Aller au contenu principal

RDC : le Coordonnateur humanitaire en faveur d'un plan de riposte aux déplacements internes de populations

L'aide humanitaire ne suffira pas pour résoudre les problèmes structurels et profonds à l'origine des déplacements internes de population, affirme Bruno Georges Lemarquis, Coordonnateur résident de l’ONU en République démocratique du Congo (RDC) dans un post de blog daté du 23 juin.

M. Lemarquis, qui est également chef adjoint de la Mission des Nations Unies en RDC (MONUSCO) et Coordonnateur humanitaire, évoque des pistes pour résoudre sur le long terme le problème des déplacements internes dans le pays.  

« Nous le savons, l'aide humanitaire - bien que nécessaire pour soulager les souffrances à court terme - ne suffit pas pour résoudre les problèmes structurels et profonds à l'origine des déplacements internes. La nécessité de trouver des solutions durables pour résoudre, à long terme, le problème des déplacements internes en République démocratique du Congo ne saurait être plus impérative », suggère M. Lemarquis, en poste en RDC depuis le mois de janvier après avoir représenté le Secrétaire général au sein du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).

Le nouveau Programme d'action du Secrétaire général de l’ONU sur les déplacements internes marque une étape importante dans cette direction, poursuit-il : « S'appuyant sur les recommandations formulées fin 2019 par le Groupe de haut niveau sur les déplacements internes, le Programme d'action énonce une série d'engagements en faveur d’une intensification de l’action du système de l’ONU et de la construction de solutions plus durables pour résoudre la question des déplacements internes en plaçant la prévention, la protection et les partenariats locaux au premier plan ».

6,2 millions de déplacés internes en RDC

Si les déplacements internes sont en hausse partout dans le monde, la RDC est le pays d’Afrique en dénombrant le plus : 6,2 millions de personnes, parmi lesquelles 700.000 ont été forcées de se déplacer cette année.

Femmes et enfants déplacés par la violence travaillant dans leur potager à Kalemie, au Tanganyika, où la FAO fournit des semences et des outils pour que les familles déplacées et la population locale puissent cultiver des légumes.
FAO/Frank Ribas
Femmes et enfants déplacés par la violence travaillant dans leur potager à Kalemie, au Tanganyika, où la FAO fournit des semences et des outils pour que les familles déplacées et la population locale puissent cultiver des légumes.

Le pays accueille aussi plus de 500.000 réfugiés et demandeurs d'asile venant principalement du Burundi, de la République centrafricaine et du Soudan du Sud.

« Qu'il s'agisse de conflits, de chocs climatiques, de catastrophes, ou de la montée des taux de criminalité violente, les facteurs qui conduisent aux déplacements internes sont souvent complexes et interdépendants », selon M. Lemarquis, qui cite pour le cas de la RDC des conflits persistants dans les provinces orientales de l'Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, ainsi que des tensions régulières dans les régions centrales et méridionales du Kasaï et du Tanganyika.

Alors que les conflits intercommunautaires rongeant les provinces de l'Est du pays entrent dans leur deuxième décennie, et que les tensions et les actes de violence liés à l'utilisation des terres et à l'exploitation des ressources naturelles se poursuivent, notamment du fait de nombreux groupes armés actifs dans ces régions, un plus grand nombre de familles déplacées dépendent de l'aide humanitaire pour survivre. 

« Rétablir l'équilibre »

Le Coordonnateur humanitaire juge indispensable de « rétablir l'équilibre » entre les interventions humanitaires et celles relatives à la consolidation de la paix et au développement ; il préconise aussi de « développer une approche cohérente dans la mise en œuvre de ces trois volets de l’action de l’ONU ».

Pour M. Lemarquis, ceci est la première d’une longue série d’étapes à franchir pour résoudre durablement la question des déplacements internes et « répondre aux besoins des millions de personnes contraintes de vivre dans les sites de personnes déplacées internes ».  

Il a aussi affirmé qu’au cours des dernières années, l'équipe de pays de l’ONU en République démocratique du Congo et l’équipe de pays pour l'action humanitaire avaient travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement central et les autorités provinciales, ainsi qu'avec d'autres partenaires intervenant dans les domaines du développement, de l’action l'humanitaire et de la consolidation de la paix, afin de développer des « passerelles ».  

« Laisser plus de place aux acteurs du développement en RDC »

Cette stratégie holistique permet de s’attaquer aux principales causes structurelles des déplacements internes, causes que le Coordonnateur appelle aussi des « nœuds gordiens ».

Au cœur de cette démarche, « il y a la reconnaissance du fait qu'après 20 ans de dépendance à l'égard de la communauté humanitaire et de présence des forces de maintien de la paix de l'ONU (MONUSCO), qui jouent un rôle essentiel s’agissant de la protection des civils, nous devons laisser plus de place aux acteurs du développement en République démocratique du Congo et travailler avec eux de manière plus équilibrée pour traiter à la fois les symptômes et les facteurs déterminants des déplacements ».

De retour de visites dans la province du Tanganyika, qui compte un grand nombre de personnes déplacées, le Coordonnateur humanitaire s’est dit frappé par les niveaux élevés d'insécurité alimentaire, la difficulté pour la populations d'accéder à des services, la concurrence liée à l’exploitation des ressources naturelles de la région et l'escalade de la violence contre les civils.

« Trouver une solution durable aux déplacements forcés dans cette partie du pays nécessite très clairement l'implication de nombreux acteurs différents - des artisans de la paix, des humanitaires, des partenaires du développement, des entités du gouvernement local – et un travail de collaboration entre ces acteurs permettant de mettre en place un plan commun de riposte et de produire collectivement des résultats », dit-il.    

S'adapter au contexte local 

Brunon Lemarquis juge essentiel de travailler avec les organisations locales, notamment les ONG et les organisations de la société civile en s’adaptant au contexte local.

Dans l'est, « une région qui a trop compté par le passé sur les acteurs humanitaires en matière d’accès aux services sociaux et aux infrastructures publiques », « l'autonomisation des acteurs étatiques locaux est une étape clé pour trouver des solutions plus durables aux déplacements de populations » ; l’équipe de pays de l’ONU continuera à donner la priorité à ce travail d’autonomisation des acteurs locaux dans les années à venir.

« Les défis à venir pour la République démocratique du Congo sont importants, mais j'ai bon espoir que, parallèlement à la mise en place de passerelles entre les différents domaines d’intervention de l’ONU sur le terrain, ce nouveau Programme d'action permettra de mieux protéger les personnes déplacées, de renforcer les moyens d’action des autorités locales et de mettre à contribution les acteurs du développement », conclut le haut fonctionnaire.