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Afrique de l’Ouest : l’ONU s’alarme des atteintes aux droits humains au Mali et de la crise en Guinée

La Cheffe des droits de l’homme s’est alarmée, lundi, de l’augmentation des atteintes aux droits de l’homme au Mali et a déploré également la « transition non démocratique en Guinée ».

« Au Mali, à la suite du coup d’État du mois de mai - le deuxième en dix mois - les activités extrémistes violentes et les graves violations et atteintes aux droits humains se poursuivent sans relâche », a dénoncé à Genève, la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet. Ces abus s’étendent désormais à des « zones auparavant épargnées dans le sud du pays », a-t-elle ajouté, à l’ouverture de la 48ème session du Conseil des droits de l’homme.

Entre janvier et juin, au moins 948 civils ont été tués, blessés et enlevés par des groupes armés ou ont disparu des mains des forces de défense et de sécurité maliennes.

« L’impunité dont bénéficient les auteurs de ces crimes est un facteur important de cette détérioration de la situation », a fait valoir Mme Bachelet.

Des femmes attendent au Centre de santé de Salamani à Kankan, en Guinée.
Photo : UNICEF
Des femmes attendent au Centre de santé de Salamani à Kankan, en Guinée.

Une nouvelle transition non démocratique du pouvoir « infligée » au peuple guinéen

S’agissant de la situation en Guinée, la Haut-Commissaire a déploré le fait « qu’une nouvelle transition non démocratique du pouvoir ait été infligée au peuple de ce pays ». « Comme le Secrétaire général de l’ONU, je suis de près la situation en Guinée », a-t-elle fait remarquer.

A noter que le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, avait « condamné fermement toute prise de pouvoir du gouvernement par la force et appelé à la libération immédiate du Président Alpha Condé ».

Pour Mme Bachelet, comme le peuple du Mali, du Tchad et, en fait, comme ceux de tous les États, le peuple guinéen mérite « une gouvernance saine par des représentants qu’il a choisis pour répondre à ses besoins et à ses préoccupations ». A ce sujet, elle insiste sur le fait que les nouvelles autorités de facto de Conakry, à tous les niveaux - et dans tous les secteurs de la fonction publique, y compris l’armée, - doivent respecter les obligations du pays en vertu du droit international des droits de l’homme et du droit humanitaire.

Deux jeunes femmes tchadiennes (photo d'archives).
ONU Photo/Eskinder Debebe
Deux jeunes femmes tchadiennes (photo d'archives).

Des « signaux encourageants » au Tchad

Du côté du Tchad, une feuille de route officielle pour la transition, adoptée par le gouvernement de transition en juillet, prévoit un dialogue national, une nouvelle constitution et un référendum constitutionnel. Selon l’ONU, des réformes juridiques importantes et des élections nationales sont attendues d’ici à septembre 2022.

Cette feuille de route fait également référence à une cartographie planifiée de la situation des droits de l’homme au Tchad comme étape vers l’adoption d’une politique et d’un plan d’action nationaux en matière de droits de l’homme. Il est également question de la création d’une commission chargée de vérifier les détentions illégales ou arbitraires, et de la ratification des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Pour Mme Bachelet, il s’agit de « signaux encourageants dans un pays qui est confronté à des menaces graves et croissantes liées aux conflits et au climat, notamment des activités extrémistes violentes et des affrontements violents entre agriculteurs et éleveurs ».

Une femme et ses deux enfants en République centrafricaine (RCA)
PAM/Bruno Djoye
Une femme et ses deux enfants en République centrafricaine (RCA)

Hausse des abus commis par les groupes armés en RCA

Toujours en Afrique centrale, la Cheffe des droits de l’homme de l’ONU s’est préoccupée par « la détérioration significative de la situation des droits de l’homme en République centrafricaine ». De février à juin 2021, les services de Mme Bachelet ont documenté une augmentation de 76 % des incidents, y compris des meurtres, qui ont été principalement perpétrés par des groupes armés.

Selon l’ONU, le nombre de victimes documentées a augmenté de près de 90 % par rapport à la même période en 2020. « Les schémas d’impunité de longue date sont une préoccupation majeure dans le pays, en raison notamment de la faiblesse des institutions nationales et de l’absence de systèmes judiciaires indépendants et fonctionnels », a déclaré Mme Bachelet.

L’environnement sera le « plus grand défi » des droits humains

Par ailleurs, la Cheffe des droits de l’homme s’est penchée également sur les crises environnementales urgentes auxquelles l’humanité est confrontée, en attirant notamment l’attention du Conseil sur les dangers environnementaux, qui sont « le plus important défi » aux droits humains.

« La plus grande incertitude est ce que les responsables politiques vont faire », a affirmé Michelle Bachelet au début d’un mois de travaux du Conseil. La combinaison entre pollution, changement climatique et crise de la biodiversité étend « les conflits, les tensions et les inégalités structurelles », a-t-elle fait remarquer.

A cet égard, elle a rappelé que l’urgence humanitaire dans les pays du Sahel est d’ailleurs « alimentée par le changement climatique ». La désertification croissante, les longues sécheresses suivies de crues soudaines et l’accès inégal aux ressources naturelles amplifient les vulnérabilités existantes, notamment l’insécurité alimentaire.

Des femmes au Niger préparent des champs pour la saison des pluies dans le cadre d'une initiative pour lutter contre la désertification.
© FAO/Giulio Napolitano
Des femmes au Niger préparent des champs pour la saison des pluies dans le cadre d'une initiative pour lutter contre la désertification.

« Mauvaise gouvernance » des ressources naturelles au Sahel

Si l’on ajoute à cela « une mauvaise gouvernance des ressources naturelles, des schémas de pauvreté et d’inégalités qui perdurent, un accès insuffisant aux services de base, des taux de chômage élevés chez les jeunes et une discrimination à l’égard des minorités, des femmes et des filles, ces tendances contraignent les populations à se déplacer, aggravent les conflits et l’instabilité politique et alimentent le recrutement par des groupes extrémistes violents ».

« Dans une telle situation, il devrait être clair qu’il ne peut y avoir de solution purement militaire aux conflits dans la région », a-t-elle insisté.

À ce jour, quatre millions de personnes ont été déplacées à travers le Sahel, selon les estimations du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), et l’urgence humanitaire devient « une crise exceptionnelle », selon le Bureau de l’ONU pour les affaires humanitaires (OCHA). Le maintien de la paix nécessite des approches fondées sur les droits de l’homme.

Pour contribuer à ces réponses, les services de Mme Bachelet mettent en œuvre un projet dans la région du Sahel, avec un accent particulier sur la Mauritanie, le Niger et le Nigeria. L’objectif est d’identifier « les lacunes en matière de protection auxquelles sont confrontées les communautés touchées par le changement climatique et la migration ».

Un homme regarde l'Atlantique depuis les cotes de la Mauritanie, pays du Sahel, situé au sud du désert du Sahara
© PNUD Mauritania/Freya Morales
Un homme regarde l'Atlantique depuis les cotes de la Mauritanie, pays du Sahel, situé au sud du désert du Sahara

Changements climatiques et migration

En Mauritanie, cela comprend l’engagement avec des familles migrantes qui ont fui les inondations et les glissements de terrain en Sierra Leone en 2017, et des communautés de pêcheurs qui ont quitté le Sénégal en raison de la diminution des stocks de poissons. Au Niger, l’ONU travaille avec les communautés rurales qui ont vu partir « un nombre exceptionnel de migrants ».

Au Nigeria, l’approche consiste à trouver « des solutions dans des endroits qui sont simultanément des sites d’origine, de transit et de destination pour les migrants qui se déplacent en réponse à des événements climatiques extrêmes, des terres dégradées et des conflits liés aux ressources ». « Dans ce contexte, il est urgent que les États qui négocient actuellement le Cadre mondial pour la biodiversité post-2020 intègrent des engagements explicites en faveur d’approches de l’action en faveur de la biodiversité fondées sur les droits de l’homme », a conclu Mme Bachelet.