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Corne de l’Afrique : hausse des mariages d’enfants alors que la crise de la sécheresse s’intensifie

Dans la Corne de l’Afrique, des filles âgées d’à peine douze ans sont contraintes de se marier et de subir des mutilations génitales féminines (MGF) à des « taux alarmants », alors que la sécheresse la plus grave depuis quarante ans pousse les familles au bord du gouffre, a mis en garde mercredi le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Dans les régions d’Éthiopie les plus touchées par la sécheresse, le mariage des enfants a en moyenne plus que doublé en l’espace d’un an, selon l’analyse de l’UNICEF. Le nombre d’enfants risquant d’abandonner l’école en Éthiopie, au Kenya et en Somalie, en raison de l’impact de la crise, a triplé en trois mois.

Une situation qui risque de laisser un grand nombre d’adolescentes en danger de subir des mutilations génitales féminines et d’être mariées de force.

« Nous constatons des taux alarmants de mariages d’enfants et de mutilations génitales féminines dans toute la Corne de l’Afrique, certaines familles démunies s’arrangeant pour marier des filles d’à peine douze ans à des hommes cinq fois plus âgés qu’elles », déclare Andy Brooks, Conseiller régional de l’UNICEF pour la protection de l’enfance en Afrique orientale et australe.

La sécheresse affecte les terres arides et semi-arides au Kenya.
© FAO/Patrick Meinhardt
La sécheresse affecte les terres arides et semi-arides au Kenya.

Des familles confrontées à des choix désespérés pour survivre

Dans toute la Corne de l’Afrique, les familles sont confrontées à des choix désespérés pour survivre alors que la sécheresse, due au changement climatique, assèche les sources d’eau et tue le bétail, et que l’effet domino de la guerre en Ukraine exacerbe la spirale des prix des aliments et du carburant. Plus de 1,8 million d’enfants ont désespérément besoin d’un traitement contre la malnutrition aiguë sévère, qui met leur vie en danger.

Plus de 213.000 personnes sont désormais considérées comme menacées de famine en Somalie, selon le Réseau d’alerte précoce contre la famine. De plus en plus de parents ou de soignants marient des filles pour obtenir une dot qui aidera à « soutenir le reste de la famille, pour avoir une bouche de moins à nourrir ou pour tenter d’aider la mariée à entrer dans un ménage plus aisé ».

En Éthiopie, selon des sources gouvernementales locales, les mariages d’enfants ont augmenté en moyenne de 119 % dans les régions les plus touchées par la sécheresse - Somali, Oromia et la région des nations, nationalités et peuples du Sud (SNNP) - entre janvier et avril 2021 et la même période en 2022. Dans le même laps de temps, les cas de MGF dans la région SNNP ont augmenté de 27%.

Cette crise socio-économique est parfois synonyme de décrochage scolaire pour les filles

« En raison de l’impact de la sécheresse, les dots en espèces, en nourriture et en bétail diminuent, ce qui signifie que les familles peuvent envisager de marier encore plus de filles », a alerté l’UNICEF.

Au Kenya, les filles sont également confrontées à des risques accrus de mariage d’enfants et de MGF. 14 des 23 comtés touchés par la sécheresse sont déjà des zones sensibles aux MGF, avec des taux de prévalence atteignant 98%.

Les filles de ces régions risquent désormais d’être excisées à un plus jeune âge, car les familles les préparent au mariage. Selon l’UNICEF, des filles vivant dans les régions frontalières sont emmenées dans les pays voisins pour y subir des MGF, ou sont mariées à des hommes plus âgés dans les pays voisins, où les taux de MGF peuvent être plus élevés.

Dans toute la région de la Corne de l’Afrique, un nombre croissant de filles risquent de quitter l’école à mesure que la crise s’aggrave, ce qui les expose à un risque accru de mariage d’enfants et de mutilations génitales féminines. Le nombre d’enfants risquant d’abandonner l’école en Éthiopie, au Kenya et en Somalie en raison de l’impact de la sécheresse a triplé en l’espace de trois mois, passant de 1,1 million à environ 3,3 millions d’enfants.

Programmes communautaires visant à réduire les risques d’abus et de mariage d’enfants

Dans toute la Corne de l’Afrique, quatre saisons des pluies ont échoué en l’espace de deux ans, et les prévisions indiquent qu’une cinquième saison des pluies, d’octobre à décembre, risque également d’échouer. La guerre en Ukraine accélère la crise.

À elle seule, la Somalie importait autrefois 92% de son blé de Russie et d’Ukraine, mais les lignes d’approvisionnement sont désormais bloquées. La montée en flèche des prix des denrées alimentaires signifie également que les familles ne peuvent pas se permettre d’acheter des produits de base.

Face à cette situation, l’agence onusienne s’efforce d’étendre les services de protection de l’enfance et de lutte contre la violence sexiste afin de répondre aux besoins croissants de protection des femmes et des enfants vulnérables dans la Corne de l’Afrique. Il s’agit notamment de mettre en place des programmes communautaires visant à réduire les risques de violence, d’exploitation, d’abus et de mariage d’enfants, et de fournir des services pour aider les femmes et les enfants à se remettre de la violence.

L’UNICEF demande que les services de protection de l’enfance et de lutte contre la violence liée au sexe soient étendus de toute urgence, notamment par le biais de services permanents et d’équipes mobiles pour atteindre les plus vulnérables. Cependant, l’appel de l’UNICEF pour la sécheresse dans la Corne de l’Afrique est financé à moins d’un tiers.