées à la Finlande par les organismes internationaux de défense des droits de l'homme, pour décider des mesures à prendre. Mme Oinonen a mentionné à cet égard la publication, sur le site web du Ministère des affaires étrangères, de la nouvelle base de données regroupant les observations finales adoptées par les organes de traités de l'ONU et du Conseil de l'Europe.

La cheffe de la délégation finlandaise a ensuite évoqué la situation à la frontière orientale de la Finlande où, a-t-elle affirmé, les autorités russes organisent activement l'entrée instrumentalisée de citoyens de pays tiers, dans le but de semer la discorde et la désunion en Europe et de saper le soutien à l'Ukraine. Pour calmer la situation, le Gouvernement finlandais a fermé la frontière, a expliqué Mme Oinonen. Elle a précisé que si l’on peut comprendre que la situation est très difficile pour les citoyens russes et les personnes ayant la double nationalité qui vivent en Finlande, la sécurité des frontières est une question tellement cruciale pour la Finlande qu'elle restera prioritaire jusqu'à ce qu'une solution permanente soit trouvée.

Mme Oinonen a ensuite indiqué que le programme du Gouvernement finlandais contenait plusieurs initiatives relatives à la politique d'asile, afin de rendre le système plus efficace, d'attribuer l'aide aux personnes les plus vulnérables et d'éviter les abus. Les personnes qui fuient la guerre, les persécutions et les violations des droits de l'homme ont le droit de demander l'asile, a-t-elle souligné, avant d’indiquer que la loi sur les étrangers allait être modifiée pour introduire la nouvelle procédure frontalière conformément aux procédures d'asile européennes, en vue d'améliorer l'examen des demandes non fondées et le retour des demandeurs dont la demande a été rejetée, dans le plein respect du principe de non-refoulement.

Mme Oinonen a par ailleurs fait savoir que la police avait considérablement étoffé ses mesures de lutte contre la traite des êtres humains depuis cinq ans et avait participé à l'élaboration du plan d'action national dans ce domaine.

S’agissant des conditions de détention, la cheffe de délégation a rappelé que le Comité s’était intéressé aux installations sanitaires des prisons d'Helsinki et de Hämeenlinna. Elle a fait savoir que, depuis 2018, toutes les cellules des prisons avaient été équipées d'installations sanitaires appropriées pour les détenus. D’autre part, depuis 2022, des quartiers séparés ont été ouverts, dans certaines prisons, pour les prisonniers et prévenus mineurs afin de les séparer des détenus adultes.

Mme Oinonen a ensuite fait savoir qu’en 2023, le contrôle interne de légalité des Forces de défense finlandaises s’était concentré sur la formation des conscrits à l'usage de la force. Le même contrôle interne effectue également un audit sur les lieux de détention des personnes privées de liberté au sein des Forces de défense – audit dont les résultats seront publiés et portés à l'attention des personnes auditées pour qu'elles prennent d'éventuelles mesures.

Mme Oinonen a mentionné d’autres mesures prévues par le programme de gouvernement en matière de lutte contre les différentes formes de violence envers les femmes et les enfants, y compris la violence domestique, avec notamment l’adoption du plan national de mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote).

Pour renforcer les garanties juridiques des patients, a poursuivi Mme Oinonen, la médication involontaire d'un patient en observation ou en traitement psychiatrique involontaire exige désormais la publication d'une décision administrative, si le patient n’est pas d’accord pour être traité ou s’il ne peut exprimer sa volonté. Cette décision peut faire l’objet d’un appel.

Mme Oinonen a par ailleurs annoncé la création, en 2020, de l'administration nationale des tribunaux en tant qu'agence distincte du Ministère de la justice, pour mieux garantir l'indépendance des tribunaux.

Enfin, Mme Oinonen a mentionné l’entrée en vigueur, en avril 2023, de la nouvelle loi sur la reconnaissance du genre : aux termes de ce texte – qui renforce le droit à l'autodétermination, l'intégrité personnelle et le droit à la vie privée –, les examens médicaux ou un diagnostic ne sont plus requis pour la reconnaissance légale du genre, a indiqué la Directrice.

Questions et observations des membres du Comité

M. CLAUDE HELLER, Président du Comité, a précisé d’emblée que le Comité avait conscience des problèmes suscités en Finlande par la situation de guerre qui prévaut dans la région. Il a cependant insisté sur le fait que le Comité n’avait d’autre objectif que d’aider les États à appliquer la Convention.

M. BAKHTIYAR TUZMUKHAMEDOV, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Finlande, s’est d’abord interrogé sur la raison pour laquelle la Constitution finlandaise interdisait explicitement la torture mais pas les traitements cruels, inhumains ou dégradants couverts par la Convention. Il s’est en outre enquis du statut de la Convention par rapport à la Constitution, aux lois et aux autres actes normatifs en Finlande.

L’expert a ensuite fait remarquer que la plupart des décisions – sinon toutes – rendues par le Comité contre la torture au sujet des communications [plaintes individuelles] déposées contre la Finlande au cours de la période couverte par le présent rapport portaient sur des contestations d'expulsions et d'extraditions. Il a demandé comment la Finlande vérifiait que les droits et les besoins des personnes sont protégés lorsqu'elles sont renvoyées de la Finlande vers leur pays d'origine ou vers un pays tiers.

M. Tuzmukhamedov a par ailleurs voulu savoir si la Convention était applicable dans les îles Åland. Il a d’autre part fait état des préoccupations exprimées par le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition au terme d’une visite en Finlande, concernant le fait que « la discrimination, le racisme et la haine à l'égard des Sami sont encore omniprésents dans la société finlandaise » : à cet égard, le Comité s'intéresse aux traitements susceptibles de causer des souffrances mentales, a souligné le corapporteur.

M. Tuzmukhamedov s’est dit très étonné de constater que, selon le présent rapport finlandais, aucune mesure n'a été prise pour éliminer la prescription pour le crime de torture au motif que, « de l'avis du Gouvernement, le libellé de la Convention contre la torture n'exige pas que ledit crime soit imprescriptible » ; et que, toujours selon le Gouvernement, la Convention n’exige pas que les États reconnaissent que la torture est un délit international.

L’expert a ensuite demandé des informations sur les programmes d’enseignement élaborés par la Finlande pour que tous les responsables de l'application des lois, le personnel pénitentiaire et les gardes frontière connaissent parfaitement les dispositions de la Convention ; il a voulu savoir, en particulier, pourquoi le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul) n'est pas utilisé, selon ce qu’indique le rapport. D’autres questions de l’expert ont porté sur la formation à la Convention dispensée aux militaires et autres personnels finlandais en uniforme.

MME NAOKO MAEDA, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Finlande, a jugé positif que la Finlande se soit engagée à examiner et à appliquer les recommandations des organismes internationaux de défense des droits de l'homme, à créer une base de données sur les droits de l'homme et à impliquer la société civile dans l'élaboration des politiques dans ce domaine. Elle a rappelé que le Comité avait encouragé le pays, par le passé, à créer un mécanisme national de prévention de la torture (MNP) qui soit distinct de l'Ombudsman parlementaire.

Le Comité, a en outre rappelé l’experte, a déjà recommandé à la Finlande de mettre fin à la détention de prévenus dans les locaux de la police. Mme Maeda a demandé combien de jours pouvaient s’écouler entre l'arrestation d’une personne et la décision du tribunal concernant la détention provisoire de cette personne. Une autre question de Mme Maeda a porté sur la notification de la mise en détention d'une personne, en particulier dans les cas impliquant des étrangers qui ne résident pas dans l'État partie et qui ne parlent pas le finnois.

L’experte s’est ensuite félicitée que l'enregistrement vidéo de la procédure d'instruction soit déjà prévu dans tous les commissariats de police et dans les locaux des gardes frontière, mais elle a relevé qu’il n’était pas exigé, en Finlande, qu'un examen de santé soit effectué dans les locaux de détention de la police sur toute personne détenue depuis plus de 24 heures. Dans ce contexte, a-t-elle signalé, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) s’est dit préoccupé par le fait que tous les locaux de détention de la police ne soient pas régulièrement visités par des infirmières ou d'autres professionnels de la santé, y compris des psychiatres.

Mme Maeda a d’autre part demandé ce qui était fait pour garantir que l’usage de gaz lacrymogènes et de sprays au poivre se fasse en respectant les critères de nécessité et de proportionnalité. Elle a demandé où en était l'enquête menée sur le décès en garde à vue d'un homme, en 2019, après que la police eut utilisé contre lui une arme à décharge électrique.

Tout en saluant les efforts de la Finlande pour moderniser les prisons et autres lieux fermés, Mme Maeda a relevé un problème de surpopulation des lieux de détention. Elle a prié la délégation de préciser si tous les prisonniers mineurs sont détenus dans des quartiers séparés des adultes ; si les jeunes en conflit avec la loi peuvent bénéficier de mesures de substitution à la détention provisoire ; et quelles mesures sont prises pour empêcher les adolescents d'être exposés au harcèlement par le personnel des centres de détention.

Le Comité, a poursuivi l’experte, se félicite de l'entrée en vigueur en 2023 d'une nouvelle loi modifiant la définition du viol pour mettre l'accent sur la notion de consentement. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que, dans certains cas d'abus d'autorité, les infractions sexuelles sont encore qualifiées d'abus sexuels, même lorsqu'il s'agit de viols : ces crimes sont ainsi passibles d'une peine moins lourde, ce qui n'est pas conforme au droit et aux normes internationales en matière de droits de l'homme, a mis en garde Mme Maeda.

Mme Maeda a invité la délégation à clarifier la pratique de la Finlande en matière de renouvellement des permis de séjour des victimes de violence domestique et de violence à l'égard des femmes. Elle a rappelé qu’il avait été recommandé à la Finlande de donner la priorité, dans les cas de violence entre partenaires intimes et de violence domestique, aux poursuites judiciaires plutôt qu’au recours à la médiation, et de veiller à ce que la médiation n'entraîne pas l'arrêt de l'enquête criminelle et des poursuites.

La Finlande a adopté une nouvelle loi qui abolit l'obligation, préjudiciable pour les personnes transgenres, de subir une stérilisation médicale invasive et des procédures psychiatriques afin d'obtenir la reconnaissance légale de leur genre, a relevé Mme Maeda avec satisfaction. Cependant, la Finlande n'aurait pas interdit les chirurgies esthétiques et non médicales sur les organes génitaux des jeunes enfants, alors qu'il s'agissait d'un objectif du programme gouvernemental avant 2024, a-t-elle souligné.

D’autres questions de Mme Maeda ont porté sur la capacité des personnes détenues de déposer des plaintes écrites au sujet de leurs conditions de détention et sur les recours ouverts aux étrangers qui ne sont pas citoyens de l’Union européenne et qui demandent un permis de séjour.

Une autre experte membre du Comité a fait état d’une nette amélioration au fil des ans des conditions de vie dans les établissements psychiatriques, les maisons de retraite et autres [établissements] en Finlande. Toutefois, a-t-elle relevé, l’enfermement forcé de patients en psychiatrie est une pratique courante et peu contrôlée – et le Comité a connaissance d’allégations selon lesquelles les personnes âgées placées en institution sont, elles aussi, très souvent enfermées pendant des périodes prolongées.

Selon de nouvelles dispositions législatives que le Gouvernement envisage d’adopter, le respect du principe de non-refoulement ne sera pas systématiquement garanti en Finlande, a pour sa part relevé un expert avec préoccupation.

Bien que la législation finlandaise stipule explicitement l’interdiction de prendre en compte des aveux obtenus sur la torture, le Code pénal prévoit la possibilité pour le tribunal de tenir compte de preuve obtenues de manière illicite, s’est inquiété un expert.

Réponses de la délégation

La délégation a précisé que les modalités pratiques de l’ examen annuel des recommandations adressées à la Finlande par les organes des droits de l'homme, nouvelle initiative lancée l’an dernier, seraient définies cet automne. Les recommandations du Comité contre la torture feront partie de cet examen. Une base de données complète des recommandations et observations finales adressées à la Finlande est déjà disponible sur le site du Ministère des affaires étrangères en finnois et en anglais, a précisé la délégation.

Des mesures sont prises pour remédier à la surpopulation carcérale, a poursuivi la délégation, citant en particulier la construction d’une nouvelle prison et l’agrandissement d’un centre de détention provisoire.

La Finlande a par ailleurs pris bonne note d’une recommandation du CPT appelant à ne plus placer les personnes en détention préventive dans les commissariats de police : un groupe de travail a été chargé d’étudier la manière d’appliquer concrètement cette recommandation., a fait savoir la délégation.

La délégation a ensuite expliqué que la moitié des personnes condamnées purgeaient une partie de leur peine selon des modalités alternatives à la détention telles que le régime de liberté conditionnelle (probation), le suivi électronique par bracelet électronique ou l’« interdiction renforcée de voyager ».

L’augmentation du nombre de mineurs en détention provisoire explique en partie que certains jeunes détenus ne soient pas séparés des adultes, a ensuite indiqué la délégation : cette situation devrait s’améliorer avec l’ouverture de nouvelles places dans les centres de détention provisoire, a-t-elle ajouté.

[Alors qu’ils étaient mineurs au début de leur détention], les très jeunes adultes détenus dont la remise en liberté est proche peuvent à certaines conditions rester dans les centres pour détenus mineurs, plutôt que d’être transférés dans des prisons pour adultes, a en outre souligné la délégation.

Au 1 er mai 2024, a précisé la délégation, cinq mineurs purgeaient une peine d’emprisonnement en Finlande et 51 étaient en garde à vue ou en détention correctionnelle provisoire.

La délégation a indiqué que les mineurs purgeaient, en général, la moitié de leur peine en milieu fermé, voire un tiers seulement pour ceux qui n’ont pas d’antécédents judiciaires. Les mineurs détenus suivent leur scolarité en détention, a-t-elle ajouté. Ils peuvent bénéficier de libération anticipée ou conditionnelle supervisée. D’autres mesures sont prises pour éviter que les jeunes ne soient détenus avec des adultes et, plus généralement, pour réduire la surpopulation carcérale, a-t-il été précisé.

Un plan d’action concernant la justice pour mineurs vise à briser le cycle de violences dans lequel se retrouvent certains enfants. Ce plan, en 45 points, vise à garantir l’intérêt supérieur de l’enfant, a par la suite indiqué la délégation.

La délégation a par ailleurs mentionné l’adoption d’une loi autorisant les détenus à demander leur séparation des autres personnes détenues, s’ils estiment que leur sécurité n’est pas garantie. Tout le personnel carcéral est dûment formé aux questions qu’il est censé connaître, a précisé la délégation.

La délégation a ensuite fait état de directives émises par les autorités de police sur la manière de gérer les cas de violence domestique et de porter secours aux victimes. Toutes les personnes concernées sont formées à la manière d’accompagner les personnes vulnérables à cet égard, y compris pour ce qui est de l’application concrète des mesures d’éloignement et autres. La police offre désormais de nombreux services en ligne pour dénoncer les crimes et déposer plainte, a ajouté la délégation.

La délégation a ensuite souligné que les autorités prenaient de nombreuses mesures pour lutter contre les violences faites aux femmes et les violences intrafamiliales. Elle a toutefois reconnu qu’il fallait renforcer les structures de lutte et de prévention de ces violences. Elle a en outre fait état d’un plan national d’action visant à mettre en œuvre les dispositions de la Convention d’Istanbul [du Conseil de l’Europe] sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

La délégation a par ailleurs souligné que le pays avait augmenté le nombre de places dans les foyers d’accueil de victimes de violences intrafamiliales et sexuelles.

Il n’y a pas de stérilisation forcée en Finlande, pour quelque motif que ce soit, a d’autre part assuré la délégation. La législation autorise toutefois une personne ou un de ses représentants légaux à demander une stérilisation du fait d’une maladie ou si la grossesse est susceptible de présenter un risque pour la santé de la mère ou de l’enfant.

La Finlande reconnaît que la question des personnes intersexe est complexe, a par ailleurs déclaré la délégation. Il n’existe pas aujourd’hui dans le pays de législation concernant spécifiquement ces personnes, a-t-elle indiqué. Il existe néanmoins un certain nombre de lois, notamment celle sur le statut des patients, qui comprennent des dispositions qui peuvent être invoquées pour défendre les droits des personnes intersexe. Lorsqu’il s’agit d’enfants intersexe, c’est toujours le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant qui est mis en œuvre, a souligné la délégation.

La Finlande n’a pas pour habitude de mentionner l’ appartenance ethnique dans ses rapports, sauf lorsque des minorités sont manifestement ciblées, comme cela a été le cas pour des membres de la minorité russe, a indiqué la délégation. La police organise des formations sur la manière de détecter les crimes de haine raciale, a-t-elle ajouté.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, les autorités finlandaises ont pris différentes mesures pour lutter contre les crimes de haine à l’encontre des minorités russes, a par la suite ajouté la délégation.

L’ usage de la force par la police est contrôlé par des mécanismes de surveillance interne, a souligné la délégation. Le dernier cycle de contrôle s’est fait l’automne dernier : il a montré que des progrès doivent être faits dans le signalement des faits, dans un contexte marqué par une montée des violences à l’égard des agents, a précisé la délégation.

Le recours au Taser est encadré par une directive datant de 2023 : son utilisation est interdite contre les femmes enceintes, les personnes âgées, les enfants et d’autres catégories de personnes, a poursuivi la délégation. La police applique un certain nombre de critères pour évaluer dans quelle mesure telle ou telle personne peut constituer un danger pour la sécurité du pays, a-t-elle ajouté.

La délégation a par la suite fait observer que plusieurs représentants des forces de l’ordre avaient été sanctionnés pour usage abusif de gaz lacrymogène lors de différentes manifestations.

Le service de contrôle de la police garde un œil attentif sur le problème de décès en garde à vue, a aussi fait savoir la délégation, avant de préciser que tous les commissariats et prisons font l’objet de visites de contrôle. L’Ombudsman parlementaire a lui aussi une mission de surveillance à cet égard, a-t-elle ajouté. Le Ministère de l’intérieur a demandé à la police de produire des statistiques plus fiables sur ces décès pour mieux en élucider les causes, a fait savoir la délégation. Les autorités ont entrepris de mettre à jour les directives relatives aux décès de personnes privées de liberté, s’agissant notamment des procédures d’enquêtes et des statistiques dans ce domaine.

Sont également en train d’être révisées les directives concernant l’accès à la santé pour les personnes privées de liberté, a poursuivi la délégation. Il est prévu que ces personnes puissent être auscultées par un médecin désigné par la police ou par leur propre médecin traitant, a-t-elle souligné.

Le Gouvernement est en train d’élaborer un nouveau Plan d’action national contre la radicalisation, l’objectif étant de prendre le problème du terrorisme à sa racine, a en outre fait savoir la délégation en réponse à la question d’un membre du Comité.

La délégation a ensuite indiqué que l’ Ombudsman parlementaire est chargé de représenter le mécanisme national de prévention. Ce Médiateur a depuis longtemps le mandat de vérifier les conditions de détention dans le pays en effectuant des visites, et il a la liberté de choisir son personnel, a souligné la délégation, avant de préciser que le Parlement n’a pas le pouvoir de modifier le statut de cet Ombudsman pour en faire un mécanisme totalement autonome.

Par ailleurs, la délégation a indiqué que la Convention était mise en œuvre sur l’ensemble du territoire finlandais, y compris sur le territoire autonome d’Åland. Dans ce territoire, a-t-elle précisé, il existe une autorité de médiation qui promeut la non-discrimination, l’égalité, les droits de l’enfant et les droits des consommateurs.

La délégation a assuré qu’il était fait référence à la Convention contre la torture dans la jurisprudence finlandaise, même s’il est vrai que ladite jurisprudence fait plus largement écho au droit européen.

Le Gouvernement va investir davantage dans des mesures préventives pour lutter contre l’exclusion sociale au sein de la population sami , a d’autre part indiqué la délégation. Le Gouvernement promeut également l’égalité entre les hommes et les femmes. Il a aussi fait de la lutte contre le racisme une priorité au sein d’un plan d’action concret. Le bureau du Premier Ministre va mener une campagne de lutte contre le racisme avec la participation des organisations de la société civile, des fédérations sportives et du monde du travail, a fait savoir la délégation. Elle a par la suite énoncé les mesures prises pour lutter contre le racisme et les discriminations à l’encontre de la communauté sami. L’objectif est de valoriser le multiculturalisme dans le pays, a-t-elle souligné.

La délégation a dit partager les inquiétudes du Comité s’agissant du financement des organes de traités des Nations Unies et a rappelé l’engagement ferme de la Finlande envers le Haut-Commissariat aux droits de l’homme. La Finlande continuera a appelé les États à financer suffisamment les organes conventionnels, a-t-elle insisté.

La délégation a rappelé que les crimes contre l’humanité – et les crimes de guerre – sont imprescriptibles et a fait observer que les actes de torture sont souvent qualifiés comme tels. Elle a en outre souligné que la torture est un crime inscrit au titre de la compétence [juridictionnelle] universelle de la Finlande.

La délégation a par ailleurs précisé que les militaires ne sont pas formés spécifiquement à la Convention contre la torture. Toutefois, a-t-elle ajouté, des formations sont organisées sur le recours légitime à la force et sur le droit international humanitaire, entre autres. S’agissant de l’usage de la force, les forces de défense reçoivent des informations détaillées sur le sujet, a-t-elle insisté. En outre, tout usage de la force doit être rapporté et faire l’objet d’un suivi.

Évoquant les questions relatives aux migrations et à l’asile , la délégation a ensuite indiqué que c’est la Loi sur les étrangers qui régit les procédures de retour. Sous certaines conditions, le renvoi d’une personne peut avoir lieu, en particulier s’il n’y a pas de menaces pour la personne concernée dans son pays d’origine. La législation prévoit la possibilité pour les requérants de faire appel de la décision de retour les concernant.

S’agissant des expulsions et des assurances diplomatiques, la délégation a indiqué que la Finlande n’avait pas le mandat de surveillance des personnes qui sont renvoyées vers leur pays d’origine. Néanmoins, il existe une aide à la réinstallation via l’Agence européenne Frontex ou l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour les personnes qui acceptent un retour volontaire dans leur pays.

La délégation a ajouté que la Finlande veillait à lutter contre l’instrumentalisation à grande échelle des entrées de migrants menée par les autorités russes. Un projet de loi est en cours d’examen dans ce domaine, a-t-elle précisé. La fermeture de postes frontière a occasionné des soucis pour beaucoup de personnes et a entraîné de nombreuses activités criminelles, a reconnu la délégation, avant de souligner que les autorités finlandaises veillent à surmonter ce défi.

 

 

 

 

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CAT24.007F