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Haïti : un mois après la dévastation, l’éprouvant chemin du relèvement pour les communautés touchées par le séisme

Des milliers d'Haïtiens continuent de se réfugier chez des voisins, dans des abris de fortune, des chapelles ou des sites de déplacement informels, un mois après le séisme dévastateur de magnitude 7,2 qui a frappé l'ouest de l'île des Caraïbes où ils vivent. C'est ce qu'indique l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui participe aux efforts de reconstruction.

Selon les chiffres officiels, le séisme a fait plus de 2.200 morts et plus de 12.000 blessés. Près de 53.000 bâtiments se sont effondrés et 77.000 autres ont été gravement endommagés, tandis que les principales infrastructures de transport ont également été gravement touchées. Tout cela alors qu'Haïti continue de lutter contre la pandémie de Covid-19.

Le pays souffre d'une série de crises : l'assassinat de son Président en exercice en juillet a provoqué une instabilité politique et une insécurité généralisée, tandis que des milliers de personnes avaient déjà été déplacées avant le tremblement de terre par la violence des gangs et de tempêtes tropicales dévastatrices.

Dans un reportage, l'agence de l’ONU pour les migrations explique comment elle travaille aux côtés du gouvernement haïtien pour venir en aide aux plus démunis.

Des milliers de personnes ont été déplacées après que des dizaines de milliers de maisons se sont effondrées ou ont été endommagées.
OIM/Monica Chiriac
Des milliers de personnes ont été déplacées après que des dizaines de milliers de maisons se sont effondrées ou ont été endommagées.

Le témoignage de Prenelise Nozé

Prenelise Nozé, 90 ans, avait l'habitude de s'asseoir dehors pour regarder ses petits-enfants jouer, y compris le matin du 14 août, lorsqu'un séisme de magnitude 7,2 a détruit sa maison. Elle a été assommée lorsque la maison s'est effondrée. « Ma fille m'a extirpée et mise à l'abri. Je ne sais pas où je serais sans elle », raconte-t-elle.

Prenelise avait souvent entendu parler de séismes et en avait même vécu quelques-uns, mais aucun n'avait été aussi dévastateur et traumatisant que celui du mois dernier, l'un des plus puissants à avoir jamais frappé Haïti.

La ville de Cavaillon, où elle vit, se situe dans le département du Sud, qui avec les départements de Grand'Anse et des Nippes, ont été particulièrement touchés par séisme à la mi-août.

La maison de Prenelise fait partie des 52.000 maisons détruites et 77.000 autres qui ont été gravement endommagées lors du tremblement de terre.

Comme de nombreux autres membres de la communauté en Haïti, Prenelise est née et a grandi dans la maison qu'elle considérait comme son foyer depuis des décennies. Le séisme l'a privée de ses biens, notamment de meubles, de vaisselle et d'autres bibelots qu'elle gardait précieusement depuis des années, dans l'espoir de les donner à ses petites-filles.

La famille de quatre personnes vit désormais dans un abri de fortune que les petits-enfants de Prenelise ont construit à partir d’éléments récupérés çà et là. Trop fière pour demander à ses voisins de l'accueillir, elle espère bientôt recevoir une aide pour construire une nouvelle maison.

La communauté des Cayes, dans le sud d'Haïti, a été fortement affectée par le séisme du 14 août.
© WFP/Marianela González
La communauté des Cayes, dans le sud d'Haïti, a été fortement affectée par le séisme du 14 août.

Des milliers de déplacés

Des milliers d'autres Haïtiens sont déplacés et ont trouvé refuge dans les maisons de leurs voisins, des abris de fortune, des chapelles ou des sites de déplacement informels. Avant même que le séisme ne frappe, des milliers de personnes avaient déjà été déplacées par la violence des gangs, tandis que d'autres se sont retrouvées sans abri suite aux tempêtes tropicales de cette année.

Si certains ont trouvé un confort immédiat auprès de leur famille ou de leurs amis, d'autres font fi des problèmes de sécurité et retournent dormir chez eux. « Nous sommes plus à l'aise ici et nous considérons toujours ces deux murs qui tiennent encore debout comme notre maison », confie Similiane, 85 ans, la voisine de Prenelise.

Depuis le séisme, plus de 2 200 personnes sont mortes, des centaines sont toujours portées disparues et plus de 12 000 personnes ont été blessées. Les communautés où les centres de santé ont été endommagés ont désormais du mal à accéder à une aide médicale vitale. Les personnes déplacées vivent dans des conditions précaires, s'exposant à des maladies infectieuses telles que le choléra, les maladies diarrhéiques et le paludisme ; et avec moins d'un pour cent de la population vaccinée contre la Covid-19, les préoccupations sanitaires et les besoins médicaux augmentent chaque jour.

Près de 1.500 personnes handicapées ont été touchées et ont besoin d'une aide d'urgence. Beaucoup ont été traumatisées et ont besoin d'un soutien urgent en matière de santé mentale. Les équipes de protection de l'OIM, y compris des psychologues formés, sont sur le terrain pour aider, avec une attention particulière pour les femmes et les enfants qui sont plus vulnérables à l'exploitation et aux abus sexuels.

De nombreuses communautés comme celle de Prenelise vivent dans des zones difficiles à atteindre, où l'accès est généralement limité - et désormais presque impossible - en raison des ponts et des routes endommagés. Depuis le premier jour, l'OIM envoie des camions à travers le pays, parcourant des centaines de kilomètres pour acheminer des articles de première nécessité.

Un service commun d'acheminement de l'aide

En tant que coordonnatrice principale pour les abris, les articles non alimentaires ainsi que la gestion et la coordination des camps dans le pays, l'OIM a mis en place un service commun d'acheminement ouvert aux partenaires pour la livraison coordonnée d’abris et d’articles ménagers. En étroite collaboration avec le gouvernement, notamment la Direction de la protection civile haïtienne, les équipes de l'OIM ont jusqu'ici distribué des articles de première nécessité à plus de 100.000 personnes.

L'OIM soutient le Ministère des travaux publics, des transports et de la communication en effectuant des évaluations structurelles afin de déterminer si les bâtiments peuvent être réparés ou doivent être démolis. Plus de 1.200 évaluations ont été réalisées dans les trois départements depuis le 30 août.

Parmi les centaines d'écoles et de centres d'apprentissage touchés par le séisme, on trouve le Collège Saint Jean des Cayes - un bâtiment historique faisant partie du patrimoine national d'Haïti, dans le département du Sud. Deux de ses structures ont été endommagées tandis qu'une troisième a vacillé et a failli s'effondrer. Le bâtiment a été jugé dangereux suite à l'évaluation de la structure et a été démoli.

« J'attendais le verdict depuis le premier jour », déclare le Directeur et pasteur Jean-François Printemps, qui travaille aujourd’hui main dans la main avec les ouvriers du bâtiment pour déblayer les décombres.

Le 14 août, le Directeur se trouvait à l'intérieur du bâtiment pour repeindre les salles de classe en vue de la rentrée scolaire. « J'ai réalisé que j'étais la seule personne au dernier étage quand j'ai commencé à sentir le sol trembler », raconte-t-il. « Je me suis accroupi dans un coin sous une table et j'ai prié pour m’en sortir vivant ».

À l'approche de la nouvelle année scolaire, Jean-François Printemps a besoin de salles de classe temporaires pour les 750 élèves qui n'ont pas d'endroit pour étudier. « Il est essentiel que nous nous attachions à trouver des solutions le plus rapidement possible », confie-t-il.